30. Amitié
En les voyant, je me fige pendant quelques secondes.
Qu'est-ce qu'ils ont vu ? Ils ont vu ce que je sais faire ?
Puis je me dis que c'est pas grave, qu'ils fassent ce qu'ils veulent, tant qu'Amel ne me fasse pas chier.
Je me retourne vers Athanase, qui me regarde, sidérée. Je lui souris.
Bah, quoi ? Elle pensait que les cours d'Inaki étaient en vain ? Quand même pas, hein.
Les garçons s'approchent, chacun avec une expression différente. Daëgan est, comme toujours, froid et indifférent; Azraël est stupéfait, quoique souriant; et Gad est rassuré et heureux, de voir sa copine, je suppose.
Celle-ci se lève et se précipite vers son homme, comme il fallait s'y attendre. «Gad !»
Il la prend dans ses bras et la fait tournoyer dans l'air, avant de la serrer très fort dans ses bras. Un baiser s'ensuit, nous obligeant à tourner la tête, les laissant à leur amour.
C'est fou comme seulement deux personnes qui s'aiment peuvent illuminer toute une rue. Les passants sourient, les couples s'embrassent et les familles s'enlacent. Les ivorgnes rient et sourient bêtement, les personnes qui étaient en train de s'énerver avec leur compère s'interrompent et se pardonnent, les célibataires courent rentrer chez eux, heureux avec l'espoir de retrouver quelqu'un qui leur est cher ; les marchands vendent avec plus de joie... Bref, c'est beau l'amour.
Quand ils finissent ce qu'ils faisaient, ils reviennent vers nous, un sourire et les joues rouges sur le visage. « Pardon. On... Vous voulez faire quoi maintenant ? nous demande Gad.
— Bah, vous me faites visiter la ville, si vous voulez ? je propose.
— Ok ! approuve Azraël sans pour autant se bouger.
— On, euh, on y va du coup ?
— Allez ! »
Azraël me prend la main et m'entraîne en courant vers la grande avenue.
Mon cerveau prend un peu de temps pour réaliser. Euh... quoi ? Hein? Il me prend par la main ? Quoi ??
Le reste du groupe suit en courant, sauf Daëgan qui marche avec ses mains dans les poches, calmement et posément.
Ça nous étonne ? Pas du moindre.
On débouche dans une rue plutôt active, avec quelques marchands de vêtements et de fruits, mais ce qui attire le plus l'attention, c'est une grande maison, recouverte de peinture dorée.
Les murs sont décorés avec des motifs représentant des différents soleils (depuis quand il y en a plusieurs ?) et plusieurs personnes ensoleillées. Je sais, ça n'a pas de sens, mais je ne sais pas comment les décrire, sinon.
Une réflexion me frappe. Daëgan il s'appelle ainsi, ce qui signifie "Journée Ensoleillée". Il est né en quelle saison donc ? Saison chaude, froide ?
Je secoue la tête. Pourquoi je pense à lui ?
Parce qu'il t'a volé ton premier baiser.
Je tais la petite voix. Je n'en ai rien à faire de mon premier baiser.
Sûre ?
La ferme !
Je redirige ma pensée à la maison du soleil (comment l'appeler sinon ?) et demande à Azraël : « C'est quoi ?
— Ça, déclare Azra, Paisajanea, c'est la maison d'enfance de Daëgan. Enfin, plutôt, le lieu où il est né. Le dieu du Soleil l'a décorée ainsi pour rendre hommage à la naissance de son fils.
— Ah. Wow. » Comment un Dieu peut être tellement respectueux envers son fils et tout un peuple et donner une engeance mauvaise et manipulatrice ? Cela reste tout un mystère.
Azraël me dévore des yeux. Je déglutis.
Pourquoi ?
Je lui fais un sourire gêné.
Gad et Athanase admirent la maison, tandis que Daëgan est toujours sur le chemin.
Je laisse mon regard s'attarder sur lui, car il a la tête baissée. Il a mis sa capuche, couleur gris sombre. Il est vêtu d'un pull noir (d'où vient la capuche), un jean gris un peu abîmé et a des bottes noires en cuir ou quelque chose comme ça. Je vois sa tête se balancer de gauche à droite, au rythme de je ne sais quoi.
À mon avis, il écoute de la musique. Mais que sais-je ?
Je recentre mon attention sur l'ange, qui se frotte les mains et les cache dans ses poches. Mais, avant ça, je vois des marques sur ses avant-bras.
Ma main fonce vers son poignet et je m'empare de son bras. L'hôte de ce dernier me regard, surpris et, je pense, légèrement inquiet. «Fais voir. T'as quoi sur le bras ?
— Paisajanea... Je ne pense pas que...
— Chut. Laisse-moi regarder. Tu penses vraiment que je vais te juger ?
— Euh, bah... fait-il, gêné.
— Ah, bon, j'ai compris, dis-je mi-amusée, mi-frustrée. Tu ne me connais vraiment pas en fait.
— Euh bah, disons que ça fait, quoi, quatre jours que tu es chez nous ?
