HS

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Bonne lecture !

La nuit était tombée depuis un petit moment, lorsque Anakim sortit de son appartement. Il descendit les marches jusqu'au garage commun de l'immeuble, et prit sa moto. Si on ne connaissait pas la véritable nature d'Anakim, on aurait pu croire qu'il 'était un adolescent comme les autres beau. Mais ce n'était qu'un rôle, une feinte.

Il rejoignit la nationale pour se diriger vers le point d'eau le plus proche, la Somme. Pour entrer en Enfer rien de plus simple ! Par contre pour en sortir... Certaines légendes grecs narrait la manière dont des héros, comme Hercule, en sont ressortit vivant. Mais pour Anakim la tache ne serait pas aussi compliquée. C'était un ange déchu, autrement dit, un démon. Et comme tous les démons, il accéderait aux enfers sans trop de peine.

Il gara sa moto sur un parking, près du quartier Saint Leu où était amarré quelques barques. Un peu plus loin des jeunes à moitié saouls traversaient la route en poussant des cris d'animaux. Les bars et restaurants restaient ouverts très tard dans ce quartier, mais aucunes des personnes s'y trouvant ne l'ennuieraient. Même si ils venaient à voir ou entendre quelque chose, ils penseraient avoir hallucinés.

Devant lui, le fleuve semblait tranquille, mais il faut se méfier de l'eau qui dort, encore plus lorsque l'on n'en voit pas le fond. Anakim resta quelques minutes à contempler le reflet de la lune dans l'eau, avant de sortir de sa poche une feuille de papier pliée en quatre. Il la déplia et lu à haute voix les mots démoniaques inscrit sur le papier.

A peine eut-il prononcé la première phrase de l'incantation, que l'eau se mit à bouillonner. Un sourire se dessina peu à peu sur le visage du démon. Dans un éclair qui déchira le ciel, l'une des neuf portes de l'Enfer encore actives en France, s'ouvrit entre Anakim et l'eau. Le démon avança d'un pas en direction de la porte, puis traversa dans un bond.

En un instant, il fut propulsé dans les ténèbres les plus profondes, cependant il ne ressentit aucune peur. Il y vivait depuis tellement longtemps, que cette noirceur ne l'effrayait plus. Il connaissait par cœur ce désir de guerre, cette violence, cette haine. Lui même avait faim et soif de guerre et de pouvoir. Pourtant quelque chose en lui l'empêchait de faire plus que ça, de faire encore plus de mal. Cette chose le bloquait, une toute petite chose qu'il aurait préféré oublier et prétendre qu'elle n'eut jamais existé.

Dans le couloir qui conduisait à la salle d'audience, présidé par Satan en personne, Anakim reconnu les voix de Jalousie et Famine ; qui comme toujours se disputaient. Lorsqu'il passa devant elles, les deux démones le fusillèrent du regard. Anakim se retint de rire, il pouvait sans l'ombre d'un doute se montrer plus cruel que ces deux là. Cette haine qu'elles lui vouaient, était à la fois insignifiante et pathétique.

Dans la salle d'audience les démons de rang supérieur s'y trouvaient rassemblés : Mort, Haine, Violence, Souffrance, Guerre et Narcissisme. Lorsque Anakim entra dans la pièce, tous se retournèrent et le considérèrent avec méfiance, se qui arracha un sourire mauvais à Anakim. Il s'adossa à un mur et attendit le début de la session.

Quelques minutes plus tard, l'atmosphère déjà lourde sembla l'être encore plus. Et dans l'encadré de la porte apparut Satan, un être d'une beauté sans pareille, mais au combien mortelle.

Le Mal est toujours tentant, sinon personne ne le ferait !

Au fil des siècles et des civilisations son nom avait changé. Mais à chaque fois il représentait la même chose, le Mal, avec un M majuscule ;des ténèbres incarnés par ce jeune homme à la gueule d'ange.

Le Roi des Ténèbres avança vers son trône. Sur son passage, les démons qui habituellement ne faisaient la courbette à personne, furent obligés de s'y plier. Anakim fut le dernier devant lequel il passa. Celui-ci s'arrêta et donna une tape sur l'épaule du déchus, tout en lui adressant un rictus amusé, qu'Anakim ne comprit pas.

