47. La Grande Bibliothèque

(Retour au point de vue de Nuit)

Plus tard dans la journée, je décide d'aller en courant à la bibliothèque de laquelle la mystérieuse femme m'avait parlé.

Athanase m'accompagne et se rend compte de plusieurs choses : 1. Les poumons humains sont moins efficaces que ceux d'un Immortel. 2. Elle ne respire pas vraiment quand elle court en étant immortelle; 3. L'endurance, c'est horrible et dur, mais ça fait du bien.

Après les quelques cinq minutes trente de course (où j'ai été obligée d'adapter mon pas à celui d'Athanase) et un kilomètre de distance, nous arrivons au pied d'un bâtiment vieux mais magnifique, où, sur la grande arche de l'entrée, est écrit "Gröbg Bibryotek", Grande Bibliothèque.

C'est ironique, parce que c'est comme si ça voulait dire que c'est la plus grande, sauf qu'il n'y en a pas, ici.

Mais bon, à mon avis, ça veut dire qu'il y en avait d'autres avant, que celle-ci était la plus grande et que c'est la seule qui tient encore debout.

Athanase, essoufflée, s'assoit sur les marches, tandis que j'admire l'établissement.

Il se dégage de cet endroit une impression de calme et de paix tranquilisante.
J'inspire l'air frais et laisse ce moment s'imprégner en moi.
Il faudra que je revienne. Je prends note.

« On peut rentrer ou tu as encore besoin de quelques minutes pour arriver à respirer ? fais-je d'un ton moqueur.

— Eh ! Arrête de te foutre de moi, toi ! J'aimerai bien te voir passer de l'immortalité aux poumons fragiles !

— Mais oui, c'est ça... Allez, si tu peux protester comme ça c'est qu'on peut rentrer.»

On gravit les marches en marbre blanc, et on se retrouve nez à nez avec une grande porte en bois massif, avec des dorures sur les bords et des dessins en or fondu. Les portes sont fermées, et elles ont l'air plutôt lourdes... Je ne sais pas comment on va rentrer...

Athanase me regarde, renifle en me regardant de travers et s'avance vers l'entrée.
Elle ferme les yeux, écarte les jambes de la largeur de ses hanches et murmure des mots incompréhensibles.
Une lumière s'allume sur elle, une lumière de la couleur de ses prunelles, puis un petit bonhomme apparaît.

Ah bah tiens.
Il m'est bizarrement familier.
Petit, trapu, coiffé d'une tonsure monastique, barbe grise qui fait au moins vingt centimètres de long, lunettes sur son nez brillant et rouge, petits yeux gris injectés de sang, sourcils bouffis, lèvres craquelées, moustache qui rejoint la barbe, oreilles plutôt grandes, rondes, dents jaunes, et le regard un peu fou.

Le metallur, ou bien son clone, je ne sais pas.
Mais il a l'air de me reconnaître lui aussi.

«Eh bien, m'agressa-t-il, bien le bonjour, Mademoiselle qui passe toujours par la forge pour rejoindre son entraînement !

— Euuuh, oui, c'est moi...

— Ah! C'est vrai ! Elle ne sait pas qui je suis ! Permets-moi de me présenter, donc ! Je suis le jumeau du metallur, je suis le Bybhiotek. Dans la hiérarchie, je suis au même niveau social que le Shaolin, donc je te prierai de t'adresser à moi avec respect.

— Le respect c'est pour ceux qui le méritent, tiens ! rétorqué-je. Et pour l'instant, ce respect, tu peux te le mettre dans le cul ! Et, d'ailleurs, j'en ai rien à faire que tu sois au même niveau hiérarchique qu'Amel, vu que lui je l'insulte tous les jours, donc si tu penses que ça peut t'apporter quelque chose de bien, t'es complètement à côté de la plaque, mon gars !»

Le Bybhiotek me reluque, puis son expression change et il éclate de rire.

« Ah ah ah ! C'est bien elle, il n'avait pas tort !»

Euh... D'accord ? Je le prends bien ou mal ?

Prends-le bien, il est comme ça. Il teste toujours tout le monde sans prévenir pour vérifier si c'est bien la bonne personne. Il sait tout sur tout le monde. Il en sait même plus sur toi que les Dieux, sans doute. Il sait à quelle heure s'endort telle fourmi, telle coccinelle, et peut ainsi prévoir les changements de température, de climat, de relief. Lui et son frère, ce sont les deux créatures les plus sages de tous les temps
Il font partie d'un cercle intime, les Savants. Personne ne sait qui exactement en fait partie, ce qui leur donne énormément de pouvoir. Le metallur a plus de pouvoir que le Bybhiotek, mais les deux ensemble, ils sont redoutables ! m'explique Athanase par la pensée.

