Chapitre 40 : Libération (Lucie)

Heure indéterminée, Enfer, Localisation précise non définie

Je ne voyais ni n'entendais rien, je ne pouvais que ressentir. Je ressentais son désir, sa passion, sa soif de pouvoir et de violence. Je la sentais. Elle. Cette part de moi que je ne connaissais pas, que je n'avais jamais eu envie de connaître. Pourtant elle avait toujours été là. Et en cet instant elle avait le dessus, elleavait le contrôle total de mon corps, me laissant dans le noir complet.

Je me débattis encore et encore, afin de reprendre le contrôle. Et à force de persévérance, je parvins de nouveau à voir et à entendre. C'est alors que je vis Raphaël, Marcus et Anakim debout devant moi. J'essayais, en vain, de leur montrer que j'étais toujours là, que sous cette créature j'existais.

Mais ils ne m'entendirent pas. Raphaël ne me regardait même pas, Marcus et lui étaient trop concentrés sur les démons qui les encerclaient et qui pouvaient à tout moment lancer l'assaut. Anakim quant à lui me regardait fixement. Je voyais bien qu'il avait peur de ce que j'étais devenue.

Puis quelque chose me brûla le dos, à l'emplacement de mon tatouage. J'avais déjà ressentis cela, à l'époque où j'étais encore humaine. Une présence, inscrit au plus profond de moi, indélébile...Mon père.

Elle aussi avait tout de suite comprit, et se pencha à l'oreille de Satan pour l'en informer. Et malgré tous mes efforts, elle parvint à dire :

« Michel arrive, il vient pour sauver sa fille. Je pense que nous allons beaucoup nous amuser. Les retrouvailles entre Anakim et Michel risquent d'être... intéressantes, gloussa-t-elle de plaisir. »

Putain de merde ! Vraiment quelle poisse ! Satan balaya le plafond des yeux puis lui répondit :

« Tu as raison, mon trésor. Je pense que nous allons bien nous amuser, concéda-t-il. »

A cet instant, alors qu'elle se délectait d'avance de ce qui allait sepasser, moi j'en tremblais. Je tremblais pour mon père que je sentais tout proche, pour Raphaël et Marcus, et contre toute attente pour Anakim aussi.

J'avais peur pour ce déchu qui m'avait conduite ici, celui à cause duquel tout était arrivé. Mais il avait aimé ma mère, et avait cherché à m'aider en comprenant qui j'étais. Alors il était peut être une enflure, mais une enflure sur le chemin de la rédemption. Je ne pouvais donc plus le haïr...

« Fort bien ! tonna la voixde Satan. »

Ses lèvres s'étirèrent en un sourire carnassier.

« Tuez-les. »

***

« NON ! j'aurais voulu hurler. » Ce mot resta coincé dans magorge. Pourtant, l'espace d'une fraction de seconde, j'arrivais de nouveau à sentir mon corps et à le contrôler. Malheureusement elle reprit vite le contrôle.

La présence de mon père était plus forte et plus rayonnante que jamais. L'air changea de texture à son approche. Elle le sentit et recula pour semettre à l'abri. Autour de nous la bataille faisait rage entre les démons et les anges. Bien que Raphaël, Marcus et Anakim arrivaient à résister aux assauts des démons, je sentais qu'ils ne tiendraient pas longtemps. Je priais alors, pour que mon père se dépêche et qu'il arrive avec des renforts consééquent. Sinon ils allaient mourir.

Satan s'approcha de moi et passa un bras autour de ma taille. Il se pencha à mon oreille et me susurra :

« Allons dans une autre pièce. Michel ne devrait plus tarder.

- Tu as raison, répondit l'Autre Moi. »

Il prit sa main et nous emmena, mon Autre Moi et moi, dans une autre pièce. Il ouvrit la porte et nous la tint le temps de nous engouffrer à l'intérieur, puis il la referma. Nous étions dans la salle àmanger, ici même où je l'avais rencontré. Sur la table, tout était déjà préparé pour le repas. Ce qui me conforta dans l'idée que Satan était certain de l'identité du vainqueur des combats.

