Chapitre 4 Première Mort
Margo s'était déshabillée. Elle était à présent en sous-vêtements.
Elle se glissa sous les draps, en souriant :
« Allez, Lauren, viens... »
Lauren se tourna vers le lit unique. C'était ça partout. Elle était rassurée d'être avec quelqu'un pour dormir.
Elle enleva doucement ses vêtements. Elle les posa sur une chaise.
Elle entra ensuite dans le lit.
Elle posa sa tête contre l'épaule de Margo. Elle lui murmura :
« Dis, Margo... tu penses que c'est vrai, cette histoire de menteur ? »
La jeune fille se raidit. Elle répondit, la voix sifflante :
« Lauren... cette histoire me fait peur... je ne pense pas que quelqu'un serait capable de nous tuer... Que quelqu'un parmi nous serait capable de tuer quelqu'un d'autre. Cette fichue malédiction ne va pas marcher avec nous. Non ! Je... j'en suis sûre... »
Lauren était pensive.
« Tu sais... j'ai lu pas mal de mangas comme ça... poussés dans de situations extrêmes, les gens sont capables de...
-Non ! Regarde... déjà, il y a nous deux...
-C'est pour ça que je veux rester avec toi. Je sais qu'avec toi, je suis en sécurité...
-Il y a aussi ton frère... Lauren, même si tu détestes ton frère, tu penses qu'il pourrait tuer quelqu'un ?
-Sûrement pas ! Enfin, je... je n'espère pas...
-Il y a Milo et Annie... Bordel, c'est un parfait couple, eux...
-Ils seraient incapables de faire du mal à une mouche, cela, c'est certain...
-Puis, Maureen. Lauren, c'est toi qui l'as sauvée. Tu as vu l'état dans lequel elle était ? Elle ne serait pas capable de tuer quelqu'un de sang froid...
-Moui...
-Lisa, vaut mieux ne même pas en parler... Matthew ?
-Pff... N'importe quoi !
-Il ne reste qu'Andrew... »
Lauren était songeuse. Elle répéta :
« Oui, Andrew... personne ne le connait, et il ne fait rien pour se faire connaitre. Il est vraiment mystérieux. Il ressemble un peu aux types qu'on peut trouver dans certains gangs...
-Ces mecs là, ils font n'importe quoi pour s'amuser... »
Lauren attrapa la main de Margo. Elle lui murmura :
« Je suis en sécurité avec toi... »
Aussitôt après, elle s'endormit. Elle était trop fatiguée. Margo contempla le corps de son amie un long moment durant.
Elle fit :
« Oui. Lauren, tu es en sécurité avec moi. Je te le promets. »
***
Lisa s'était allongée, toute habillée, dans le lit. Andrew avait retiré son t-shirt, dévoilant un torse musclé, barré par une cicatrice, mais avait préféré garder son pantalon. Il s'était couché aux côtés de la jeune fille.
Il s'aperçut qu'elle avait le regard vide.
Il sourit et lui fit :
« Qu'est-ce qu'il y a ?
-Je... je ne me sens pas bien...
-Plus vite cette histoire sera terminée, plus vite tu pourras te faire soigner par un médecin... »
Andrew attrapa son fameux carnet et recommença à écrire.
Lisa tendit le cou, pour tenter d'apercevoir ce qu'il écrivait :
« Qu'est-ce que c'est ?
-Je... j'aimerais devenir écrivain... »
Lisa semblait surprise :
« Vraiment ? »
Andrew se crispa soudain :
« Arrête de jouer la comédie ! Tu m'énerves ! »
Le visage de Lisa se fit interrogateur, innocent :
« Que veux-tu donc dire ? Quelle comédie ?
-Lisa Honeycutt, ton petit jeu marche peut-être avec les autres, mais pas avec moi. Tu connais tout sur la vie de chacun d'entre nous...
-Je ne vois pas ce que tu veux dire. Exprime-toi plus clairement.
-Tu es folle, Lisa... Complètement folle...
-C'est toi qui devient fou, Andrew... »
Lisa avait reculé, effrayée.
Elle eut une moue boudeuse :
« Tu me fais peur... Arrête, s'il-te-plait... Tu me fais une blague, c'est ça ?
-Espèce de tarée... »
Lisa se releva, attrapa son oreiller et son sac à main et fit :
« Je vais dans la chambre de Matthew. J'espère qu'il ne va pas avoir pété un câble comme toi... »
Elle ouvrit la porte.
