Chapitre 13 : Jalousie


Le salon de travail du Grand Prêtre était magnifique, avec deux statues toisant le bureau en bois brut. Des plantes d'intérieur se trouvaient çà et là, donnant une impression de petite jungle aux lieux.

Un peu remis du choc de la découverte de l'Elémentaire et du dieu Tarco qui lui avait directement adressé la parole, l'homme de foi les considérait avec un grand sourire serein. Silna, Iris, et Sakhar se trouvaient devant lui, fatigués mais ravis que les Jeux se soient finis ainsi.

-Vous êtes un homme exceptionnel, Élu de Tarco. Que me vaut l'honneur de votre présence ici ? Et de celle de ces deux courageuses jeunes femmes ?

-Nous sommes contre le principe d'esclavagisme, déclara Silna en s'installant avec grâce sur un siège, juste à côté d'un bol d'eau fraiche dans laquelle elle plongea la main avec soulagement. De fait, nous sommes ici pour marquer notre soutien à Sakhar.

-Effectivement, approuva Iris, sans rien ajouter.

Ne sachant pas qu'il avait devant lui deux autres Elémentaires, le Grand Prêtre sourit d'un air indulgent. Il n'avait aucune idée de qui étaient ces femmes à l'air si assuré. Néanmoins, il savait qui était l'homme resté debout, les bras croisés, son regard sombre l'étudiant attentivement.

-Je suis l'Élémentaire de la Terre. Mais vous devez surtout me connaitre sous la dénomination de « Chien de Guerre ». J'étais l'esclave du Roi de Ghania jusqu'à récemment.

Plein de compassion et avec une pointe de colère dans le regard, le vieil homme hocha la tête en prenant place à son bureau, puis en leur désignant leur siège. Sakhar ne s'y installa pas, préférant rester debout près de Silna. Elle était si maigre, si fragile... Fragile, elle ? La bonne blague !

-La dynastie actuelle a effectivement pour coutume d'ôter toute liberté aux élus du dieu, ce qui est une honte. Mais dites-moi... Que... Les moyens de pression sur vous...

-Ma famille est vivante, mais elle doit être protégée. Avec l'accord de la Reine d'Ydra, elle va être mise en sécurité à la Cité-État dès que possible. Le Roi ne prendra pas le risque d'attaquer la Reine Lubilla. Elle ne ferait qu'une bouchée de lui, surtout avec la Prêtresse de l'Eau à ses côtés.

Si le Prêtre fut surpris qu'il parle de la souveraine de la Cité-État de cette façon, il ne releva pas pour le moment. Il aurait tout le temps d'en savoir plus ultérieurement. Car la situation prenait une tournure terriblement intéressante.

-Vous m'en voyez ravi. Vous êtes donc un homme libre... Que souhaitez-vous faire, à présent ?

À ces mots, les trois Élémentaires sourirent. Loin d'être stupide, le Grand Prêtre eut un petit sourire à son tour.

-Est-ce que, par le plus grand des hasards, vous souhaitez reprendre le statut des anciens Elémentaires, monsieur Sakhar ?

-Pas nécessairement, répliqua-t-il, au grand étonnement du Prêtre. Je ne brigue pas le pouvoir, et c'est pour cela que je me trouve ici : quand j'aurai tué le roi, le désert risque d'être plongé dans le chaos. J'aurais besoin de votre aide pour assurer le relai du pouvoir et éviter que tout le monde s'entretue. Je veux ma vengeance. Pas faire tomber le royaume. M'aiderez-vous ?

Il y eut un silence, au terme duquel le Grand Prêtre hocha solennellement la tête.

-Si vous aviez souhaité devenir roi à votre tour, je vous aurai cru perverti et ne vous aurai pas apporté mon soutien. Mais en l'état... Je vous aiderai, monsieur Sakhar. Toutefois, étant donné le pouvoir du roi actuel et le fait que vous êtes dans l'esprit populaire son Chien de Guerre, celui qui punit les rebelles, nous allons devoir faire quelque chose.

-Je sais. C'est pour cela que j'ai fait les Jeux du Sable, fit-il avec un sourire en coin.

Le Grand Prêtre le considéra pensif. Avec son aspect colossal de guerrier, l'Élémentaire de la Terre ne donnait pas une impression de grande intelligence au premier abord. Mais quand on l'observait de plus près... Une lueur malicieuse brillait dans son regard. Une lueur qui, il était prêt à le parier, était morte du temps de son esclavage.