Une fois installé, il fit signe aux autres démons de le rejoindre. Anakim avança d'un pas prudent et s'arrêta devant son maître. Les autres s'approchèrent à leur tour. Satan claqua une fois dans ses mains et l'on vit apparaître une table ronde et des sièges à haut dossier. Les démons prirent place autour, la peur au ventre que leur souverain eu un reproche à leur faire.

Ce ne fut que lorsqu'ils furent tous installés, que Jalousie et Famine firent leur entrée. Ils saluèrent leur maître tout en se confondant en excuses, puis à leur tour prirent place.

« Quelles nouvelles m'apportez-vous ? demanda le Roi des Ténèbres.

- Aucunes, Maître. Je dois dire que c'est très calme en ce moment, déclara Mort. Seulement quelques intrusions dans mes propriétés de Russie et de Turquie. Mais cela est sans importance.

- Je ne sais pas si cela est réellement sans importance. J'en ai moi même encore trouvé deux sur mon territoire pas plus tard qu'hier, annonça Guerre.

-Seriez-vous entrain de me faire croire qu'une bande d'anges, froussards et faibles, trouvent le moyen d'entrer sur des territoires nous appartenant ? éructa Satan.

- Non, Seigneur. Mais ils ont de moins en moins peur de nous. Ils n'hésitent pas à nous provoquer et venir nous chercher jusque sur notre territoire, expliqua Famine sans cacher son inquiétude.

- C'est vrai, Seigneur. La semaine dernière un Ange Guerrier s'est introduit chez moi pour me tuer. Heureusement, je l'ai tué avant. C'est le troisième qui essaye, rien que sur un mois en temps humain, ajouta Narcissisme.

- Nous pensions que peut être, sombre Seigneur, que vous pourriez trouver une solution à nos problèmes d'anges, commenta Haine.

- Bien.Bien, soupira Satan. Et toi Anakim ? As-tu eu des problèmes avec des anges récemment ?

- Aucun Seigneur, répondit humblement celui-ci.

- Voilà ! s'écria Satan. En voilà un qui règle ses problèmes seul, sans tout le temps avoir besoin de moi ! s'énerva le souverain. J'aimerai que pour une fois vous régliez vos problèmes seul ! Est-ce trop vous demander ? »

Il eut quelques minutes de silence durant lesquelles, tous les démons, sauf Anakim, fixèrent la table, honteux. Puis Satan reprit la parole :

« Voilà bien quelque chose que je n'aurais jamais cru avoir à régler,avoua-t-il avec un rire sans joie. Je commence vraiment à me demander si vous méritez d'être assis à cette table. Alors la prochaine fois que j'ai ce genre de chose à régler. Je vous fais tous remplacer, annonça le Roi des Ténèbres avec colère. Est-ce clair ?

- Oui Seigneur ! répondirent précipitamment les démons.

- Bien ! Vous pouvez vous retirer, déclara Satan d'une voix agacée. »

Les démons se levèrent d'un bond et sortirent, très heureux de ne pas sortir de la salle d'audience avec des membres manquant. Ils quittèrent la salle d'un pas rapide pour retourner le plus vite possible sur leur territoire. Pourtant, alors qu'ils s'en allaient, un seul était resté planté au milieu de la pièce, comme si il attendait quelque chose.

Satan se leva et lui fit signe de le suivre dans l'une des salles auxiliaires. Anakim ravala sa peur, puis suivit son roi. Celui-ci entra dans une petite pièce et se vautra sur le canapé. La salle n'était éclairée que par la cheminée qui servait aussi à réchauffer la pièce. Dans la pénombre, Anakim arrivait à peine à distinguer la silhouette du souverain. Celui-ci proposa d'un geste de la main à Anakim de venir s'asseoir sur le fauteuil en face de lui. Il ne put qu'obtempérer.

« Tu es le seul de mes démons à avoir appris à réfléchir par soi-même, lâcha le souverain. Cela est peut être dû au fait que tu es un Ange de la Mort. Enfin, tu l'étais... C'est d'ailleurs ce qui m'a décidé à te donner cette mission, expliqua Satan.

- Et je vous en remercie. Votre confiance m'honore. »

Le Roi de l'Enfer pouffa de rire, ce qui vexa Anakim.

« Ne parle pas de confiance. Il n'y a pas de confiance dans la relation maître et serviteur. Il n'y a que de la peur, de l'envie tout au plus. Mais jamais, au grand jamais de confiance !

- Bien, Seigneur. Je ne prononcerai plus ce mot. »

Satan éclata de rire, et celui-ci résonna dans la pièce faisant vaciller le feu de cheminé.