D'accord, je vois à peu près à quoi m'attendre... Cependant, j'ai l'impression que je n'ai aucune idée de ce qu'est cet homme. Ou, devrais-je dire, cette créature ?

Quoiqu'il en soit, le Bybhiotek nous fait passer, et nous pénétrons le bâtiment.

Dès que j'entre dans la pièce principale, la spiritualité et la paix de cet endroit m'assaillent et je ne peux m'empêcher de me détendre.

Quel est cet endroit magique ?

L'odeur des livres, des bougies et des herbes aromatiques comme la lavande me permet de laisser mon esprit s'évader.

Des étagères et des étagères de livres, de toute sorte.

Le toit est très haut, et je peux voir des balcons sur tous les côtés.

Il y des livres et des livres et des livres et des livres.

Je n'ai jamais lu d'œuvre, à part la légende du canard vert quand j'avais six tdp, que je ne me souviens plus (mémoire défaillante), et les quelques récits que mon père parvenait à dénicher chaque année pour mon anniversaire.

Ça a toujours été une manière de m'évader, j'ai toujours été passionnée par la manière dont les auteurs peuvent écrire, mais ce moyen de partir était tellement rare que j'ai bien appris à vivre sans.

Tout de même, ça me fait plaisir de voir qu'il y a des gens qui ont dédié leur vie à ça.

Athanase m'entraîne vers les rayons du fond, où la lumière est rare, mais où l'ambiance est meilleure.

L'odeur des parchemins me chatouille les narines d'une manière agréable.

Athanase disparaît entre les rayons et revient plus tard avec un grand livre, avec la reliure épaisse et vieille.

Sur la couverture, il est marqué "Arkiv 4: continent et Olymasis".

Atha m'entraîne vers une table, et pose bruyamment le livre. Les quelques personnes se retournent et la regardent d'un regard réprobateur. Mon amie écarquille les yeux et met sa main devant sa bouche. « Pardon !»

Ça me fait rire. Il faut dire qu'elle est très innocente et mignonne quand elle agit comme une humaine. Sinon, l'innocence n'est plus trop une de ses caractéristiques.

« Bon, ça c'est le tome 4 des Archives de la Grande Bibliothèque, et c'est le seul tome qui pourrait t'aider sur ton nom, m'explique Athanase. Il y a une carte du monde et toutes les représentations des Dieux.

— Et, tu penses que ça va m'aider ? Comment ? En regardant toutes les caractéristiques des Dieux ?

— Plus tu en sais, mieux c'est. Et ce ne sont pas seulement les dieux. C'est aussi un repère géographique.

— Euh, ok... je réponds, confuse.

— Tu verras. »

Elle ouvre le livre.

Soudainement, les pages se mettent à tourner, à une vitesse fulgurante, seules. Je regarde, stupéfaite. Athanase regarde, indifférente.

L'ouvrage se calme, les feuilles s'immobilisent.

Elles restent ouvertes sur une double page :

"Astrea : Olyma,ae, f.
Olyma stellae.
Astrea, astrea, astream, astreae, astreae, astreā.
Mater •••••.
Soror Luniae.
Conjux Celestini.

Attributa :
Stellae, oculus maris, capillus noctis. "

Un dessin est accompagné.
Je comprends plus ou moins ce que ça veut dire tout ça :
Le prénom de sa fille est masqué,  mais ses attributs sont... Comment dire... Les étoiles, ça oui, mais après ils disent que les yeux bleu marine la représentent et que les cheveux noirs la représentent.
Or, j'ai moi-même ce type de cheveux et ce type d'œil.
En plus, Azraël et Daëgan ont trouvé ça très naturel et normal de m'appeler Nuit.

Cela voudrait-il dire que... ?

Je lève mon regard vers Athanase.
Elle me regarde en souriant.

Elle a compris que j'ai compris.
Elle sait à quoi je pense.

Je referme le livre brusquement et me dirige vers elle.

«Je pense qu'une visite chez mes parents Paisajanea s'impose.

— Je pense aussi... »

En passant, je me regarde dans un miroir.
Et c'est là que je me rends compte que c'était évident, que c'était sous mon nez depuis toujours.

J'ai exactement les mêmes yeux qu' Astrea. Même forme, même couleur. Les cheveux : pareil. Même épaisseur, même couleur (sauf les points argentés), même type, un peu ondulés mais pas trop.

L'image d'Astrea me revient en tête.
Plus aucun doute, je suis sa copie conforme, à quelques détails près.

Mais, et si je me trompais ?

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