61. Mère et vagues.

Je me redresse et le regarde, surprise.
Nos regards se croisent et il rit sinistrement.
Puis il m'explique qu'il comprend la langue elfique et saurait sûrement la parler, mais qu'il ne voulait pas le manifester, de peur que la bête soit beaucoup moins ouverte.
Il m'explique aussi la raison pour laquelle il a décidé de me raconter... ça.

En résumé, il estime que je fais partie du groupe et que ça fait maintenant plusieurs années qu'on s'est croisés et que j'avais le droit de savoir, qu'il ne trouvait pas ça correct de me cacher ça alors que je leur ai toujours tout, ou presque, raconté.
Il a vu aussi ma logique et mon non-jugement (ou jugement intérieur) quand les choses sont sérieuses et que c'était uniquement ça ce qui l'avait empêché de me le raconter plus tôt.

Je hoche de la tête et le remercie de me faire confiance.

« Tu sais déjà qu'Amel à tué ma mère. Mais ce qu'on ne t'a pas dit, c'est qu'il avait essayé de me détruire, parce que j'étais trop puissant et il avait peur que j'essaye de tuer ou je ne sais quoi Azraël pour prendre son trône. Nous n'étions pas encore des amis, nous nous connaissions à peine. J'avais huit tdp. Il est arrivé dans ma maison avec trois Kuntaï, maintenant morts. Un d'eux ma immobilisé et est entré dans ma tête pour m'obliger à tout voir. Deux autres ont amené ma mère. Je ne pense pas que ce soit nécessaire d'expliquer toute la scène. Mais avant qu'Amel parvienne à lui faire vraiment du mal, avant qu'elle se retrouve sans protection ni rien, mon petit être a explosé. J'étais une furie. J'étais déjà traumatisé d'avoir surpris mon grand frère de cinq ans et son "amie" de l'époque, mais là, c'était ma propre mère. C'était trop. J'ai tué les trois Kuntaï en leur grillant le cerveau et en faisant fondre leurs organes internes. Amel a juste eu le temps de poignarder ma mère à quelques centimètres du cœur. Il a une précision infaillible, et ça, je le savais déjà à l'époque. Je lui suis rentré dedans au dernier moment, et ça a dévié l'arme.
J'ai eu l'honneur de voir ma mère mourir entre les flammes, me dire qui j'étais en réalité et prononcer ses derniers mots.
Un an plus tard, je suis devenu le meilleur ami d'Azraël, sans que nous sachions qui nous étions.»

Un long silence suit son récit.

Malgré toute ma haine envers cet imbécile, je le respecte.
Il a assisté à des choses horribles à un trop jeune âge.

Bon, moi aussi. Nous tous, je pense.
Mais... Quand même. Et depuis neuf ans, il vit sous le meurtrier de sa mère.

« C'est dur. J'en suis navrée. »
Et c'est vrai. Mais je ne dirai rien de plus.

Daëgan soulève sa manche et illumine avec sa peau (faculté qu'il a) ce qu'il souhaite me montrer.

Il a une cicatrice sur l'avant bras.
Des mots.
Des phrases.
«Je t'aime. Et j'espère qu'un jour, tu trouveras la capacité à aimer quelqu'un autant que je vous ai aimés toi et ton père. »

La cicatrice est tellement grande qu'elle recouvre tout son avant-bras.

« Ce sont ses derniers mots.»
Oh.

Enfin, je m'en doutais, mais... Quand même.

Attends. Ça veut dire que...
« Tu as gravé ça ?

— À la dague. À quinze ans. Je me tenais responsable de sa mort.

— Mais...

— Oui, ça a fait un mal de chien. Mais je voulais qu'elle soit toujours avec moi, et qu'elle me pardonne, d'une certaine manière. »

Je hoche la tête, et le remercie d'avoir partagé ça avec moi.

Je me couche et me tourne dos à lui.
Le vent me frigorifie, pourtant, je ne cherche pas de chaleur corporelle.

***

Quelque chose de chaud enveloppe mon corps.
Quelque chose de confortablement réconfortant.
Je me blottis contre ce qui me transmet la chaleur.
Puis je me rends compte qu'hier je me suis endormie presque à côté de Daëgan.

Oh merde.

J'ouvre les yeux et vois un t-shirt noir. Soit c'est Daëgan, soit c'est Azraël. Je lève le regard et me retrouve nez à nez avec...
Athanase.

Elle est assise et me sourit. Elle a un t-shirt noir entre les mains, c'est pour ça.

