Chapitre 27
C'est le deuxième chapitre que je publie. Assure toi d'avoir lu le précédent avant de lire celui-ci !
En fin d'après-midi, une fois habillée de vêtements plus appropriés, on m'a autorisé à sortir de ma chambre à condition de marcher avec des béquilles. Ces objets de torture ne m'avaient pas manqué. Je me forçais à marcher sans elles quand personne ne faisait attention à moi, et au bout d'un moment, la douleur disparaissait presque. Mais je les gardais quand même pour ne pas m'attirer d'ennuis.
J'ai pu rejoindre les autres dans une espèce de salle commune, où je les trouve entrain de discuter, jusqu'à ce que notre arrivée les rend silencieux. Le silence gênant et leur regard m'analysant comme un intrus me donne envie de faire demi-tour et m'enfermer dans ma chambre, mais j'avance tout de même, dirigée par Kad qui avance à la même vitesse que moi si jamais je trébuche. Une fois installée, je le remercie d'un signe de tête, reposant les béquilles au dessus de la table basse. Un soupir s'échappe de mes lèvres entrouvertes.
« Merci de m'avoir soignée. Et pour votre hospitalité. Et votre bienveillance. Et votre patience, aussi, je souris, gênée par ma maladresse, avant d'inspirer profondément, Et je suis désolée pour la gêne occasionnée et, je regarde Tobby, la machine. »
« Électrocardiogramme, il corrige. »
« Ouais, ça, je racle ma gorge, les regardant tous les sept, Kad m'a dit que vous ne faites pas confiance aux autres, c'est pour ça que vous êtes aussi reculés de la ville et que, en dehors de votre cercle, personne ne sait que vous êtes là. Vous avez quand même pris le risque de me prendre en charge, sans en demander d'avantage. Merci pour tout. »
Un silence s'installe, mais leurs expressions sont un peu plus détendues. Certains me sourient même, me confortant. Jamie se racle la gorge, attirant toute l'attention.
« C'est notre devoir, en tant que docteur, de prendre en charge tout patient. Qu'il soit bon ou mauvais relève d'un autre domaine. Nous sommes destinés à sauver un être humain en passant outre la personne qu'il est. De plus, qui laisserait mourir la dernière des femmes ? »
Sa réponse me convient. Il prend en compte le fait que je suis une femme, mais le plus important reste que tout le monde mérite d'être sauvé. Cependant, cela semble logique que ma vie passe avant toutes les autres, mais c'est une idée que j'ai encore du mal à accepter.
« Maintenant que ça, c'est fait, intervient le vieil homme, On ne connait toujours pas ton prénom. »
Je fronce les sourcils, regardant Kad.
« Tu n'as rien dit ? »
Il souffle, mais le vieil homme l'interrompt.
« Il était trop occupé à menacer tout le monde pour dire quoi que ce soit d'autre. »
« Fais attention, le vieux, la situation a changé. Un mot de travers et je les mets à exécution. »
Je roule des yeux, décidant de les arrêter avant que ça n'aille plus loin.
« Je m'appelle Erin Atkins. »
« Atkins ? »
Je hoche la tête en direction de Tobby qui pose la question, plutôt confus.
« Rien de très original, dans ce pays, dit l'homme à la peau noire, On ne peut pas faire un kilomètre sans trouver un Atkins. »
Je le regarde, surprise. C'est quelque chose qui m'étonne, sachant que pour moi, nous étions les seuls à porter ce nom de famille. Peut-être que si j'avais vécu en ville, ça m'aurait paru moins étrange.
Jamie présente alors chacun d'entre eux. Les seuls qui sont écartés de notre cercle sont les deux plus jeunes. Jumaane et Dominic, si je suis bien. Ce sont les fils de Dale, et excepté la teinte de leur peau qui est plus claire, ils se ressemblent énormément. C'est la famille la plus complète que j'ai vu jusque là. Le petit semble toujours intimidé, mais l'aîné a juste l'air hostile. Peut-être qu'il n'a pas encore confiance en nous, je ne peux pas lui en vouloir.
« Tu devrais aller te reposer, dit Jamie, Nous allons bientôt commencer à préparer le dîner, et tu n'es pas d'utilité, alors retourne dans ta chambre. »
Je lui rends son sourire bienveillant, acceptant pour cette fois-ci. L'accumulation des événements s'appuie sur mes épaules, rendant le chemin pour le retour plus difficile que l'aller. Heureusement, mon accompagnateur est là pour me soutenir dans les couloirs lumineux de la clinique.
Une fois dans la chambre, je m'assois sur le lit, une jambe repliée en dessous de moi.
