10. La bataille de Terranie - quinzième partie
Il n'eut aucun avertissement, aucun signe précurseur du cataclysme. Un immense éclat de lumière engloutit soudain la formation impériale qui martelait le Poing des étoiles; enflant démesurément, une bulle d'énergie brillait de couleurs changeantes et indéfinissables, comme une nouvelle étoile née dans le vide.
Sur la passerelle du Dédale les détecteurs s'emballaient en tentant de mesurer le phénomène.
-Qu'est ce qui s'est passé!? lâcha S3th.
-Sûrement une bombe à antimatière, répondit la commandant Treny, les yeux rivés sur son écran. Mais il en aurait fallut une quantité énorme pour créer une telle détonation...
Tout en parlant, elle cherchait une erreur dans les données. Hélas les scanners ne mentaient pas; l'explosion venait d'anéantir plus d'un millier de vaisseaux alliés en même temps que les survivants de l'escorte du Poing des Étoiles, créant un immense vide dans les deux formations.
Piepie avait attiré le gros des forces impériales sur lui, avant de fuir en faisant exploser son propre vaisseau amiral. Il avait sacrifié sa flotte d'escorte pour s'assurer la victoire. Mais comment pouvait-il avoir rassemblé de telles quantités d'antimatière?
Cela ne comptait pas vraiment à cette instant. Sur son écran S3th voyait la situation des alliés empirer à chaque seconde. Partout, les forces de Piepie prenaient l'avantage en attaquant avec une vigueur redoublée. Quintus était mort, son groupe de combat anéanti et Malarite ne disposait plus que de quelques centaines de vaisseaux lourdement touchés et entourés d'ennemis.
Libérés de toute menace, les pirates du flanc gauche fondaient maintenant sur le centre de la flotte alliée. Kress et Frallon tenaient encore le flanc droit, mais plus pour longtemps. Au sol, la résistance avait pratiquement cessée alors que les soldats survivant se dispersaient pour échapper au déluge de feu qui s'abattait depuis l'orbite. Les forces de Piepie continuaient méthodiquement à bombarder les défenseurs de la planète, larguant des troupes sur les sites stratégiques.
Thrawn avait eu le temps d'ordonner la retraite, le seul choix possible à ce stade. Avait-il pu aussi fuir l'explosion qui avait engloutit de son vaisseau pour aller affronter Piepie comme il le prévoyait? Qu'il l'ait fait ou non ne comptait plus vraiment.
-Je rassemble nos forces pour le repli, annonça l'amiral Ordhën. Mais la fenêtre est trop courte pour récupérer tout le monde. On a deux groupes de combat ennemis en approche; si on ne fonce pas maintenant ils vont nous prendre en tenaille...
L'officier était un des plus vieux compagnons de route de S3th, qui lui vouait une confiance aveugle. Les batailles étaient son domaine; s'ils disaient qu'une escadre était perdue, le haut conseiller ne risquerait pas la flotte pour la sauver.
-Faites au mieux Thiazzy. Notre rôle ici est terminé; tout ce qui compte maintenant c'est de tirer de là un maximum d'hommes et de vaisseaux. Rassemblez ceux que vous pouvez et tirons nous là.
-Je vais faire manœuvrer le Dédale pour qu'il couvre les vaisseaux les plus endommagés, annonça la commandant Treny.
Elle se pencha vers son supérieur pour ajouter à voix basse:
-Ça pourrait être dangereux, vous devriez peut-être vous téléporter sur un autre vaisseau.
-J'ai confiance en vous et en votre équipage, Larryn. Ce bon vieux Dédale nous a toujours ramené à la maison; espérons qu'il le fera encore aujourd'hui.
Rassemblant ce qui restait de la formation centrale, la flotte alliée forma une immense pointe de flèche et se lança dans une fuite en avant, échangeant des tirs nourris avec ceux qui tentaient de l'intercepter.
Le Dédale s'était positionné sur le flanc avec d'autres vaisseaux moins touchés, protégeant les navires blessés au cœur de la formation. Les premiers assaillants ne tardèrent pas à affluer. L'espace était saturé de tirs; une salve frappa le Dédale de plein fouet, et tout le vaisseau trembla, forçant l'équipage à s'accrocher. L'impact avait fait vaciller les lumières.
