Chapitre 16 : Une Tente pour Deux
Iris se disait déjà qu'elle allait s'ennuyer ferme pendant ce voyage. Alivéne faisait la gueule, car visiblement il ne la supportait pas. Forcément. Ardent défenseur de l'eau, il ne pouvait pas voir en peinture la représentante du feu. Enfin, bref.
Sa seule consolation était la présence des autres hommes d'Ydra venus avec cette tête d'endive, et celle de Savinha. Même si elle doutait que cette dernière se remette un jour de la vision de son crâne à moitié arraché.
Elle occupait donc, pour le moment, son temps en pilotant l'aéronef. Alivéne l'avait engueulé en lui demandant de faire des trajectoires droites, sinon une épidémie de vomissements leur pendait au nez. Et ils étaient en vase clos.
Donc, même piloter devenait barbant, en ligne droite. Au bout de la première demi-journée, elle craqua et partit à la recherche d'un partenaire sexuel, histoire de faire passer le temps. Ce ne fut pas cela qu'elle trouva, pourtant.
Mais c'était presque encore mieux. Au moins sur un pied d'égalité.
-Bonjour, Iris, fit Mirhna en venant à sa rencontre. Comment allez-vous ? Pas trop mal à la tête ?
-Nan, ça va. En temps normal, il m'aurait fallu deux jours pour retrouver mon crâne, mais grâce à Silna je n'ai plus rien.
La femme haussa un sourcil, une lueur intéressée dans le regard. Petite, le regard franc et le dos droit, elle avait un beau sourire. Elle aurait été plus jeune, Iris aurait été tentée. Quoique...
-Votre corps se reforme tout seul ?
-Ouais. C'est le côté éternel du feu. Une vraie mouise, si vous voulez mon avis. Surtout quand vous tombez sur un psychopathe qui veut voir quelles sont vos limites, ajouta-t-elle en roulant des yeux exaspérés. Si vous saviez le nombre de cons qu'il y a sur cette terre !
-J'aimerais bien entendre votre histoire, Iris, elle me semble très instructive. Mais je dois vous avouer qu'en parlant de cons, il y en a un, ou plutôt une, qui m'intéresse tout particulièrement.
Loin de prendre cela pour une insulte, l'Elémentaire lui adressa un sourire curieux.
-Ah oui ? Laquelle ?
-Wokabi. Je sais que vous devez la confier à la Reine Lubilla.
Ah oui. La folasse du cul. Celle qu'elle était allée chercher elle-même à la capitale, pour la trainer jusqu'au Temple de la Fertilité afin de pousser Sakhar à utiliser la marque de la déesse... Quelle histoire !
-Elle est en prison. Pourquoi ?
Un lent sourire étira les lèvres de Mirhna. Du genre qu'Iris n'aurait jamais cru voir sur son visage.
-Je souhaiterais lui parler.
Songeuse, la fille du feu la contempla un instant.
-Je veux bien, mais ne la tuez pas. Silna serait très contrariée de ne pas pouvoir lui régler son compte.
-Nous vous en faites pas. J'ai seulement quelques questions à lui poser.
La Mercenaire Rouge sourit à son tour.
Elle commençait à bien aimer la mère de Sakhar.
*
Ils avaient quitté Mokha à l'aube. Le Grand Prêtre s'attendait certainement à ce qu'ils restent longtemps encore. Mais une fois Iris, sa famille, Alivéne et sa clique mis dans l'aéronef, il avait décidé de se tourner vers ses prochains objectifs.
Qui aurait pu avoir peur de trois voyageurs ? Dont une qui ne supportait pas du tout la chaleur ?
Le premier village se trouvait perdu dans le désert, à une journée en chameau. Ils partirent donc, en se mêlant à une caravane équipée en eau, au grand soulagement de Silna. Étant la seule femme de leur équipée, il y avait toujours Ravish ou Sakhar à ses côtés. Plus souvent le deuxième que le premier, d'ailleurs.
Enturbannés, vêtus de vêtements amples destinés à dissimuler leur identité, à défaut de la carrure de l'Elémentaire de la Terre, ils écoutèrent les rumeurs portées par les marcheurs de Ghania. On parlait de la destruction de Tirhn. De la rébellion du Chien de Guerre. De la colère constante du roi Chameka. Des villages fouillés, des rebelles recherchés dans les moindres recoins du royaume.
Mais s'il y avait une chose que les citoyens possédaient mieux que le souverain du désert, c'était la géographie des dunes. Ils parvenaient à se cacher, à se dissimuler aux yeux de leurs poursuivants. Un vent de panique, de révolte soufflait dans tout Ghania.
Ils arrivèrent le lendemain matin à leur premier objectif. Une petite garnison de soldats était ici à demeure, étant donné que le village se trouvait sur l'un des axes commerciaux du royaume, comme le prouvait la présence de la caravane. Attablés sur la place centrale, ils riaient de rires gras. Ces derniers redoublèrent lorsque Sakhar s'approcha d'eux, laissant Silna avec Ravish.
-Je vous donne une chance de retourner vers la capitale dans l'heure.
