I. Le projet Paladin - troisième partie
-Tu ne me dis pas bonjour? ajouta-t-elle après un bref silence.
-Bonjour Syrise, répondit-il.
Sa sœur s'approcha et le prit maladroitement dans ses bras. Varig lui rendit son étreinte avec la même gêne; ils n'étaient pas vraiment habitués aux effusions.
Quand ils avaient quitté leur planète d'origine ravagée par les bombes, c'était Syrise qui s'était occupé de lui. Elle était sa seule famille survivante, son seul point de repère. À seize ans elle avait endossé le rôle de mère de substitution, mais il avait bientôt fallu qu'elle trouve du travail pour échapper à la misère. Son don pour la robotique et la programmation pouvait se monnayer partout, mais les réfugiés étaient mal payés, contraints d'accepter les boulots dont personne d'autre ne voulait. Il fallait travailler beaucoup pour pas grand chose, ne laissant que peu de temps pour s'occuper d'un pré-ado en manque de repères.
Syrise avait nourri son frère, s'était assuré qu'il reçoive une instruction correcte et l'avait même tiré de quelques ennuis. Pourtant leurs relations n'avaient fait que se dégrader.
Varig se sentait abandonné, tandis que sa sœur avait de plus en plus de mal le gérer tout en travaillant pour deux; l'arrivés sur Nirauran les avait tout les deux délivrés de cette situation intenable.
Syrise avait réussi haut la main les tests d'aptitude d'une formation d'ingénieur tandis que son frère était placé dans un internat d'état au milieu de nombreux autres orphelins et réfugiés. Ils avaient été nombreux à s'engager comme lui dans l'armée impériale dès leur majorité...
L'éloignement avait mis fin aux disputes et aux rancœurs entre le frère et la sœur, mais ils n'avaient pas encore réussi à combler le vide entre eux. Ils s'en tenaient à des échanges de nouvelles par messages et ne se voyaient que rarement. La dernière fois remontait à plus d'un an maintenant... Elle n'avait pas beaucoup changé. Ses cheveux noirs étaient toujours rassemblés dans un chignon anarchique, et ses yeux noisettes étaient toujours aussi vifs.
Varig ne s'attendait vraiment pas à la retrouver ici, aujourd'hui.
Syrise recula, mettant fin au contact.
-Chouette uniforme, lâcha-t-elle en le toisant de la tête aux pieds. T'es un homme important maintenant, félicitations.
Elle avait dit ça avec gêne, comme une banalité. Varig chercha ses mots.
-Merci, répondit-il. Toi aussi à ce qu'il parait. On m'a dit que tu étais l'ingénieure en chef du projet Paladin?
Un franc sourire apparut sur le visage de la jeune femme.
-Eh oui, lâcha-t-elle. Moi aussi j'ai pris du galon... Apparemment il fallait au moins ça pour que tu vienne me voir.
-Je ne savait même pas que tu étais postée sur Maridun, se défendit Varig.
Plus exactement, il n'avait pas cherché à le savoir. Il aurait suffit d'un mot à Carlsson pour savoir exactement ce que sa sœur avait mangé à son dernier repas.
Mais il ne l'avait pas fait. Non pas parce qu'il n'éprouvait rien pour elle, mais plutôt parce qu'il ne savait pas vraiment comment s'y prendre pour renouer un lien abîmé par des années de conflits où il avait pourtant vécu à ses crochets. Une part de lui avait honte de ce qu'il avait pu lui faire endurer, de la personne qu'il avait été et que Syrise avait été la seule à connaitre.
-Détend toi, c'était juste une blague, lâcha-t-elle avec un soupir avant de se diriger vers un casier intégré au mur.
Un petit appareil analysa ses traits et le vestiaire s'ouvrit, faisant coulisser un plateau sur lequel reposait une combinaison blanche et un casque assorti.
-Tu dois enfiler ça et rien d'autre pour piloter, expliqua-t-elle en lui tendant l'équipement. Il y a des commandes manuelles, mais les contrôles du Paladin seront directement basés sur la lecture de tes impulsions neurales. En clair la machine devrait sentir ce que tu veux faire et l'exécuter avant même que n'appuie sur le moindre bouton. L'interface est surtout là pour t'aider à te concentrer.
-Ok, lâcha Varig en récupérant les affaires. Ça a l'air pratique, mais est-ce que ça fonctionne bien?
-Super bien. Ceux qui ont conçu ce système sont de vrais génies, et on a tout vérifié et revérifié. Enfin tout sauf le générateur Jedora, mais bon elle a beau être une enfoirée de sociopathe, je dois reconnaître qu'elle connait son boulot. Et de toute façon au moindre truc suspect on coupe tout, fais moi confiance. Bon, je vais préparer le Paladin, rejoins moi une fois en tenue.
Syrise quitta le vestiaire, et Varig se sentit soulagé d'un poids. Il n'était pas à l'aise avec sa grande sœur; sans doute qu'ils devraient arranger les choses entre eux un de ces jours, mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui ils avaient tous les deux un boulot à faire.
La combinaison de pilote ressemblait à celles utilisées sous les armures d'infanterie, avec quelques protections matelassées en plus. C'était une matière agréable, qui semblait à la fois flexible et résistante. Quand au casque intégral, il était pressurisé et doté d'un système de com dernière génération.
Varig le le prit sous le bras plutôt que de l'enfiler et se dirigea à son tour vers le hangar où l'attendait le Paladin.
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