57. Le vrai Lucifer
Je vais résumer le plus brièvement possible la situation.
Azraël doit aller une fois tous les je-ne-sais-pas-combien dans son propre domaine, qu'il partage avec Daemon, pour s'occuper des trucs d'Ange de la Mort, comme torturer les âmes, les marquer pour bien signaler qu'elles appartiennent aux Enfers. Après, il n'y a pas que torturer les âmes, évidemment. Ce n'est d'ailleurs que le quinze pour cent de ce qu'il se passe, là-bas. Mais ce quinze pour cent, il n'est destiné qu'à une seule personne pour faire le sale boulot : Azraël. Mais, me direz-vous, quel est le rapport avec ses cicatrices sur les avant-bras ? Eh bien, pour accéder au domaine, il faut décliner son identité, et offrir du sang pour fertiliser les têtes de mort.
Non, vraiment, sans blague. Pour que les têtes de mort se multiplient et forment une muraille. Sinon tu peux pas entrer. Dommage, hein ? Bon, j'arrête avec mon sarcasme, parce qu'en attendant, Azraël souffre de devoir y aller, et toujours dans la menace de perdre Angelica.
Athanase s'est agenouillée et a entrepris de guérir ses plaies encore sanglantes, mais elle n'a que très peu de connaissance dans cette matière. Je m'accroupis à ses côtés : "Laisse-moi voir, s'il te plaît." Azraël est adossé, il est épuisé.
Je prends son avant-bras et un frisson me parcourt l'échine à la vue de ces multiples cicatrices. J'invoque ma glace, et la fais fondre pour qu'elle devienne de l'eau glacée. Je rince les plaies et demande à personne en particulier d'aller chercher un pansement ou quelque chose pour fermer la plaie. Je sais qu'il faut qu'elle respire, mais là, il y a un peu trop de sang à mon goût.
Je presse le tissu propre sur la coupure, et demande : "T'as jamais demandé à faire soigner ça ?T'attends juste que ça cicatrise tout seul?
- Euuuh, bah oui.
- Mais !?" m'exclamè-je, exaspérée. Il faut vraiment tout expliquer niveau survie ici ! Pff...
Après quelques minutes, Athanase et moi prenons enfin la parole.
On énonce tout ce qu'on a vu et je montre même ma bague que je garde dans ma brassière, je refuse de la mettre à mon doigt. Pourquoi ? Parce que si un bijou mérite d'être porté chez moi, ça veut dire que c'est un être cher à mon âme qui me l'a offert. Par exemple, j'ai un bracelet attaché à la cheville qui est en bois tressé, comme si c'était taillé pour un elfe des bois des contes pour enfants, sur lequel pendent des feuilles solidifiées, offert par Aiken. Je l'ai gardé pendant tout ce temps. Et, bizarrement, il s'agrandit avec ma cheville.
Mais là n'est pas le sujet de la conversation.
Au fur et à mesure de notre récit, le visage d'Azraël passe d'intrigué à horrifié en passant par la surprise, la curiosité et l'admiration.
Gad, quant à lui, est plus heureux qu'autre chose. Et quant à Daëgan... Il est impassible, mais j'ai vu une lueur d'intérêt s'allumer dans ses yeux quand j'ai sorti la bague.
Tous ont la même question à la fin : "Tu vas le dire à Unaï ? À moins que tu l'aies déjà dit."
Ils pensent vraiment qu'à ça ?
Quand nous nous séparons, avant que j'entre dans ma chambre, une main me saisit le bras et m'entraîne dans un coin un peu à l'abri des regards indiscrets.
Une main calleuse et chaude, bien qu'elle ne soit pas moite.
Mon regard plonge dans celui d'un paysage d'été, mais comme l'hiver est là, le bleu et le vert ont été presque entièrement avalés par du mordoré.
"Qu'est-ce que tu veux, Daëgan ? je crache avec mépris.
- Pourquoi ne mets-tu pas cette bague à tes doigts ? ordonne-t-il.
- Pourquoi ne te mêles-tu pas de tes oignons pour une fois ? je rétorque.
- Pourquoi ne peux-tu pas répondre à une question simple pour une fois ? articule-t-il.
- Peut-être que le problème c'est la personne.
- Ah bon ? Pourtant, j'en connais une bien plus énervante et idiote, qui se trouve juste devant moi d'ailleurs.
- Je pense que tu t'es confondu, je ne suis pas un miroir.
- Au contraire, je n'ai jamais été aussi sûr de moi.
- Bouffon va.
- Eh ! Les insultes ça commence déjà ?
- Tu penses que tu mérites mieux ?
- Peut-être un peu plus de créativité, je ne sais pas, répond-il sarcastiquement.
- Tu penses vraiment que je vais dépenser mon énergie en pensant à toi ?
- Je sais que tu le fais."
Je me tais. Je cligne des yeux et le regarde confuse. Est-il en train de flirter avec moi ? Daëgan ? Il a une manière bien spéciale pour draguer. Il ne sourit même pas. Il est toujours aussi impassible.
En face de mon silence, il dit d'un air moqueur : "Eh bien tu as perdu ta langue de vipère ? Celle qui a déjà eu un contact avec la mienne ?
- Quoi ?! j'avale ma salive de travers et commence à tousser.
- Excuse-moi, c'était trop tentant. Donc, pourquoi gardes-tu cette bague dans tes sous-vêtements alors que tu as dix doigts à ta disposition ?
- Peut-être c'est parce que je suis fétichiste des seins ? je lance brutalement.
- Hein ?" fait Daëgan, confus.
Attends, je viens vraiment de dire que je ressens une attraction sexuelle particulière pour les seins ? Mais qu'est-ce qu'il m'a pris ?
Je cligne de multiples fois des yeux et sors un "Pardon, excuse-moi." gêné.
"Je... euh... donc pourquoi ? À moins que ce soit vraiment que tu es fétichiste de cette partie du corps...
- Euh non c'est pas ça... C'est une tradition à nous. À moi.
- Mettre des bijoux dans ta brassière ? dit-il, toujours aussi gêné.
- Non ! je me reprends avec honte. Je pourrais aussi les mettre dans mes poches, mais ça tombe facilement. Donc je les mets là.
- Ah. Bon, d'accord. À demain du coup.
- Ah non, je ne veux pas de À demain ! Je veux pas te revoir ! annonçai-je de but en blanc. Mais qu'est-ce qu'il me prend ?
- Dommage. Parce que tu vas me voir de toute façon. D'ailleurs, tes parents ne t'ont jamais appris à ne pas te mentir à toi même ?
- Qu'est-ce que tu entends par là ?
- Ne fais pas l'aveugle va. Je sais très bien ce que te penses, sauf que même toi tu ne sais pas ce qu'il en est. T'as juste besoin de temps.
- Vraiment ? Tu me sors vraiment un "Tu m'aimes mais tu ne le sais pas encore" typique des gars sans une once d'intelligence ? Sot !
- Sauf que là, en l'occurrence, j'ai raison, pas comme tous ces autres idiots de ton peuple."
Il me fait une sourire en coin et disparaît.
Je reste dans la pénombre.
C'était bien Daëgan ça ? Que diable s'est-il passé ?
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