Chapitre 12

J'ai attendu ce jour avec tant d'impatience ! Me voilà désormais en compagnie de ma sœur, en cette première semaine des vacances de février. C'est elle qui a proposé que nous nous rendions toutes les deux au parc d'attraction aujourd'hui. C'est vrai que la grande majorité des parcs sont fermés en hiver. Il faut dire que peu de personnes ont envie de s'y rendre en cette saison. Ma sœur et moi avons décidément des loisirs à la marge.

Le parc d'attraction est un incontournable pour nous deux. Nous adorons cela ! Il est vrai que les files d'attentes trop serrées ont parfois tendance à me mettre mal à l'aise, mais les sensations fortes finales sont la meilleure des récompenses. Une fois lancée dans le wagon, je me sens la Reine du monde. Tous comme du haut de ma fenêtre, dès que j'observe la cour. J'aime les parcs d'attractions pour l'ambiance également. Ils sont souvent si décorés qu'on se croirait dans un autre monde.

Le temps est plutôt chaleureux pour un mois de février, c'est agréable. Au début de la journée, ma grande sœur a essayé de garder mon rythme de marche, particulièrement lent pour elle. Mais très vite, elle s'est mise à accélérer, impatiente. Depuis près d'une heure, je la suis, tandis qu'elle accourt vers son attraction préférée. Margaux est tellement plus enjouée et souriante que moi ! Sa bonne humeur attire tout le monde vers elle, ce qui avait même tendance à me rendre jalouse. Peut-être toujours encore un peu.

Nous sommes pour le moins différentes toutes les deux. Seul notre physique rappelle que nous sommes sœurs : nos cheveux noir ébène, notre grande taille, notre poitrine plate, ... Je peux dire que nos passions nous rapprochent également. Nous aimons chacune lire et voyager. Petite, nous répétions vouloir nous rendre ensemble aux Etats-Unis. Margaux s'en rappelle-t-elle ? J'espère toujours pour ma part réaliser ce rêve.

Nous nous installons dans le wagon de l'attraction. Le manège s'apprête à avancer, puis s'élance à grande vitesse. Instinctivement, je m'accroche à Margaux, comme pour avoir sa protection. Elle a toujours été une grande sœur qui s'occupait beaucoup de moi. Après réflexion, je me dis que j'étais sans doute trop dépendante d'elle.

Notre tour est terminé. Ce manège est tellement rapide qu'il en devient frustrant ! Ma grande sœur cours aussitôt vers un suivant, mais je me dois de l'arrêter :

— On devrait manger, non ?

— Déjà ? Encore un dernier tour...

— Margaux !

Mon interlocutrice me fait une moue boudeuse avant de revenir vers moi. Elle est la seule personne avec laquelle j'ai le courage d'hausser parfois le ton. Dommage qu'elle se montre souvent têtue. Maintenant que l'heure de déjeuner est déclarée, nous nous installons tranquillement sur un banc. Il ne fait pas très froid, même si le temps reste frais pour manger dehors. Je profite du moindre rayon de soleil, aussi timide soit-il, pour me réchauffer. Malgré tout, je sais que mon véritable soleil restera toujours ma grande sœur.

Quand je pense à Louise qui est en guerre avec la sienne je me sens triste pour elle. Enfin, après tout, chacun a des relations différentes avec sa fratrie. J'espère tout de même que la majorité s'entendent bien entre eux. Je me sentirais si seule sans ma grande sœur !

J'ouvre mon paquet de chips et le partage avec elle. De nombreux visiteurs passent devant nous et accompagne la musique du parc dans un brouhaha strident. Pour autant, je me sens comme seule avec Margaux. Nous parlons ensemble de tout et de rien. Je lui demande ce qu'elle fait en cours. Sa réponse me semble intéressante, je pense poursuivre les mêmes études après le lycée. Nous échangeons sur nos dernières lectures également. Je ne sais pas si Théo et les autres aiment la lecture. J'espère un jour avoir le courage de leur demander.

— Au fait, Léa, comment ça se passe au collège ?

— Bien. Je passe mes récrés avec trois camarades sympas.