Un homme en veille depuis dix ans, et qui s'apprêtait à montrer au monde qui il était vraiment.

-J'ai cru comprendre que vous vous étiez illustré aux côtés de l'Elémentaire de l'Eau, lors de la bataille d'Ydra, fit-il en observant le colosse.

-À côté d'elle, j'ai fait office d'enfant de chœur, rit Sakhar.

-Vous êtes pourtant d'une force exceptionnelle. Et vous avez déjà une alliée de poids, avec la Reine Lubilla.

-Il a payé de sa personne, lança Silna avec un air moqueur.

-Eh, oh ! Tu m'avais donné ton feu vert, je te signale !

-Oh, ça va ! riposta la deuxième femme en levant les yeux au ciel. Taisez-vous ou je vous crame le cul à tous les deux ! Espèces d'amoureux, va.

-Ta gueule, Iris !

-Elle veut quoi la maigrichonne ? Se mesurer à moi ?

L'air devint presque électrique entre les deux. Bouche bée, le Grand Prêtre considéra ces femmes. L'eau du bassin commençait à léviter, tandis que les bougies flambaient plus fort.

-Vos gueules, les filles ! s'exclama Sakhar.

-Toi, le grand dadais, tu...

-Par tous les dieux ! s'exclama le Prêtre en se redressant brusquement, manquant renverser sa chaise. Vous êtes toutes les deux des Élémentaires !?

Sakhar soupira. Confuses, les deux andouilles qui étaient censées rester discrètes grimacèrent. C'était parti pour une grosse explication et un serment de se la fermer. Sinon il finirait le cul rôti avant de se retrouver noyé en plein désert.

En vérité, l'homme de foi n'avait pas réellement besoin de faire un serment. Il était tellement sidéré de se retrouver face à trois Elémentaires d'un seul coup, dont la célèbre Prêtresse de l'Eau, qu'il était prêt à tout pour rentrer dans leurs bonnes grâces. Car selon lui, son dieu était grand, pour lui avoir permis de rencontrer ces personnes d'exception en ce jour des Jeux du Sable.

Autant dire que Sakhar, l'ancien esclave devenu ami avec deux autres Elémentaires, était pour lui un élu unique en son genre. Un élu qui allait soudain résoudre tous les problèmes dans Ghania.

-Nous devons commencer par une cérémonie qui officialisera votre liberté et votre position au sein des Premiers Croyants. Nous sommes plus nombreux que vous croyez. Et...

-... Vous avez un lien certain avec les rebelles, acheva Sakhar avec un sourire en coin. Ne vous en faites pas, moi aussi.

Il était temps de reprendre contact avec tonton Sakhil.

*

Plus tard dans la nuit, Ravish regarda une dernière fois Savinha, paisiblement endormie dans l'un des lits du Temple de l'Apparition. Ils n'avaient pas revu son frère depuis la fin des Jeux, mais des prêtres étaient venus les trouver, lui et la famille de Sakhar, pour leur offrir un copieux repas et un lit pour la nuit.

Néanmoins, il commençait à s'inquiéter. Il n'avait toujours pas de nouvelles.

Sortant discrètement de la chambre, il avisa les longs couloirs aux couleurs claires. Des torches brulaient aux murs, éclairant les lieux. Bon. Les Élémentaires étaient censés avoir une chambre dans le coin aussi. Toutefois, il n'avait entendu aucune porte se fermer depuis leur arrivée. À pas de loups, il se faufila plus loin dans le Temple. Il n'y avait pas âme qui vive à cette heure-ci. Pas de garde, pas de prêtre, rien. C'était... paisible ?

Oui, c'était bien le terme.

Le Temple de l'Apparition était paisible. Il était bien loin du modèle de celui de la capitale, où tout était accès sur la souffrance des Elémentaires et sur le symbole phallique de Tarco. Ici, il pouvait voir des plantes de partout, de la vie de partout. Des petits plans d'eau propres, de la fraicheur, un aspect apaisant en dépit de l'absence de monde. Comme si le dieu enveloppait les lieux de sa bienveillance.

Si tel était le cas, pourquoi avait-il abandonné Maissana ?

Finalement, il ne trouva pas à temps le bureau du Grand Prêtre. Par contre, il tomba sur un visage familier au détour d'un couloir. Il allait pour pousser un juron lorsqu'un bras se retrouva en travers de sa gorge. Projeté contre le mur, Ravish vit la pointe d'une dague se précipiter vers sa carotide.

