Silence de Luna
Je l'ai vu arriver en courant, défonçant la porte du labo d'un coup d'épaule, me faisant sursauter. Je l'avais verrouillée pour m'assurer d'être tranquille, mais apparemment je n'avais pas pensé à la fenêtre. Je reste immobile, tremblante, le visage caché entre les mains par réflexe, tandis qu'il s'approche de moi précipitamment.
Mais il ne me fait rien. Il ne parle pas, m'attrape par le poignet et m'entraîne au-dehors, se plaquant un mouchoir sur la bouche pour ne pas respirer les vapeurs toxiques. Ma tête me tourne. L'effet du CO2. Je ne me débats pas, je le laisse m'emmener je ne sais où. J'ai confiance.
Paul marche dans les couloirs en me traînant à sa suite, le regard fixe. Je sais qu'il a compris ce que je voulais faire. Va-t-il me dénoncer, ou...?
Nous franchissons la porte d'entrée du lycée. L'air frais, comme une bourrasque de renouveau, ébouriffant les cheveux du garçon. Il est toujours muet. Il se dirige vers un banc, situé près d'un arbre. Le vent nettoie mes poumons enfumés. Ce que je voulais faire me paraît soudain bien stupide.
Il s'assied, et je fais pareil. Les nuages gris s'approchent, et bientôt je sens une pluie fine tomber du ciel et tremper mes vêtements. Il se tourne vers moi, et me tend son manteau. Je l'accepte sans dire un mot, et me recroqueville dans la chaude étoffe. Il soupire. Je sais à quoi il pense. Il se demande comment faire pour me reconduire chez moi sous cet orage, et de toute façon, puisque je ne parle pas, il n'a aucune idée d'où je vis. Il ne semble pas avoir de cellulaire non plus, donc pas moyen d'appeler pour un transport.
Finalement, Paul se lève. Se retourne vers moi, me faisant signe de le suivre. J'acquiesce, et m'approche de lui. La pluie mouille sa tunique de laine, et il tremble de froid, même s'il essaie de ne pas le montrer. Je me sens un peu coupable.
Le soir semble tomber plus tôt que d'habitude, à cause des nuages noirs qui couvrent le ciel. Les lampadaires ne s'allument pas, étant donné l'heure, et seuls les éclairs illuminent la rue détrempée. Je sursaute à chaque fois qu'ils apparaissent, et le garçon s'en aperçois. Il semble vouloir me rassurer, mais ne sait pas quoi dire. Je le comprends. Mon silence en paralyse plus d'un. Alors je hoche la tête, pour montrer que je vais bien.
Nous arrivons devant sa maison. Il y a une lumière allumée aux fenêtres, et je me sens un peu mieux, même si Paul semble s'y diriger à contrecœur.
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