Prologue
Le nez en sang, Julius regardait ses pieds et ne releva la tête que quand un goute rouge tomba sur sa chaussure. Devant lui, imposante et impénétrable, la porte du bureau du directeur semblait le juger. La scène était étrangement familière et l'Apprenti aurait été incapable de se souvenir de toutes les fois où il avait attendu dans ce couloir avec un fond sonore, des reproches étouffés qu'on adressait à Louis. Néanmoins, cette fois-ci était bien différente même si actuellement, la seule divergence au schémas habituelle était leur âge étant donné qu'ils n'avaient pas était convoquer dans ce bureau depuis leurs quinze ans. L'apprenti aurait aimé se dire que le temps les avait rendus plus agiles et rusé si bien que leurs dernières frasques étaient restées anonymes que l'on cherchait encore les coupables. Cependant, si le jeune homme se montrait honnête avec lui-même, il remarquait que cela faisait juste longtemps que le temps des bêtises avait cessé. Avant même toute cette histoire, les occasions de faire tourner la direction en bourrique pour qu'Armance puisse s'introduire dans l'Elite s'était amoindri. Il faut dire que Louis passant lui-même moins de temps avec Julius et Robin, les occasions de voir tout simplement la jeune fille s'était aussi réduites. Et quand bien même l'une d'elle s'était miraculeusement présentée à eux lors d'un des anniversaires du roi, c'était l'adolescente qui les avait froidement repoussés. Etonnés, les deux apprentis avaient un peu insisté, espérant au moins une explication mais ils avaient seulement eu le droit à être informé de la rupture d'Armance avec leur meilleur ami... ainsi qu'à des reproches bien senti quoique seulement sous-entendu.
Tout était parti de là.
Ensuite, poursuivit par Robin qui tentait de le calmer – lui disant que les problèmes de leurs amis ne concernaient qu'eux, – Julius était allé chercher Louis.
Après avoir parcouru la moitié du château et une bonne partie de l'Elite, semant au passage Robin, bien moins rapide que lui, Julius avait fini par trouver Louis assis devant une tapisserie géante comme si celle-ci contenait tous les secrets de l'univers.
— Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? s'exclama le blond faisant au passage sortir son ami de sa contemplation.
— Quoi donc ? demanda ce dernier un peu perdu.
— Armance m'a dit que vous vous étiez séparés !
— Et alors en quoi ça te concerne ? répliqua Louis soudainement sur la défensive.
— Cela me concerne qu'elle semble nous reproche à Robin et moi d'avoir été tes complices dans... Je-ne-sais quelle combine qui t'as valu de te faire larguer.
Entendant cette dernière phrase, l'autre adolescent tenta de revêtir une expression neutre mais celle-ci cachait bien mal l'animosité du jeune homme. Il allait donc partir mais Julius le retint par le bras.
— Qu'est-ce qu'il s'est passé avec Armance ? insista-t-il d'une voix où perçait une légère détresse
— Mais rien ! répliqua son ami. Pourquoi ça t'inquiète tant que cela ?
Car les moments de rire et de complicité, cœur de leur petit quatuor s'étaient doucement éteints. Le joyeux vacarme de leur adolescence avait disparu emportant avec lui tout ce qu'il y avait eu de beau et de magique dans l'Elite. Tout ce qui jusqu'à présent les protégeait de l'extérieur.
Néanmoins, Louis ne comprendrait pas cette réponse. Pour lui, la magie de l'Elite se cantonnait à l'arbre doré et les dangers de l'extérieur à six frères immortels.
Bien que n'étant pas du fait de son ami, cette divergence de point de vue était en fin de compte assez frustrante pour Julius :
Quand Louis ne se souciait que des Estaffes et était prêt à tout pour les détruire, Julius était terrifié à l'idée de se faire virer en essayant.
Quand Louis jouait un tour pendable à direction, Julius s'effacer pour ne devenir que l'ami et assistant de cet incroyable magicien.
Quand Louis s'isolait volontairement dans sa quête personnelle, Julius avait l'impression de disparaître un peu plus à chaque fois que leur petit groupe se déliait.