Sa main rencontra le poignet armé, faisant dévier l'arme vers le mur. De l'autre côté, il saisit le service trois-pièces de son agresseur et serra si fort qu'il lâcha sa lame avec un bruit douloureux.

-Salut Alivène. Désolé de te casser les couilles, mais ce n'est pas une façon de dire bonsoir.

Contre toute attente, le soldat d'Ydra lui donna un coup de tête. Il relâcha ses attributs en l'insultant. Il allait pour se remettre en position lorsqu'il vit Alivéne avec une autre arme, prêt à la lui planter dans le cœur.

Du moins, c'est ce qu'il aurait probablement fait si une forme rectangulaire n'avait pas jailli du mur, pour percuter l'ydrasien avec une telle force qu'il rebondit sur celui d'en face, à moitié sonné. La colonne retourna dans sa paroi d'origine, livrant la vision d'un Sakhar particulièrement moqueur.

-Alors mon petit Ravish, on se ramollit ?

-Tu frimes parce que tu as gagné les Jeux, Sakhounet ?

Ce surnom le prit par surprise, le faisant éclater de rire. Cet élan de gaieté ne l'empêcha pas d'attraper le soldat d'Ydra par le dos de sa tunique, pour le soulever du sol telle une poupée de chiffon et le lever jusqu'à son visage.

-Je peux savoir pourquoi tu tentes de tuer mon pote, Alivène ?

Encore sonné, il adressa un regard bleu haineux à Sakhar, qui le considérait comme un maitre le ferait avec un chiot fautif. D'ailleurs, il haussa un sourcil, dans l'attente d'une réponse.

-Tu as osé enlever la Prêtresse de...

La main de l'Élémentaire le bâillonna, tandis que Ravish levait les yeux au ciel. Mais quel abruti, cet Alivéne !

Ni une ni deux, Sakhar le pris en poids comme un paquet, pour partir en sprint dans les couloirs, suivit de son ami. Comme le premier ne savait pas encore où était sa chambre, Ravish le conduisit dans la sienne, où Savinha se réveilla en sursaut quand on jeta ledit paquet sur le lit.

-C'est quoi ce bordel !? rugit-elle, le drap plaqué contre sa poitrine.

Sur quoi son frère jeta un coup d'œil mauvais à l'ancien soldat du roi. Ce dernier lui fit un sourire contrit en levant les mains.

-De toutes les chambres disponibles, pourquoi je me retrouve dans celle de ma sœur à poil !?

-Parce que c'est aussi la mienne.

Mauvaise réponse.

Sakhar lui aurait dévissé la tête si Alivéne n'avait pas fait mine de se saisir de sa sœur... qui décocha une droite à l'importun, puis une seconde, avant de le jeter au bas du lit avec un coup de pied.

-Vous avez intérêt à vous expliquer ! éructa-t-elle pour les deux autres.

-Ce débile à essayer de tuer ton homme, s'empressa d'expliquer l'Élémentaire. Mais il a failli dire une bêtise alors on a dû le planquer le plus vite possible !

-Tu as enlevé la Prêtresse de l'Eau !

-Mais la ferme ! s'exclama Ravish. Tu n'as toujours pas compris, espèce d'abruti !?

À moitié par terre, Alivène allait répliquer lorsque la porte s'ouvrit à la volée sur Iris, qui haussa un sourcil en voyant tout ce monde.

-On organise une orgie et on ne m'invite pas ?

-C'est ma sœur, bordel ! s'exclama Sakhar.

-Tu n'es pas obligée de la toucher elle, ronronna la Mercenaire en glissant une main sur son torse.

Très clairement, le cerveau de l'Élémentaire s'enraya. Les yeux ronds, il considéra Iris, avant de pâlir en découvrant Silna juste derrière elle.

-Tu peux sauter qui tu veux, mais pas Iris, déclara-t-elle. Tiens ? Salut Alivéne. Qu'est-ce que tu fiches ici ?

-Et vous, qu'est-ce que vous faites ici !? rétorqua Ravish en refermant la porte derrière elles.

-Vous faites un raffut de tous les diables, lança Iris en se rapprochant du soldat d'Ydra. Alors c'est toi, l'amant de Silna ? Tu as plutôt une belle gueule.

Cela eut l'effet d'une bombe. La Prêtresse de l'Eau dut sauter sur Sakhar avant qu'il n'atteigne Alivéne, tandis qu'Iris éclatait de rire... Et qu'un tremblement de terre secouait tout le Temple. Merde !

