Chapitre 6 : La fuite


BONJOUR BONJOUR 

Je suis irrégulière à mort mais je poste quand même voilà le chapitre 6, bonne lecture (hésitez pas à me dire ce que vous en pensez !) 


Chapitre 6 : La fuite. 

Je n'avais pas franchement eu le choix. Et cela me frustrait énormément. Je rageai. Avoir quitté la Colonie pour me remettre à castagner contre la Légion Romaine. D'autant plus que c'était Hazel Levesque qui la menait et que de tous les romains, c'était elle qui m'était apparue comme la plus sympathique. Je ne voulais pas me battre contre elle.

Mais je n'avais pas le choix. Si je voulais retrouver Alice je n'avais pas le choix.

Alors j'avais sorti mon poignard, et j'étais descendu en compagnie des enfants perdus de la Cour des Miracles. Chelsea et Camille écumaient à mes cotés alors que leurs compagnons s'équipaient.

-C'est idiot, lança la fille d'Apollon en jetant un casque à Camille. Franchement idiot. Non seulement ça ne résoudra rien de se battre, mais en plus il risque toutes nos vies – et celle de Rose, bon sang !

-Il sort vraiment avec ?

Camille haussa les épaules en enfilant un casque deux fois trop grand pour elle. Je savais que Grover avait une petite-amie nymphe, mais je n'avais jamais entendu parler d'une telle relation avec un Sang-mêlé.

-Je l'ai ai déjà vu s'embrasser en tout cas. C'est assez glauque quand on pense que Rose est un buisson d'épine.

-Un buisson d'épine qu'ils risquent de brûler s'ils ne peuvent pas passer, s'inquiéta Chelsea, avant de prendre quelqu'un par le bras. Dylan pour l'amour du ciel, comment tu peux laisser faire ça ?

Dylan se retourna vivement, une lueur farouche dans les yeux. Elle avait sorti son arc mais n'avait pas pris la peine de mettre une armure.

-Attends ... Tu comptes quand même te battre après ça ? m'étonnai-je.

-Enfin Dylan, ce n'est pas sérieux, tu es blessée ! renchérit Camille. C'est stupide enfin ! Déjà cette bataille est stupide ! Obliger Travis à y participer est stupide, risquer nos vies est stupide et enfin Jasper est stupide !

-Alors pars ! s'agaça Giovanni qui passait par là. Si tu trouves que tout cela est stupide, va-t'en, fuis !

Et il s'en fut, dépité, les armes à la main. Je remarquai que la plupart de leurs équipements étaient de type grec – sans doute dérobés à la troupe de Luke venu les attaquer. Chelsea le regarda partir, les yeux plissés.

-Partir ..., répéta-t-elle en un souffle. Oui, c'est une bonne idée.

-Pardon ?

Dylan écarquilla les yeux en dévisageant Chelsea comme si elle était folle. Mais Camille n'avait pas l'air de la trouver si folle que cela parce qu'elle hocha la tête.

-Oui. On a pas de temps à perdre avec cette bataille. On doit retrouver Alice.

-Attendez, vous voulez qu'on parte tout de suite ? compris-je, un lent sourire s'étirant sur mes lèvres. Et Clopin ?

-La bataille c'est sa décision, répliqua Camille d'un air farouche. Pas la mienne. Moi je dois aller retrouver ma sœur.

Je fus à deux doigts de prendre ma jeune demi-sœur dans mes bras en la couvrant de mille mercis. Sa phrase reflétait mes sentiments. Mon père m'avait demandé de retrouver Alice – et le plus vite que possible. Alors je n'avais pas de temps à perdre avec une bataille qui ne me concernait absolument pas. Mais Dylan ne semblait pas de cet avis :

-Mais vous êtes sérieux ? On est censé être fidèle à la Cour ! On ne peut pas partir comme ça, on doit la défendre !

-On n'aurait pas eu à la défendre si Clopin avait décidé de parler aux Romains au lieu de leur foncer dessus ! rétorqua Chelsea. Maintenant si j'ai bien compris, une gamine est en danger, vous n'avez pas le temps à perdre.

-Vous ? répétai-je en fronçant les sourcils.

Chelsea hocha doucement la tête. Ses yeux brillaient de détermination.

