48. Vérité ?

Quelques dizaines de minutes plus tard...

"Toc toc toc"

Je tape à la porte de la cabane.
« Mamia ! C'est moi !»

Le battant s'ouvre sur...

Oh merde.
Emnylk.

« Oh, mais bien le bonjour, ma chère. Je t'attendais... Ça fait quelques semaines que je t'attends d'ailleurs...

— Où est ma mère, fils de tu-sais-quoi.

— Ah, elle, elle est ici, tout comme ton père d'ailleurs...

— Parfait. » Je le bouscule violemment et entre dans la maison.

Mamia et Papio sont là, un air désolé sur le visage.

« Chérie, dit-elle en Paisajanea, je... Je suis désolée... On n'avait pas le...

— T'inquiète pas, on va tout arranger.

— On ? fait Emnylk dans mon dos.

— Ah oui, mince, tu ne l'avais pas vue ? Atha ?

— C'est moi ! fait-elle en apparaissant dans l'encadrement de la porte.

— Oh non, pas une Kuntaï en plus ! se plaint Le Cultivé.

— Toi, tu la fermes, parce qu'on sait tous les deux que tu n'as pas de problème spécial avec les Kuntaï, juste avec Amel, hein ? le réprimandé-je.

— Ah oui, c'est toi... ajoute Athanase.

— Quelqu'un peut nous expliquer ce qu'il se passe ici ? demande mon père, perdu.

— Demandons d'abord à notre cher chef, qui voulait absolument me voir... »

Amaury-Kadir Emnylk grogne, mais il se décide à parler.

Je ferai un résumé :
Il veut un service, il ne l'a pas spécifié, et en échange il fout la paix à mes parents.

Sauf que je ne suis pas complétement bête, je ne vais pas accepter un marché comme ça, sans savoir ce que je dois faire.

« Amaury, je vais te rappeler très poliment que je ne suis pas dépourvue de cerveau, et que je ne vais pas juste accepter un marché comme ça.

— Donc tu t'en fiches si je reste chez tes parents ?

— Non, mais si le service implique négocier auprès d'Amel, je peux t'assurer que mes parents préféreront vivre avec toi que vivre sous la menace constante d'Amel, qui refusera tout ce que je lui proposerai et se vengera sur mes parents.
Donc, oui, si ça, pour toi, c'est s'en ficher de ses parents, alors oui, je m'en fiche royalement. »

Le Cultivé est livide, j'ai touché juste.
Il fallait pas vraiment se creuser la tête, il est tellement prévisible.

Athanase est morte de rire derrière moi, et mes parents sourient d'amusement et, peut-être un peu, de fierté...

« Donc, Amaury, je vais décliner ton offre. Et si tu pouvais me laisser parler à mes parents Paisajanea, je te serait reconnaissante.

— Si tu déclines mon offre, je t'en propose une autre : j'écoute ce qu'il y a à dire maintenant, et après je laisse tes parents tranquilles.»

Évidemment. Les ragots, potins et la curiosité avant tout.
Il faut dire que cet homme est vachement naïf et enfantin, quand même. 

« Pff... D'accord...»

Pourquoi j'ai dit oui ?
Ce qu'il va entendre sera sûrement fatal pour moi...
Mais entre moi et mes parents, le choix est vite fait.

« Mamia. Je suis la fille d'Astrea, n'est-ce pas ?»

Le silence qui s'installe sur la pièce est brutal.
Athanase me regarde, stupéfaite.
Ah ouais, t'y vas pas par quatre chemins toi...
Tsk, n'importe quoi...

Le Cultivé me regarde, confus et surpris.
Plus que surpris, même.
Choqué.

Mes géniteurs échangent un regard, lourd de sous entendus.

« Chérie... Tu... Tu es sûre de vouloir parler de ça devant... Lui ? me demande ma mère, inquiète.

— Oui, ne t'en fais pas.»

J'ai peur de sa réponse.
Enfin, surtout parce que je la connais. Même si une part de moi veut toujours croire le contraire, que c'est faux, je connais la réponse.

Mais je dois l'entendre.
Je dois être sûre.

Seulement une syllabe.
Une syllabe et je les laisse tranquilles.
Une syllabe et je pars.
Une syllabe, un mot.

« Oui. »

Ma respiration se bloque.

Une douleur fulgurante explose dans ma poitrine, puis, rien.

Un vide émotionnel atroce, comme pour me protéger.

Rien. Absolument, RIEN.

Aucune sensation, aucune émotion, rien.

Je vois du vide, puis je me souviens que j'ai arrêté de respirer.

J'inhale l'air, et je cligne des yeux.

Athanase me regarde, peinée.
«Viens, on va respirer l'air des lavandes. »

Elle m'entraîne dehors et me laisse m'allonger dans les plantes.

Donc, oui, je suis une enfant des dieux.
Je suis comme eux.
Pourquoi ça ne me surprend pas ?
C'est vrai que c'était plutôt évident, mais je n'y pensais jamais, donc je ne l'avais pas déjà découvert.

