Réprimandes et explications
Je regarde ma mère, hébété. Ais-je bien entendu ce qu'elle vient de me dire ?
- Que... quoi ? bafouillé-je.
- Allez, rentrons, le soleil se couche, gronde Oncle Will.
Perplexe, je lève les yeux : en effet, le ciel se tente d'une étrange couleur bleu nuit. Pourtant, quand j'ai pénétré dans la forêt, le soleil était à son zénith. Que s'est-il passé, enfin ? Pourquoi le temps semble t-il s'être subitement accéléré ? Et surtout...
- Pourquoi dites-vous que vous me recherchez depuis cinq heures ? Je ne me suis absenté que cinq minutes !
Personne ne prend la peine de me répondre. Je lis sur leurs visages de la colère, mêlée à de l'inquiétude. Je sens que je vais passer un sale quart d'heure, mais... je n'ai absolument rien à me reprocher.
Quand mon oncle claque la porte d'entrée derrière lui et m'ordonne de m'assoir sur la canapé, j'obéis. Sa tête est rouge écrevisse, on dirait qu'il sur le point d'exploser. Quand à mes parents... ma mère, les cheveux en bataille, les joues roses et le regard sévère, me lance des éclairs de ses yeux. Mon père, lui, semble surtout inquiet, mais soulagé à la fois - sûrement parce qu'ils viennent de me retrouver. Maman s'accroupit devant moi, les mains jointes devant sa bouche. Au bout de quelques minutes de silence gênant, elle me pose enfin la question que je redoutais tant :
- Bon. Où étais-tu pendant ces cinq heures ?
- Tu as fugué à cause de l'épisode à table, ce midi ? renchérit mon père sans me laisser le temps de répondre.
Je me tourne vers Oncle Will, redoutant également une réaction, mais il n'ose même pas me regarder dans les yeux. Je reporte mon attention sur mes parents, qui attendent impatiemment une réponse crédible. Mais je ne peux que leur dire la vérité :
- Je vous l'ai dit : je ne suis parti que cinq minutes ! Cinq heures ? C'est impossible, je m'en serais rendu compte.
Ma mère lance un coup d'oeil à mon père : on dirait qu'ils me prennent pour un fou. Je continue, en espérant que ça m'aidera :
- Je... écoutez : je ne sais pas ce qu'il s'est passé, mais je peux vous assurer que je suis sorti dehors pas plus de cinq minutes. Quand j'ai entendu tes appels, maman, je me suis précipité vers vous.
- Tu as dû t'évanouir, propose mon père, déjà un peu plus calme. Sinon, comment expliques-tu que tu ne te souviennes pas avoir passé cinq heures hors de la maison ?
Je réfléchis. Après quelques fouilles dans mes récents souvenirs, je leur assure que je suis resté conscient. Ma mère, à ce moment, soupire. Elle me regarde droit dans les yeux :
- Passons cet épisode, de combien de temps tu es sorti... tu dis cinq minutes, nous cinq heures... on comprend bien que tu veux nous mentir pour nous cacher quelque chose...
- Non ! m'écrié-je. Je ne vous mens pas, je suis sincère !
Nouveau soupir.
- Si tu le dis..., répond papa, peu convaincu. Mais ce que l'on aimerait savoir, c'est pourquoi tu es sorti, et sans nous prévenir en plus !
J'ouvre la bouche pour répondre, mais je ne suis plus très sûr de vouloir dire la vérité, cette fois-ci. J'ai vu quelqu'un. J'ai voulu rattraper cette personne alors qu'elle s'enfuyait. En y repensant, je me dis que mon geste était vraiment insensé. C'est vrai : pourquoi ais-je fait ça ? Sur le coup, je me rappelle avoir eu une sorte de poussée d'adrénaline qui m'a, en quelque sorte, forcé à la suivre. Mais si je raconte ça à ma famille, ils vont me prendre pour un cinglé. Alors je m'inspire de l'épisode qui s'est passé juste avant pour modeler mon mensonge :
- Tu sais, l'écureuil, qui était sur le rebord de ma fenêtre, commencé-je en me tournant vers mon père (au moins, j'ai un témoin) eh bien, il s'est enfui à travers bois et j'ai voulu...
- D'accord, me coupe mon paternel d'un ton sarcastique, donc tu es en train de nous dire que tu as poursuivi une saleté de bestiole pendant cinq heures ?
- Pas pendant cinq heures, mais cinq...
C'est à mon tour de pousser un gros soupir. Il ne sert à rien de continuer à dire que mon temps de sorti se comptait en minutes. Je continue donc de raconter mes bobards :
- Je suppose que vous aviez raison : j'ai dû perdre connaissance et je suis resté dans les vapes pendant pas mal de temps, vu que je n'ai quasiment rien avalé à midi...
Une pause. Le temps de guetter leurs réactions... en vain.
- ... désolé.
Mes parents se consignent du regard, tandis que mon Oncle Will reste impassible. Finalement, ma mère prend la parole :
- File dans ta chambre. On reviendra te voir pour ta punition.
Sans broncher, je m'exécute.
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