Chapitre 19



  - Est-ce que vous désirez manger quelque chose ?

Farah quitta sa longue torpeur avec un peu de mal et se tourna vers Isobel. Une semaine venait tout juste de s'achever et Farah désirait un moment de paix.

- J'ai une faim de loup...

Sa réponse fut brève accompagnée d'un léger soupir qui aiguisa la curiosité d'Isobel.

- Qu'avez-vous Farah ? Vous sembler perdue dans vos songes.

Farah attendit qu'elle soit assez proche d'elle pour poser sa main sur son avant-bras.

- S'il te plaît Isobel, j'aimerais que l'on passe au tutoiement.

Celle-ci lui sourit en pressant sa main dans la sienne.

Farah ôta son voile pourpre qu'elle avait mis plus tôt dans la journée pour recevoir des dirigeants hautement symbolique pour Saïd et se passa une main sur ses cheveux.

- Alors ? Est-ce que tu veux me parler ?

Farah hésita à lui répondre, lèvres pincées.

- Le cheikh me rend heureuses.

Isobel éclata de rire...un rire si fort que Farah préféra se cacher le visage pour échapper à son amusement. Cette déclaration si belle soit-elle renfermer quelque chose de plus douloureux.

- Eh bien ? Quel est le problème Farah ? N'est-ce pas une merveilleuse nouvelle ?

- Si ça l'est ! Mais est-ce que c'est possible que je me trompe ? Est-ce que...tout ceci est-il sincère ? Est-ce que le cheikh fait-il tout ceci pour que l'année s'achève et...

- Je pense que toutes ses questions sont dues au stress de ta nouvelle vie mon enfant, la coupa-t-elle en lui souriant.

Farah se dressa sur le fauteuil gagnée par l'espoir.

- Tu le penses sincèrement ?

- Je le pense sincèrement, affirma Isobel en lui servant une tasse de thé ; J'ai vu cet homme détruire le cœur d'une guerre avec un regard et une détermination effrayante. Mais l'homme que tu vois est le même à l'exception qu'il te montre son côté doux, rassurant et protecteur.

Farah inspira imperceptiblement, le regard empreint de peur et de joie mêlées.

- Tu n'as pas reçu l'amour que tu méritais Farah et je pense que c'est pour cette raison que tu te montres si réservée avec les sentiments qui te sont offert.

Farah releva lentement les yeux vers Isobel en refusant d'admettre qu'elle avait raison. Une partie d'elle voulait s'ouvrir à Saïd et une autre lui disait d'être prudente devant cet homme si aimant avec elle.

- Est-ce la façon dont les choses se sont passé qui te font craindre qu'il n'est pas sincère ?

Pour gagner du temps Farah trempa ses lèvres dans son thé avant de reposer la tasse dans sa coupelle.

- N'importe quelle femme aurait eu des doutes non ? Saïd m'a probablement sauvé la vie le jour où il m'a retrouvé mais...je n'étais pas préparé à une telle demande.

Isobel semblait comprendre ce qui la chagrinait tant.

- Mais sans Saïd, ton avenir aurait été désastreux.

Cette remarqua lui fit l'effet d'une gifle si bien qu'elle baissa les yeux.

- Je le sais, s'entendit-elle murmurer.

- Donne-lui une chance, ajouta Isobel en lui prenant la main.

Luttant contre un accès de larmes, Farah prit conscience de l'énorme soutient que lui donnait Isobel.

- Merci d'être là, tu es un énorme soutient pour moi.

Isobel lui caressa la joue avec une tendresse toute particulière.

Leur moment fut soudain coupé par un bruit de porte. Saïd émergea du couloir et son regard se braqua immédiatement dans le sien. Très vite, son cœur se mit à battre contre sa poitrine. Saïd dégageait une telle force qu'il suffisait que sa présence apparaisse pour que le silence s'impose. Il portait un tee-shirt noir révélant des muscles bronzés ainsi qu'un pantalon gris foncé.

- Isobel, pouvez-vous me laisser seul avec ma femme, ordonna-t-il sans même la regarder.

- Bien-sûr votre altesse.

Farah jeta un rapide coup d'œil en direction d'Isobel puis reporta son attention vers Saïd. Ce dernier portait un masque impénétrable. Difficile pour elle de décrire une quelconque émotion même la plus insignifiante.

- Tu désires me parler ? S'enquit Farah en nouant ses mains sur ses genoux.

Il se rapprocha lentement d'elle et vint s'installer sur le canapé.

- Tu as été remarquable tout à l'heure, commença-t-il en esquissant un faible sourire ; Tu as laissé d'excellentes impressions.

- Mais ? S'enquit Farah en sachant que cette vague de compliments cachait une faille.