On lui rit au nez. La seconde suivante, confrontés à trois golems dotés du visage du dieu de Tarco, ils comprirent leur erreur. Ils déguerpirent aussitôt. Certains villageois crièrent au miracle. D'autres, au scandale. Mais tous avaient peur pour la suite. Il allait partir, non ? Qu'allait-il advenir d'eux !?
-Vous ne serez pas sans protection, déclara-t-il en désignant les statues, qui s'immobilisèrent autour de la place, leur lance ou leur épée plantée dans le sol, menaçantes. Tarco veille sur vous.
L'incertitude. Des pleurs de joie. Des murmures de liberté.
Abasourdie d'avoir accueilli l'Elémentaire de la Terre en son sein, la caravane marchande leur proposa de les accompagner dans leur périple. Ils voulaient faire partie de la geste du Chien de Guerre.
Ce fut le cas, cela pour les trois premiers villages. Le même procédé. Il donnait le choix aux soldats du roi : partir, ou subir ses foudres. Jusqu'à présent, ils avaient tous préféré retourner à la capitale la queue entre les jambes. Sakhar laissa trois golems sur place, à chaque fois.
Au quatrième, ils passèrent la nuit sur place. La caravane et eux se sépareraient le lendemain. Ils comptaient sur eux pour répandre la rumeur de la libération de certains villages. Ce n'était que le début. Et pourtant, Sakhar avait bien l'intention de passer par le plus de lieux habités possible.
Consultant une carte prise au Grand Prêtre, il rapprocha sa chandelle de l'un des noms. Il avait quitté Mokha en passant par le chemin le plus direct pour la côte. Silna ne connaissant strictement rien à la géographie de son pays, il ne lui avait rien dit. Ravish, en revanche, avait parfaitement compris où il voulait en venir.
Ce serait le premier symbole fort, après l'attaque repoussée à Mokha.
Pourtant, il devinait déjà les soldats du roi à ses trousses. Mais cette fois-ci, ils n'avaient pas Iris à lui lâcher dessus, vu que cette dernière se trouvait avec sa famille. Une Elémentaire immortelle... Mieux valait l'avoir dans son camp, celle-là.
Fatigué, il roula la carte, avant de la glisser dans un étui en cuir pendu à sa taille.
Il avait besoin de dormir. Ravish montait la garde, bien que les villageois ne leur soient pas hostiles. En plus, on leur avait gracieusement prêté un lit pour la nuit. Il souffla la chandelle dans un soupir, pour rejoindre Silna. Étalée sur le ventre sous un drap fin, elle souffrait de la chaleur.
-Sakhar... Pourquoi tu vis dans un pays si chaud ? gémit-elle en entrouvrant un œil épuisé.
-Ah, demande au destin, rit-il en enlevant son turban, pour s'ébouriffer les cheveux. Je n'y suis pas pour grand-chose si je suis né ici.
-Pff.
Pff ? Comment ça, pff ? Tout sourire, il ôta son haut ample, qu'il jeta sur une pile de vêtements. Une pile de vêtements ? Louchant dessus, il se rendit compte qu'il s'agissait de ceux de Silna. Retournant sur elle, il manqua avaler de travers quand il comprit. Elle était nue sous le drap.
-Mmh, tu viens te coucher ?
Son cerveau s'enraya, pour la énième fois depuis qu'ils avaient pris l'habitude de dormir ensemble. Dès qu'il pensait à autre chose, il commençait à légèrement paniquer. Ou à s'emballer ? Bref, il n'en restait pas moins qu'une chose inappropriée commençait à se manifester, et il n'avait pas envie qu'elle s'y retrouve confrontée. Clairement, elle n'était pas en état, vu sa fatigue.
-J'arrive, j'arrive.
Se félicitant d'avoir soufflé la chandelle, il ôta sa ceinture, ses bottes, mais mit un point d'honneur à garder ses chausses. La petite maison qu'on leur avait prêtée les isolait du reste du monde. Pour la première fois depuis un bon moment, il se retrouvait réellement seul avec elle.
Glissant sous le drap, il passa un bras autour de sa taille tout en veillant à ne pas la toucher avec son érection. Manœuvre compliquée. Lovée contre lui, Silna s'endormit quasiment tout de suite, son souffle devenant plus régulier. Malgré son excitation, il ne tarda pas à la suivre.
Et, comme pour toutes les dernières nuits, il se retrouva dans les songes à ses côtés. Ayant sombré la première, il découvrit ce que son inconscient lui présentait dans son sommeil. C'était un lieu froid, battu par les vents. On eu dit une tour perdue dans la brume, avec de la neige couvrant le balcon extérieur. Il n'était ni à Ghania, ni à Ydra.
Debout au milieu de la pièce, la Silna d'aujourd'hui contemplait son homologue de l'enfance. Une petite chose enveloppée dans une robe de style orientale. Elle aurait été bleue, si elle n'avait pas été imbibée de sang.
Silencieux, Sakhar se positionna derrière la Prêtresse de son époque, pour la prendre dans ses bras. Un frémissement la parcourut, tandis qu'elle se laissait aller contre lui. Si petite. Si fragile... Et pourtant si puissante.