-Je n'ai pas oublié mes vieux réflexes de Sang-Mêlé Romaine. Une quête c'est trois personnes. Il s'agit de ta sœur, ainsi que celle de Camille, c'est normal que ce soit vous qui y alliez. Et ton père t'a dit de t'aider de Dylan. Ça fait trois. Moi, je vous couvre.

-Je devais juste conduire Travis à la Cour, protesta Dylan, prise de court. Non, je dois rester, je dois ...

-Non, Dylan, soupira Camille, le visage crispé. Non. Je pense savoir ce qu'il se passe et ... On aura besoin de toi.

-Sérieux ?

Je dévisageai ma demi-sœur avec incrédulité. Quand on s'était parlé dans la pièce télé, elle avait nié savoir la moindre chose concernant Alice. Pourtant, à présent, son regard racontait une toute autre histoire. Elle hocha sinistrement la tête.

-On en parlera plus tard. Mais ce qui est sûr, c'est que tu dois venir avec nous, Dylan.

-C'est n'importe quoi ... Ecoutez, je ne peux pas ...

-Ah non ? cingla Chelsea. Tu préfères suivre aveuglément Clopin sans réfléchir ? Dylan, je t'ai connue meilleure que ça. Tu es intelligente, tu sais que ce que Clopin fait est idiot. Les Sangs-Mêlés de Castellan étaient clairement hostiles. Pas ici. On aurait pu parlé. Et de toute manière ... Si eux sont ici, c'est que toute la légion est au courant. Si on gagne et que ces soldats ne rentrent pas, ils enverront toute l'armée. Réfléchis, Dylan ... C'est la fin de la Cour.

Dylan contempla Chelsea avec de grands yeux ronds, comme sonnée par ses mots. Je ne pouvais m'empêcher d'être entièrement d'accord avec ce que disait la fille d'Apollon. Et je ne voulais pas me retrouver clouer ici alors que je devais retrouver Alice. Pendant un moment qui me semblait une éternité, Dylan resta silencieuse et immobile devant Chelsea. Dehors, les premiers sons de la bataille se faisaient entendre : le fracas des épées, les flèches fouettant l'air, le feu grec explosant. Il me semblait même que me parvenait les cris des premiers blessés.

Clopin était complétement fou.

Finalement, Dylan baissa la tête, et son air vaincu me sembla être le meilleur des augures. La lieutenante abdiquait.

-D'accord, lâcha-t-elle d'une voix rauque. D'accord. En soit on pourrait fuir ... Oui, on va faire ça. Chelsea, couvre-nous, et ensuite rassemble le reste de la troupe. Oppose-toi à Clopin s'il le faut, mais fait en sorte qu'ils s'échappent. Fais les passer le Colorado. Essaie d'en sauver le maximum.

-C'est ce que je comptais faire, promis Chelsea en prenant derechef un arc.

-Et fais attention à toi. Je vais chercher des affaires pour la route.

Dylan disparut dans la cuisine, me laissant seule avec Camille, qui avait agrippé un parapluie jaune vif, et Chelsea qui se préparait au combat. Ses doigts tremblaient et mon cœur de se serra. Qu'allait-il se passer pour elle, à présent ? Une idée me traversa l'esprit et je pris Chelsea par les épaules.

-Ne passez pas le Colorado. Allez vers la ville, vers chez moi. Ma mère vous aidera.

-Quoi ?

Je soupirai profondément, me promettant d'appeler ma mère dès que je serais à l'abri. C'était en parti moi qui l'obligeait à ainsi se sacrifier, il était normal que je répare mes tords. Et au fond de moi, je sentais vibrer la fibre Hermès en moi, celle qui me poussait à protéger les voyageurs et les démunis.

-Je lui parlerais, assurai-je en plantant mon regard dans celui de Chelsea. Elle vous aidera, mais il faut que tu les y emmènes. Je suis sûr que tu connais Denver comme ta poche à force d'y mendier.

-Et n'allez pas dans notre planque, ajouta Camille. S'ils sont au courant pour ici, ils connaitrons sans doute leur existence ... Prenez la camionnette et partez pour Denver.

Chelsea nous fixa, pétrifiée, avant de hocher la tête avec détermination. Puis elle me sauta au cou et je sentis ses larmes effleurer ma peau. Je refermai mes bras sur elle avec automatisme.

