K. Le destin de l'Empire - neuvième partie
Le QG officiel du BSI à la capitale était un bâtiment arrogant situé tout près du palais impérial et dominant de vastes pelouses artificielles. Aucune barrière n'en interdisait l'accès, mais aucun citoyen thrawnien n'aurait été assez stupide pour tenter d'approcher sans autorisation.
Contrairement aux apparences mais de façon assez prévisible, l'endroit n'abritait que quelques services administratifs et logistiques. Le véritable centre opérationnel du BSI se cachait sous terre; il s'agissait d'une ville de plusieurs milliers d'habitants, un repaire à l'abri des senseurs comme des orages qui avaient rendu la surface de Nirauran inhabitable pendant près d'une génération.
L'existence de ce complexe était un secret de polichinelle dans les hautes sphères de l'administration impériale, mais sa localisation restait incertaine. Varig faisait partie des rares privilégiés à y avoir été invité et à pouvoir espérer en repartir librement ensuite.
Le bureau auquel on l'avait escorté était différent de ce à quoi il s'attendait. Une grande pièce largement éclairée, avec des cloisons de bois et même une moquette. Un grand écran mural projetait un paysage de plaines verdoyantes, donnant l'illusion d'une baie vitrée.
Une longue table de réunion occupait un angle, tandis qu'un petit salon doté de fauteuils confortables était aménagé à l'opposé, un peu plus bas que le reste de la pièce. Seul le bureau surplombé par un drapeau thrawnien rappelait le statut très officiel des lieux, contredit par les pièces d'art réparties avec goût et le large meuble de bois abritant toute une collection d'alcools rares.
Finalement on se serait cru dans un appartement luxueux plutôt que dans un bureau. Une ambiance feutrée en total décalage avec la réputation impitoyable de son occupante.
-Ravie de vous revoir, lança Nina Septime avec un sourire amène, s'avançant à la rencontre de son visiteur pour lui serrer la main.
-Merci madame la directrice, répondit raidement le chevalier alors que les portes de la pièce se refermaient en coulissant.
Contrairement à son hôte, il laissait paraître sa tension, mais son interlocutrice fit mine de ne pas s'en apercevoir.
-Nina suffira. Ce n'est pas un entretien officiel. Vous pouvez même vous servir un verre si le cœur vous en dit.
Varig déclina de la tête, dérouté par son attitude et ce cadre.
Près d'une semaine s'était écoulée depuis la bataille de Terranie. Une semaine qu'il avait passé à tourner comme un lion en cage à bord du Spectre. Le front contre la SOB était englué dans une inaction de plus en plus inquiétante; plus l'attaque des pirates tardait plus elle s'annonçait terrible, et la Triplice devrait l'encaisser sans flotte digne de ce nom où qu'ils frappent. Cela gardait au moins l'Alliance à l'écart des affaires internes à l'Empire, offrant une diversion bienvenue.
Dans quelques heures, le Haut Conseil Impérial devrait se réunir, et prendre les décisions remises à plus tard. Une réception suivrait servirait à l'annoncer à tous les hauts dignitaires thrawniens d'importance, convoqués à la capitale pour l'occasion.
L'Empire entrerait alors officiellement dans une nouvelle ère. Un Empire sans Empereur.
Le chevalier aurait dû s'intéresser aux complots et aux tractations qui préparaient cet avenir en coulisse. Des mécaniques complexes s'étaient mises en marche et il détenait toujours l'exorbitant pouvoir que lui conférait son siège au Conseil. Beaucoup de gens auraient dû tenter de l'approcher pour en tirer parti tant qu'il occupait la place, mais ça n'avait pas été le cas.
La seule explication rationnelle était que Nina Septime s'était assurée que personne ne puisse directement le contacter. Et ça, Varig s'en moquait. Un autre sujet occupait toute son attention ces derniers jours: le Vaillance.
D'après les rapports, ce vaisseau de bataille avait recueillit les survivants du détachement Bravo, dont Red. Mais il avait inexplicablement disparu des radars. On l'avait signalé à au moins six endroits différents, assigné à différentes missions fictives puis méthodiquement effacé des rapports. Delta avait eu beau fouiller d'innombrables bases de données et en hacker certaines, le vaisseau semblait devenu intraçable. Le chevalier avait eu beau ordonner, menacer, personne ne semblait capable de remettre la main dessus. C'était à devenir fou; chaque piste semblait s'évaporer entre ses mains.