« Attends, dis-je à Kad avant qu'il ne s'en aille, Reste encore un peu. »
Il hésite d'abord, puis revient vers moi. Au lieu de s'asseoir, il se tient debout devant la fenêtre donnant sur une étendue d'herbe nous séparant de la forêt. Il semble pensif, comme si quelque chose ne cessait de lui revenir en mémoire. Il n'a pas l'habitude de montrer ses émotions, mais j'en ai remarqué pas mal depuis mon réveil. On dirait qu'il est trop épuisé pour avoir la force de les cacher.
« Tu as l'air fatigué. »
Il me lance un coup d'œil furtif, écarté de ses pensées, avant de se tourner de nouveau en soupirant.
« Ça va aller. Je vais mieux dormir, maintenant. »
Est-ce qu'il est fatigué au point de ne plus avoir aucun filtre ? C'est mauvais pour moi et ma capacité à rougir pour un rien.
« Est-ce que tu t'es occupé de moi au point de t'en négliger ? »
Ma voix sort comme un murmure, contre mon gré. Je me sens coupable de lui avoir infligé toute cette attente et cette aventure.
Il secoue la tête.
« L'important c'est que tu ailles mieux. »
J'ai eu l'occasion de me regarder dans le miroir. Avec beaucoup de réticence, mais je l'ai fait, et je peux le confirmer. Les blessures qui avaient du mal à cicatriser et disparaître ne sont déjà plus là, sauf quelques égratignures à peine visibles. Mes cernes se sont atténuées considérablement, et mon teint a repris de la couleur. Je ne ressemble plus à un cadavre ambulant. Mais à quel prix ? Combien d'heures de sommeil a-t-il sacrifié pour moi depuis des jours ?
Ses phalanges tapotent mon front, me faisant sursauter. Je fais une moue boudeuse en frottant la zone douloureuse, alors qu'il s'assoit à côté de moi.
« Arrête d'y penser. Je ne vais pas mourir de fatigue. »
« Tu es affaibli. »
« Pas plus que toi, alors cesse de penser à ma santé, gronde-t-il en regardant l'extérieur. »
Ses bras s'appuient sur le lit, l'empêchant de retomber en arrière et faisant contracter ses muscles qui dansent sous sa peau tâchée de noir. Ils sont devenus tellement familiers que je ne les remarque presque plus, mais je me souviens qu'au début, je voulais lui poser de tas de questions dessus. Ce que ça faisait, pourquoi il l'avait fait, comment ça fonctionnait, est-ce qu'il peut les enlever... toutes ces questions auxquelles le gamin n'aurait eu aucune réponse. Mais peut-être que Erin, si ?
Je lève doucement la main, l'approchant de son bras sans qu'il ne s'en rende compte. La pulpe de mes doigts frôle un des dessins, le faisant brusquement tourner la tête. Je recule, soucieuse.
« Ça... ça te dérange ? »
Mes épaules s'affaissent quand il secoue la tête. Je m'approche de nouveau, touchant la peau colorée du bout des doigts, sans trop appuyer. Je pensais que la texture serait différente, mais sa peau ne change pas. Les dessins ne s'effacent pas sous mes doigts, contrairement à la craie que j'utilisais quand j'étais plus jeune.
« Ils ne s'enlèvent pas ? »
Il secoue de nouveau la tête.
« Pas sans un appareil. Se faire un tatouage demande une longue réflexion. »
Pendant qu'il parle, son souffle s'écrase sur mon visage, me faisant lever les yeux. Je n'avais pas remarqué à quel point nous sommes proches, la chaleur de nos deux corps nous enveloppant.
Je baisse de nouveau les yeux, traçant distraitement le contour de ses dessins. Ou tatouages, devrais-je dire ? Avec tout ce que j'ai appris, c'est une information qui m'échappe toujours, et même si elle n'est pas si importante pour ma survie, j'aime le fait de le savoir. L'apprendre me renseigne plus de choses sur lui. Comme le fait qu'ils doivent avoir un grande importance, puisqu'il ne peut plus jamais les retirer. Comme des cicatrices.
Je souffle.
« Je suis désolée. »
Le silence retombe. Je ne peux m'empêcher de regarder mon doigt glisser sur sa peau, incapable de croiser ses yeux intenses.
« Si je n'avais pas été là, tu n'aurais pas eu autant de problèmes à gérer. Tu serais entrain d'accomplir ton rôle de bras droit ou qu'importe, mais tu ne serais pas obligé de me protéger. »
« J'ai choisi de le faire. »
La pression de mes doigts se fait plus forte contre son bras.
« Si je n'avais pas été là, des tas de choses seraient différentes. Tout le monde prend des risques par ma faute. La situation est sous contrôle pour le moment, je me bats pour que ma voix reste stable, mais on sait tous très bien que ça ne va pas le rester. »
Mes yeux sont baignés de larmes. Ma respiration est saccadée. Tout allait bien, jusqu'à ce que la réalité me frappe.
« Regarde moi. »
Je refuse.
Le virus était un poids en plus à supporter, mais maintenant que je suis guérie, je me rends compte qu'il n'est pas le problème principal.
