Chapitre 12 : Le dessin d'Anakim (Lucie)

Non, il n'y a vraiment pas de quoi rire ! Ça arrive à tous le monde de se faire avoir. Mais là, je dois bien avouer avoir été bluffé par ma propre stupidité ! Me faire ridiculiser de cette manière ! Du grand art ! Si Raphaël avait été là, j'aurais reçu un lot de reproches incroyables. Vraiment, me laisser avoir par Anakim de cette façon... Un ange déchu de surcroît !

On peut dire que j'avais fais fort cette fois. Me faire avoir deux fois, en plus ! Un fois en sport, et l'autre fois en cours de français.Cette fois là j'aurais dû l'assommer pour m'avoir tiré les cheveux ! Et tout ça pour une stupide rivalité entre hommes...

Je vous le dis je ne me laisserais pas avoir une troisième fois.

***

Mon professeur de mathématiques, madame Lenbert, était vraiment quelqu'un de génial ! Tout l'inverse de ce que j'aurais pensé d'un professeur de mathématiques ! Lorsque l'on ne comprenait pas quelque chose tout de suite, elle répétait toujours de manière à essayer que l'on finisse par comprendre. Il est vrai qu'un professeur qui répète toujours la même chose, ça finit par être lassant, mais avec elle, on ne s'ennuyait jamais. Cette femme était si gentille, que parfois j'en venais à me demander si elle n'était pas un ange.

Cela peut paraître étrange, mais je m'habituais à ces heures inutiles passé à l'école. Cela me faisait rire, pour je ne sais quelle raison idiote. Un ange au lycée ! Rien que cette idée me faisait sourire. Et lorsque je ne pouvais plus me retenir, il m'arrivait d'éclater de rire en plein milieu du cours. Peu importait lequel ; mathématiques, physique-chimie, français... Je l'avais fait dans presque toutes les matières.

Dans ces moments, vraiment très stupide, Anakim qui se trouvait à côté de moi, me regardait à la fois avec incompréhension et amusement. Puis, une fois que je m'étais calmée, il penchait sa tête vers moi et me demandait ce qu'il y avait de drôle. Je lui répondais toujours avec un geste vague de la main, pour lui signifier qu'il ne comprendrait pas si je lui disais. Je ne pourrais pas lui dire de tout façon, même si je le voulais.

Cet après-midi là, nous venions de commencer un nouveau chapitre de mathématiques, et, comme le matin même nous avions disputé un match de basket plutôt fatiguant, tous les élèves y comprit moi, étions dans un état végétatif en cette dernière heure de l'après-midi.

La plupart des élèves dormaient à moitié sur leur table, ne s'occupant pas des exercices que notre professeur nous avait donné en introduction au chapitre. « Des équations simples, avait-elle dit en nous les donnant. » Simple ? Ouais, simple lorsque l'on n'a pas sept heures de cours dans les talons. Et encore !

La tête baissée sur mes exercices, je mâchouillais distraitement le bout de mon stylo plume. Alors que je regardais ma feuille sans vraiment lavoir, un bruit de stylo qui gratte sur le papier, me sortit de ma rêverie. Je tournais la tête en direction d'Anakim qui dessinait sur son cahier de brouillon. Il n'était certes pas aussi bon que moi, et je ne dis pas ça pour me valoriser, mais il y avait dans son coup de crayon quelque chose d'unique. Et je dois dire aussi que je trouvais ça un peu flippant qu'il sache aussi bien dessiner. Comme quoi, les démons ont eu aussi certains talent caché.

Son dessin représentait une petite fille assise devant une magnifique demeure. Anakim dessinait exclusivement avec crayons de bois HB, 2B, 4B et 6B qui étaient disposés devant lui. Pourtant, l'espace d'un instant, je crus entrapercevoir les couleurs qui auraient très bien pu convenir à son dessin. J'étais fasciné par la finesse de son travail et par sa beauté. On aurait pu croire que son dessin était en fait une ancienne photo en noir et blanc. C'est super bien fait. Mon travail était mêlé d'impressionniste et de douceur ; le sien avait un petit côté macabre et brutal, mais il y avait parfois des traits doux et anguleux, qui offraient une belle palette de techniques, pour un style unique et remarquable.

Le dessin en lui même me parut assez banal pour un style si fin et particulier. La petite fille représentée, était assise en tailleur, dos à la maison, ses cheveux cachant son visage, ce qui donnait à cette petite un aspect mélancolique, presque fantomatique. En regardant la scène dans son ensemble, on aurait pu croire qu'elle jouait à la poupée assise dans l'herbe, mais ce n'était pas du tout le cas. Elle tenait quelque chose dans ses mains, et je m'aperçus avec horreur que se qu'elle tenait en fait,était un couteau, qu'elle tenait la lame tournée vers elle.

Prise d'un élan d'effroi, je lâchais un petit cri, presque inaudible, auquel Anakim réagit immédiatement.

« Quoi ?me demanda-t-il, en surprenant mon regard horrifié.

- C'est ton dessin, cette petite fille... chuchotais-je. »

Il l'observa quelques secondes, puis braqua ses yeux sur moi, à nouveau sur le dessin et enfin sur moi. Il posa sa main sur son cahier et déchira précautionneusement la feuille pour ne pas abîmer le dessin et me la tendit.

« Il est pour toi, dit-il.

- Mais...voulus-je protester.

