10› ne disparais pas

11 DÉCEMBRE


- Mais de rien, tout le plaisir était pour moi.

- ...

- Et toi, Ana ? Tu as rencontré combien de bouches gluantes dans ta vie ?

- Est-ce que tu sais que si je ne te connaissais pas, je pourrais facilement croire que c'est une manière absolument pas subtile de me demander si je suis célibataire ?

- Peut-être que c'est le cas.

- Non. Parce que je sais très bien que tout ce qui t'intéresses, c'est les détails dégueux.

- C'est un sacré bonus, c'est sûr.

- Eh bien laisse moi te dire que tu vas être déçu. Déjà, je ne suis pas aussi bizarre que toi et la vérité c'est que je n'ai vraiment embrassé qu'une seule personne de toute ma vie.

- OK, ça veut dire que tu es en couple, j'aurais misérablement échoué si j'essayais de te subtiliser ton numéro. Comment s'appelle cette enflure ?

- Je ne sais même pas.

- Attends, quoi ?

- Tais-toi et laisse-moi m'expliquer d'accord ?

- OK, je la ferme.

- Merci. Alors je disais, je n'ai embrassé qu'une seule personne et ça remonte à genre un an. Ouais, un an, à l'anniversaire d'une fille avec qui je traînais avant. Elle voulait absolument que j'embrasse quelqu'un alors elle a organisé un de ces jeux de gamins à la con et elle m'a mis la pression pour y participer. En y repensant, j'aurais dû lui dire d'aller se faire foutre mais voilà, les choses étaient différentes avant. Bref, le gars était grand, j'ai galéré à atteindre sa bouche et en plus d'être très pressant, je peux t'assurer que malgré mon manque d'expérience en matière de baisers, il embrassait vraiment hyper mal. Je me souviens encore de la sensation et - ah! ça me donne des frissons. Depuis ce jour, j'ai jamais embrassé personne et voir des gens se rouler une pelle - même à cinquante mètres - me donne envie de gerber... Voilà, tu sais tout maintenant.

- Wow.

- Wow ?

- Wow, genre wow, c'est la première fois que tu me dis autant de choses sur toi d'un coup.

- Ouais, peu importe. Je ne vois plus ces gens de toute façon.

- Et pourquoi ?

- Parce que ce sont des cons.

- Embrasser comme un cul ne signifie pas être un con.

- Peut-être mais lui il embrassait comme un cul et c'était un con.

- Il a rien pour lui, le pauvre gars. Heureusement qu'il est plus qu'un con qui embrasse mal quand même.

- Qu'est-ce que t'en sais ? Tu ne le connais même pas !

- Parce que tu peux pas être un con sans raison comme tu ne peux pas embrasser mal sans raison. Les baisers, ça s'explique avec l'expérience et la connerie, il y a un milliard de raisons plus ou moins logiques qui la justifie. En plus c'est un con d'après toi seulement, ne le prends pas mal mais ton jugement ne fait pas de lui un con universel, il y a des gens qui le connaissent différemment. Et puis tu l'as croisé dans une situation particulière en ignorant tout de sa vie, de son état émotionnel et même de son taux d'alcoolémie. Tout ça pour dire que ouais, je crois tu portes un jugement hâtif, Ana.

- Wow.

- Wow ?

- Wow genre wow, ça faisait longtemps que je t'avais pas entendu partir loin comme ça.

- Ça t'avait manqué ?

- Ça commençait à m'inquiéter, plutôt. Mais sinon c'est bien, tu es un garçon intelligent, tu as compris que je portais des jugements hâtifs. Sauf que j'en ai strictement rien à foutre.

- Oh, t'as entendu ? Tu as dit que tu t'inquiètais pour moi ! C'est vraiment trop mignon.

- Est-ce que tu peux éviter d'employer ce mot ? Ça me gêne.

- Ça te gêne ? Oh, comme c'est chou et mimi, vraiment trop adorable.

- Je vais te vomir dessus.

- Personne ne m'a jamais vomi dessus. Ça pourrait être une expérience enrichissante.

- Ce que tu viens dire est encore plus bizarre que ce que tu dis déjà habituellement. Se prendre du vomi c'est pas enrichissant. Ça pue, c'est tout.