« Regarde moi, il ordonne un peu plus fort. »
Le monde entier est le problème. Tant que je serais en vie, les hommes vont vouloir me chercher et me garder pour eux. Ils voudront se battre, et attaquer un ennemi entraîne forcément une guerre.
C'est donc ça le monde dans lequel nous vivons ? Un monde où les hommes s'entre-tuent à cause d'une femme ?
« Erin. »
Je relève brusquement mes yeux vers les siens. Sa main attrape délicatement la mienne, m'empêchant de creuser d'avantage son biceps. Le ton de sa voix a prononcé mon prénom avec une douceur que je ne pensais jamais entendre venant de lui.
Mais ce qui m'étonne le plus, c'est qu'il vient de m'appeler par mon prénom pour la toute première fois.
Ce constat fait frémir mon cœur. J'ai toujours été gamin, ou gamine, ou encore idiote, parfois imbécile.
Et là, juste devant lui, il me voit comme Erin. Alors, j'aimerais savoir : qui suis-je pour toi ?
Sa grande main lâche la mienne, venant se poser tout doucement sur le côté gauche de mon visage, presque comme s'il a peur de me blesser avec un geste trop brusque. Mon corps est instantanément attiré par le sien, s'approchant sans que je ne puisse me contrôler. Et pour être honnête, je ne veux pas le faire.
Une agréable chaleur se propage dans mon estomac quand son nez frôle le mien. Mes paupières papillonnent à notre proximité. Nous avons déjà été proche, mais c'est comme si je découvrais notre rapprochement pour la première fois. Nous n'étions jamais allés au point d'avoir nos souffles entremêlés.
Nous n'étions jamais allés au point de laisser nos lèvres se toucher.
Je ne sais plus comment réfléchir. Je ne sais plus si je dois le faire. Je ne pense plus qu'à lui. À la douceur de ses lèvres contre les miennes. À la danse qu'on mène sans relâche. À son odeur qui m'imprègne. À la chaleur de sa paume de main. À la tendresse de nos gestes.
Les problèmes n'existent plus quand il me touche.
Je ne pensais pouvoir ressentir quelque chose d'aussi fort. Comment ça a pu grandir sans que je ne le sache ? Pourquoi je ressens le besoin de m'accrocher à son t-shirt quand son autre main attrape mon visage pour approfondir notre baiser ?
J'entends mon cœur s'emballer, tellement que j'ai presque peur de mourir, ici, tout de suite, d'un bonheur intense, comme jamais je ne l'ai expérimenté.
Je suis presque triste quand il s'écarte, laissant la chaire de mes lèvres gonflées et sûrement rougie. Ses pouces caressent mes joues, frôlant le haut de mes pommettes, me poussant à ouvrir les yeux.
Je n'arrive pas à retenir mon rougissement sous son regard brûlant. Je ne sais pas si je pourrais, un jour, le regarder de nouveau sans rougir.
« Tout ira bien. »
Et sur le coup, je le crois. Il pourrait même me dire que l'herbe est bleue, je le croirais toujours.
Mais dans ce monde, baisser sa garde mène à sa propre perte.
Et nous l'avions bien compris lorsque la bâtisse s'est mise à trembler sous les grondements d'explosions.
Instantanément, mes yeux s'écarquillent. Mes pensées ne sont pas en ordre, je n'arrive pas à penser correctement. Notre proximité vient juste de se briser.
« Qu'est-ce... »
Une autre secousse me propulse hors du lit, me faisant crier de surprise. Kad m'attrape avant que je ne touche le sol, me sécurisant dans ses bras alors que les murs commencent à se craqueler tout autour de nous.
« On est attaqué. »
Ses mots sortent entre ses dents serrées, témoignant de sa colère. Mon souffle se bloque dans ma gorge. Une attaque ? Ici ? Au milieu de nul part ?
« On doit sortir de là. »
Il me relève facilement, prenant mes béquilles d'une main et enroulant son bras autour de ma taille pour me servir de support tout en avançant plus vite. Je pose mon deuxième pied par terre, grimaçant sous la douleur, mais je continue quand même. Dans ce genre de situation, je n'ai pas le droit à l'erreur.
On se retrouve dans le couloir, marchant vers une direction qui m'est inconnue.
« Où est-ce qu'on va ? »
« Par derrière. J'ai repéré une sortie de secours pendant que je traînais dans les alentours, au cas où on devrait partir en vitesse. »
« Et les autres ? demandé-je, essoufflée. »
Il secoue la tête, me tend mes béquilles, puis me porte dans ses bras sans attendre. Je m'accroche furtivement à ses épaules, surprise par son geste, mais ne dis rien. Je ne fais que le ralentir, et je ne peux rien y faire, cette fois-ci.