Finalement, les actes du premier avaient des conséquences directes sur les angoisses du second qui n'arrivait cependant pas à en vouloir à son meilleur ami.
— Alors ? répéta Louis avec impatience
— Car Armance est mon amie ! répondit à la place Julius. J'ai le droit de savoir pourquoi elle me fait la tête !
— Eh bien, je lui dirais que tu n'y es pour rien !
— Donc, il s'est bien passé quelque chose ?
— Mais non !
— C'est à cause des Estaffes ?
— Pourquoi cela aurait-il un lien avec eux ? répliqua Louis sur la défensif.
— Car en ce moment, c'est une véritable obsession pour toi !
Cela avait d'ailleurs commencé plusieurs mois auparavant mais à cette époque personne n'y avait vraiment fait attention. Avec Robin, ils en avaient même souvent ri, répétant à Armance que son chère et tendre était bien plus en couple avec Tybalt Estaffes qu'il ne pourrait un jour l'être avec elle. A présent, la blague paraissait de très mauvais goût vu à quel point la situation était devenu... inquiétante.
Cette appréhension devait d'ailleurs se lire dans son regard car se renfermant un peu plus sur lui-même, Louis s'exclama :
— Je ne vais tout de même pas m'excuser de vouloir mettre fin aux Estaffes ou de chercher à protéger l'Elite ?
— Personne ne te reproche cela ! s'énerva Julius qui en avait marre de voir son ami faire comme si il était le seul à se soucier de l'école.
Comme s'il était meilleur que tous et seul à voir la dangerosité des Estaffes
— Alors où est le problème ?
— Le problème, c'est que tu veux à tout prix être l'homme qui protégera l'Elite en mettant fin aux Estaffes car tu es persuadé que seul toi peux y arriver. Tu veux à tout prix être le héros de cette histoire car si tu n'es pas celui de celle si tu es celui d'aucune. Et ça, ça te serait insupportable, ça voudrait dire des années de négligence en orphelinat pour finalement atterrir à l'Elite et devenir le meilleur n'ont servie à rien ! Que des années de souffrances ne ton pas rendu plus fort ! Et que tu ne peux pas te sauver car tu ne peux même pas sauver les autr...
Alors Julius s'interrompit. Soudainement conscient des quatre vérités qu'il venait balancer à son ami. Soudainement conscient d'à quel point, elles étaient méchantes et nourrit par un ressentiment qu'il n'avait jamais su exprimer.
Honteux, il allait s'excuser mais il était déjà trop tard. Avec véhémence, Louis cracha :
— Car tu penses peut-être valoir mieux ? Tu es incapable de t'opposer à tes parents ou aux professeurs. Tu es terrorisé par les premiers et persuadé que les seconds remarqueront un jour ta rigueur, ton honnêteté ou je ne sais quelle qualité à la noix qui fait que d'après toi, tu mériterais d'être aimé et admiré. Mais tu sais ce que c'est la vérité ? Si je n'avais pas été ton ami, là pour te pousser à quelques bêtises, tu serais devenu depuis bien longtemps un petit pantin incapable de penser par lui-m...
Louis n'avait cependant pas eu le temps de finir sa phrase car un coup était soudainement parti et une bagarre s'en était suivit. Julius finalement ne se souvenait que de Robin, le tirant en arrière pour qu'il arrête pendant qu'un Elitien faisait de même avec son camarade. Peut-être qu'il s'agissait d'Arthur de Château-Boisé ou John Mid. En tous cas, c'était avec eux qu'était à présent enfermé Louis dans le bureau du directeur depuis plus d'une heure.
Soudain, la porte s'ouvrit. Dans la tête de Julius, plusieurs souvenirs défilèrent montrant Louis à différents âges sortant de ce bureau avec fierté et lançant un sourire complice à son ami.
Malheureusement, la réalité était tout autre. Ainsi, quand le jeune Serra sortit aucun sourire n'illumina ses lèvres explosées et il partit sans même un regard à son camarade.
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