Je cligne des yeux et lui demande : « Tu fais quoi là ?

— Salut, j'ai bien dormi, merci, et toi ? rit-elle.

— Pardon. Je me suis endormie en tremblant de froid mais à part ça, tout va bien, oui.

— C'est pour ça que notre gentleman t'a laissé son t-shirt.

— Et c'est qui ?

— À ton avis, se moque-t-elle.

— Je sais pas ! je proteste.

— Daëgan.»

Pourquoi ça ne m'étonne pas ? C'est quand même bizarre qu'il soit si... gentil, en ce moment.

Je me dresse et enlève mes cheveux de mon visage.

Le soleil est éclatant, bien qu'il vienne de se lever. Nous sommes sur une grande étendue de sable, qui fait face à une encore plus grande étendue d'eau.

Celle-ci est turquoise, et il y a des petites vagues.

Devant moi se trouvent les marais, avec le brouillard.
C'est assez spécial, parce qu'il s'arrête pile quand le sable commence. Comme s'il y avait un mur.

Mais le plus impressionnant restent les vagues et l'eau.

La mer.

La voix de ma mère résonne dans ma tête.
Elle m'en avait parlé quand j'étais petite.
Elle l'avait décrite comme splendide et majestueuse.

Je ne peux la contredire.

Avec les vagues assez grandes pour nous engloutir, mais douces d'une certaine manière, ça donne envie de se baigner dedans. Sauf que je n'irai pas dedans, je refuse de mouiller mes habits.

Cependant, Daëgan, Gad et Azraël ont eu une idée plutôt avancée et...

Ils se sont déshabillés.
Heureusement, là ils sont dans l'eau et on ne voit rien, mais avant.

Oh.
Athanase.
Je me tourne vers elle et lui demande : « Tu les as vus se déshabiller ?! je m'exclame.

— Hein ? Ah ! Ça ! Oui... Enfin, j'ai juste vu leurs fesses pendant qu'ils s'habituaient à la froideur de la mer, mais sinon je me suis retournée quand ils enlevaient leurs vêtements.

— Ah. Heureusement !

— Ah ça oui. Rien que la vue de leur fesses, je suis traumatisée à vie !» Nous rions ensemble, et j'interromps mon rire pour la contredire : « Enfin, tu dis ça, mais t'as déjà vu Gad et je doute que ça t'aie traumatisée.»

Athanase ouvre grand les yeux et devient rouge comme une écrevisse.
Qu'est-ce que j'ai dit ?
Ah. Ah. Je viens de me dénoncer.

Atha se racle la gorge et déglutit péniblement avant de balbutier : « Co-comment tu s-sais ç-ça ?

— Pardon. J'aurais dû me taire.

— Non, t'inquiète pas, mais juste... Comment tu sais ?

— T'étais humaine, c'était un ou deux jour après ton anniversaire et je suis arrivée dans ta chambre pour te demander quelque chose et... J'ai entendu quelques bruits...

— Non, vraiment ?! demande-t-elle, encore plus rouge.

— Ça s'entendait pas depuis le couloir hein, c'est juste, au bout de cinq minutes...

— Oh putain !» s'exclame-t-elle, honteuse et désolée.

Elle enfouit son visage dans ses mains et commence à rire nerveusement.
Je ris avec elle.

Elle se re-excuse, et je lui redis que c'est pas grave, que j'ai trouvé ça mignon.

Même si mignon n'aurait pas été le mot, ç'aurait été plutôt marrant et gênant, mais shh, on dit rien.

On repart dans notre conversation quand soudain, les garçons sortent précipitamment de l'eau.
Athanase les voit en premier et m'ordonne de me retourner, ce que je fais.

On entend des bruits de vêtements puis Gad dit que c'est bon.

On se retourne et nous demandons pourquoi ils sont sortis d'un coup comme ça.

« On a vu que t'étais réveillée et on s'est soudainement souvenus de ce que Daëgan nous a dit, concernant ce qu'il faut faire ce matin.

— Ah oui ! je m'exclame. J'avais oublié.

— D'ailleurs Nuit, tu me rends mon t-shirt ? dit Daëgan un peu gêné.

— Ah oui, tiens. » Je lui rends son haut et Athanase et moi nous nous levons.

Je me dirige vers la mer et sors la bague de mes sous-vêtements. Je demande à parler avec Hyale.
Le saphir s'illumine et une voix cristalline résonne :

« Nous arrivons. »

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