« On a pas le temps pour ça. Ils pourront sortir d'eux-même puisqu'ils connaissent les lieux. »
Une série de coups de feu me font sursauter et regarder par dessus son épaule. Il n'y a encore personne là où nous sommes, les tirs venaient de plus loin, mais je ne peux cesser de m'inquiéter. Que vont devenir les autres ?
Est-ce qu'ils vont mourir comme les membres de l'escouade ?
« Tu es sûr que... »
« Si je ne l'étais pas, j'y serais déjà allé, il me coupe, Si on avait une chance de survie en les aidant, je l'aurais fait. Mais trop de facteurs entrent en compte, et je ne peux pas me permettre de te laisser derrière. »
Des cris retentissent, plusieurs voix que je ne discerne pas. Une seule sort du lot, bien plus forte que toutes les autres.
« Oyez, oyez ! Nous réclamons la présence de Erin Atkins immédiatement à l'accueil. Je répète, Erin Atkins est demandée à l'accueil... »
« Merde, pas lui, grogne Kad. »
«... Si mademoiselle Atkins ne ramène pas son petit cul à l'accueil, je vais vite m'ÉNERVER ET BUTER TOUT LE MONDE. »
Son hurlement résonne contre les murs des couloirs, me faisant boucher mes oreilles. Il parle en chantant, comme si la situation l'amusait. Son rire maladif résonne dans mes oreilles alors qu'on continue d'avancer, mais sa voix ne disparaît pas. Elle continue de me suivre, encore et encore, même quand il se tait.
« Kad, qu'est-ce qu'on va faire ? murmuré-je.»
Il ne me regarde pas, fixant une porte droit devant lui. Je pourrais presque voir les rouages de son cerveau tourner à grande vitesse. Si il a un plan, je suis preneuse, parce que sortir dehors et fuir alors qu'on a, exactement, zéro véhicule, ne semble pas être suffisant.
Mais quelque chose me dit qu'il n'a pas de meilleure idée.
D'un coup de pied, il ouvre la porte. Le paysage me coupe le souffle. Pendant quelques secondes, tout ce que je vois est un ciel violacé, parsemé de quelques nuages roses imposants. Les rayons du soleil les percent d'un jet de lumière rouge-orangée, déformant la réalité en un songe.
Puis ces secondes passent, et tout ce que je vois est un groupe d'hommes que je ne connais pas. Les armes, qu'ils pointent dans notre direction, ne me donnent pas envie de les connaître. Leur tenue est composée d'uniforme sales, parsemés de tâches de sang séché et déchiré à multiples endroits. Ceux qui ont encore des cheveux sur le crâne ne les ont pas lavé depuis des mois et des mois vu l'apparence qu'ils ont. Leur peau est noircie par les immondices qu'ils ont pu commettre et leurs traits défigurés par la folie.
Je n'ai pas besoin de l'entendre pour savoir de qui il s'agit.
Les Pitbulls.
Je comprends mieux l'aversion que les gens ont pour eux.
« On l'a, dit l'un d'eux, la main portée à l'oreille. »
Personne ne bouge pendant un instant. Je regarde Kad, attendant une réaction de sa part, mais il ne bouge pas, ne dit rien, ne me regarde pas. Il reste stoïque, mais une colère s'enflamme dans le bleu de ses yeux.
L'ennemi sourit.
« Emmenez les. »
Instantanément, je me retrouve debout, les deux pieds plantés au sol et les béquilles dans une main. Les hommes chargent leur arme en s'arrêtant, visant tous, sans exception, Kad qui vient de me poser. Il lève les mains, flegmatique.
« On doit y aller, non ? »
Ils le fixent avec méfiance, s'approchant de nous, les armes toujours relevées vers nous. Ils nous indiquent d'avancer en leur tournant le dos. Je marche plus lentement, étant ralentie à cause de ma blessure, et pour une fois, je ne prétends pas pouvoir avancer sans. Mes pas sont lourds, écrasant le sol avec anticipation. Mon cœur cogne contre ma cage thoracique, à la fois à cause de la peur et du dégoût pour les ennemis, dont les regards me reluquent sans aucune gêne.
Une main me pousse l'épaule, me faisant vaciller.
« Plus vite. »
Kad bouge à côté de moi, mais je réagis la première.
« Je ne peux pas ! Tu vois pas que je suis blessée ?! »
Je tourne mon regard féroce dans sa direction. Si il y a bien une chose que je déteste, c'est qu'on me presse dans ce que je fais.
L'homme hausse les sourcils, alors que ses camarades rient. D'un geste de la main, il les fait tous taire. Sa longue barbe ébouriffée a des résidus de nourritures et de saletés, me donnant envie de vomir lorsqu'il se met à la gratter et éparpiller des restes de partout. Ses yeux vicieux me jaugent, passant sur les courbes de mon corps, alors que ses lèvres s'ouvrent pour montrer une dentition jaunâtre.
