8› je prierai pour qu'un jour tu vois

9 DÉCEMBRE

- Attends, répète ?

- Quoi ?

- Répète pour voir.

- Je disais juste que ton splash était disons... Assez conséquent. La vie est belle aussi tu trouves pas ?

- ...

- Ah ! J'en ai dans les yeux !

- Petite nature.

- C'était du bluff, tu n'as même pas réussi à m'atteindre.

- Je vais te noyer.

- Mais oui.

- Je t'aurais prévenu !

- Non !

- Les crabes c'est sous l'eau !

- ...

- ...

- Ah ! Tu as de la force c'est dingue ! J'étais au moins à deux doigts de me noyer. Attends, t'es où ?

- La ferme et je suis là, je sors.

- Quoi, déjà ? Ça commençait juste à être fun.

- Fun, sérieusement ? Qui dit ça de nos jours ?

- Moi, au moins. Ça fait nuf à l'envers.

- Et alors ?

- J'aime bien.

- Putain mais t'es vraiment taré. Et ça n'a rien à voir avec la lune.

- En parlant de la lune, regarde son reflet sur l'eau, c'est pas magnifique ça ? Quand je te disais que c'était un paysage à la Monet.

- Ouais, super. Et en quoi ça m'aidera à sécher ?

- Tu finiras par sécher. Mais ça peut être la dernière fois que tu vois un paysage aussi beau de ta vie.

- Mais c'est hyper glauque ce que tu me dis.

- C'est histoire de te rappeler qu'il faut profiter du moment présent, psychologie positive, ce genre de trucs.

- C'est pas positif mais oui, c'est vrai. Demain, je pourrais me faire écraser par une voiture. Donc si j'en avais quelque chose à foutre de la lune, je devrais sûrement en profiter.

- Et tu le ferais ?

- Non. Et est-ce que tu fais semblant de pas avoir froid ? Parce que tu es mille fois cramé, je vois tes lèvres trembler d'ici.

- J'essayais de prétendre que j'avais pas froid pour affirmer mes capacités physiques de résistance mais quelque chose me dit que j'ai échoué.

- Tu as échoué, c'est clair.

- ...

- Putain, j'y crois pas il est 22h30 ! Eh écarte-toi tu vas m'en mettre partout, laisse-moi sécher.

- 22h30 ? Oh, je vais me faire engueuler.

- Tiens, voyez vous ça, le Jean-Charles emploie un mot un peu familier ! Dis-moi coco on se lâche ce soir !

- Et t'as pas tout vu. Des fois je vais même jusqu'à dire "merde" quand je suis énervé.

- T'es pas sérieux.

- Si, putain de merde.

- Oh mon Dieu, j'y crois pas ! Tu l'as dit !

- Ça m'a erraflé la gorge !

- Pauvre chou !

- Plus jamais je reparle comme toi. C'est trop... D'émotions.

- T'inquiète pas, ça ira. Tu es un grand garçon, hein, Zach ?

- ...

- Sourire sincère.

- Sourire sincère ?

- Tu as souri sincèrement à l'instant. Quand tu souris sincèrement, tu as une sorte de fossette un peu moche qui apparaît en dessous de ta bouche, du côté gauche.

- C'est juste que tu me fais rire ! Et c'est vrai, tu es observatrice.

- Tu viens juste d'avouer ces longues heures à tenter un sourire décent devant ton miroir.

- ...

- ...

- Je viens de le refaire, pas vrai ?

- Exactement.

- Non, je ne souris pas comme ça, le miroir me l'a dit. Tu imites hyper mal !

- Les gens sous-estiment constamment mes talents.

- Et puis c'est faux, cette fossette n'est pas laide. Je lui trouve un petit truc personnellement. Du genre charmant ou beau si on se place de ton point de vue.

- Bah écoute, c'est bien de réussir à s'aimer soi-même.

- Des fois, j'y arrive. Avant jamais. Mais maintenant, j'ai accepté le fait que je devrais garder mes mollets de coq et mes tablettes inexistantes toute ma vie et c'est plus facile.

- C'est super.

- C'est super que je sois aussi musclé qu'une petite fille de sept ans ?

- Mais non. Le fait que tu t'acceptes comme tu es. Et puis tu exagères, tes bras sont vachement musclés. Sincèrement.

- C'est vrai qu'ils le sont. Je suis canon.

- Tellement que je tiens plus place. Sinon ce banc fait mal au cul, non ?

- On peut pas continuer de parler de combien je suis sexy ?

- Le sujet est épuisé depuis longtemps.

- C'était un peu facile. Tu préfères qu'on parle de ton charme alors ?

- Oh ça y est tu reviens à cette histoire de charme pourri. Sujet épuisé aussi.

- Non. Et c'est ça qui est génial avec le charme. Son infinité. Il est inépuisable, on pourrait en parler toute la soirée parce qu'il y a toujours des choses à découvrir et à redécouvrir, même des détails. Le charme n'est pas immuable et c'est ça que j'apprécie tant, ce qui explique pourquoi j'en parle aussi souvent. Et pour revenir à ce que tu disais, oui, ce banc fait super mal aux fesses.

- ...

- Quoi ? J'ai une algue sur la tête ?

- Il n'y a pas d'algues ici, imbécile de crabe.

- Ah ouais, c'est vrai. Une traînée de morve alors ?

- Mais - ah, putain non ! C'est juste carrément dingue comment tu vas loin. Est-ce que tu prends... Est-ce que tu prends des trucs ?

- Des trucs ?

- Enfin tu sais quoi.

- Tu me demandes si je me drogue ?

- Plus ou moins, ouais. Les joints comptent aussi, pas mal de gens ont l'air de l'oublier mais le canabis c'est rien d'autre que de la drogue.

- La réponse est non. Tu trouves que c'est insensé ce que je dis ? Parce que les gens drogués disent un tas de choses insensées, j'ai déjà vu ça.

- Ou alors au contraire ils disent des choses parfaitement sensées. Genre ce qu'ils avaient jamais eu les couilles de dire avant et que la barrière de l'inconscient n'a pas réussi à retenir sous l'effet de la drogue. Et c'est comme ça que la vérité surgit.

- ...

- Mais toi, ce que tu dis est sensé, et dans le bon sens. T'inquiète pas.

- Je suis heureux de l'entendre. Ce que tu dis aussi est sensé, Ana. Tu devrais parler sérieusement plus souvent.

- ...

- Tu lèves les yeux au ciel pour tenter de dissimuler un sourire sincère. Je te vois.

- Arrête. Toutes ces niaiseries me donnent envie de gerber.

- C'est ce que tu dis. Tes fossettes au milieu des joues par contre, elles, ne sont pas du tout de cet avis !

- La ferme ! Pour la peine, j'y vais !

- En fuyant la vérité tu ne fais que confirmer mon intuition !

- Je suis trop loin, je t'entends plus !

- N'essaie pas d'ignorer le doux timbre de ma voix et la douloureuse vérité qu'elle transporte !

- Pourrie bien sur ce banc et tais-toi !

- Passe une bonne soirée toi aussi, à demain !

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