Qui es-tu ?

Enfermé dans ma chambre, j'ouvre en grand ma fenêtre et respire un bon coup. Je n'ai plus faim. Au diable la super soupe de maman, elle m'a coupé l'appétit. Pourquoi faut-il que les adultes agissent ainsi envers les adolescents ? Certains disent qu'on ne comprend pas les grandes personnes, d'autres le contraire. Je pense que c'est un peu des deux. Mais le pire dans tout ça, c'est que je déteste me disputer avec ma mère, car ça arrive très rarement. Et encore, aujourd'hui, ce n'était rien : un jour on s'est embrouillé pour je ne sais plus quoi et nous avons tous les deux finit en larmes - la colère et la tristesse, sûrement. En général, quand un conflit familial éclate, il y a les phrases typiques des parents : "L'adolescence, c'est la période la plus difficile de la vie - Arrête de te croire grand, tu n'es encore qu'un enfant - Tant que tu resteras sous mon toit, c'est moi qui commande." Et celles des ados : "Vivement que je me tire de cette baraque de merde - Arrête m'man, tu me fais honte, là ! - Vous me faites tous chier !" Etc... etc...

- Kriii... Kriii...

Je relève la tête. C'était quoi, ce bruit ?

- Eh... salut, toi.

Oui, je viens de saluer un écureuil. Aussi improbable que cela puisse paraître, c'est la première fois que j'en vois un. C'est tout aussi étonnant de le voir là, perché sur le rebord de ma fenêtre. Il a un joli pelage roux, des yeux noirs dont la forme et la couleur sont égales à une bille et un petit museau remuant. Alors que je me demande ce qu'il fait ici, j'ai la réponse ; la forêt, évidemment. Je suis sûr que ce n'est pas le seul animal rodant dans les parages.

- Toi, je ne sais pas ce que tu viens faire là, mais je te conseille de partir sur-le-champ. J'ai pas envie que tu ramènes tout tes petits camarades, l'informé-je.

Devant son air adorable, je tends doucement la main et, à mon grand étonnement, il s'avance d'un pas hésitant et se laisse caresser, comme un animal domestique. Il est si doux, on dirait une peluche.

- Horace ? Mais à qui parles-tu ?

- Ah... papa.

Il vient d'entrer dans ma chambre et me regarde comme si j'avais perdu la boule.

- Non, c'est juste un écureuil.

- Et, euh... tu lui parles ? insiste t-il en s'approchant.

- C'est juste comme ça, pour déconner, le rassuré-je. On n'aurait pas quelque chose à lui donner à manger ?

- Non, Horace. Pas de ça, tu le sais bien.

Je hausse les épaules et change de sujet :

- Qu'est-ce que tu veux ?

Je retire ma main et l'écureuil saute de ma fenêtre, fuyant en direction des bois en face de nous. Je regarde son petit corps s'éloigner en faisant des bons, puis il disparaît dans des buissons. Mon père me répond quelques secondes après :

- Tu sais, il ne faut pas en vouloir à ta mère pour tout à l'heure... elle ne voulait pas...

- Si, elle voulait, coupé-je. Mais je ne veux pas me prendre la tête avec ça. En fait, je m'en fiche. Je ne boude pas comme un gamin de cinq ans pendant des heures ; ça me tracasse deux, trois minutes, puis j'oublie. C'est plus facile comme ça.

Papa hausse les épaules et s'en va. J'entends la porte se refermer derrière moi alors je tourne la tête pour le voir partir. J'attrape mon livre et m'assois sur le rebord de ma fenêtre, mais à ce moment, un bruit entre les arbres retient mon attention. Je lève la tête, pensant que c'était l'écureuil qui revenait, mais non. Soudain, je vois une paire d'yeux curieux se lever vers moi. Quand la personne croise mon regard, elle quitte sa cachette et s'enfuit. J'ai juste le temps de voir les pans d'une robe blanche avant de la perdre de vue. Soudain, mon estomac se contracte et une drôle de sensation m'envahit. Comme touché par une sensation irrésistible, j'enjambe ma fenêtre et m'élance à travers la forêt. Je cours pendant quelques minutes, mais d'un coup, je suis pris d'un vertige. Je tombe dans l'herbe humide et me passe une main sur le front. Je regarde autour de moi, réalisant où je me trouve. Mais qu'est-ce que je fais là ? Il y a trois secondes, j'étais dans ma chambre... j'ai vu cette personne, et...

- Horace ?

Je relève la tête ; c'est ma mère. Elle m'appelle et sa voix tremble de panique.

- Maman !

Nous nous renvoyons nos noms comme un écho jusqu'à ce que je revienne à l'orée du bois en titubant. Quand ma mère m'aperçoit, elle se jette à mon cou, prend mon visage entre ses mains et m'inspecte :

- Tu... tout va bien ? Tu n'es pas blessé ?

Je secoue la tête tandis qu'elle me serre contre elle. Mais aussi vite qu'elle est arrivée, sa peur est remplacée par la colère. Elle me repousse et ce n'est que maintenant que je me rends compte que mon père et Oncle Will sont là aussi.

- Maintenant dis-nous ! m'envoie t-elle. Qu'est-ce qu'il ne tourne pas rond chez toi ?!

J'écarquille les yeux.

- Que... quoi ? balbutié-je.

- Tu te fous de nous ? intervient papa en faisant un pas en avant. C'est tout ce que tu as à dire ! Nous étions morts d'inquiétude ! On était à deux doigts d'appeler la police !

J'écarquille les yeux de stupeur et tente de mettre un peu d'ordre dans toute cette histoire :

- Comment ça ? De quoi parlez-vous ?

Mes parents, éberlués, me fusillent du regard. Je... je ne comprends rien.

- Voilà près de cinq heures que nous te cherchons !

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