« T'as de la chance. Le chef me buterait si je te baisais tout de suite. Porte la, ordonne-t-il à Kad. »
Je m'empare du bout de ma béquille, m'apprêtant à attaquer, mais une main m'en empêche. Je remarque la mâchoire de Kad qui tressaute alors qu'il se baisse pour me porter. Il meurt d'envie d'intervenir, mais avec six hommes armés, on n'ira jamais loin. Autant rester obéissant jusqu'à trouver un moyen de s'enfuir. Et au point où nous sommes, je ne sais pas si on pourra fuir.
Nous arrivons à l'avant de la clinique, et là, les choses se compliquent. Devant nous se trouve une cinquantaine d'hommes, et des camions décorés de ce que je reconnais comme étant une tête de chien, sûrement un pitbull. Ils sont tous tournés en direction de la porte d'entrée, ce qui fait qu'ils nous voient directement lorsqu'on émerge du côté de la bâtisse.
« Voyez qui nous fait l'honneur de sa présence ! Erin Atkins, la seule et unique ! il se met à rire hystériquement, Et c'est le cas de le dire ! Venez ! Venez ! Mettez vous à côté de vos charmants amis. »
Je tourne les deux vers la direction qu'il indique. Dos à l'entrée et face à l'ennemi, sont placés nos sept alliés, agenouillés au sol, les mains derrière la tête. Non, ils sont six.
Où est Spencer ?
Ma réponse ne tarde pas à arriver lorsqu'on se positionne au centre de la ligne formée par nos alliés. Je lâche un cri, enfonçant mon visage dans le torse de Kad. Tous mes membres sont tremblants. Ma respiration est coincée dans ma gorge. Je n'arrive même pas à pleurer. Je ne peux plus regarder dans leur direction.
Sortez nous de là, je vous en supplie.
« Oh, non ! Non, non, non ! Ce n'est pas l'effet escompté, je pensais que tu allais aimer ton cadeau ! Couvrez son cadavre ! Et jetez la tête plus loin. »
Mes doigts s'accrochent à son t-shirt, essayant désespérément de supprimer l'image de mon esprit. Je l'ai sûrement imaginée. Personne ne serait assez inhumain pour le faire. Personne n'oserait faire du mal à une personne aussi adorable de Spencer. Quel monstre pourrait être aussi cruel ?
« Repose la. »
Je m'accroche plus fort à son t-shirt, secouant la tête.
« Kad, s'il-te-plait. »
« Ne rends pas les choses plus difficiles, ses yeux, pour une fois, montre autre chose que de la colère. Ils sont chagrinés par la situation, Tu sais très bien que si je pouvais, je serais déjà entrain de brûler leur cadavre. »
Je frémis alors que mes deux pieds touchent le sol. J'inspire profondément, essayant de me redonner un peu de force.
Erin, ressaisis toi.
Tu es la dernière femme au monde. Prouve leur que tu n'es pas faible. Prouve leur que tu as passé du temps à t'entraîner pour cette confrontation. Prouve leur que même seule, tu arriveras toujours à t'en sortir. Prouve leur que même si ils t'emmènent, ils n'auront jamais, jamais, le dessus sur toi.
Arrête de pleurnicher et tourne toi.
Je contracte ma mâchoire, faisant face à l'homme fou qui me détaille de ses yeux noirs. Ils sont tellement profonds que j'ai l'impression de me perdre dans un gouffre de haine et d'insanité. Il n'y a rien d'humain dans son regard, bien que son apparence est la seule qui est soignée parmi tous les autres. Ses cheveux noirs sont coupés courts, sa peau est pâle, fade, et son corps est long et fin. Et avec le large sourire mesquin qu'il affiche, je frissonne de peur. Cet homme n'a aucun désir autre que celui de faire souffrir. J'ai l'impression de regarder le mal droit dans les yeux.
« Oh, regardez moi ça, il s'approche de moi comme d'un animal, avec des pas lents et calculés, Tu es belle, le chef va t'adorer. Oh, oui ! Il va tellement t'aimer ! son sourire s'élargit dévoilant ses dents droites, Tes yeux sont époustouflants ! Plus beaux que ceux de ton gentil frère. »
Mon frère ?
Comment est-ce qu'il connait Blake ?
Il a du lire la confusion sur mon visage, puisque le sien montre de la surprise surjouée.
« Oh, dit-il en étendant le son, comprenant la situation, Tu ne le sais pas, c'est vrai. »
Il nous tourne le dos, regardant ses camarades. Il chantonne en cherchant quelqu'un du regard.
Quelqu'un que je pense très bien connaître.
« Ramenez moi cet incapable ! crie-t-il, changeant immédiatement de masque. »
La foule d'hommes armés s'écarte, me laissant croiser un regard bien trop familier.
Émeraude.
Des yeux de couleur émeraude.