« Et si nous arrêtions de rire pour enfin se concentrer sur l'essentiel. Ma future femme l'as-tu trouvé ?

- Non pas encore, avoua Anakim. »

Il crut d'abord que son Roi allait se mettre en colère, qu'il allait se prendre quelque chose à la figure, pourtant rien ne se passa.

« Te rappelles-tu la dernière fois que je t'y ai envoyé ? le questionna Satan après une minute de silence.

- Oui... répondit le déchu en contractant la mâchoire à ce souvenir.

- Je ne veux plus que cela se reproduise et que les anges viennent s'en mêler.

- Je comprends Seigneur. Mais vous devez savoir qu'une fille a tout de même retenue mon attention, commenta Anakim.

- Comment s'appelle-t-elle ? demanda Satan avec nonchalance.

- Lucie.

- Lucie, répéta-t-il comme pour s'imprégner de la saveur du prénom. Je pense que tu devrais essayer dans apprendre le plus possible sur cette fille. Si elle est vraiment l'Élue, elle deviendra mienne.

- Cela sera fait selon vos ordres et désirs.

- Cela fait des millions d'années que je la cherche. Tu sais ce que cela fait,de chercher quelqu'un qui peut se trouver n'importe où ? Les prophètes m'ont dit que je la trouverais là. Ai-je tord d'espérer ?

- Non, murmura Anakim tout en se levant. »

Il s'apprêtait à sortir lorsque Satan reprit la parole :

« D'ailleurs, une autre porte a été redécouverte. Elle se trouve dans ton secteur. Il se trouve aussi, que par une étrange coïncidence, une maison a été construite sur ce site. Et elle est justement à vendre, expliqua-t-il. »

Anakim le regarda s'en trop comprendre où il voulait en venir.

« Je veux que tu t'y installes, clarifia Satan.

- Très bien. Je m'y installerais donc, Seigneur, répondit Anakim. »

Sur ces mots, il quitta la pièce. Il traversa un dédale de couloirs,jusqu'à arriver à l'une des deux portes de transfert, puis rejoignit la surface. Dans sa tête, une multitude de plans se croisèrent. Comment se rapprocher encore plus de Lucie ?

Le vent qui fouettait son casque de moto l'empêchait de réfléchir clairement. Pourtant, une vision s'imposa à lui. L'idée qui en découla lui parut satisfaisante. Et si il l'invitait au bal d'hiver ?

***

Raphaël avait prit l'habitude de faire régulièrement des rondes la nuit depuis son arrivée sur Terre. Jusque là à part Anakim aucuns autres démons ne s'étaient manifestés. Mais cette nuit là alors qu'il retournait chez Marie après plus de deux heures passées dehors, il perçu le bruit d'une moto qui s'approchait. Instinctivement, il se cacha derrière l'un des arbres qui bordaient la rue. La moto passa à tout allure devant lui, puis disparut au coin de la rue.

Lorsqu'elle eut tourné, Raphaël sortit de sa cachette. Il avait reconnu la moto, une Harley-Davidson. La même qu'Anakim. Non, il ne l'avait pas reconnu lui, mais il était près à parier que c'était bel et bien l'ange déchu.

Durant la demi-heure qu'il lui fallut pour rentrer chez Marie, il passa au crible toutes les raisons pour lesquelles Anakim pouvait se trouver dehors à une heure aussi tardive. Deux motifs lui parurent plus logique que les autres. Soit, il s'était rendu à une de ces fêtes organisées par ces crétins de l'équipe de football, ou il revenait d'une réunion en Enfer.

La première était toute aussi logique que la seconde ! Enfin... Elle l'aurait été deux fois plus si Anakim avait été humain. De plus une réunion en Enfer était beaucoup plus dangereuse qu'une fête de lycéen. Si ces doutes venaient à être confirmés, il devrait en parler à sa coéquipière ainsi qu'aux autorités supérieurs.

Lucie... Il pensait qu'à elle du matin au soir ! Sa dépendance à la jeune femme n'avait fait qu'augmenter en devenant humain. Les sentiments qu'il avait soigneusement gardé en lui étaient remontés à la surface, le privant du libre arbitre dont il jouissait en tant qu'ange. Pour Raphaël le libre arbitre ne prenait pas en compte les sentiments, car ceux-ci opprimaient les gens.