Andrew murmura, le sourire aux lèvres :
« 'Good Night', Lisa Honeycutt... la sœur de Marine Honeycutt... »
Lisa s'arrêta un instant, mais reprit son chemin, et ferma soigneusement la porte.
***
Annie avait trouvé un bloc de papier dans un bureau. Elle avait attrapé un stylo qui était resté dans sa poche. Elle avait écrit toutes les informations qu'ils avaient. Elle regardait les mots, l'air pensif.
Elle était allongée sur son lit.
Elle soupira :
« Je ne comprends rien... Pire que les maths... Je vais laisser les autres résoudre ça... Je n'ai pas compris... Pourtant, je suis sûre que ça a un rapport avec 'Danse Macabre' de Camille Saint-Saëns... »
Milo lui attrapa les hanches par derrière. Il l'embrassa dans le cou.
Annie, contre toute attente, s'énerva :
« Milo ! Tu es un gamin ! Tu penses vraiment que c'est le moment ? »
Celui-ci haussa les épaules :
« Annie... t'es sérieuse ? Qu'est-ce que tu as ? C'est Matthew, c'est ça ?
-Je t'ai déjà dit que lui, ce n'était rien ! Je ne l'aime pas, et il ne m'aime pas. Alors, arrête d'y revenir à tout bout de champ... »
Milo détourna la tête. Il parut être blessé.
Il chuchota :
« Annie, ma chérie, je peux tout te pardonner... Si tu aimes un autre garçon, je serais capable de le supporter... »
Annie se releva brusquement. Elle était vraiment furieuse, cette fois-ci.
Elle dit, rageusement :
« Ecoute-moi bien, Milo Sparks... On sort ensemble depuis la troisième, mais si tu continues de me saouler, on va mettre terme tout de suite à notre relation, compris ? »
Milo grimaça :
« Oui, compris, pas la peine d'être cassante... »
Lui aussi, désormais, était énervé.
Annie se mordilla la lèvre. Elle s'en voulait.
Elle murmura :
« Milo...
-Quoi, encore ?!
-Je suis désolée... »
Annie était au bord des larmes. Elle ne s'était presque jamais disputée avec Milo.
Milo sourit doucement :
« Moi aussi, je suis désolé...
-Oh, mon chéri... »
Elle le serra dans ses bras. Elle l'embrassa. Les mains de Milo passèrent dans son dos.
Elle fit une moue, qui ne la rendit que plus mignonne, aux yeux de Milo :
« Milo ! Quand même ! On peut mourir d'un instant à l'autre...
-Oui, et alors ? C'est une raison pour le faire maintenant. Si ça se trouve, demain, nous mourrons. Alors, je veux profiter de toi à fond. Compris ? »
Elle sourit doucement.
Elle chuchota :
«Milo, pour moi, tu es le seul à compter. A jamais.
-Toi aussi, ma chérie. A jamais. »
***
Ted se sentait mal.
Maureen n'avait presque pas décroché un mot depuis qu'il l'avait retrouvée.
Il s'en voulait.
Dans ce genre de situations, le garçon trouvait toujours de quoi réconforter sa petite amie. Mais, lui, il ne savait pas quoi dire.
Maureen tremblait légèrement.
Les grands anneaux qu'elle portait aux oreilles se balançaient au rythme de ses entrechoquements de dent.
Ted chuchota soudain :
« Maureen ?
-Mmm...
-On va s'en sortir. Tous les deux. Je te le promets... »
Maureen se retourna brusquement.
Des larmes brillaient dans ses yeux :
« Tu promets ? »
Ted ne l'avait jamais vue pleurer. C'est ce qui le marqua, plus que tout.
Il sourit :
« Evidemment... Je te protégerais... De toutes mes forces...
-Je sais. Mais, cela ne suffira peut-être pas à me sauver...
-Maureen, nous allons vivre. J'en suis sûr. Quand nous sortirons, que mes parents soient d'accord ou pas, je me marie avec toi. Je nous achète une grande maison, avec l'argent que j'ai hérité de ma grand-mère, et je me mets à travailler sérieusement... On aura plein d'enfants... »
Maureen éclata de rire. Ted lui avait enfin rendu son rire. Il regarda sa petite amie.
Elle était ainsi, telle qu'il l'avait toujours aimée. Belle, forte, riante.
Pas cette pauvre petite chose recroquevillée qu'il avait retrouvée.