-Je suis désolé ... Mais tu es courageuse, Chelsea. Tu vas y arriver.

-J'espère. Merci Travis. Et retrouve ta sœur.

Elle se détacha et prit Camille dans ses bras. Elle ne semblait pas particulièrement aimer les contacts physiques mais se laissa faire de mauvaise grâce. Dylan revient avec deux sacs bien fournis, et son arc déployé. Des plumes pendaient à sa hanse. Elle en donna un à Chelsea et l'autre à moi. Les deux jeunes filles s'étreignirent. Puis nous plongeâmes dans l'enfer.

La barrière de ronce était en feu et dégageait une forte fumée qui obscurcissait d'avantage la place et piquait les yeux. Camille se plia en deux, prise d'une forte quinte de toux, si bien que je dus la soutenir durant presque tout le trajet. Dylan et Chelsea poussèrent un cri d'horreur en découvrant le spectacle. A l'écart des combats, affalée contre le mur de la fermette, une jeune femme semblait à l'agonie. Tout son corps était couvert de cloque et de brûlure, comme s'il prenait tout ce que les ronces subissaient. Je n'avais pas besoin du cri déchirant de Dylan pour deviner qui était cette femme :

-Rose ! Rose, non !

Un cri bien plus terrible encore se fit entendre et je vis une grande silhouette en casque courir vers la nymphe, et prendre son visage entre les mains avec douceur et douleur.

-Clopin, devina Camille en me prenant par le bras. On ne peut plus rien, à présent, il faut y aller.

-On doit l'aider, hoqueta Chelsea, dont les larmes coulaient sur le visage.

-Clopin est un fils d'Apollon comme toi, s'il doit l'aider il le fera, répliqua durement Camille. Nous on ne peut rien faire. Allez, allons-y.

Ce fut difficile d'arracher Dylan et Chelsea à leur contemplation. Les larmes brillaient dans les yeux de la fille de Perséphone et je dus la prendre fermement par les épaules pour que nous puissions reprendre notre chemin. Toute la Cour était entourée du buisson enflammé, et nous nous éloignâmes des combats pour trouver un passage. Dylan s'arrêta devant les ronces en feu, le nez niché dans son coude pour la protéger des fumées.

-C'est Rose, fit-t-elle d'un air désolé. Je ... Je ne peux pas la couper, non ...

-Elle brûle, fit tristement remarquer Camille. Alors la couper ... Ça ne fera pas pire.

Mais Dylan n'y paraissait pas résolue. Alors je sortis mon mousqueton, le transformai en poignard de bronze céleste, et me mis au travail. Certaines branches ne brûlaient pas et je commençai par elles. Camille donnait de grands coups de pieds dans les ronces à chaque fois, cherchant à se frayer à passage avec son parapluie jaune. Je compris un instant plus tard que son parapluie n'était pas un simple parapluie : sa poitrine semblait être aussi aiguisée qu'un couteau et elle s'en servait pour m'aider pour les branches enflammées. La chaleur n'était néanmoins pas sans conséquences : j'avais de plus en plus de mal à respirer et mes mains commençaient à se couvrir de cloques. Camille n'était pas dans un meilleur état et se mettait à tousser assidument. Chelsea finit par nous tirer tout deux de là, alors que nous avions bien entamé des ronces, pour nous soigner. Je soupirai de soulagement quand je vis les cloques disparaître de mes mains.

-Bon j'en ai ma claque, râla Camille en brandissant son parapluie. Reculez.

Elle appuya sur un bouton et son parapluie se déploya. Un instant, je craignis qu'elle décide de passer à travers les flammes en se servant de lui comme bouclier. Mais au moment où le parapluie se déployait, je sentis comme une déflagration qui venait de sa pointe. Chelsea me tira vivement en arrière au moment où les ronces explosaient, créant un passage étroit mais suffisant pour que l'ont puisse passer. Camille eut un sourire satisfait en agitant son parapluie.

-Il est chouette, hein ? C'est Jennifer qui m'a aidé à le perfectionner. Il a plein d'autres fonctionnalités.

-Tu te bats avec un parapluie. Par les dieux. Après ça, j'aurais tout vu.