Le ou les responsables de ces manœuvres semblaient impossible à identifier, cachés derrière des couches administratives, des cryptages sophistiqués et des intermédiaires. Pourtant Varig avait retenu une leçon de toute ses aventures à travers l'Empire: pour retrouver quelqu'un ou quelque chose, personne n'égalait le BSI. L'inverse était aussi vrai; Nina Septime pouvait faire disparaître tout ce qu'elle voulait. Et elle l'évitait, ignorant ses appels et ses messages de plus en plus pressants.
Le chevalier en avait finalement conclu que c'était elle qui tenait Red. Et elle venait de le convoquer; alors maintenant pourquoi lui offrir un verre et faire comme si ils étaient deux bons amis? Était-ce un test, un jeu psychologique tordu?
-Où est le Vaillance? demanda-t-il sans préambule.
Malgré son ton sec, son interlocutrice continua à sourire.
-Droit au but, lâcha-t-elle. Une qualité que j'apprécie chez vous.
-Je ne suis pas d'humeur, Nina, lâcha-t-il en prononçant le prénom avec colère. Où est le Vaillance?
Il avait mit une note de menace dans sa dernière phrase. L'intéressée cessa de sourire au profit d'une moue vaguement ennuyée et fit un geste, faisant apparaître un plan de vol sur un écran fixé au mur.
-Le voici, à quelques heures de vol de la base lunaire de Nemesis, indiqua-t-elle. Vos hommes sont bien à bord mais j'ai dû faire face à une contrariété imprévue qui m'a forcée à... Momentanément faire disparaître ce vaisseau.
Varig croisa les bras.
-Quel genre de contrariétés? demanda-t-il sèchement.
-Votre sergent a semble-t-il perdu son sang froid et sérieusement menacé un officier après les combats sur Terranie. Il a été nécessaire de la mettre aux arrêts et des charges très sérieuses pèsent contre elle, en assumant qu'elle passe un jour en cour martiale bien sûr.
Le chevalier sentit ses muscles se bander malgré lui. Il bouillonnait littéralement.
-Conneries, lâcha-t-il. Laissez tomber vos menaces et dites moi ce que vous attendez de moi, quel complot tordu a nécessité que vous montiez ce chantage.
La directrice se remit à sourire. Varig faillit la frapper, rien que pour effacer son air satisfait de ses traits.
-Votre franchise est rafraîchissante, mais vous êtes sur la mauvaise planète, lâcha-t-elle. Ce n'est pas un chantage. Oh, évidemment beaucoup de gens auraient aimé exploiter cet incident pour vous contrôler, mais je me suis assuré qu'aucun ne puisse y parvenir.
-Vous essayez de me dire que vous m'avez rendu service sans rien attendre de ma part en retour? le chevalier avec méfiance.
Comme disait un de ses camarades de l'académie, quand c'est trop beau pour être vrai, c'est que c'est trop beau pour être vrai. Ça n'allait pas tarder à se vérifier.
-Non, répliqua la directrice souriant encore plus largement. Après tout j'ai une réputation de garce sans scrupules à protéger. Cette affaire aurait pu gravement nuire à votre légitimité au sein du Haut Conseil, or il était dans l'intérêt de l'Empire que ça n'arrive pas. Et c'est précisément la mission du BSI de protéger les...
Le chevalier la coupa, frappant brutalement sur la table à côté de lui.
-Ça suffit, cracha-t-il. Vous ne m'avez informé de rien en me laissant courir après ce vaisseau comme un putain de chien cherchant sa balle. Maintenant je suis là, et je connais votre moyen de pression. Alors arrêtons les conneries, et parlons franchement vous attendez quoi de moi Nina? Que je vous aide à prendre le pouvoir?
-Toujours sur la mauvaise planète, lâcha-t-elle sèchement. La politique n'est vraiment pas votre fort, ou vous auriez déjà compris. Les dirigeants impériaux ont peur de moi, quand ils ne me haïssent pas ouvertement. Je ne veux pas prendre le pouvoir, Varig. Je veux que ce soit vous qui le preniez.
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