-Que s'est-il passé ? demanda-t-il doucement.
-Rien dont je souhaite parler ce soir, soupira-t-elle en faisant disparaitre tout cela pour le remplacer par le bord de mer. Tu... Je ne crois pas...
-Silna, la coupa Sakhar. Quoi qu'il advienne, je serais toujours à tes côtés. J'accepterais tout de toi. Tu en as conscience ?
Baissant les yeux, elle poussa un soupir, avant de les relever vers lui, rieurs.
-Maintenant, oui. Et toi, je vais te faire comprendre quelque chose.
Pardon ?
Il ne sut exactement comment, mais Sakhar se réveilla dans la petite maison, Silna à califourchon sur son torse. Le temps qu'il fasse le point sur la situation, stupéfait, elle s'était penchée sur lui, la pointe de ses seins nus venant frôler son torse...
Ses seins nus !?
-Sakhar, mon petit Sakhar, ronronna-t-elle tandis que l'Élémentaire s'agrippait soudain au cadre du lit, ses yeux ne sachant plus où se poser. Et toi, tu as conscience que je serais toujours à tes côtés ?
-Heu... Je...
Son cerveau semblait être en panne, à défaut de son sexe. Ou était-ce parce que tout son sang venait d'être drainé vers cette zone ? Oh, bordel ! Dès que ça la concernait, il ne savait plus où se mettre. Enfin... Posant ses mains douces sur ses joues devenues barbues avec le voyage, Silna l'incita ainsi à quitter les globes pulpeux des yeux. Ça ne l'empêchait pas de les sentir, brulant, plaqués contre lui.
Et elle ? Percevait-elle les battements affolés de son cœur, dans cette position ?
-Tu as conscience que j'accepte tout de toi ? murmura-t-elle en se penchant vers ses lèvres, son ventre, un poil trop creux depuis l'invocation, se planquant contre le sien.
Néanmoins, ce qu'elle venait de dire le dégrisa un peu, faisant remonter du sang vers sa cervelle de moineau. Elle acceptait tout de lui ? Aussitôt, des images venues d'un passé déterré quelques jours plus tôt vinrent le hanter. Il entreprit de les enterrer une nouvelle fois, à toute vitesse.
-Je... Silna... Je ne crois pas que tu souhaites...
-Oh si, je le souhaite. Mais depuis cette fois-là sur le bateau, où nous avions laissé nos instincts nous commander, tu réfléchis beaucoup trop, Sakhar.
Ça, ce n'était pas tout à fait faux. D'un autre côté, ils avaient été sacrément occupés, depuis. La bataille d'Ydra, le retour en esclave à la capitale, son émancipation, Iris qui l'avait capturé, le retour de Silna, les Jeux du Sable... Ils avaient eu de quoi faire.
Mais il savait très bien qu'elle ne parlait pas de cela.
-Écoute, je... C'est juste que... Je suis un esclave...
-Était. Et quand bien même, est ou était, je m'en cogne.
-Silna... Je...
Son index se posa délicatement sur ses lèvres, tandis qu'un sourire railleur étirait les siennes, délicates.
-Je vois que je vais devoir t'empêcher de réfléchir.
Elle l'embrassa. Lui, l'ancien esclave, elle l'embrassa non pas sous le coup de la colère comme pour la première fois, mais avec une douceur toute féminine. Son corps se pressa un peu plus étroitement contre le sien. Ne résistant pas à la tentation, Sakhar caressa son dos de ses mains calleuses, abimées par les années de combat. Sa peau était douce... Fraiche sous ses paumes.
Un léger frisson parcourut la Prêtresse de l'Eau, qui quitta ses lèvres avec un léger gémissement. Ses yeux étaient voilés de désir. Il reprit sa bouche, comme assoiffé d'elle. Depuis combien de temps voulait-il cela ? Depuis combien de temps le fuyait-il ? Il avait envie d'elle avec une force presque effrayante, et pourtant il ne désirait qu'une chose, c'était la sentir gémir sous lui, voir cette femme si forte qu'il aimait s'en remettre entièrement à lui. Il avait envie de la sentir se refermer autour de son sexe, il avait envie de lui arracher des cris de plaisir.
Il avait envie de tout oublier dans ses bras.
Qu'elle oublie tout dans les siens.
Néanmoins, elle ne semblait pas avoir la même idée que lui.
Lui mordillant délicatement la lèvre inférieure, ce qu'elle lui dit le laissa pantois.
-Je vais te faire découvrir un truc que, je suis certaine, on ne t'a encore jamais fait.
Quoi ? Il n'était pas certain de savoir... Ah non, effectivement il... Lorsqu'elle descendit le long de son corps massif, il comprit qu'elle allait à la rencontre de sa verge. Ce simple constata lui fit un peu plus perdre la tête.
Il n'en resta plus rien quand elle posa le bout de sa langue sur son gland. Il confirma, on ne lui avait jamais fait de fellation de sa vie. Or, cette découverte le fit s'en remettre totalement à Silna, qui entreprit de lui donner un plaisir absolu sans rien lui demander en retour. Sans d'autres objectifs que de le faire jouir, lui, l'ancien esclave.
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