"Pour toi"
Horror était assis à la grande table du salon, un petit couteau à la main, il sculptait un morceau de bois. C'était une activité qu'il faisait régulièrement dans son univers pour penser à autre chose que sa faim et qu'il avait continué à faire une fois chez Nightmare.
Ce dernier était assis à cette même table avant même que le cannibale n'arrive, il lisait un livre. Le noiraud leva cependant la tête en entend le bruit de raclement de la lame sur le bois tendre et regarda Horror, il allait lui demander d'aller faire ça ailleurs mais s'arrêta en voyant ce qu'il faisait. Ses mouvements étaient fins et précis. Nightmare avait toujours été fasciné par ce genre de travail minutieux, quand il était petit il regardait toujours les artisans du village travailler, du moins il essayait, puisqu'il se faisait souvent chasser comme un vulgaire chien errant. Dream avait le droit de rester, lui, et il lui racontait toujours comment c'était pour que Nightmare ne soit pas tenu trop à l'écart, mais celui-ci voulait voir, pas simplement entendre le protocole, il voulait être là pendant la création. Il voulait voir lui aussi, il voulait avoir l'occasion de poser des questions, d'apprendre un peu, peut-être même d'essayer ?
Il regardait alors en douce, se cachant entre des poubelles, sous une grande cape pour ne pas être reconnu, mais il était souvent démasqué alors il partait et retournait au grand arbre qui lui servait de maison, s'asseyait entre les racines et attendait que son frère rentre et lui raconte tout ce qu'il avait encore loupé et qu'il lui dise que ce serait vraiment bien qu'il vienne voir un jour, que ça pourrait lui plaire et que ça ferait plaisir aux artisans de le voir, parce qu'il était un gardien alors tout le monde serait heureux de le connaître, ce n'était pas comme s'ils allaient le chasser après tout, quelle ridicule idée, n'est-ce pas ? Ridicule crainte infondée qu'on le rejette, et puis peut-être qu'il ne serait pas repoussé s'il passait plus de temps au village, c'était peut-être de sa faute finalement, pourquoi ne faisait-il pas comme son frère ? Pourquoi ne faisait-il pas d'efforts ? Lui était aimé de tous, c'était bien pour une raison !
Nightmare fut coupé dans ses pensées sombres par un mouvement en face de lui: Horror venait de poser sa sculpture miniature devant le noiraud, un petit renard.
- Pour toi. Fit le cannibale.
Nightmare releva la tête vers lui avec confusion, ne semblant pas comprendre ce que Horror voulait dire.
- Comment ça "pour toi" ? Demanda-t-il.
- Cadeau.
Horror n'était pas du genre à faire de longues phrases, il préférait être bref et clair. Nightmare semblait surpris.
- Pourquoi ?
- Tu regardais. J'en ai pas besoin. Garde le.
Le squelette de mucus ne sut pas quoi répondre, mis à part son frère on ne lui avait jamais fait de cadeaux, à tel point qu'il pensait qu'il ne les méritait simplement pas, alors le fait qu'Horror lui offre quelque chose simplement car il le regardait le touchait énormément. Il aurait pu en pleurer s'il avait été seul.
- Merci, j'en prendrai soin... sourit-il en prenant la sculpture dans ses mains pour la voir de plus près.
Horror sortit un nouveau morceau de bois de sa poche.
- Tu veux regarder ?
Nightmare leva le regard avant de hocher la tête en poussant son livre sur le côté pour admirer le travail de son acolyte.
Sur la table de nuit du noiraud s'accumulaient les petits animaux en bois, Horror ne voyant pas l'intérêt de tous les garder il les lui offrait, il l'avait d'ailleurs fait pleuré une fois. Nightmare chérissait ces sculptures, c'était comme si chaque morceau de bois soignait un peu l'enfant à l'intérieur de lui, il pouvait enfin regarder, toucher, poser des questions et avoir des réponses, Horror lui avait même fait essayer un jour.
Il aimait beaucoup ces moments qu'ils partageaient, et au fils du temps il commença également à partager des moments avec Killer et Dust: Killer fabriquait toute sorte de pochettes et sacs en cuire et Dust nettoyait des os qu'il trouvait dehors, des activités toutes différentes que Nightmare aimait plus que tout regarder. Il était heureux de pouvoir les voir à l'œuvre, et il l'était encore plus quand il obtenait une petite création en cadeau.
Il les gardait toutes dans une armoire en verre afin qu'il puisse les regarder sans qu'elles ne prennent la poussière. Elles étaient ce qu'il avait de plus chère en ce monde.
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