Je ne peux pas me permettre de les nommer "amis". Malgré tout, je sais que rien que des "camarades" suffisent à surprendre Margaux. Elle s'en étouffe presque avec son jambon-beurre.

— Ça fait plaisir que tu sois plus intégrée ! Moi qui t'ai toujours vu toute seule depuis qu'on a déménagé. Comment ils sont, tes "camarades" ?

Pourquoi dit-elle cela ? Comme s'il fallait être intégré pour être heureux. Est-ce réellement le cas ?

— D'abord, il y a Théo. C'est lui qui m'a proposé de venir avec eux. Il est vraiment gentil et calme. C'est toujours intéressant de discuter avec lui. Et puis, Hugo aussi est sympa. Il est toujours de bonne humeur, et adore cuisiner. Une fois, il nous a préparé des cookies super bon ! Et... pourquoi tu souris comme ça ?

— Oh rien ! C'est juste assez inhabituel de te voir aussi radieuse, je suis contente pour toi, petite sœur. Et sinon, comment il est ton troisième "camarade" ?

— Elle s'appelle Louise. Au début, elle me paraissait hyper prétentieuse, surtout qu'elle est plutôt belle et intelligente. Mais en fait, elle est plus gentille que je ne le pensais. Même avec toutes ses qualités, elle manque beaucoup de confiance en elle. J'aimerais tellement qu'elle croit plus en ses capacités...

— Dis, tu as l'air de bien l'aimer, cette Louise !

— Comment ça ? Oui, je l'aime bien... Enfin, normal quoi.

Je me demande ce qui amuse tant Margaux. Comme sa réaction m'a vexée, elle décide de changer de sujet. Au fil de nos paroles, je reprends goût à nos conversations d'avant. Je me rends compte qu'en fait, j'ai toujours aimé discuter.

Cette même réflexion m'est venue à l'esprit lorsque Théo m'a proposé de manger avec lui à la cantine : partager des moments avec les autres me fait du bien. Avec ma sœur, évidemment, mais d'autres aussi. En voulant me contenter de ma solitude, je me suis plongée dans une illusion, qui finalement ne me rendait pas heureuse. J'ai besoin des autres. Ma fenêtre est géniale, mais elle ne me suffit pas.

Quand j'y pense, elle ne me manque même pas aujourd'hui. Moi qui, depuis septembre, ai toujours attendu avec impatience d'y regarder à travers, j'en viens maintenant à l'oublier ! Ce n'est pas si mal de temps en temps.

Une fois notre repas terminé, nous repartons de plus belle pour une série d'attractions. A nouveau, Margaux marche plus vite que moi. Derrière elle, Je vois ses cheveux tressés se balancer de droite à gauche ; j'ai presque l'impression qu'elle sautille. Moi, j'ai plutôt tendance à garder ma chevelure détachée et la laisser libre, au gré du vent.

Le temps passe et nous ordonne de quitter le parc. Ma grande sœur a beau faire la moue, lui, il ne répond à aucun caprice. Avant de partir, nous profitons des quelques instants qu'il nous reste pour faire un tour dans une boutique. J'aime flâner dans les magasins, si bien que j'ai tendance à agacer Margaux. Qu'est-ce qu'elle est impatiente ! Bon, pour cette fois, je veille à ne pas trop traîner. Elle ne semble cependant pas très embêtée aujourd'hui.

Je passe du temps dans la boutique sans rien acheter. Je regarde simplement. La plupart des produits qui se vendent ici sont des bibelots, des jouets dont le seul objectif est d'attirer les enfants.

C'est alors que je sens une main se déposer sur mon épaule droite. Je reconnais tout de suite à qui elle appartient. Derrière moi, ma sœur pointe du doigt un adorable lapin en peluche.

— Je te l'achète ? me propose-t-elle le sourire aux lèvres.

Elle se souvient que j'adore les lapins ! Son cadeau est adorable ! Je l'accepte volontiers. Finalement, je quitte le parc d'attraction, ma sœur à mes côtés, mon lapin dans les bras, et des souvenirs pleins la tête.

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