Chapitre 3

Cher journal,

Aujourd'hui, c'est comme d'habitude.

Je ne suis pas calme, je ne suis pas agitée. Je suis simplement... En fait, je ne sais pas comment je suis.

Je ne sais pas ce que je ressens.

Vois-tu, en moi, mes émotions se font la guerre. Il y a de la peine, de la déception, de la colère, et aussi un petit peu de joie. Je ne pourrais pas te dire d'où elle vient, car je l'ignore moi-même.

Comme me l'a fait remarquer mon ancienne psy, si je ne veux pas dire ce que je ressens, alors il faut que je l'exprime d'une autre manière. Je vais l'écrire. Je vais essayer de mettre des mots dessus. Et je l'écris ici, car je sais que toi tu ne me jugeras pas.

En moi, il y a de la peine, car je sais que mes parents se font énormément de soucis pour moi, pour mon intégration à l'école. Je sais qu'ils veulent que j'aie des amis, mais je n'y arriverai pas.

La déception est là parce que je ne pourrai pas les rendre fiers de moi. Je ne pourrai pas revenir, dans une semaine, et leur dire que j'ai adoré ça, que je veux y retourner. Non, ça sera au-dessus de mes forces. Ça va les décevoir.

Je suis en colère contre moi, contre ma famille, contre tout le monde en fait. Je me déteste de ne pas faire plus d'efforts pour réussir à m'intégrer, de ne pas accepter de voir une psy. J'en ai marre que mes parents ne comprennent pas que depuis deux ans plus rien ne va dans ma vie. Ils pensent qu'il faut juste que j'oublie et tout ira mieux. Sauf que je ne peux pas oublier ! Même si je le voulais, je ne pourrai pas. C'est gravé dans ma mémoire, et ça le sera pour toujours.

Mais au fond, il y a cette petite étincelle de joie qui est là et qui me permet de ne pas craquer, de ne pas me jeter dans l'océan et de me laisser emporter par les vagues. C'est grâce à elle que je tiens. Je ne sais pas d'où elle sort, peut-être parce que je suis assise au bord de la plage, un goût salé sur la langue, le vent marin s'emmêlant dans mes cheveux ? Peut-être que c'est l'excitation d'aller chercher mes fournitures scolaires dans un autre pays ? Ou peut-être simplement qu'elle est là, car elle ne m'a jamais quittée, même si j'ai souvent pensé le contraire ? Peut-être qu'elle a toujours été dans mon cœur et qu'elle ne s'y délogera pas ? Qui sait, c'est sans doute elle qui me permettra de rester en vie, qui me permettra de vieillir, de fonder une famille et peut-être de délivrer un jour ma langue et ce secret ?

Quoi qu'il en soit, je tiens à cette étincelle qui me permet de ne pas me détacher de ce monde, de subir toutes les remarques de mes parents me disant ce que je dois faire.

Aujourd'hui, je dois aller chercher mes fournitures scolaires pour faire ma rentrée. Je ne connais pas les choses à la mode chez les jeunes de mon âge... de quelles couleurs devraient être mes classeurs ? Et ma trousse, devrait-elle être unie ou avec des motifs ?

Je ne me sens pas bien rien qu'à l'idée de l'école.

Mais je vais devoir m'y faire, jamais mes parents ne me laisseront rester à la maison.

Peut-être que je devrais me jeter d'un pont en revenant ? Au moins, je serais débarrassé de cette idée d'école.

Mais je suppose que ce n'est pas une solution envisageable ?

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