Il lui embrassa le sommet de la tête. Il murmura :
« Maureen... Tu ne m'as jamais parlé de toi... ni de ta vie... avant... »
Maureen devint plus sérieuse.
Elle chuchota :
« Je n'ai jamais connu mon père. Il est parti avant ma naissance... Ma mère s'est remariée avec un autre homme... Je ne l'ai jamais aimé... Il était... horrible... avec moi...
-Généralement, on n'aime pas trop son beau-père ou sa belle-mère...
-Tu ne comprends pas ! »
De nouveau, Maureen avait fondu en larmes.
Elle se mordit la lèvre.
Comment aurait-elle pu expliquer cela à Ted ? Elle ne l'avait même jamais avoué à sa mère...
Jamais...
Sa mère travaillait dur, comme femme de ménage, dans un grand hôpital. Elle ne terminait pas ses journées avant vingt-deux heures.
Aussi, la petite Maureen avait toujours été seule quand elle rentrait de l'école.
Elle se rappelait de cette peur. Cette peur horrible, qui la prenait aux tripes...
Elle n'osait pas franchir le seuil de la porte. Elle prit son courage à deux mains, et appuya sur la poignée. La porte s'ouvrit dans un craquement sourd.
La voix jaillit aussitôt :
« Tu es en retard !
-Je suis désolée... Je... j'étais chez une amie... »
C'était faux. Maureen n'avait pas d'amis. Elle avait bien trop peur qu'ils découvrent son terrible secret...
L'homme se releva de son fauteuil.
Il était grand. Trop grand. Il pouvait briser les os de la petite d'une simple pression.
Il la plaqua contre le mur :
« Je crois que tu n'as toujours pas compris... tes amies, tout passe après moi !
-Je...
-Réponds « oui monsieur » !
-... Oui monsieur... »
Les lèvres de l'homme s'étirèrent en un sourire satisfait. Il posait ses lèvres sur celles de la petite fille. Elle n'osait rien dire.
Il l'entrainait ensuite vers le lit de la petite.
Elle, elle détournait toujours le regard vers la poupée Barbie qu'elle avait reçue pour Noël. Ses yeux étaient vides de toute humanité.
Au début, elle avait crié. Elle s'était débattue.
Mais, maintenant, depuis des mois, elle avait compris la leçon. Ne jamais protester.
L'homme lui susurra :
« Il ne faut pas en parler à ta mère... ça lui ferait mal... tu ne veux pas lui faire de mal, n'est-ce pas ?
-Non monsieur...
-Mmm... Je préfère ça... Demain...
-Demain je... je ne peux pas rentrer. Je... je dois terminer un exposé chez une amie... Je vais dormir chez elle... »
Elle comptait dormir sous un pont. Ce serait mieux que chez elle.
Le visage de l'homme changea immédiatement. La colère y était perceptible :
« Pardon ?
-J'ai... j'ai demandé à maman. Elle est d'accord...
-Je me fiche éperdument de ce que pense ta mère... »
Il attrapa violemment le bras de l'enfant, la releva, et l'emmena vers un placard.
Maureen, comprenant ce qu'il allait lui arriver cria :
« Non ! S'il-vous-plait ! »
Sans lui laisser le temps de continuer à gémir, l'homme l'enferma à l'intérieur du placard.
Maureen se mit à pleurer.
Elle était terrifiée par le noir.
Depuis son plus jeune âge, même avant l'arrivée de cet homme, elle avait eu peur du noir.
Il lui faisait penser à son père.
Elle ne supportait plus le noir.
La seule fois où elle avait « parlé » de ce que son beau-père lui faisait subir à sa mère, elle avait juste dit que l'homme « faisait des jeux embêtants » avec elle.
Sa mère avait soupiré.
Elle avait répliquée :
« Ecoute, Maureen, c'est dur pour tout le monde... tu as déjà de la chance que ton beau-papa joue avec toi, alors, même si tu n'aimes pas ces jeux... »
Elle n'avait jamais compris, ou avait toujours fait semblant de ne pas comprendre.
Maureen ne saurait sans doute jamais la vérité.
Cette chambre d'enfant, souillée par cet homme... Elle l'avait quittée dès qu'elle en avait eu l'âge et les moyens pour s'installer en ville.
Désormais, elle ne craignait plus cet homme. Elle avait grandi.
Toutefois, à chaque fois qu'elle le voyait, lui et son détestable sourire, son estomac se serrait.
Elle n'avait plus peur de lui.
Par contre, elle avait toujours peur du noir.