-Tout le monde dehors ! rugit Ravish. Iris, Savinha, Alivéne ! On dégage !

Ils se retrouvèrent soudain tous à l'extérieur, dont une nue enroulée dans un drap, tandis qu'une dispute éclatait à l'intérieur de la chambre. Silencieux, ils se considérèrent tous les quatre.

-Je peux savoir pourquoi tu as fait ça, Iris !? râla Ravish.

-Pour voir la réaction de notre petit Elémentaire de la Terre. Il ne m'a pas déçu.

-Tu es une grande folasse.

-Une folasse que tu as baisée, que je sache, rétorqua-t-elle avec un grand sourire.

Fermant les yeux, il pria pour que Savinha n'ait rien entendu.

-Bordel !

Elle avait entendu.

-Que tu ais couché avec elle est une chose, Ravish, mais j'aimerais bien que cette garce arrête de se vanter devant moi !

-Attends, je...

-Je ne me vante pas, je constate, c'est tout.

-Tu n'as rien à constater du tout !

-Les filles, calmez-vous ! On a un autre problème à...

-Ta gueule, Ravish ! le jeta Savinha, avant de revenir sur l'Élémentaire goguenarde. Tu es insupportable, Iris ! Tu te crois tout permis !

-Tu dis ça parce que tu as un sentiment d'insécurité, ma jolie ?

-Je ne suis pas...

Iris prit soudain le menton de la jeune femme entre ses mains, pour l'embrasser sous le nez de Ravish ! Estomaqué, ce dernier regarda les deux tour à tour, tandis qu'un baiser langoureux bien plus long qu'attendu était échangé. Quand l'Élémentaire quitta les lèvres de sa victime, elle affichait un sourire plein d'assurance.

-Dis-moi, ma petite Savinha... Que dis-tu de vérifier si tu as raison d'être si peu sure de toi ?

Le rouge aux joues, la jeune fille de Tirhn avait les paupières mi-closes.

-Je...

-Qu'en penses-tu, Ravish ? susurra Iris en lui adressant un coup d'œil torride. On a besoin d'un juge... participatif.

Autant dire que dans l'histoire, tout le monde avait oublié Alivéne.

*

-Tu n'as pas le droit d'être jaloux ! explosa Silna en agitant un doigt furieux sous le nez de Sakhar. Je n'ai rien dit quand tu as couché avec quatre ou cinq filles en même temps ni même quand tu t'es tapé Lubilla !

-Je n'y peux rien ! éructa-t-il. Le simple fait de savoir qu'il t'a touché... Ça me... Ça me dégoute !

-Ah je te dégoute, maintenant !?

L'eau de la carafe, sur la table de la chambre, commençait à s'élever dans les airs, tandis que des secousses agitaient toute la ville de Mokha. Mais ça, ni l'un ni l'autre ne le percevaient.

-Je n'ai jamais dit ça !

-Si tu l'as dis !

-Je me suis mal exprimé !

-Alors tu voulais dire quoi, tête de nœud !? Que savoir que je ne suis plus vierge ne te donne plus envie de me toucher !? Espèce de faux cul arriéré !

-Mais je n'ai pas dit que je ne voulais pas te toucher !

-C'est ce que tu sous-entends !

Mais comment en étaient-ils arrivés là !? Il se souvenait à peine d'Alivéne et de la remarque fracassante d'Iris. Là, tout de suite, il avait un problème plus urgent à régler. Silna et son air meurtrier.

-C'est le fait de savoir qu'un autre homme peut te toucher ! J'ai envie de le massacrer !

-Tu es jaloux !

-Évidemment que je suis jaloux ! Je tiens à toi Silna ! Bordel, avec tout ce qu'on a traversé ensemble je ne vois même pas comment tu peux en douter !

-Comment diable pourrais-je ne pas douter, alors que l'on est quasiment jamais seuls tous les deux, hein !? Nous n'avons aucune relation réelle, Sakhar, alors oui, je suis perdue face à toi et je ne sais ni quoi faire, ni quoi penser !

Soudain, la colère s'était évanouie, pour révéler une fragilité émotionnelle qui décontenança totalement l'Élémentaire. Debout face à ce petit bout de femme aux pouvoirs titanesque à l'air triste, il ne savait plus quoi faire. Alors, il la prit dans ses bras.

