H. Deuil - troisième partie

Resté seuls avec Red, Varig retira sa casquette, comme pour effacer la distance hiérarchique qui existait entre eux.


-Comment tu vas? demanda-t-il.


La question arracha une grimace à la jeune femme.


-Pas terrible, admit-elle en fermant les yeux. Mais je suis toujours vivante.


Varig savait qu'elle ne parlait pas seulement de ses blessures physiques.


-Je suis désolé pour Hanson, ajouta-t-il. Je sais ce que c'est que de perdre un soldat. Si...


Il hésita, cherchant ses mots.


-Si tu as besoin de parler je suis là, finit-il par lâcher.

-... Merci, répondit-elle en évitant de le regarder.


Un silence inconfortable suivit ce bref échange.


Le chevalier n'avait plus eu l'occasion d'être seul avec la jeune femme depuis leur rupture sur Maridun, encore moins pour évoquer des sujets personnels. Jusqu'ici Red l'avait évité avec soin, et il s'était efforcé de respecter son choix en se plongeant dans le travail pour faire le deuil de leur couple.


Mais la journée avait été trop dure pour maintenir cette distance entre eux. D'abord le transport de la jeune femme avait été abattu et son escouade capturée, puis à peine libérée elle s'était lancée dans une mission à haut risque aux côtés d'un Jedi fraîchement rencontré. Varig avait tout suivit depuis la passerelle du Spectre.

Son rang était une torture; il aurait suffit d'un ordre pour mettre la femme qu'il avait aimé... Qu'il aimait encore en sécurité. Mais que faire alors? Envoyer un autre risquer sa vie à sa place, parce qu'il tenait trop à elle? Trahir ses subordonnés, son devoir et tout ce en quoi ils croyaient tous les deux? Impossible.


Même quand on avait ramené Red à bord grièvement blessée, Varig avait dû rester à son poste. Des hommes et des femmes sous ses ordres continuaient à se battre et à mourir en bas pour éliminer ou capturer les derniers soldats LCO, et il devait continuer à commander.


Quand la bataille s'étai achevée et qu'il avait enfin pu aller la voir, elle était encore inconsciente, maintenue en vie par des machines médicales. Il avait serré doucement sa main, partagé entre la peine de la voir si mal en point et le soulagement qu'elle ait finalement survécu.


À ce moment ses sentiments lui semblaient clairs; mais maintenant qu'elle était réveillée, il sentait le malaise revenir, comme un mur qui se dresserait toujours entre eux.

Arriveraient-ils un jour à être de nouveau amis, comme avant? Il en doutait.


Finalement c'était sans doute Appollyon qui avait eu raison depuis le début; les relations personnelles entre supérieurs et subordonnés compliquaient trop les choses. Peut-être devrait-il l'éloigner une bonne fois pour toute pour leur éviter plus de souffrances à tous les deux...

Mais ce n'était pas le moment de prendre cette décision.


-Je ferais mieux de partir, lâcha-t-il en remettant sa casquette. Repose toi et...

-Reste, demanda-t-elle soudain d'un ton pressant. S'il te plaît.


À cause de son passé d'adolescente rebelle ou des difficultés à se faire respecter dans le milieu masculin et brutal des troupes de choc, Red exprimait peu ses angoisses, cachant ses moments de détresse ou de doute derrière d'autres émotions comme la colère.


Mais elle venait de frôler la mort, et de perdre un soldat; cela semblait avoir eu raison de ses défenses habituelles. Elle avait besoin de réconfort, d'une épaule sur laquelle s'appuyer.


-D'accord, lâcha Varig en revenant près d'elle.


Elle se pencha et posa sa tête contre son torse tandis qu'il l'entourait de ses bras.

Ils restèrent une longue minute l'un contre l'autre, sans rien dire. Ce contact familier leur faisait du bien.

La jeune femme finit par s'éloigner essuyant les larmes qui avaient coulé d'un revers de manche.


-Désolée, lâcha-t-elle en fixant le bout du lit.

-De quoi?

-De pleurer sur toi comme une idiote. Surtout sur toi... Après ce que je t'ai fait, tu devrais me détester.


Varig n'était pas sûr de ce qu'elle voulait dire. Parlait-elle de ce qui c'était passé sur Maridun?

C'était elle qui avait finit par trancher dans le vif, mais elle n'avait fait que dire à haute voix une réalité qu'ils avaient repoussé trop longtemps. Sur le coup il lui en avait voulu, mais plus maintenant.


-Je ne te déteste pas, lâcha-t-il en lui caressant doucement la joue. Au contraire.


La jeune femme se tourna vers lui et leurs regards plongèrent l'un dans l'autre.

Toute pensée rationnelle annihilée par ce contact, ils s'embrassèrent avec passion.


Red fut la première à reculer, l'air perdue. La machine qui marquait les battements de son cœur avait accéléré la cadence. 


-Qu'est ce... Qu'est-ce qu'on fait là? lâcha-t-elle.


Varig aurait dû se sentir aussi perdu qu'elle; pourtant au contraire, il avait soudain l'impression d'y voir enfin clair.


-Ça me va, lâcha-t-il fermement. J'aurais dû te le dire tout de suite, dès cette nuit sur Maridun. Tout ce que je veux c'est être avec toi, même si c'est seulement pour des instants volés, même en cachette. Je ne veux pas renoncer à toi... Parce que je t'aime.


Une unique larme coula sur la joue de la jeune femme.


-Je ne te demande rien en échange, poursuivit Varig. Ni de mettre en danger ta carrière, ni de faire des plans sur l'avenir. Rien que nous deux, rien que le présent. Tu en dis quoi?


Elle ferma les yeux.


-Tu n'as rien compris, lâcha-t-elle d'une voix étranglée. Je n'avais pas peur de ce que tu me demandais, mais de ce que je voulais. Il y a une part de moi qui aimerait à abandonner tout le reste pour vivre avec toi, et ça fait mal... Parce que moi aussi je t'aime. Je ne veux pas renoncer à toi, ni à tout le reste. C'est...


Varig caressa doucement son visage, effaçant la larme qui avait roulé sur sa joue.


-Tu n'as pas à choisir, affirma-t-il. Fais moi confiance.


Elle hocha la tête et rouvrit les yeux, les plongeant dans les siens avant de venir doucement l'embrasser. Le chevalier la prit ensuite dans ses bras, la serrant longuement contre lui.


Il se séparèrent rapidement quand le bruit du déverrouillage de la porte de l'infirmerie retentit. Le sas s'ouvrit, livrant passage au docteur Leroy.


-Le Jedi a quitté le vaisseau, annonça-t-il. Ah quelle tristesse, il avait l'air tellement intéressant, j'aurais bien...

-Je vais retourner sur la passerelle, le coupa Varig, conscient qu'il risquait de disserter un moment sur cette occasion ratée d'en apprendre plus sur la Force.


Il remit sa casquette et se dirigea d'un pas décidé vers la sortie. Avant de quitter l'infirmerie, il se tourna ver Red.


-Reposez vous sergent, lui lança-t-il. Vous l'avez bien mérité.

-Comptez sur moi amiral, répondit-elle sur le même ton formel.


Mais l'ombre d'un sourire effleura un instant ses lèvres.


Varig s'éloigna vers la passerelle, le cœur léger. Il ne ressentait pas ce moment comme un nouveau départ pour Red et lui; plutôt comme un retour à la normale. Avec la jeune femme à ses côtés, il se sentait de taille à affronter l'univers entier.

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