S e p t
« Mon pote, j'ai soif. »
Il était minuit passé lorsque Quentin réveilla Rémi pour lui réclamer une boisson, et pas n'importe laquelle. Rémi grogna, exaspéré par l'attitude de son ami, il était crevé et ne demandait qu'à pouvoir dormir d'un sommeil paisible et profond.
« Va boire de l'eau. Y'en a plein le robinet. lui répondit le jeune dormeur.
– Nan, moi je veux du whisky ! » s'indigna Quentin.
Rémi enfonça la tête dans son oreiller et souffla bruyamment, tandis que son ami restait debout dans la pénombre au seuil de la porte de la chambre, soit la limite de l'espace personnel et intime de Rémi qu'il s'était juré de ne jamais franchir. Le jeune psy n'aimait pas ça, que l'on rentre dans sa chambre, pour lui, c'était comme si on violait une partie de sa vie. Et Rémi tenait à sa vie privée bien plus que Quentin n'aurait pu le penser.
« Aller, s'te plaît ! » rétorqua-t-il d'une voix criarde.
Rémi prit pitié et finit vite par céder face à la détresse de son ami.
« Bon, ok. Je vais t'en acheter une bouteille.
– Deux. le corrigea Quentin en lui montrant le fameux chiffre avec ses doigts.
– D'accord, deux. » acquiesça Rémi, qui n'avait pas vraiment le choix.
Il se leva avec le peu de force qui lui restait dans les membres, c'est-à-dire rien du tout. Puis se dirigea à l'entrée, enfila des baskets, se couvrit de son manteau et attrapa les clés à la volée, tout ça avec des gestes mous et à peine réveillés. Il sortit dehors, marcha sous la clarté de la lune, et partit trouver l'épicerie la plus proche qui ouvrerait de nuit. Malheureusement pour lui, elles étaient rares dans le coin.
Rémi retrouva petit à petit un peu de lucidité, et commença à se demander quelle idée il avait eu d'accepter d'aller lui acheter de l'alcool, surtout à une heure pareille. Il devait être vachement fatigué pour être tout d'un coup aussi manipulable qu'un pantin. Surtout qu'en tant qu'ami il ne devrait pas faire ça, ce n'est pas comme ça que Quentin s'en sortira. Ce n'est pas en liquidant des bouteilles entières d'alcool qu'il retrouvera un jour sa joie de vivre.
Et comme si cela ne suffisait pas, la pluie vint se déverser en trombe au-dessus de sa tête. Alors il décida de faire demi-tour, tant pis pour l'alcool, il dira à Quentin qu'ils étaient en rupture de stock. C'est pour son bien.
Arrivé chez lui, il partit directement se jeter sur son lit encore tout habillé, oubliant même qu'il était mouillé de la tête aux pieds. Il retrouva le confort de son matelas et la douceur de ses draps, puis se laissa emporter par un sommeil qui le transporta bien loin du monde réel.
Il était exactement huit heures et demie lorsque Rémi ouvrit les yeux, évidemment, il n'avait pas entendu son réveille sonner. Alors, il se leva de son cocon douillet en vitesse et partit se changer dans la salle de bain, en avalant un bol de céréales dans la foulée. Il lâcha un juron, après avoir regardé sa montre, cette fois, il était vraiment en retard, et en début de semaine, on pouvait dire que ça craignait.
Sa montre affichait déjà huit heures cinquante quand il débarqua au métro, mâchouillant encore quelques restes de son petit-déjeuner. Dans la précipitation et sans s'en apercevoir, Rémi se trompa de quai, il atterrit sur celui de la fille. Le jeune homme finit par se rendre compte de son erreur lorsqu'il l'aperçut, non loin, debout, ses jambes allumettes surélevées par une paire d'escarpin rouge vertigineux, vêtue d'un perfecto noir, d'un jean basique et dont les cheveux couleur miel n'avaient pas été coiffés. Rémi ne trouva rien à redire, elle était définitivement magnifique, il avait même comme l'impression qu'elle devenait de plus en plus belle à chaque fois qu'il l'apercevait. Il était tellement captivé par une telle créature qu'il en oublierait presque qu''il était en retard.
Mais l'arrivée du train d'en face le ramena vite à la raison, il jeta un dernier regard à la demoiselle, puis partit au pas de course pour rejoindre l'autre quai. Malheureusement, le train partit sans lui, pile au moment où il avait franchi l'escalier qui menait au point de départ. Les chauffeurs n'attendent jamais personne, ils ont un timing à respecter, et ça, Rémi ne pouvait qu'en vouloir à lui-même.
