45. Gardienne de secrets

Quand je lève mon regard sur Athanase, elle sourit. Elle a compris que j'ai compris. 

Elle SAIT. 

Pourtant je ne sais qu'elle ne me dira rien. Elle veut que je trouve tout par moi-même. Mais c'est tellement dur quand on a perdu la moitié de ses souvenirs.... 

J'ouvre la bouche pour dire quelque chose quand on toque à la porte et celle-ci s'ouvre sur Daëgan et Azraël.

Daëgan est torse nu, l'air renfrogné, et les yeux lançant des éclairs.

Azraël sourit, gêné.

« Athanase, déclare le fils du Soleil d'un ton sans appel.

— Dis-moi ? répond-elle d'une vois enchanteresse.

— Pourquoi on a tous les cinq ces foutues visions de merde qui arrêtent pas de troubler le peu de sommeil que je trouve ?»

Un masque d'indifférence se pose sur le visage d'Athanase.

C'est comme si une autre Atha avait pris le dessus, une Atha froide, distante et impassible.
Qui s'en fiche de ce que veulent les autres.

« Cher Daëgan. Je pense que tu as oublié que on ne me parle pas comme ça, et tu le sais très bien. 
Tu veux des réponses ? Va les chercher, tiens. Si tu veux quelques indices, tu me parles sur un autre ton, compris ?

— Atha... Je n'ai pas le temps pour des indices. Je veux des réponses, maintenant !

— Si tu continues comme ça, tu les auras jamais, tes réponses ! Peut-être c'est ça le problème, Daë. Tu n'as jamais le temps pour chercher les choses par toi-même, tu veux toujours que les autres le fassent à ta place. Peut-être les réponses, tu les trouveras facilement, si tu les cherches !»

Daëgan bouillonne.
Mais il a la sagesse de ne rien dire.
Le truc horrible avec Athanase, c'est qu'elle a toujours raison. Et elle ne manque de respect à personne. Elle dit tout simplement la vérité.
Que veux-tu répondre face à ça ?
Tu ne peux rien faire.
Rien.
Tu dois juste la fermer et penser à ce qu'elle dit.

L'Immortelle-plus-trop-immortelle cligne les yeux et un regard plus authentique et plus doux prend la place de cette personne froide.

Elle sourit et continue à siroter son café.

Je me racle la gorge et déclare : «Euhm... J'ai une petite idée de ce qu'on peut faire, si vous voulez...

— Oui ! Dis-nous ! s'exclame Azra pour m'aider à détendre l'ambiance.

— Vous savez que j'ai pas de prénom non ? Du coup, au lieu de m'appeler "Paisajanea" ça vous dirait de me donner un surnom ?
Genre, je sais pas, un truc simple.

— Ouais, grave ! Parce que dire à chaque fois "Paisajanea" c'est un peu long. Et un peu péjoratif.

— On est d'accord ! Donc, vous proposez quoi quand vous m'interpellez ?»

Un silence pensif s'installe.
Mais j'ai bien vu que le visage d'Athanase s'est illuminé quand j'ai donné cette idée.
Je suppose donc qu'elle doit approuver l'idée.

Après de longues minutes où une douleur poinçante me vrille les tempes, Daëgan propose enfin une idée : «Nuit.»

Nuit ? Sérieusement ? Moi ? Me surnommer NUIT ?
C'est pas un prénom ça !

Justement, tu veux un surnom. Le prénom tu l'as déjà. Tu ne t'en rappelles tout simplement pas, fait la petite voix dans ma tête.

Bizarrement, je ne peux m'empêcher d'être d'accord avec elle.

« C'est vrai que ça te va bien, "nuit", fait Az. C'est comme si... Comme si c'était normal, de t'appeler Nuit. Mais dans une autre langue.

— Hein ?

— C'est vrai, accorde Daëgan.

— Eh, attendez, il faut que je demande à Gad, nous prévient Athanase.

— Effectivement. »

Son regard devient vague, et quelques minutes après, Gad arrive, essoufflé.

«Hey ! Désolé, j'étais en train de changer les couleurs de mon appart. Vous saviez vous qu'il était tout gris et bleu clair, comme ça ?

— Euh, ben... fais-je gênée, oui ?

— Ah oui, c'est vrai que vous voyez les couleurs vous. Par contre, c'est vachement chiant de ne pas voir les émotions ! Comment vous savez quand on vous ment ?

— Expérience, j'explique. Les personnes ont tendance à fuir ton regard quand elles mentent. Ou bien elles sont trop assurées. Ou quand elles mentent, elles sont mal à l'aise et se balancent un peu ou remuent la jambe. Après, il y a les experts, qui ne peuvent même pas différencier leurs propres mensonges et leurs vérités.

— Ah. Tu t'y connais bien on dirait.

— Quand tu as passé toute ton enfance avec des personnes qui faisaient semblant de t'apprécier juste pour plus tard avoir de l'avantage, c'est ce qu'il y a de bien.