- Même, j'aimerais bien essayer.

- ...

- ...

- Zach ?

- Oui ?

- Est-ce que tu crois en Dieu ?

- Euh, cette question est complètement inattendue ?

- Et ?

- Surtout de ta part ! Je veux dire, on était en train de parler de vomi et toi tu sors ça ? Ça me perturbe ! Parce qu'en fait... On dirait moi.

- Ne m'insulte pas, s'il te plaît. Et je te demande pas ce que tu penses de la question, je te demande d'y répondre.

- Alors la réponse est non.

- Et où est le développement ? Tu peux pas répondre non comme ça, il faut m'expliquer pourquoi ! D'ailleurs, depuis quand tu loupes une occasion de te lancer dans tes délires philosophiques bizarres ? Ça ne te ressemble pas !

- Et toi, depuis quand tu me poses des questions existentielles ?

- Réponds à la -

- Ana, depuis quand tu es d'accord pour parler de problèmes existentiels ?

- Attends, c'est moi ou tu me fais du chantage ?

- Je ne vois pas de quoi tu parles.

- Connard !

- ...

- ...

- ...

- ... Putain, d'accord ! C'est juste que... C'est juste que me demandais si quelqu'un comme toi croyait en Dieu. Et je me suis dit aussi que comme t'es du genre à philosopher, ça pourrait m'éclairer un peu sur ce que je pense moi. Voilà.

- Donc en gros, si j'ai bien compris, tu dis que tu as envie d'écouter mon opinion sur le sujet parce je suis un être carrément génial capable de t'aider à en savoir plus sur toi-même.

- Si ça peut te faire répondre, je peux mentir et te dire que oui.

- T'inquiète, on s'est compris. Mais ça restera entre nous, promis.

- Bon, tu vas te décider à répondre, oui ou merde ?

- OK, mais on va s'asseoir sur le pont. Ça me paraît être un endroit stylé pour parler de Dieu.

- Vendu.

- Ce n'était pas un deal.

- Ta gueule.

- ...

- ...

- On se met là ?

- Pourquoi tu me poses la question comme si j'avais mon mot à dire ?

- C'est vrai, ça ! Tais-toi et assieds-toi là.

- Il manque le s'il te plaît, Zach.

- Pas grave.

- Alors là je peux t'assurer que tu ne vas pas t'en sortir comme ça, mon garçon. Souviens-toi que tu es une personne très polie ; quand tu insultes quelqu'un, tu n'oublies pas de t'excuser ensuite ; quand c'est toi qu'on insulte, tu rigoles pour ne pas vexer la personne qui t'a insulté et quand, par mégarde, tu donnes un ordre, tu te rattrapes toujours grâce à un s'il te plaît bien placé. Et si - malheur ! - tu ne fais pas tout ça, tu défonces tout simplement la première personne qui se trouve devant toi. On sait très bien que c'est quitte ou double avec toi, bonhomme, alors tu vas me faire le plaisir d'être poli parce que j'ai envie de garder mes dents ce soir.

- ... Tu veux vraiment me tuer ! Mais c'est bon, j'ai compris la leçon. Ana, tais-toi et assieds-toi là s'il te plaît.

- Et bah voilà ! Tu vois quand tu veux !

- Cela dit, sache que jamais ô grand jamais je n'oserais abîmer ce charmant visage qui est le tien.

- De toute façon tu sais très bien que tu si tu me touches, je t'explose la gueule.

- C'est aussi l'une des raisons.

- ...

- ...

- Bon, il te faut quoi de plus pour répondre à ma question ? On est sur ton pont préféré, ça pue la nature et il y a même des étoiles. Sérieusement, je vais finir par croire que tu es putain de sale gosse exigent.

-  Je sais pas, j'ai l'impression qu'il me manque quelque chose. Tu veux pas aller chercher à manger ?

- Je t'apporte chinois, on va chez moi et on baise. Ça te va ?

- ...

- Oh mon Dieu mais tu devrais voir ta tête ! Je savais qu'au fond, tu étais une petite chose prude ! Regarde-toi, on dirait un gosse à qui on explique comment on fait les bébés pour la première fois !

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