Au bout d'une vingtaine de minutes, quelque chose ou plutôt quelqu'un essaya d'emboutir la porte. Satan ne bougea pas d'un millimètre, et l'Autre Moi non plus. Lui je le sentais excité de se battre, l'Autre Moi se régalait d'avance d'assister à un duel, tandis que moi j'étais terrifiée. Terrifiée à l'idée que la personne derrière cette porte ne me croit perdue et ne décide de me tuer. Mais c'était surtout l'issue des combats qui me terrifiée.

La porte résista deux minutes aux violents assauts avant de céder, ce qui propulsa des morceaux de celle-ci à travers la pièce. Je me retrouvais également projetée à trois mètres, un débris me maintenant plaqué au sol. Je le poussais pour me relever etre marquais que mon bras saignait. Le démon qui me contrôlait, vit rouge. Quelqu'un venait de la blesser, elle, la campagne du Seigneur de l'Enfer ! La personne devait mourir pour cet affront !

Je balayais la pièce du regard pour trouver Satan, enfin c'était Elle qui le cherchait, moi je me fichais royalement de ce qui lui était arrivé. Je ne distinguais pas grand chose à cause du nuage de fumé qu'avait engendré l'explosion, mais je distinguais tout de même des ombres. J'aperçus dans ce brouillard une silhouette élancée s'approchant de moi, mais celle-ci ne correspondait pas à la corpulence de Satan. L'Autre Moi ne défaillit pas, elle préférait mourir plutôt que de faire preuve de lâcheté. Au moins nous avions cela en commun...

Au fur et à mesure que la personne avancée, je distinguais mieux ses contours, son aspect général. Puis je vis deux émeraudes briller et des cheveux mi-long et bouclés couvert de poussière. Anakim...

Il s'arrêta à ma hauteur. Et je vis alors qu'il était blessé au visage, son front était barré d'une ligne sanglante. Son tee-shirt étaittellement imprégné de sang, qu'il lui collait à la peau. C'était une vision d'horreur.

Il se pencha vers moi et m'attrapa par les épaules pour éviter que je ne m'enfuis. Mon Autre Moi resta figée, surprise, lorsqu'il planta ses yeux dans ses miens, comme pour sonder son âme, notre âme partagée.

« Je sais que tu es là, quelque part. Reprends le contrôle de ton corps, m'implora-t-il, les yeux plus brillants que jamais.

- Tu peux toujours rêver ! rétorqua-t-elle. »

La démone en moi gloussa, avant de lâcher :

« Maintenant ce corps est à moi ! A moi ! Jamais vous ne reverrez votre petite Néphilim chérie ! »

Anakim ne parut pas entendre ce qu'elle disait, car il prononça mon nom plusieurs fois. Il le psalmodiait avec douceur, comme si il essayaitde me réveiller. Elle commença à crier et à lui donner des coups de pied, essayant en vain de se dégager, obligeant Anakim à resserrer son étreinte. Ce moment était à la fois magnifique et effroyable.

La poussière créée par l'explosion commençait à se dissiper. Je vis alors Satan debout, derrière Anakim, tenant dans sa main droite une dague noire. Il ne me fallut qu'une seconde pour comprendre qu'elle particularité elle avait. Cette dague était faîte dans un matériau que l'on appelait le métal des Dieux, celui-ci agissait tel un poison sur les démons et les anges, les rendant incapable de guérir de leur blessure.

Un coup bien placé pouvait tuer un immortel. Je savais que certaine lance, dont celle de mon père, étaient forgées dans le même métal, et je l'avais déjà vu à l'œuvre lors d'un combat entre immortels. Le résultat n'était pas joli à voir...

La peur m'envahit soudain, ce qui me donna la force d'ouvrir une brèche dans la carapace qui m'écrasait et me réduisait au silence. J'eus juste le temps de crier :

« Derrière toi ! »

Anakim me lâcha et se retourna pour parer le geste de son ancien maître. Il esquiva et lui fit face en se mettant en position défensive. Ilavait l'air fatigué et me donnait l'impression de ne pas pouvoir tenir face à son adversaire. Je devais trouver un moyen de l'aider.

J'ai redoublé d'efforts pour faire lâcher prise à celle qui avait usurpée mon corps.

