Lorsque j'ouvre les yeux, le plafond est blanc. Celui des casiers est rouge. La deuxième chose que je remarque, c'est Noah et Jules assis au pied du lit en train de discuter. Je ne saisis pas leurs propos, mais ils s'arrêtent nets en voyant que je suis réveillée.

Je me redresse et remarque que je suis allongée sur un lit, dans une petite pièce. Les deux garçons se rapprochent se moi.

— Lessy ! Tu nous as fait une de ses peurs ! Tu t'es évanouie d'un coup, comme ça !

Je m'en souviens. Yan. Comment est-ce que je le connaissait. Le drame.

Les larmes coulent sur mes joues.

— Lessy, ça va ? Que se passe-t-il ? A-t-on dit quelque chose qu'il ne fallait pas ?

Oui, ils ont posé les questions qu'il ne fallait pas. Oui, ils veulent savoir mon passé. Mais je ne peux leur dire. Ils ne pourront pas comprendre. Ils vont me détester. Mais ils l'apprendront un jour ou l'autre...

Je cherche un crayon et du papier du regard, mais soudainement, la porte s'ouvre sur une intervenante de l'école.

— Hum... Excusez-moi, vous êtes attendu sur le parking de l'école par la mère de Nathan Cardinal. Il s'est réveillé à l'hôpital.

Sans un mot de plus, nous sortons à toute allure de la pièce et fonçons jusqu'au parking.

Dans ma tête, mes pensées virevoltent, elles partent dans tous les sens, apeurés et excitées. Il est réveillé. Il est sauvé. Nathan.

Sur le parking, une voiture blanche nous attend. A l'intérieur, une dame nous fait signe de monter et nous nous empressons d'attacher nos ceintures. Le voyage est silencieux, seul le bruit du moteur rompt la pesanteur et la pression qui s'est installé.

- Il est réveillé depuis une heure, les médecins ont dit qu'il était sauvé. Son père et moi nous sommes dits que vous seriez heureux d'être prévenu, mais que si on le faisait, il faudrait vous emmener le voir. On a donc négocier avec vos parents pour qu'ils motivent votre absence.

Noah hoche la tête sans répondre. Aucun de nous n'a le courage de prononcer un seul mot, de peur que ce ne soit qu'un rêve, que nous nous réveillons à l'école, dans la salle d'infirmerie. En fait, est-ce que je délire à cause de ma chute ? Je me pince pour vérifier, mais la douleur est bien présente.

Les jambes tremblantes, j'ai soudainement chaud, et en même temps, froid. Est-ce qu'il me reconnaitra ? Est-il blessé ?

En pénétrant dans l'hôpital, des souvenirs jaillir des tréfonds de ma mémoire. J'y ai passé un bout de temps, mais pas pour les mêmes raisons. Tandis que Nathan est tombé des rochers, je suis tombée de haut en vivant ce rêve bien réel, Yan au-dessus de moi. Je me souviens encore des étoiles brillants dans ses yeux, de ses dents qui mordaient sa lèvre, et sa bouche s'écrasant sur la mienne, sa langue s'enroulant autour de ma langue, et soudain, le moment où tout a basculé. Le moment où je me suis rendu compte que je ne le connaissait pas aussi bien que je le pensais.

- Lessy, ça vas-tu ? Tu viens ?

Je hoche la tête et avance à leur suite. Mes pas sont lourds, mon sang résonne à mes oreilles. Le trajet vers sa chambre parait durer une heure. Je n'ai jamais eu aussi chaud. Ont-ils mis le chauffage à fond ? Y a-t-il un incendie en train de se déclencher ? Non ! Tout sauf ça.

Ma peur viscérale. Le feu. Ma phobie. Que des souvenirs qui m'ont toujours suivi et qui continuent encore aujourd'hui à me hanter.

Lorsque la porte de la chambre s'ouvre, je ne pense plus qu'à lui, allongé sur ce lit. Il est immobile et fixe le plafond, les mains croisées sur son ventre. Quand il entend la porte s'ouvrir, il tourne la tête vers nous et sourit. Il est crispé. Son regard s'attarde plus longtemps sur moi. Je retiens ma respiration.

- Vous êtes venus ! s'exclame-t-il.

- Beh oui, on allait pas continuer les cours alors qu'on vient d'apprendre que t'es réveillé ! réplique Jules.

- On exceptera le fait qu'on était pas en cours, mais ouais, rit Noah en donnant une tape dans le dos de Nathan.

- Ah bon ? Vous séchiez ? s'étonne Nathan. C'est pas votre genre pourtant.

- Nan, on était à l'infirmerie, Lessy a fait... un malaise, hésite Noah en me jetant un regard en coin.

Immédiatement, Nathan s'inquiète pour moi. Ses sourcils se froncent, ses yeux s'ouvrent grands, il se redresse sur un coude et m'observe de haut en bas essayant probablement de savoir si je suis blessée quelque part. Je lui adresse un sourire qui, j'espère, ne ressemble pas à une grimace.

- Lessy, ça vas-tu ? Tu te sens bien ?

Je hoche la tête, une boule en travers de la gorge.

- Elle connait Yan, dit soudainement Jules.

Les trois garçons me regardent, Nathan avec un air surpris, mais en même temps, pas tant que ça. Il a l'air de le savoir... Yan lui aurait-il parlé de moi ? Derrière moi, un hoquet de surprise se fait entendre. Je me retourne et découvre les parents de Nathan, me fixant. Son père fronce les sourcils, comme s'il tentait de lire en moi. Sa mère a la main sur la bouche et les yeux ronds.

- Lessy Madidet, l'ex de Yan ? murmure l'homme.