-Non, tu n'as pas tout vu, marmonna Dylan. Il s'appelle Mary Poppins.

-Oh par pitié ...

-On discutera du nom du parapluie de Camille plus tard, répliqua Chelsea d'une voix pressante. Il faut que vous y alliez, maintenant.

-Je ne crois pas, non.

Nous fîmes prestement volte face pour voir arriver Giovanni, le fils d'Athéna, et Allison la fille de Némésis. Elle nous tenait en joue avec un long fusil que je soupçonnai être munie de balle en bronze céleste, et Giovanni tenait entre ses mains une longue épée. Dylan et Chelsea bandèrent aussitôt leurs arcs et Camille s'arma de Mary Poppins.

-Personne ne sort de la Cour, princesse, gronda Allison, les yeux rivés sur Dylan. Tu le sais, c'est toi qui l'a crée.

-Mais je n'aurais jamais cru que cela tournerait ainsi, rétorqua Dylan, les dents serrées. Ça ... devait juste être un havre de paix.

-Vous n'êtes obligé de faire ça, plaida-je, baissant ma garde d'un centimètre. Vous pouvez encore vous sauver, vous pouvez encore ...

La balle partit trop vite pour que je puisse la voir. Dylan me poussa sur le coté et la balle lui effleura la joue, y creusant un sillon écarlate. Je tombai sur le sol et une autre balle alla se ficher entre mes deux pieds. Les yeux d'Allison étaient durs comme la roche.

-Je suis presque sûre que tout ça est arrivé par ta faute. Tu as livré la Cour et nous ...

-C'est faux ! Je veux juste retrouver ma sœur.

-Et bien tu la retrouveras aux enfers.

Avant que je ne puisse bouger, ou que Dylan ou Chelsea puisse songer à décocher leurs flèches, Giovanni, aux cotés d'Allison, poussa un cri écœurant. Ses yeux tombèrent sur son épaule, où dépassait la pointe d'une lance dorée.

Les lances des Romains.

J'échangeai un regard alarmé avec Dylan alors que Giovanni tombait à genoux.

-Chelsea, va t'en ! lui cria Dylan en la poussant vers la ferme. Vite !

Chelsea hésita un instant, avant de se mettre à courir en direction des flammes. Allison voulut retirer la lance de son épaule quand un cheval arriva à vive allure, se cabrant devant elle. Elle se laissa tomber sur le sol, pétrifiée par son arrivée soudaine, et un soldat Romain la désarma, avant de la mettre en joue. Quant à moi je me relevai et pris vivement Dylan par la main.

-On doit y aller, vite !

Dylan hocha la tête et nous nous tournâmes vers le passage que Camille avait crée. Celle-ci tenta de s'y engouffrer, quand une nouvelle lance se ficha devant elle, lui barrant la route. Le cheval s'avança en quelque pas sur moi et son cavalier me désarma avec une facilité déconcertante pour pointer son épée sous ma gorge.

-Vous n'irez nul part. Baissez vos armes.

La voix m'était affreusement familière. Comme l'était le cheval et les cheveux couleur caramel qui dépassaient du casque de la cavalière.

-Hazel Levesque.

Je vis les sourcils de Hazel se froncer du haut de son mythique cheval, Arion. Elle abaissa son épée.

-Nous nous connaissons ?

-Travis Alatir, fils d'Hermès et ancien Conseiller-en-Chef du Bungalow 11.

-Oh.

Ce n'était pas un « Oh » particulièrement encourageant. Je fouillai dans ma mémoire si j'avais pu ne serait-ce qu'un tant soit peu déplaire à Hazel durant son séjour à la Colonie, mais rien ne me venait à l'esprit. A priori, elle ne devait pas me détester.

-C'est toi qui a accroché de l'ail partout dans le bungalow 13 pour vérifier si mon frère Nico était un vampire ? Et qui a mis du sang sur tout ses Tee-Shirt pour le faire croire ?

Connor, maudit sois-tu, rageai-je en souriant le plus courtoisement que possible.

-Ça devait être Connor, mon frère. Je ne suis plus à la Colonie, moi.