« Tu t'y attendais, pas vrai ? me demande Athanase, précautionneuse.

— Oui. Mais ça reste un choc. C'est quand même dur d'apprendre un truc comme ça de la part de ses parents qui, en réalité, ne le sont pas.

— Techniquement, ils le sont. Nos "parents" sont ceux qui nous ont donné l'amour et l'attention qu'il fallait, l'éducation. Après, ça peut être tes créateurs, ou pas.
Regarde. Ta mère t'as vraiment mise au monde. Tu as les oreilles pointues, comme tes parents, tu as le teint hâlé et la morphologie de ta mère. Tu as la forme des lèvres de ton père, tu as les épaules plus carrées, comme celles de ton père. Il y a une partie de leur ADN en toi, mais pas uniquement. Tu as aussi une partie de l'ADN d'Astrea et de ton père Olyma. Qui, suivant la logique, serait Celestino, ou Célestin. Tu as la couleur des yeux d'Astrea, les mêmes cheveux qu'elle, mais ta mère les a très semblables aux siens, elle aussi. Les traits de ton visage sont doux et durs à la fois, un mélange des traits de ta mère et de Célestin. Ton nez est un peu épais, comme ceux des Paisajanea, mais en même temps, il est fin et élégant, comme celui d'Astrea.
Donc, tu vois ? C'était assez mitigé. »

Le portrait qu'elle a fait de moi est tellement... exact.
Même si elle n'a pas décrit toutes les caractéristiques de mon visage, elle a fait les choses les plus importantes.
Et, elle a raison.

Il faut dire qu'Athanase a un don pour dire la vérité, tout en apaisant l'esprit des personnes.

Je me lève, me secoue et lui tends la main. « Il faut rentrer à la maison, Atha. Sinon, Amel va nous tuer. Et il faut raconter ça aux gens.

— Tu as raison. Mais... Est-ce que tu vas le dire à Unaï ? me demande-t-elle, inquiète.

— Unaï ? Pourquoi me parles-tu d'Unaï ? fais-je en sentant le rouge me monter aux joues.

— Ne joue pas avec moi, Nuit. Tu penses vraiment que je suis aveugle ?

— Oui, bon, c'est bon... Non, je ne vais pas lui dire. J'ai l'impression que c'est pas correct. Il est Kuntaï, je suis donc une... future déesse ? Il va encore plus me traiter comme une princesse ! Et, de plus, j'ai comme... Une impossibilité de lui dire quelques informations, comme le fait d'avoir des visions...

— Je vois. C'est bien. »

Bien ? Mentir à son... Mince alors. Il est quoi ? Mon mec ? Mon ami-avec-droits ? Mon conjoint ? Non, conjoint ça sonne trop sérieux.

On va l'appeler mon aad (ami-avec-droits), hein.

Donc, mentir à son aad, c'est bien ?! Non, c'est loin de là. Mais que puis-je y faire ? Rien.

***

De retour au monastère, je croise directement Unaï. « Hey !»
Il se précipite vers moi et me prend dans ses bras.
« Ça va ? Tu étais passée où ?

— Ça ira mieux quand tu auras arrêté de me péter les côtes, mais sinon oui, ça va bien. J'étais à la Grande Bibliothèque, avec Athanase. Je voulais découvrir cet endroit.» Pas complètement vrai mais pas faux non plus.

Il acquiesce et me regarde dans les yeux.
Les siens sont deux noisettes magnifiques, et j'y plonge sans aucun doute.

« J'ai droit à un bisou ? »

Je ris, et lui plante mes lèvres sur les siennes, sans pour autant le lâcher du regard.

Avant que le baiser s'approfondisse, je m'écarte et lui demande à mon tour : « Et toi, ça va ? T'as l'air un peu fatigué, non ?

— Ça va, ça va, j'ai pas beaucoup dormi cette nuit mais ça va...

— Ah, d'accord. Tu veux qu'on aille se promener ?

— J'aurais adoré, mais Amel m'a réclamé, et je sais pas du tout pourquoi. Et je préfère y aller que me faire tabasser quand je serais arrivé, en retard.

— Ah oui, je vois ! T'inquiète pas, je comprends tout à fait. Si t'as besoin que quelqu'un aille lui botter les fesses, dis-le moi ! » dis-je en lui plaquant un petit baiser sur les lèvres avant de m'éloigner.

Athanase, qui a assisté à la scène, commente : « Vous êtes mignons tous les deux... Mais je préfère quand tu engueules Daëgan, c'est plus drôle.

— Gna Gna gna.»

On rejoint les garçons et je me rends compte que Daëgan a tout vu.
Tout.

Et il a le visage de quelqu'un qui a avalé tous les fruits d'un citronnier.

Je l'ignore et m'assois à côté d'Azraël. « Vous voulez des nouvelles ?

— Oui ! s'écrie Azraël, comme un enfant.

— Je suis la fille d'Astrea, déesse des Étoiles. »

Quoi ?! s'exclament Gad et Azraël en chœur dans ma tête.

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