Révolte de Luna
J'ai fermé la porte de ma chambre à clé, me barricadant encore.
Les policiers me demandent de sortir. Calmement, d'abord, comme on parle à une enfant effrayée. Puis de plus en plus fermement, avec des menaces sous-entendues.
Je m'en fous. Je suis recroquevillée sur mon lit, ma tête entre mes genoux, la colère brûlant en moi, le désespoir aussi. Je n'arrive pas à croire que la joie qui m'a animée, alors que je dansais sans musique, dans le silence de cour, a réellement existé. Tout s'est passé si vite. Ils sont venus, interrompant le rythme de mes pas sur l'herbe. J'ai fuis, comme d'habitude, tentant d'éviter au maximum le contact avec d'autres. Mais bien sûr, ils ne se sont pas arrêté là, quand j'ai refusé de coopérer. Ils m'ont suivie, me parlant de famille d'accueil, de nouvelle vie, de partir loin. Des mots vides de sens qui n'ont pas atteint mon cœur.
Ils n'oseront pas défoncer la porte. Ils ne sont pas là pour m'arrêter, je le sais bien. C'est logique, quand l'on souhaite emmener une adolescente innocente, on ne la saisit pas de force. Ils vont attendre. Ils sont patients, mais moi aussi.
Soudain, la sonnerie de mon portable interrompt mes réflexions. Je le décroche avec lassitude, me demandant qui m'appelle à un moment pareil. Peu de gens connaissent mon numéro, et je n'utilise presque jamais le téléphone.
Je ne parle pas la première. Si la personne au bout du fil me connaît, elle saura mon silence.
-Maève, c'est moi.
Mon souffle se bloque. J'ai du mal à tenir l'appareil tant mes mains tremblent, et un sanglot m'étrangle, sans que je ne puisse le retenir. Je reconnais ce prénom. Mon prénom de petite fille parfaite que plus personne n'utilise désormais. Et je reconnais la voix, aussi bien que je reconnaîtrait la mienne.
-Adrian?
-Chut... Grand frère s'en vient te chercher. Tout ira bien.
Je serre le combiné dans ma main, l'émotion m'empêchant de parler. Je n'y crois pas. C'est impossible, pas maintenant, pas après toutes ces années...
-Luna... Tu dois me croire. Je viens, tout de suite. Paul est avec moi. Nous rentrons à la maison.
À la maison.
Je ferme les yeux, la joie revenant, au cœur du désespoir. Je remarque qu' Adrian a recommencé à utiliser l'autre nom, mais je ne m'en afflige pas. « Maève » est disparue depuis longtemps.
Je ne peux que murmurer, les doigts crispés sur le téléphone:
-Je te crois.
À l'autre bout du fil, je n'entends pas sa réponse. Je crois que, lui aussi, l'émotion étouffe sa voix.
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