Hazel resta un instant silencieuse, me lorgnant du haut d'Arion. Malgré sa taille modeste, je ne pouvais m'empêcher de la trouver impressionnante dans son armure dorée, montant ainsi un animal mythique. Mais peut-être était-ce également dû à l'épée qu'elle pointait élégamment sous ma gorge. Puis, après un instant qui me parut une éternité, elle rangea son épée dans un fourreau accroché à sa selle, et mit pied à terre. Elle était bien plus petite que moi, le haut de son casque m'atteignant à peine, et pourtant, son impérieux regard d'or me clouait sur place.

-Maintenant, je crois que je te reconnais. Alatir, hein ? Les jumeaux ?

-Connor est mon petit frère, pas mon jumeau. Mais oui.

-Un grec, avec ça, marmonna un des soldats derrière elle. On peut le tuer, centurion ?

-Non, répliqua sèchement Hazel. Nous ne sommes pas là pour tuer. (Elle vrilla à nouveau ses yeux sur moi). Si tu es un grec de la Colonie, qu'est-ce que tu fais là ?

-Il est venu me chercher, intervint Camille, lorgnant méchamment le Romain qui la tenait en respect avec une lance. Notre père nous a demandé de retrouver ma sœur jumelle, Alice. Elle a disparu, on doit la retrouver.

Les sourcils de Hazel se froncèrent un peu plus et son étalon piaffa d'impatience. Elle caressa doucement ses naseaux sans nous quitter du regard.

-Hazel, insistai-je avec la foi du désespoir. C'est assez urgent pour que mon père m'ordonne d'y aller, alors que j'avais cessé toute activités de Sang-Mêlé. Je t'en supplie, peu importe ce que la Légion est venu faire ici ... Laisse-moi y aller. S'il te plait.

-On a été informé qu'un groupe de Sang-Mêlé était ici, avoua Hazel en penchant la tête. Dont d'ancien de la Légion qui étaient recherchés. Je ne voulais pas que ça finisse ainsi.

-Nous non plus, lâcha Dylan dans un filet de voix.

-On veut juste retrouver Alice, assurai-je, plantant mon regard dans celui de Hazel pour que le message passe mieux. Je t'en prie ... Il s'agit uniquement d'Alice. Elle est peut-être en train de mourir, ou je ne sais pas encore quoi ... Hazel, mon père me l'a demandé, c'est forcément important. S'il te plait ...

Je vis Hazel hésiter, ses lèvres se pinçant en une mince ligne marquant son indécision. Elle contempla Dylan, blessée, et désarmée, puis Camille et son parapluie jaune. Nous formions un piètre groupe, mais c'était tout ce dont je disposais pour retrouver ma sœur et j'en avais besoin. Les soldats parurent sentir l'hésitation de leur cheffe.

-Hazel, on a des ordres ... Reyna nous a demandé de les ramener.

-Pas tous, protesta la centurion. Seulement ceux que la Légion recherchait. Comment vous vous appelez ?

Ses yeux se tournèrent vers Dylan et Camille. Elles m'interrogèrent du regard et je hochai imperceptiblement la tête. De toute manière, elles étaient toutes deux grecques : ce n'était sans doute pas elles que les Romains cherchaient. Elles déclinèrent leurs identités et Hazel parut satisfaite. Un mince sourire s'étira sur ses lèvres.

-Dans ce cas, je ne vous retiens pas.

-Mais Hazel ...

-Ils ne sont pas sur nos listes. Ils ne nous intéressent pas. Vous pouvez y aller.

Je sentis le soulagement m'envahir. Dylan ramassa l'arc qu'elle avait laissé tomber et Camille s'engagea dans le passage dans demander son reste.

-Merci, centurion Levesque, soupirai-je avec un grand sourire. Mon instinct ne m'a pas menti, tu es une fille bien.

-Mouais. J'ai quand même une condition, te concernant. Dis à ton frère de ne plus embêter le mien. Sinon, je te retrouverais et c'est toi qui payeras, d'accord ?

Son regard sérieux était démenti par son léger sourire. Une vague de mélancolie m'étreint quand je songeai que vu le contexte actuel avec Connor, je pourrais l'obliger à rien – et de toute manière, il s'agissait de Nico Di Angelo. Le coup du vampire, j'aurais été capable de le faire moi-même.

-Je vais essayer. Merci.

Et sans attendre sa réponse, je fis volte-face, et suivis Dylan et Camille à travers les ronces, le feu et l'obscurité.