« Tu devrais avoir disparu ! me lança t-elle, décontenancée.

- Comme tu peux le voir je suis toujours là, et je compte bien l'être toujours ! répliquais-je.

- NON ! C'est mon corps à présent ! renchérit-elle.

- Tu n'as aucun droit sur ce corps ! grondais-je.

- Bien sûr que si, vu que c'est aussi le mien ! Tu crois être là depuis plus longtemps que moi ? Mais tu te trompes lourdement ! Je suis née en même temps que toi. Moi, ta partie démoniaque ! Et aujourd'hui je suis enfin libre ! Mon Seigneur m'a rendu la liberté ! Et je ne te laisserais pas me museler à nouveau, pas après avoir passé les soixante dernières années cloîtrée dans ton esprit, ne pouvant rien faire d'autre que d'attendre le jour où je serais enfin libre !

- Comptes là dessus ! »

J'y avais mis toutes mes forces, toute ma volonté dans cette ultime attaque psychique. Je devais impérativement reprendre le contrôle. Petit àpetit je réussis me réapproprier mes mains, les bras ainsi que lesmuscles de mon visage. Je savais que c'était risquée, mais je devais aller au bout. Je me pinçais le nez et fermais la bouche. J'étais humaine, il suffisait que je cesse de respirer pendant quelques petites minutes pour mourir.

Elle se débattit, sachant ce que j'avais en tête, pourtant je réussis à contourner ses défenses et à exécuter mon plan. « Tiens encore quelques secondes pour la faire lâcher prise. Elle va rapidement s'apercevoir que je suis prête à nous tuer toutes les deux, si elle ne me cède pas sa place, me répétais-je. »

Elle se débattit, m'obligeant à fournir un effort considérable. Je sentais la tête me tourner, mes jambes lâcher et ma cage thoracique était comme en feu. Elle était, par son entêtement, en train denous tuer. Puis à bout de force, elle cessa de résister. Elle mecéda de mauvaise grâce sa place, se rétractant comme à l'arrière plan de ma conscience.

« Ne crois pas te débarrasser de moi aussi facilement ! Je serais toujours là, quoi qu'il arrive, je t'en fais le serment ! »

Puis plus rien, elle n'était plus là. Je disposais de nouveau mon corps tout entier. « Quel bonheur ! » Je pris une grande inspiration, essayant de calmer les battements effrénés de mon cœur. Je me relevais tant bien que mal avec les jambes en coton etune migraine terrible.

Une fois stable sur mes jambes, je pus enfin me concentrer sur l'essentiel. Déjà il faisait chaud, ensuite j'entendais le vacarme des combatsqui faisaient rage dans le couloir, et pour finir Anakim et Satan se battaient à trois mètres de moi.

Anakim avait le tee-shirt en lambeaux, de nouvelles blessures avaient fleurit sur ses avant-bras et son torse. Satan lui n'avait qu'une seule petite entaille sur la joue. Cette image me paraissait prétentieuse, celle du roi s'en sortant une fois de plus indemne.

Je ne pouvais rester là à les regarder, il fallait que j'intervienne ! Seul problème, et non le moindre, j'étais humaine. Je m'avançais tout de même dans leur direction au péril de ma vie, mais mon pied butta sur quelque chose.

Je baissais les yeux et vis un débris de bois qui venait de l'explosion. Je le ramassais et prit mon courage à deux mains. Il fallait que je le fasse. Mon plan était le suivant :

- Donner un grand coup sur la tête de Satan qui, l'espace de quelques secondes, serait hors d'état de nuire.

- Convaincre Anakim que c'était bien moi, si peu qu'il en doute encore après ce que j'aurais fais.

- Ensuite aller chercher les autres et partir le plus vite possible de cet endroit.

Je prit mon courage à deux mains et m'avançais à petits pas vers eux. Je contournais la table venant me placer derrière Satan. Anakim me regardait faire du coin de l'œil, continuant d'esquiver les coups de son adversaire. Tout deux avaient la respiration saccadée et la peau moite de sueur. La victoire reviendrait au plus résistant des deux et malgré mon envie malsaine de savoir lequel s'en sortirait vivant, je décidais que pour mon bien je devais porter main forte à Anakim.