Elle ne devait pas s'attendre à cela, car elle resta un moment immobile contre lui, jusqu'à ce qu'il lui embrasse doucement les cheveux. Alors, avec un soupir de soudaine décontraction, elle passa ses bras autour de sa taille, pour se serrer contre lui. Après toutes les émotions des dernières heures, des derniers jours, même, ce moment de tendresse apaisa soudain leur cœur.

Néanmoins, le regard de Sakhar se posa sur le lit, où Ravish avait couché avec sa sœur peu de temps auparavant. Il plissa les paupières avant de dire :

-Ce n'est pas notre chambre. Viens.

La prenant par la main, il la guida vers leurs appartements. Comment le savait-il ? Son nom avait été marqué à la craie sur la porte. Une fois à l'intérieur, il se retrouva de nouveau seul avec Silna. Il ne devait pas stresser. Pas angoisser. Surtout pas.

Bloquant toutes les pensées négatives sur son propre passé qui menaçaient de le submerger, il embrassa doucement la Prêtresse. Se dressant sur la pointe des pieds pour lui éviter d'être trop plié en deux, elle glissa les mains dans ses cheveux... Quand elle se détacha brutalement de lui. La seconde suivante, une vague d'eau percutait de plein fouet Sakhar, qui s'écrasa sur une chaise dans la pièce. Cette dernière céda sous son poids, lui faisant frapper le coccyx par terre. Bon sang, il était indestructible, mais ça faisait mal, quand même !

-Ça va pas la tête !? s'exclama-t-il, outré...

... Jusqu'à ce qu'il voit le poignard planté dans le mur, à l'endroit exact où se trouvait sa tête un instant plus tôt. Ça aurait rebondi sur sa peau, mais Silna avait probablement réagi par réflexe en l'expulsant de la trajectoire.

-Je vais te tuer, gronda-t-elle, les yeux rivés sur Alivéne, debout sur le lit.

Alivéne !? Mais il n'était pas censé être avec les autres lui ? Et comment il avait fait pour trouver la chambre ? Ah oui, le nom sur la porte.

-Prêtresse, j'ai fait cela pour vous protéger, déclara le soldat d'Ydra en portant une main à son cœur, avant de s'incliner devant elle.

-Tu as fait ça par jalousie. Ça se voit, quand même, que j'étais volontaire !

Alivéne regarda Sakhar toujours avachi sur ses restes de chaises, avant de revenir sur son Élémentaire.

-Ce n'était pas évident.

-Ça m'apprendra à sauver ta Cité et le cul de cet ingrat, râla Sakhar en se relevant avec un soupir dépité. Bon, Alivéne, je crois que c'est clair, je n'ai pas enlevé Silna. C'est bien la raison de ta présence ici, non ?

-Oh bon sang, gémit Silna en levant les yeux au ciel. Je n'avais pas prévu ça ! C'est Lubilla qui t'envoie, c'est ça ? Parce que j'ai disparu environ au moment où Sakhar a été ramené de force à Maïssana ?

Les mains dans le dos, toujours sur le lit comme pour le condamner, il hocha la tête de façon tout à fait militaire.

-Effectivement ma Reine. Tous les soupçons se portaient sur lui.

Le « lui » fut prononcé avec une telle haine que la jalousie sous-jacente fut évidente, même pour le chien de guerre. Décidément, cette fin de soirée était vraiment sur ce thème ! S'en suivirent des explications. Alivéne leur fit un rapport sur son enquête, tandis que Silna et Sakhar lui faisaient un exposé sur leur propre situation.

-Vous avez tué Wokabi ? fit-il avec étonnement. J'aurais cru que vous voudriez la faire souffrir avant, Prêtresse.

Haussant un sourcil, l'Élémentaire de la Terre regarda Silna, qui évita soigneusement son regard avec une grimace.

-Elle est toujours vivante, sur l'aéronef d'Iris.

-Oh. Ça me parait plus logique. Heu... Donc, Prêtresse... Votre objectif est de sortir le chien de guerre de son esclavagisme ?

Elle hocha la tête.

-À vrai dire, je ne suis déjà plus un esclave, déclara Sakhar. Mais pour éviter toutes représailles sur ma famille, je dois renverser la dynastie de Chameka et la religion au pouvoir qui réduit les Élémentaires de la Terre à l'esclavage depuis des siècles.

-D'ailleurs, puisque tu es là... Dis-moi Alivéne, serais-tu enclin à accomplir une mission diplomatique pour moi ?

La réponse était évidemment oui.

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