Une fois dans le train, qu'il avait dû attendre cinq longues minutes, Rémi regarda autour de lui, sûrement par habitude. Aussi bizarre que cela puisse être, il adorait prendre ce transport en commun, il y avait pris goût. C'était l'occasion pour lui de croiser de nouveaux visages, les gens sortaient du wagon, de nouvelles personnes rentraient, et Rémi les regardait toujours avec cette fascination. Il était fasciné par le genre humain.
Il scrutait un à un les visages des passagers qui l'entouraient, ces visages que l'on croise le matin dans le métro parisien, ces visages aux yeux fuyant vers le lointain. Une mère de famille accompagnée de son fils, des retraités plongés entre les lignes de leur journal quotidien, des étudiants en chemin pour l'une des bibliothèques de la capitale, des ados aspirés par la lecture d'un livre, des grands-parents promenant leurs petits-enfants. Simplement des gens qui vivaient leur vie parallèlement à la sienne, avec qui il ne partageait rien mis à part ce métro qu'il avait l'habitude de prendre.
Cet amas de personnes défilant devant ses yeux reflétait parfaitement la France, pour lui. La France c'était tout un mélange de teinte, d'origines et de religions. La France était multicolore comme une explosion de couleurs. La France n'était pas toute blanche, ni toute noire, elle était arc-en-ciel.
Finalement, ce fut avec deux heures de retard qu'il arriva à son cours sur l'histoire de la psychologie, sous le regard moqueur de l'assemblée d'élèves participant au cours. Par chance, si cela en était, le professeur l'accepta dans son cours, et reprit sans ciller, la suite de son discours.
Comme à son habitude, le professeur qui était censé aborder la vision des psychologues du XXème siècle, dériva sur le portrait d'un grand philosophe : Descartes. Comme un hommage qu'il souhaitait donner, les élèves restèrent respectueux et tout aussi captivés par ses paroles qui s'élevaient dans tout l'auditorium.
Mathématicien, physicien et grand philosophe français du XVIIème siècle, il a marqué son temps d'une pierre blanche.
Descartes était celui qui avait donné son nom à cette grande université en plein cœur de Paris. L'université des sciences humaines et de la santé.
Mais il fut celui qui dit un jour « cogito ergo sum »
Tout en méditant sur ses paroles à consonance latine, Rémi répéta machinalement, comme une constatation à son égard, admiratif de la pensée de Descartes, épris d'une envie de comprendre l'esprit vif et plein d'embûches de l'être humain.
« Je pense donc je suis. »
Une fois les cours terminé, Rémi rentra chez lui, il avait droit à trois heures de pause aujourd'hui, ça lui laissait l'occasion de souffler un peu.
En prenant le métro du retour, il eut comme l'impression qu'on l'observait, il sentait une présence, une force inconnue qui l'étreignait. Il avait le sentiment d'être enfermé dans un endroit d'où il ne sortirait jamais, sa tête tournait, mais il tenait tout de même le coup et restait debout malgré le fait qu'il respirait difficilement. Un surplus d'air s'était emmagasiné dans ses poumons, et il avait comme du mal à le rejeter. Le train accosta enfin à son quai, il en sortit précipitamment, essoufflé.
Le jeune homme trébucha maladroitement en tentant de monter les marches de l'escalier qui menait à la surface. Il chancelait.
C'est alors que pour dernière image lui vint le visage de la jeune femme qui lui hurla à plein poumon : « Laisse-moi tranquille ! » comme un avertissement, une alerte à la bombe. Et s'ensuivit l'apparition du nombre 26, dont les chiffres saignaient abondamment, se liquéfiant sous ses yeux stupéfaits, s'enflammant d'une chaleur ardente. Des pensées fragmentaires. Une bombe à retardement. Une explosion inévitable.
Puis, Rémi sombra dans le noir complet, laissant l'obscurité l'envelopper et le prendre pour seul otage de son hallucination.
***
Hey ! 😊 J'espère que ce chapitre vous aura plu, j'ai mis du temps à vous le poster parce que samedi dernier je n'ai pas eu le temps de le réécrire et de le corriger, mais le voilà enfin !
J'ai peu de temps pour écrire en ce moment, surtout que j'ai deux autres projets sur le feu en plus de LFDM, donc c'est un peu dur à gérer en plus des cours 😅 J'ai hâte de vous faire découvrir tout ça ❤️
N'hésitez pas à me donner vos avis, ça m'aidera à m'améliorer comme ça 😌
Des bisous & prenez soin de vous 💕☀️
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