Chapitre 7 partie 2 - Nora

28 mai 2020

Paolo ricane, lève son majeur dans un geste très classe et s'éloigne calmement. Je pouffe en silence tout en fixant mon regard sur la route. La paroi rocheuse à ma gauche ressemble presque à une rivière, vue la quantité d'eau qui s'en écoule. Une rivière verticale...

Le calcaire semble glissant et absolument pas sécurisant. L'eau court à une vitesse importante pour se jeter de l'autre côté du chemin. Cette fois, ce n'est pas une forêt qui s'étend dans le ravin, mais une prairie au vert éclatant. L'herbe ne semble pas inquiétée par la pluie, je dirais même qu'elle apprécie la caresse du fluide, qui la désaltère.

Ça fait deux jours qu'il pleut, tu vas pas me dire que qu'elle en a encore besoin.

Un petit sourire moqueur étire mes lèvres tandis que je suis le parcours de la pluie sur le ravin. Je ne suis pas là pour ça, mais je trouve ça intéressant de le regarder. Un peu plus bas, des arbustes et des buissons se dressent fièrement, défiant le ciel gris comme un poing levé. Et si je cherche encore un peu plus loin, une forêt de conifère naît à la base de la montagne. C'est trop loin pour que je puisse le discerner correctement, mais un mouvement dans les arbres attire mon regard.

Non tu as rêvé. Il n'est pas à ce niveau-là de stalkage. D'autant plus qu'il a des choses à gérer beaucoup plus importantes que toi. Arrête d'imaginer des trucs Nora.

Mon attention se porte de nouveau sur le calcaire à ma gauche. Il faut qu'on trouve le changement de lithologie². Hier soir, on s'est rendu compte sur la minute qu'on a raté un changement étrange. Alors on a décidé de prendre ce chemin pour voir si on pouvait le repérer en cherchant à un autre endroit.

J'accélère un peu la marche, lorsque je vois que c'est la même chose à perte de vue. Un grand virage à gauche plus loin et mon corps s'arrête.

Qu'est-ce que c'est que ça ?

La roche a été broyé, comme si elle était passée sous un rouleau compresseur. L'objet a relativement la forme d'un entonnoir. Je m'approche, analysant la paroi de près. Ah je vois.

Je m'écarte, avance de quelques pas et après quelques mètres, la seconde lithologie² apparaît.

— Eh, c'est pas une gouge de faille ça ? s'exclame Eléa dans mon dos.
— Bien sur que oui gamine, répond Théo.

Aujourd'hui je suis responsable des descriptions. Je vais m'abriter sous le parapluie d'Eléa, ouvre mon carnet à la page et inscris le numéro dix dans un cercle. Puis je commence à décrire ce que je vois. Pendant ce temps, mon amie sort ses crayons pour inscrire la faille et les natures des roches sur la minute. Les zones de transitions sont très importantes, si on veut avoir une idée globale de la géologie du terrain.

Je suis contente qu'on ait résolu ce problème. Mais l'eau qui commence à s'infiltrer sous mon K-way me fait trembler. Ça va être sympa...

Les heures s'égrènent jusqu'à ce qu'on rejoigne le point de rendez-vous avec la prof. Je frissonne toujours, il pleut à seau. Je remonte légèrement ma manche pour vérifier l'heure. Nous avions dix minutes de retard, mais le minibus n'est pas là.

Nous attendons au croisement de deux routes. Un pont en pierre se profile sur notre droite.

— Qu'est-ce qu'elle fout ? s'agace Paolo en jetant un œil à son téléphone.

Nous n'avons pas eu de nouvelles. Je l'écoute échanger avec Théo d'une oreille distraite. Il décide de téléphoner à Faustine pour savoir où elle en est. Peut-être que les autres groupes qu'elle doit récupérer ont eu des problèmes, ou n'étaient pas à l'heure comme nous. Je ne sais pas.

Je croise les bras, tremblante de froid et visiblement partie pour faire le pied de grue pendant un bon moment. La prof ne décroche pas son téléphone. Eléa s'approche de moi, cale son parapluie au-dessus de nous deux. Je souris, touchée par son attention, mais c'est inutile étant donné que je suis déjà trempée. Nous échangeons un regard complice.

Puis le vrombissement d'un moteur s'élève de notre droite. Je tourne la tête, mais ce n'est pas le son du minibus. Au loin, j'aperçois un véhicule vert fluo. Mes sourcils se froncent alors que je l'observe rouler vers nous, cela s'accentue quand il s'arrête. Un homme, portant un grand blouson en cuir marron foncé, descend du véhicule. Il porte un casque noir, qu'il retire prestement et dépose à l'arrière de son quad. Je me fige en croisant son regard.

You gotta be fucking kidding me.

Vous vous foutez de ma putain de gueule.

La pluie mouille ses cheveux bruns, qui se plaque rapidement sur son crâne, perdant leur joli volume par la même occasion. Il avise mes camarades, puis fixe son regard cuivré sur moi.

— Je croyais que j'avais été clair Nell. Vous n'avez rien à foutre sur mon territoire.

Mes yeux roulent d'eux-mêmes, tandis que mes bras se resserrent autour de moi. Paolo pouffe un peu plus loin, Théo rit plus bruyamment. Eléa, quant à elle, est médusée.

— Laisse-nous le temps d'appeler notre gang, et on est opé pour la bataille, raille Théo.
— Et on est armé, renchérit Paolo en désignant les marteaux que nous portons.

Les iris de Kiëran s'habillent d'un air rieur, que je ne leur avais jamais vu. Il amorce un mouvement vers moi, et d'une voix autoritaire, il enchaîne, ignorant royalement les blagues de mes amis par la même occasion :

— Déshabille-toi. 

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Merci d'avoir lu le début de mon roman ! Pour lire la suite, tu peux te procurer le roman chez ma maison d'édition !

https://www.hachette.fr/livre/la-force-de-la-nature

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Des bisous

~ Liv 🐺

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