- Prends-le, insista-il en haussant légèrement la voix, attirant l'attention de notre professeur et de certains curieux. »

Madame Lenbert leva les yeux de son bureau chargé de copies, pour nous dévisager durant quelques instants avant de retourner à ses corrections d'évaluations. Les élèves qui s'étaient retournés se détournèrent pour se concentrer à nouveau sur leurs exercices. Ne pouvant refuser au risque de provoquer une esclandre, je pris le dessin qu'il me tendait. Je le posais en face de moi et le regardais.

« Qu'est-ce-qui t'as inspiré ce dessin ? le questionnais-je, sachant très bien qu'il continuait de me dévisager.

- Toi, répondit-il d'une voix dénuée de toute émotion, ce qui me fit frissonner. »

La petite fille paraissait si triste, si froide. Avais-je vraiment quelque chose a voir avec elle ? Paraissais-je si déprimée, si seule ?

« C'est l'image que tu as de moi ? le questionnais-je »

Je tournais mes yeux vers lui, incertaine. Et lorsque nos yeux se croisèrent,son visage s'illumina d'un sourire charmeur.

« Oh que oui ! répondit-il vivement.

- En quoi je lui ressemble ? murmurais-je, curieuse malgré moi. »

Il m'étudia durant quelques instants, prenant le temps de me répondre.

« Une petite princesse triste et seule, que personne ne comprends vraiment parce qu'ils ne sont pas comme toi. Je rajouterais également mélancolique ou plutôt nostalgique, je me trompes ? murmura-t-il à mon oreille. »

Je ne pus répondre à sa question, ma bouche était comme pétrifiée. Il savait qu'il venait de toucher dans le mille. Peu à peu, je retrouvais la force de bouger mes lèvres et de parler. Je décidais alors de changer de sujet.

« Tu as finis tes exercices ? lui demandais-je.

- Oui. Et toi ? fit-il en souriant, amusé par mon détournement de conversation

- Non. Je suis trop fatigué pour me prendre la tête avec ces futilités. »

Il rangea ses crayons dans sa trousse et sortit sa feuille d'exercices de son classeur et me l'a donna vivement.

« Pas besoin de t'embêter, tu as juste à demander, déclara-t-il, en me tendant la feuille. »

Je l'ai prise et commençais à recopier les équations, avec leurs développements et leurs solutions. Après avoir fini de tout recopier je repassais sa feuille à Anakim, qui l'a reprit en me gratifiant d'un clin d'œil. A cet instant je me rendis compte de ce que j'étais en train de faire. Moi une Néphilim, en train de copiner avec un ange déchu ? Sacrilège ! Il fallait se reprendre !

La cloche retentit soudain, me libérant enfin de cette interminable journée.Je glissais soigneusement, le dessin dans mon sac et me levait. Anakim passa devant moi à toute allure et sortit sans un regard pour moi. Pourtant je crus le voir esquisser l'ombre d'un sourire avant de quitter la salle.

Raphaël m'attendait à la sortie de la classe en grande conversation avec une fille, qui je crois s'appelait Sophie. Celle-ci était assez banale dans le genre pétasse. Elle en était le stéréotype même d'ailleurs : des cheveux blond cendrés et bouclés, de grands yeux bleus, une peau pâle et un corps mince, sans aucunes courbes ni rondeur ainsi qu'une poitrine qui sentait la chirurgie esthétique à plein nez. Un corps que pourtant bien des filles lui enviaient.

En gros une belle fille qui se croit la reine du monde. Pathétique. Tout comme ses tentatives veines de séduire Raphaël. Celui-ci m'avait tout l'air de souffrir le martyre. Et j'étais bien décidée à le libérer de cette torture. Je m'approchais de Raphaël, et tout d'eux arrêtèrent net leur conversation. Mon Archange préféré me décocha un sourire radieux, alors que Sophie m'adressait un sourire forcé.

« Ça va ? me demanda Raphaël, oubliant totalement Sophie.

- Oui. Et toi ? fis-je en prenant mon expression la plus charmante.

- Très bien, me dit-il, avec un clin d'œil qui n'échappa pas à Sophie.

- Tu me présente ? lui dis-je Raphaël en désignant Sophie d'un signe de la tête.

- Oui, bien sûr, fit-il comme si il avait totalement oublié sa présence. Lucie je te présente Sophie. Sophie, Lucie. Sophie est dans mon cours d'anglais, m'informa-t-il.

- Ah ! Heureuse de te rencontrer Sophie, dis-je, en lui tendant la main.

- Moi aussi,je suis heureuse de te rencontrer. Si tu savais le nombre de fois que Raphaël parle de toi, dit-elle avec une voix où perçait l'agacement et en me serrant un peu trop fort la main avant de la relâcher.

- En même temps qui ne parle pas de moi ? Je suis tellement intéressante ! lui rétorquais-je sur un ton légèrement provocateur. »

Elle partit d'un grand éclat de rire qui fit lever la tête à beaucoup de curieux qui passaient dans le couloir.

« Humour... Tu as beaucoup d'humour, fit-elle en couvrant sa bouche de sa main comme pour éviter de rire à nouveau J'espère que nous serons de grandes amies, toi et moi. Vraiment, déclara-t-elle d'une telle façon que l'espace d'une seconde j'aurais pu la croire sincère.

- Moi aussi je l'espère. Moi aussi, marmonnais-je en m'efforçant de sourire.

- Bon, je vais devoir vous laisser, dit-elle d'une voix faussement déçu. Au plaisir de te revoir, Lucie.

- Au revoir, dis-je sans me départir de mon sourire.

- Bye ! s'exclama-t-elle à l'intention de Raphaël. »

Je regardais Sophie s'éloigner, puis tourner au coin du couloir pour rejoindre l'autre côté du bâtiment. « Quelle peste ! criais-je, mentalement. »

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