— Ah...

— Bref, on disait, que je voulais un surnom pour pas qu'on m'appelle tout le temps "Paisajanea", et Daëgan a proposé–

— Nuit, dit Gad de but en blanc.

— Comment...?

— C'est vraiment Nuit qu'il a proposé ?!

— Bah, oui...

— Ben il faut t'appeler Nuit du coup ! C'est tellement instinctif !»

Je fronce les sourcils.
Non pas que ça me dérange, mais, qu'est-ce que ça veut dire, ça ? Tout le monde est d'accord pour m'appeler Nuit, comme si c'était juste normal. Et après, ce qu'Azra a dit, que c'était comme si c'était mon vrai prénom, mais dans une autre langue...

Et si c'était un prénom ? Qui signifie la même chose mais c'est pas le bon ? 

Et si...?

« Bon bah on t'appelle Nuit du coup ? m'interrompt Athanase. Ça te va?

— Euh... Je... Oui, d'accord...

— Trop bien ! s'écrie Azraël. C'est comme si ça faisait des lustres que j'attendais de t'appeler comme ça !»

Encore un truc comme ça ?
Qu'est-ce que ça veut dire, bordel !

Je regarde Athanase, avec un air disant : "Toi et moi, on en reparle après"
Mais mon amie sourit, heureuse, mais il y a quelque chose en plus.
Une touche de mystère, une touche d'euphorie, une touche d'inquiétude.

Je décide de n'y prendre garde, et accepte le fait que maintenant, on m'appellera Nuit.

Azraël est aux anges, je ne sais pas pourquoi, Daëgan a les sourcils froncés, comme s'il cherchait des réponses, par lui-même (ironie, n'est-ce pas ?).

Gad, lui, est trop occupé à admirer le monde autour de lui.
Enfin, quand je dis le monde, c'est Athanase hein.
Après, je comprends Gad.
Elle est très belle.
Et en plus, c'est sa copine.

Quant à moi, je me taraude l'esprit à la recherche de réponse, quand, soudainement, je vois Daëgan se crisper à mort et Athanase sursauter.
J'ai à peine le temps de voir Athanase s'endormir que mes muscles se tendent d'un coup.

Non non non non non. Pas encore une fois.
S'il vous plaît.
Je ne veux pas...

Et un voile de vide se pose sur ma conscience.

~★~

Le feu me réchauffe les mains.
Neven est en face de moi.
Jürgen est ligoté.
Et les autres sont en rond autour de Jürgen.

Tout comme moi, d'ailleurs.

Nous sommes six.
Pourtant, on pensait être sept.

Mais on s'est trompés.
Ou bien, devrai-je dire, je me suis trompée.

C'est moi qui ai insisté pour Jürgen.
J'ai convaincu les autres.

J'ai été naïve.

Je vois mon reflet dans l'eau du bol, qui est entre mes jambes.

Une nouvelle cicatrice me barre le visage.
Mes cheveux argentés mal coupés au carré encadrent à la perfection mon visage.
Mes yeux un peu bridés sont injectés de sang, comme s'ils étaient super secs, et les flammes font briller une lueur dangereuse dedans.

Mais mon regard est figé sur la cicatrice.
Une deuxième me barre la joue droite, une nouvelle.
Pour représenter mon échec émotionnel.
J'ai été faible.

Les blessures psychologiques sont dures à se refermer, dit-on.
Chez moi, elles prennent forme de cicatrice physique, permanente qui ne disparaîtra jamais.

Une marque de faiblesse.

« Hey » fait Neven, me relevant le menton.
Ses doigts parcourent la méchante démonstration de ma stupidité.
Pourquoi faut-il qu'il soit si embêtant ? Pourquoi est-il tellement arrogant et hypocrite ?

« Je t'aiderai à enlever cette cicatrice, même si elle te va bien, si c'est ce que tu souhaites.»

Je souris.

Son regard bleu/vert plongé dans le mien et ses lèvres prononcent mon nom, que j'ai toujours détesté.

« Ellunia »

~★~

Je sors de mon sommeil en cherchant de l'air et en me redressant d'un coup.

La sueur perle sur mes tempes, et je vois Daëgan penché au-dessus de moi.

Il me tient fermement.

Je lève mes yeux vers lui et vois le même regard que celui de... Neven.

« Nuit. Je sais. Ellunia, c'est ta parente. »






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Hellooo !
Comment vous allez ??
Je suis actuellement, à l'heure où j'écris ce chapitre, dans l'avion !
Je m'efforce de faire quelque chose d'intéressant, donc ça prend du temps 😂
On s'approche des révélations, j'ai hâte ! Ou pas... ;)
Petite question, pour avoir votre opinion.
À votre avis, que signifie le fait que le surnom de notre chère protagoniste soit si naturel pour les autres ?
Personnellement, j'en ai aucune idée, j'écris dans une sorte de transe, hahaha.
Je vous laisse pour le prochain chapitre ;)
Elena ✨;)

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