Alors que je me plantais derrière Satan, Anakim planta l'espace d'une demi-seconde son regard dans le mien, comme pour s'assurer de ce que j'allais faire. Un. Je m'avançais encore un peu. Deux. Je levais le bout de bois. TROIS. Je frappais un grand coup sur la tête du roi qui s'effondra aussitôt.

Je lâchais aussitôt mon arme et levais les mains pour bien montrer à Anakim que je ne lui voulais pas de mal.

« C'est bien moi, lui assurais-je.

- Si tu n'avais pas été toi, jamais tu n'aurais fais cela. »

Je le regardais, vérifiant qu'il ne bluffait pas et baissais les bras.

« Heureuse de l'entendre. Maintenant viens, dis-je à Anakim. Il ne faut pas traîner.

- Non, il faut finir le travail, m'arrêta t-il, alors que je me dirigeais vers la sortie.

- Ne sois pas stupide ! lui criais-je. Il nous faut sortir d'ici avant qu'il ne soit trop tard. »

Satan remuait déjà, à demi conscient. Anakim me donna quelque chose, que je reconnue ahurie : une fiole de sérum.

« Toi pars rejoindre les autres. Moi, je reste ici pour finir ce que j'ai initié, même si je dois y laisser ma peau. Cela sera mon châtiment pour tous les crimes que j'ai commis.

- Ne sois pas stupide ! Tu n'as aucune chance seul ! asseyais-je de le résonner.

- Il y a toujours une chance, renchérit- il. »

J'allais le contredire et le pousser de force à s'enfuir avec moi, mais il était trop tard, Satan se relevait déjà. Anakim eut juste le temps de parer le coup de dague de son adversaire, et déjà l'autre repartait à l'assaut. Forcée, j'ouvris la fiole et la bue d'un trait.

Je sentis immédiatement mes pouvoirs me revenir, mon tee-shirt se déchira pour laisser place à mes ailes. Je me sentis revigorée. J'étais à nouveau moi même. Et maintenant je savais très exactement ce qu'ilme restait à faire.

Je courus en direction de la table, pris l'un des couteaux et commençais le travail. Dans le bois noble je m'acharnais à dessiner une porte. Une porte qui mènerait au vide. Une porte à travers laquelle on enverrait Satan, pour que plus jamais en entendre parler.

Je me concentrais sur la possibilité d'un monde en paix, et vit apparaître la porte telle que je l'avais imaginé. Elle s'ouvrit dans un grincement qui fit redresser la tête aux deux combattants.

Je courus vers eux et attrapais Satan par derrière, mais il se dégagea en uninstant.

« Ce n'est pas possible ! hurla-t-il. Tu ne peux pas être là ! Le démon qui est en toi aurait dû t'achever !

- Je ne suis pas si facile à tuer ! répliquais-je.

- Non ! clama-t-il, le regard fou. »

Anakim fendit sur lui, le forçant à reculer. Satan fut si surpris qu'il enlâcha sa dague, que je m'empressais de rattraper au vol. Sans la dague il n'était rien. Anakim lui immobilisa les bras.

« Lucie aide moi ! me lança t-il. »

J'obtempérais et l'aidais à venir à bout de notre ennemi. Celui-ci s'égosillait et se débattait de toutes ses forces, usant et abusant de ses pouvoirs, mais rien n'y faisait. Nous étions plus forts à deux.

Plus que deux centimètres et il tomberait dans l'oubli. Il dû comprendre qu'il ne s'en sortirait pas, parce qu'il me jeta un regard implorant. Je le poussais alors dans le vide. Il ne poussa aucun cri en tombant, seuls ses yeux trahissaient ses tourments secrets et inavouables.

Puis la porte disparut dans une bourrasque de vent venu des profondeurs du monde. Je n'aurais jamais cru que cela aurait été aussi simple... Cela m'inquiétais. Avions-nous seulement vraiment réussi ?

« Prends garde à toi Lucie, Lucifer... susurra une voix dans ma tête. »

Et je m'évanouis, encore. Cela devenait vraiment une fâcheuse habitude.

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