— Quatre jours ? Un peu plus non ? » Nous commençons à compter, ce qui me fait lâcher son avant-bras pendant quelques secondes.
Oui, ça fait vraiment quatre jours que je suis chez eux. J'ai l'impression que ça fait au moins une semaine !
Bon, après, mes journées sont plutôt chargées.
Je secoue la tête, et reprends l'avant-bras d'Azraël.
Je regarde attentivement, surtout l'endroit où les veines sont très visibles.
Il a des marques de coupures.
Blanches.
« Azra. C'est quoi ces cicatrices ?»
Un long silence s'ensuit, interrompu seulement par le bruit des chaussures d'Athanase qui se précipite vers nous.
Ses yeux s'écarquillent en voyant les traces sur la peau de son ami.
Elle regarde l'ange tombé avec préoccupation.
Il a le regard vague.
Qu'est-ce qu'il a fait ?
Des pas posés et silencieux s'approchent.
Daëgan.
Je regarde pour vérifier, mais j'avais raison. Il est là, et regarde l'avant-bras de son meilleur ami impassiblement.
Est-il à ce point sans cœur ?
Je sors de la stupeur qui s'était installée et me racle la gorge. « Hmhm, Azraël ? Qu'est-ce que tu as fait ? Ou, qu'est-ce qu'il s'est passé ? S'il te plaît ?»
Il secoue la tête, dirige un long regard à Daëgan puis déclare : «Je n'ai pas envie d'en parler. Un jour, peut-être. Mais vous avez juste besoin de savoir que, non, je ne me fais pas ces cicatrices parce que j'ai des problèmes psychologiques. Ce n'est rien. »
Un autre coup d'œil à son ami.
Athanase et moi échangeons un regard.
‘Ce n'est rien’. Il vaut quoi ?
Rien, me confirme-t-elle. Az nous cache quelque chose.
Je suis bien d'accord.
Je scrute Azraël, pour voir si je peux tirer un signe quelconque de son expression.
Impassibilité, froideur, distance. Voici tout ce qu'il y a sur son visage.
Il ne dira rien.
Je décide donc de laisser passer, ce coup-ci. Mais attention, Azraël. La prochaine fois, tu ne t'en tireras pas tellement bien.
«Bon, euh, quelqu'un m'explique pourquoi on est là ?» je demande de but en blanc.
Gad me sourit et dit: «C'est pour te montrer l'importance que nous donne le peuple Kuntaï.
Comme on est des enfants de Dieux, sauf moi, on est considérés comme des personnes privilégiées.
Moi aussi, parce que je suis avec Athanase, donc si un Enfant d'un Dieu me considère comme son compagnon, cela veut dire que je suis spécial.
Cette maison est chaque jour au moins touchée, vénérée par des centaines de personnes.
Avec nous, tu es en sécurité. »
Ok. Je vois. Mais pourquoi me le dire de cette manière ? Je ne comprends pas.
«Ah d'accord. Mais du coup, pourquoi vous me le dites comme ça ? Et en plus, je ne suis même pas votre amie. Donc la population n'a aucune raison de me respecter. Parce que je ne vais quand même pas passer toute ma vie avec vous !
— C'est en partie pour ça que Daëgan a dit que tu étais sa fiancée, intervient Athanase. Et en ce qui concerne le fait d'être notre amie, je ne sais pas toi, mais je pense que je pourrais te considérer comme telle. Peut-être. Si tu veux bien.»
Mon cerveau s'arrête de fonctionner un instant.
Une amie...
Non, non, non, non, non !
Je n'en ai jamais eu.
Et c'est chez les Kuntaï que je vais m'en faire une ?
Traîtresse. Tu fais plus confiance à l'ennemi qu'à ton peuple ?
Je n'ai pas envie qu'on me traite de monstre encore une fois.
Mais... Est-ce que Athanase est vraiment une ennemie ? N'est-elle pas elle-même victime d'Amel ? Tout comme Gad, Azraël, et même, Daëgan ?
Je tais mes voix intérieures. Pas encore. Je ne suis pas encore prête pour répondre à tellement de questions.
C'est pour ça que je me contente de murmurer un "peut-être..." sans conviction, de peur de leur faire des faux-espoirs.
Je vois tout de même les yeux d'Atha s'illuminer de surprise et de soulagement.
Elle ne s'attendait pas à ce que je dise ça.
Deux voix étouffées me tirent de ma demi-stupeur :
« Mais enfin, Az ! s'exclame Daëgan en chuchotant. Comment tu la regardes ?!
— Chut ! fait son ami. Oui, bon, je sais, mais elle me rappelle Angelica... Elles ont la même forme d'yeux et la même longueur de cheveux...
— Ses cheveux ont sûrement poussé. Mais quand même...
— Je ne l'aime pas. Enfin, pas dans la manière que tu penses. C'est juste, Elle me manque tellement...
— Je sais, mais ce n'est en aucun cas Angelica. »
C'est qui cette fille ? Je décide d'intervenir, au diable les contenances !
«Euh... je ne voudrais pas vous déranger, mais c'est qui cette Angelica ? »
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top