Blake, mon frère, qu'as-tu encore fait ?
« Ne sois pas timide, viens, dit l'homme, reprenant une expression faussement chaleureuse, Tu es notre invité surprise ! »
Il avance le long du chemin, les poings serrés et le regard baissé vers le sol. Il a l'air de s'être battu, mais ses habits sont toujours en place. Il n'a pas de trace de sang sur lui et paraît en un seul morceau. Ses mains ne sont pas attachées et ses poignets ne montrent pas qu'il l'ait été. Sa tête reste baissée tout le long, même quand il arrive juste devant moi, aux côtés de l'inconnu qui lui tapote l'épaule.
« Tada ! Que penses-tu de ton deuxième cadeau ? Tu es plutôt gâtée comme fille ! »
Je ne lui réponds pas, fixée sur celui que j'avais toujours considéré comme mon frère. Ma chaire. Mon sang. Mon meilleur ami. Mon meilleur allié.
« Enfin, Blake, relève la tête ! Ce n'est pas la bonne manière de souhaiter joyeux anniversaire à sa petite sœur. Allez, relève la tête et dis le lui. »
Blake hésite une seconde de trop.
« Fais le ! hurle-t-il de nouveau. »
Il sursaute et obéit, relevant rapidement la tête.
« J-joyeux a-an-anniv-versaire. »
Son expression est petit à petit déformée par la peur. Nos regards sont fixés, ne bougeant plus une fois le contact fait. Sa lèvre inférieure tremble et ses yeux sont larmoyants.
Est-ce que c'est moi qui te fais cet effet, Blake ?
Est-ce que c'est le fait que ta précieuse petite sœur te regarde avec tant de haine qui te donne envie de chialer ?
Est-ce tu vois ce que je suis entrain de t'infliger dans ma tête ? C'est pour ça que tu as peur ?
« Blake nous a dit que c'était ton anniversaire alors, je n'ai pas résisté à la tentation ! Vingt ans ça se fête, non ? »
« Kad, je te le demande une dernière fois. Même si je n'ai plus de doutes, j'ai besoin de te l'entendre dire. »
Pendant que je parle, mes yeux ne se détachent pas de ceux de mon frère de sang.
« Qui a donné les plans à l'ennemi ? »
Un silence s'installe, pesant sur nos têtes, s'engouffrant dans mes poumons jusqu'à m'étouffer.
« Blake. »
J'inspire profondément, un seul et même résonnant sempiternellement dans mon crâne.
Traître.
Pendant tout ce temps.
Traître.
Alors qu'il me souriait avec tellement d'innocence.
Traître.
Il voulait ma survie seulement pour mieux me tuer.
Traître.
« Ce n'est pas toi que j'ai trahi, Eri... »
« Tu sais ce que tu es, traître ? »
Ma voix est étrangement calme. Je ne ressens même pas le besoin de crier.
Je le regarde, indifférente, s'écraser sous le poids des remords.
« Un échec. Le plus grand raté que j'ai connu de toute ma vie. Tu n'as jamais su prendre les bonnes décisions, même en étant l'homme que tu es aujourd'hui. Le frère que j'ai connu n'est pas mort : il est juste devenu la pourriture qu'il a toujours été destiné à devenir. La lâcheté est ce qui t'a toujours fait vivre, et pour ça, tu ne mérites même pas que je prononce ton prénom. »
Je me détourne de lui, le rejetant dans l'oubli. J'ignore son entière existence, parce que pour moi, il est désormais mort.
Je dirige mon regard vers l'ennemi, suivant notre échange avec de gros yeux.
« Je suppose que ce cadeau ne te plait pas non plus. Ramenez le dans le camion ! »
Mes pupilles ne vacillent pas de l'homme, dont le plaisir ne fait qu'augmenter. Finalement, il frappe des mains.
« OK, OK, trêve de bavardage. On ne vous veut aucun mal, un sourire narquois étire ses lèvres, Notre demande est simple. »
Il croise ses mains sur son torse, son expression figée dans le temps.
« Donnez nous la fille, ou on vous bute tous. »
Sa bouche forme une moue boudeuse quand personne décide à bouger. Je tente un regard vers Kad qui me le rend, un avertissement bien visible sur son visage. Je me détourne, sans plus. Les hommes sont tous chargés, de longues et terrifiantes armes pointés vers chacun d'entre nous. Même si leur apparence est négligée, leur soif de sang est bien présente. Un seul faux mouvement, et nous sommes morts. Ou plutôt, ils sont tous morts. Sauf moi.
Je regarde les côtés. Il n'y a aucune ouverture. La seule option qui s'offre à moi me tord l'estomac. C'est le seul moyen de garder tout le monde en vie.
« Levez vous, mettez vous en ligne et reculez de cinq pas. »
Confus, on se regarde sans comprendre ce qu'il essaie de faire.