-Déflecteur tribord hors ligne, dégâts sur la coque et début d'incendie dans trois secteurs!
-Gardez le cap et maintenez les systèmes, répliqua Treny. Brouillez leurs viseurs et balancez leur tout ce qu'on a, c'est le moment ou jamais!
Bien que vaisseau scientifique et d'exploration, le Dédale et son équipage avaient connu leur lot de batailles sanglantes. Le vaisseau était donc armé en conséquences; une salve de missiles vint frapper les ennemis qui tentaient de lui barrer la route, et les canons lasers répartis sur toute la surface déchaînèrent une salve meurtrière.
Un massif destructeur brava ce tir de barrage, fonçant droit sur le vaisseau amiral. Lui aussi faisait cracher son artillerie, mais son canon principal manqua sa cible, pulvérisant à la place un traqueur déjà endommagé. La riposte du Dédale faisait briller ses boucliers, mais ils tinrent bon.
-Encore un peu! cria Treny, sans qu'on sache si elle s'adressait à son équipage ou à son vaisseau.
Le lourd destructeur ne pourrait tirer qu'une unique salve avant de perdre sa proie, mais elle suffirait. Il pivotait pour porter le coup de grâce quand un petit vaisseau frôla soudain la passerelle du Dédale et tira un puissant laser rouge. L'arme transperça littéralement les boucliers du destructeur pirate, le poignardant à plusieurs reprises.
Partant à la dérive, le lourd vaisseau percuta une épave et s'éloigna, secouée d'explosions internes.
-Dédale ici le Paladin, annonça une voix dans le système de com. Je vous couvre!
Le mécha virevoltait au milieu de la formation pirate, fauchant les ennemis avec férocité.
Grâce à ce renfort providentiel, le Dédale voyait le bout du tunnel.
-On est passés! annonça un des opérateurs.
Les pirates allaient faire demi-tour les poursuivre, mais ils arriveraient trop tard. Plus de mille vaisseaux allaient leur échapper.
La flotte terranienne n'avait pas eu cette chance; elle tentait de rejoindre le couloir créé entre les deux énormes mâchoires de la force ennemie, mais il était évident qu'elle n'y arriverait pas à temps. Une autre escadre retardataire n'avait pas réussi à éviter le choc et subissait le choc de flanc, broyée sous la masse d'ennemis.
L'amiral Kress avait lui aussi amorcé sa propre manœuvre de repli; regroupant ses forces pour une seule percée, il avait positionné son vaisseau et quelques centaines d'autres pour faire barrage à plus de deux mille vaisseaux pirates. Jeté contre la ligne de front, le commandant Frallon menait le groupe principal de la deuxième flotte dans une attaque désespérée pour arracher ses hommes au désastre, abandonnant une partie de leurs camarades, sacrifiés pour qu'ils puissent se replier.
Les thrawniens ne cherchaient plus à tenir, et se rendre ne servait à rien contre les pirates de la SOB. Ils en avaient suffisamment massacré pour savoir qu'eux non plus n'auraient aucune pitié. Alors ils se battaient, jusqu'à la mort et avec une rage désespérée. Les formations s'entrechoquaient brutalement les unes contre les autres, ignorant les pertes. Les éperonnages se multipliaient alors que les mastodontes de métal déchargeant leurs missiles quasiment à bout portant.
La bataille pour Terranie s'achevait dans un dernier sursaut féroce et violent. Les débris jonchaient l'orbite, et des centaines de milliers de capsules de sauvetages dérivaient entre les épaves. Les corps brisés se mêlaient aux carcasses des machines.
Pourtant le combat continuait, toujours. Plongée dans les terreurs de la nuit, la verdoyante Terranie brûlait. Les incendies allumés par les bombardements luisaient, visibles depuis l'orbite. Le Palais Présentiel n'était plus qu'un tas de ruines sur lequel les pirates continuaient pourtant à s'acharner. Au sol, les soldats thrawniens et la garde fondatrice affrontaient les troupes de débarquement ennemies qui tentaient de s'emparer des cibles trop précieuses pour être bombardées.
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