Il reprit un air sérieux voire mécontent.

- Mais tes sourires forcés me laissent perplexe et agacé Farah.

Alors il l'avait remarqué, songea-t-elle en baissant précipitamment les yeux sur ses mains serrées.

- Qu'as-tu ? Parle-moi avant que la folie s'empare de moi.

Farah confronta son regard fissuré par l'impatience qui commençait peu à peu à le gagner.

- Je n'ai rien de grave, murmura Farah en secouant de la tête frénétiquement ; Toutes ces sorties officielles m'ont épuisé. Il se leva bruyamment puis vint poser ses mains sur les accoudoirs. L'étau resserré, Farah déglutit péniblement se souvenant des paroles d'Isobel. Ce n'était plus le mari doux qu'elle avait devant les yeux mais le guerrier implacable.

- Je comprends mais je ne suis pas dupe Farah, tu donnes l'image d'une épouse malheureuse.

- C'est faux Saïd, j'étais juste en proie à des songes et...

- J'aimerais que tu me partages tes songes.

Farah ouvrit la bouche mais aucun son ne trouva la force de sortir. Les lèvres sèches, elle dévia son regard légèrement sur la droite puis la gauche.

- Si tu ne fais pas un pas vers moi on ne peut pas y arriver.

- Je suis hantée par des myriades de questions, avoua-t-elle en soutenant son regard.

- Et je pense que j'ai répondu à tes questions Farah, répondit Saïd avec un calme qui le surprit lui-même.

Farah était en proie à la peur. Il n'avait guère besoin d'être voyant pour clairement comprendre les maux qui la tenaillaient tant.

Si elle s'ouvrait difficilement à lui, Saïd lutterait en vers et contre tout pour lui prouver que ces barrières étaient inutiles.

- Oui je sais, soupira-t-elle en se passant une main dans les cheveux.

- Alors pourquoi persistes-tu à croire que je suis...

- Je ne persiste pas Saïd, je suis seulement en proie à la panique. Tu vas peut-être trouver ceci dramatique mais je n'ai jamais été aimée, je n'ai jamais goûté à l'affection que tu me donnes alors...pour moi c'est presque anormal.

Saïd fronça des sourcils pour masquer sa fureur.

- Je ne me battrait pas contre des fantômes Farah, déclara Saïd en prenant soins d'être doux ; Parce que pour moi, ton oncle et sa famille n'existent plus.

Il lut dans les yeux de sa femme une immense tristesse s'emparer d'elle et qu'elle n'essayait pas de refouler.

- Je ne suis pas ton oncle, je suis ton mari, ajouta-t-il fermement ; Les sentiments que j'éprouve à ton égard ne sont pas une comédie pour prouver à mon peuple que je suis heureux.

- Mais ce mariage est tout de même une décision prise pour ton peuple, laissa-t-elle tomber en sondant son regard au sien ; Ce n'est pas un choix sentimental Saïd mais un choix pour ton peuple.

Saïd se redressa, rembrunit par l'aspect désastreux qu'il lui avait laissé de leur mariage.

- Si cette décision était seulement pour mon peuple crois-tu sincèrement que j'aurais signé un contrat stipulant que je te laissais partir dans le cas où je ne te rendrais pas heureuse ?

- Non, bien-sûr que non, murmura-t-elle en se levant lentement.

- Si une autre femme avait été à ta place crois-moi Farah, je n'aurais même pas fait l'effort de l'emmener en lune de miel.

Voyant les forces qui vibraient dans la voix de son mari, Farah comprit que son passé faisait front à son présent mettant en péril son mariage.

Oui son mariage, répéta-t-elle dans son esprit. Saïd semblait sincère et loyal...deux qualités qu'elle ne pouvait nier. Seulement, une question brûlait trop son esprit pour la garder secrète.

- Et si je tombe enceinte ?

L'homme resta de marbre, impassible mais sans le savoir ses yeux brillaient d'une importante lueur.

- C'est impossible, je suis un homme prévoyant, j'ai pris la décision d'avoir un enfant seulement après cette année. Nous aurons un enfant l'année prochaine ma chérie pas avant.

La force et la fermeté de son discours la fit vaciller. Il prit son visage en coupe les mâchoires serrées.

- Est-ce que c'est une preuve assez suffisante pour toi habibti ?

- Oui elle l'est et je ne peux pas remettre ton discours question seulement...tu ne t'es pas protégé le soir où...

Il relâcha son visage doucement.

- Je sais, mais toi si habibti c'était largement suffisant comme protection.

Farah fronça des sourcils avant de comprendre. Elle cilla, affolée par sa réaction qui pourrait naître de sa réponse.

- Saïd, je ne prends pas la pilule..

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