« Maintenant ! »
Son hurlement pousse les autres à se relever. On obéit et quelques secondes plus tard, nous sommes tous debout, en ligne, à un mètre de lui.
« Bien, on va jouer un petit jeu. Je vais compter jusqu'à trois, et à la fin, soit tu avances, il explique en me pointant du doigt, et les autres sont libres à mon signal, soit personne ne bouge, et tout le monde meurt, il s'esclaffe, comme s'il avait dit quelque chose d'absurde, Sauf toi, bien sûr, mais tu viens quand même avec nous. On te laisse le choix. Pendant ce temps, une petite pause pour vous laisser le temps de faire vos adieux. »
Mes paupières se plissent dangereusement.
Donc, si je comprends bien, soit on me prend de force et mes alliés se font tuer, soit j'y vais de force et mes alliés survives.
Mon choix est vite fait.
Ma tête se dirige vers Kad qui a très bien compris mon intention. Je vois qu'il est réticent, qu'il refuse que j'y aille.
« Je dois le faire. »
« Attends... »
« Si tu peux trouver une solution en moins de trois secondes, alors j'attendrais, je dis d'une voix pressente, Écoute, dans les deux cas ils m'emmèneront, mais dans l'un des deux, tu es mort. J'ai besoin que tu sois vivant pour venir me sauver, d'accord ? »
Je m'approche un peu plus de lui, posant mes deux mains sur ses épaules. J'ai la terrible impression de lui faire mes adieux.
« Je me battrai le plus longtemps possible. J'attendrai autant de temps qu'il faut pour que tu viennes me sauver, je souris doucement, les larmes brouillant ma vue, J'ai confiance en toi. Je sais que tu ne m'abandonneras jamais. Alors vis, et viens me sauver, d'accord ? »
Son expression m'arrache le cœur. Je vois qu'il se sent coupable et impuissant, mais il n'aurait rien pu faire. Quoi qu'il arrive, ce jour devait arriver. Je préfère le vivre en étant consciente, plutôt que de me réveiller de mon coma dans un repère plein d'ennemis. Me réveiller et voir Kad a été un véritable pansement pour mon cœur. Et je sais qu'il reviendra.
Je le sais.
Me prenant par surprise, il attrape mon visage, s'emparant de mes lèvres pour la deuxième fois de la journée. Notre baiser est passionné, plein de promesses et de regrets. Je retiens mes larmes de justesse, les empêchant de gâcher notre étreinte. Mais ça ne sera pas la dernière.
Notre bourreau nous interrompt, commençant le début des hostilités. On se sépare, puis après un dernier regard complice, on se place cote à cote sur la ligne.
« Désolé d'interrompre les deux tourtereaux. Je pense que ça ne va pas plaire à quelqu'un ! »
Un autre rire hystérique s'échappe de ses lèvres. Il est tellement bruyant que je me retiens de couvrir mes oreilles.
« Très bien, c'est parti ! Un. »
Je n'attends pas la suite et avance d'un pas, déterminée. Il s'arrête net, un air épaté sur le visage.
« Oh, je ne m'attendais pas à tant de courage. Je suis assez déçu, je voulais en liquider un ou deux avant, il fait une moue, puis reprend une expression joyeuse, Bien ! Prenez la. »
Je ne bouge pas quand deux hommes s'approchent de moi. Ils m'attrapent par les bras, attachant mes mains derrières mon dos avec une corde, puis me tire pour que j'avance. Je grimace, ayant toujours mal à ma plaie, mais je ne peux pas m'y attarder. En passant devant l'homme, je m'arrête.
« Relâchez les, j'ordonne. »
« Ah, ouais, c'est vrai. J'oublie ma part du marché des fois. »
On me tire de force vers l'avant, me traînant presque vers le camion. Je surveille par dessus mon épaule m'assurant qu'il fait ce qu'il dit. La foule se dissipe et la plupart commencent à grimper dans les véhicules. L'homme ne bouge pas, faisant monter mon stress.
« Bon, allez, vous pouvez courir, dit-il finalement. »
Kad ne bouge pas immédiatement, me regardant toujours au loin. C'est Jamie qui vient le tirer vers l'arrière, le poussant à courir pour se réfugier, et je lui en suis reconnaissante. Mon protecteur se tourne une dernière fois pour me regarder, courant loin de moi. Je lui offre un sourire qui se veut rassurant.
Mais il est vite détruit par un rire fou.
« Et... TIREZ ! »
Et d'un coup, c'est le chaos.
Les tirs fusent, faisant voler des étincelles partout autour. Je ne vois que lumière et fumée, mon cœur battant la chamade alors que je cherche Kad.
Où est-il ?
On me pousse à l'intérieur d'un camion, m'enfonçant le plus loin possible.
« Non ! Non, non, non, non ! »
Je me bats contre eux, les poussant pour avancer et voir le champ de bataille.