Toujours.
Elle n'expliqua rien de cela à Ted.
Mais, il parut comprendre instinctivement.
Il ne rajouta rien.
C'était sans doute mieux ainsi.
Elle murmura :
« Ted... ne me laisse jamais dans le noir, seule, je t'en prie...
-Je ne te laisserais plus jamais dans le noir toute seule. Promis. »
Il la prit dans ses bras.
Elle s'endormit ainsi.
Paisiblement.
Elle était si belle, aussi, quand elle dormait...
Si magnifique...
Ted l'aimait tellement... Il ne s'en rendait compte. C'était d'abord le côté rebelle de la jeune fille qui l'avait attiré. Mais, ça avait été rapidement elle en entier...
Il l'embrassa doucement.
Elle remua dans son sommeil.
Il s'endormit, à ses côtés.
Ted se réveilla en sursaut. Il n'avait aucune idée de combien de temps avait pu s'écouler depuis qu'il s'était endormi avec Maureen.
Elle, elle dormait encore.
Elle n'avait pas retiré ses boucles d'oreilles pour dormir. Ce fut la première constatation que se fit Ted.
Il l'embrassa sur le front.
Il nota la froideur de sa peau. Avait-elle froid ?
Il se releva, la secouant avec douceur.
Elle ne faisait aucun mouvement pour se lever.
Il cria soudain :
« Maureen ! »
Il la repoussa, au niveau de la poitrine.
Il sentit quelque chose d'étrange. Comme... de l'eau...
Il retira sa main. Elle était pleine d'un liquide rouge. Il refusa tout d'abord de comprendre.
Mais, c'était bel et bien cela.
Du sang.
Il sortit brusquement du lit.
Maureen avait les paupières closes. Normal.
Une longue entaille partait de son cou et se terminait au niveau de son bas-ventre.
Elle devait être morte sur le coup.
Elle n'avait même pas changé d'expression. Ça avait dû être si soudain...
Et, se rendant compte de tout, il cria.
Maureen était morte !!!!!!!!!!!!
Les autres arrivèrent rapidement.
Lauren désigna le corps de Maureen :
« Ted... qu'est-ce que tu lui as fait ? Ted !
-Je... ce n'est pas moi... je viens juste de me réveiller... Je... Maureen... »
Il éclata en larmes. Lauren en fut choquée. Ted n'avait jamais pleuré devant elle.
Elle le prit dans ses bras.
Pour la première fois depuis des années et des années, elle sentait de l'amour envers ce grand frère qu'elle avait tellement détesté...
Annie trembla :
« Vous croyez que c'était un fantôme ? Un fantôme qui aurait...
-Bien sûr que non ! »
Calicy venait de sortir d'un mur. Son air était déterminé. Matthew la présenta aux autres.
La petite fille commença :
« Les fantômes ne manient pas les couteaux, je suis désolée...
-Pourquoi ? demanda Lisa.
-Je n'en ai aucune idée. Mais, cela aussi, c'est dans les fameuses règles. Nous ne pouvons tuer qu'en étant... inventif... Pour nous tuer à l'aide d'un couteau est interdit. Ainsi qu'avec toute arme du même genre... Nous n'avons pas le droit de tuer directement...
-Comment as-tu tué tes parents ? Osa demander Margo.
-Je les ai poussés à s'entretuer, répondit Calicy, très sérieuse. De toute façon, ils étaient déjà à moitié fous, depuis qu'ils étaient là... ça n'a pas été très compliqué... »
Andrew demanda calmement :
« A partir de combien de temps peut-on devenir fou ?
-Oh... cela dépend de chacun... de votre état psychologique... de votre passé... mais, en général, vingt-quatre heures sont largement suffisantes... »
Calicy énonçait ça comme si elle avait parlé de la météo. Lauren serrait les poings.
Mais, c'était sûr que, pour elle, la mort n'était plus rien... Elle était déjà morte une fois, et atrocement...
Calicy reprit :
« Oui, et donc, je disais, aucun fantôme n'a pu faire ça. C'est donc l'un d'entre –vous qui a tué Maureen... Je ne sais pas qui... »
Ils s'entreregardèrent tous.
Ted fut pris de convulsion.
Il chuchota :
« Cela veut dire que... que le tueur était juste à côté de moi... qu'il a tué Maureen comme il aurait pu tuer n'importe qui pendant son sommeil ? »
Le silence pesant qui régna de suite était lourd de sous-entendus.
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