Non.
Je refuse de partir sans l'avoir vu.
Je vois l'homme fou courir vers un camion, accompagné de ses alliés. Les premiers véhicules commencent à partir, emportant un nuage de poussière derrière eux. Le camion, dans lequel je suis, commence à vibrer, mais je pousse quand même pour passer. Mes yeux continuent de chercher, et enfin, je le trouve.
Je le vois au sol, face contre terre, baignant dans son propre sang.
Du sang.
« C'est impossible, je murmure. »
Mon coeur saigne avec ses plaies.
« Kad... Kad ! je crie, Kad, lève toi ! KAD ! RÉVEILLE TOI ! »
Je crie son prénom, encore, encore, et encore, inlassablement. Je le vois s'éloigner de moi, et bientôt, les champs recouvrent mon champ de vision. Son prénom meurt sur mes lèvres, tandis que mon corps s'affaisse faiblement.
C'est terminé ? Je peux me réveiller ?
C'est sûrement un cauchemar. Je suis encore entrain de rêver.
Alors pourquoi est-ce que j'ai aussi mal ?
J'ignore les bras qui s'entourent autour de moi et le torse qui se colle à mon dos. Ma profonde tristesse dépasse largement mon dégoût pour cette personne. Je n'ai même pas la force de le dégager.
« Chut, Erin, c'est fini. Je suis là. »
Au contraire, mon calvaire vient juste de commencer.
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FIN DU TOME 2
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Bon, eh bien moi je vais me réfugier, bisous !
Non, sérieusement, ne me tuez pas, c'est moi qui écris la suite je vous signale.
Je comprends ceux qui veulent me bloquer, moi-même j'ai envie de me bloquer, mais j'avais prévenu à l'avance que ça n'allait pas être tout rose.
(par contre, si l'envie vous vient de vraiment m'insulter ou défouler une vraie colère, bloquez moi à la place, parce que je le ferai juste après avoir vu votre commentaire.)
J'ai prévu cette fin depuis, genre, le tome 1. Je pouvais pas changer ça comme ça. Pour la suite des événements, il est impératif que ça se passe ainsi et pas autrement. Vous allez voir (pour ceux qui voudront toujours continuer, lol) que tout est vraiment lié, rien n'est laissé au hasard, alors, PATIENCE !
Si Erin et Kad étaient retournés à la base tranquillement, il n'y aurait pas eu de suite. Elle se serait cachée sans jamais pouvoir trouver une solution, ou même le vouloir. (Nda : j'ai écrit « seraient » au lieu de « étaient » donc je corrige mais j'ai tellement honte)
Là, puisqu'elle se fait enlever, ça ouvre une multitude de possibilités ! Faites moi confiance, pour le coup.
J'ai une bonne nouvelle et une mauvaise nouvelle.
La bonne nouvelle : Comme vous l'avez deviné, il y aura un TOME 3. Et pour ceux qui désespère, je pense que ce sera le meilleur, jusque là, mais littéralement. J'ai prévu tellement de choses prometteuses, je n'ai jamais eu autant d'idées. Les choses commencent sérieusement ici. Vous allez voir une vraie évolution d'Erin.
La mauvaise nouvelle : Je ne vais pas écrire le tome 3 de si tôt ! Attendez au moins la mi-Mai pour peut-être avoir une suite. Eh oui, j'ai une vie aussi ! J'essaierai déjà de poster l'épilogue entre temps, mais bon, je ne garanti rien.
Du coup, l'épilogue sera sous le point de vue de Blake. Vous en saurez plus sur sa trahison, comment il s'y est pris, et surtout, pourquoi.
Quant à la question fatidique : Est-ce que Kad est vraiment mort ?
Inutile de me poser cette question. Si je dis oui, vous n'avez plus de suspense, et si je dis non, c'est pareil. Donc je vous préviens encore : INUTILE DE POSER CETTE QUESTION.
Je vous aime fort, sachez le, genre vraiment beaucoup, mais je répondrai toujours en restant très floue, ou j'arrêterai simplement de répondre si ça s'éternise. J'ai vraiment besoin que vous viviez le truc à fond avec Erin. Alors pas de spoil !
Du coup, vu que je suis quand même sympathique, je vous révèle le tome 3 (je suis pas mal fière de la couverture), mais il n'y a pas encore de chapitre. Je ferais un petit debrief histoire que vous puissiez l'ajouter à votre bibliothèque et recevoir une notification quand ça arrivera. Patience, patience !
Merci pour ceux qui seront assez compréhensifs et qui auront assez de courage pour continuer. Sachez que je vous porte dans mon cœur, c'est grâce à vous que cette histoire continue de grandir.
Bisous à tous, et à bientôt dans le tome 3 !
- Apocaptic.
PS : Je mettrai une mise à jour ici quand je posterai un chapitre du tome 3.
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