***

-Toujours aucun message de Chelsea, remarqua Dylan en rangeant son téléphone.

Elle était allongée à l'arrière de la vieille Prius que nous venions de voler. Une plaie saignait à sa joue, et elle grimaçait chaque fois qu'elle bougeait, mais dans l'ensemble elle était intacte. Camille l'était également, et dormait à présent contre la fenêtre du coté passager, son parapluie jaune contre sa poitrine. Je conduisais la voiture, avec parfois une brusquerie qui me valait le regard noir de Dylan dans le rétroviseur.

-Les communications passent mal en ce moment, lui dis-je, me rappelant du mal que j'avais en ce moment à joindre ma sœur Julia au Camp. Et tu veux nous attirer des ennuis ou quoi ? Tu ne sais pas que les téléphones ça attire les monstres ?

-Tu utilises bien le tien, toi.

-Pas pareil. Mon père est Hermès, messager des dieux, le roi des communications et saint créateur d'internet. J'ai une sorte de passe-droit.

-Comment tu penses qu'ils s'en sont sortis ?

Je gardai un instant le silence, les yeux rivés sur l'horizon. Nous allions vers l'ouest et l'aube éclairait le ciel d'une belle couleur rosée. La fuite de la Cour avait été douloureuse pour tous. Dylan n'avait cessé de se retourner, des larmes pleins les yeux, pour voir la ferme se réduire peu à peu en cendre et Camille avait montré quelques signes de sensibilité en pinçant des lèvres. Notre seule satisfaction avait été d'entendre, alors que nous étions à distance respectable, le bruit d'un moteur qui quittait la fermette en flamme en trombe. Chelsea avait sans doute réussi à s'enfuir – du moins, c'était ce que nous espérions.

-Aucune idée, Dylan. Clopin devait sans doute être sur la liste de Hazel – et Chelsea aussi, d'ailleurs. Elle a dû réussir à s'enfuir.

-Alors pourquoi elle n'appelle pas ? Elle doit être à Denver à l'heure qu'il est ...

-Je t'ai dis, les communications entre demi-dieux passent mal, répétai-je avec lassitude. Dylan, je suis sincèrement désolé pour la Cour mais ... Cesse de t'inquiéter, d'accord ?

Je sus avant même de voir son regard meurtrier dans le rétroviseur que c'était la mauvaise chose à dire.

-La Cour c'est tout que j'ai connu, répondit-t-elle en détachant chaque syllabe, le regard humide. J'ai aidé Clopin à la mettre debout, ça a été ma maison et ma famille durant des années ... Qu'est-ce que ça te ferait, à toi, si ton précieux camp avait été réduit en cendre que tu avais dû le fuir en urgence ? Sans avoir aucune nouvelle de ta famille ?

-J'ai participé à plusieurs guerres, Dylan, lui rappelai-je avec douceur. L'incertitude, je connais bien.

La colonie avait l'été dernier subi des dommages colossaux. Le bungalow onze s'était effondré en flamme, et avec lui certains demi-dieux restés à l'intérieur. Cela avait été une angoisse de chaque instant de déblayer les gravats à la recherche des survivants. Le siège de New-York avait été aussi un calvaire. Connor était parti en reconnaissance avec Julia et d'autres frères et sœurs, pendant l'interruption des combats. Ils étaient partis tout le jour et j'avais arpenté le hall de l'hôtel dans lequel nous avions élu domicile de long en large en les attendant, me rongeant les sangs et les ongles. Finalement, ils étaient revenus au crépuscule, portant le corps de la chasseresse qui les avait accompagnés. 

Je n'avais pas le cœur à raconter ces histoires à Dylan. Je ne voulais pas lancer une sorte de compétition sur qui avait vécu les trucs les plus horribles. Sans doute parce qu'elle gagnerait haut la main. Moi, malgré tout, j'avais toujours ma mère, Connor, et Denver. Dylan n'avait à présent plus rien. Le pire dans toute cela, c'était que j'avais douloureusement conscience que c'était en partie de ma faute. Dylan ne répondit rien, se contentant de me fixer dans le rétroviseur. J'évitai de croiser son regard – tant pour garder les yeux sur la route que pour maintenir la culpabilité à distance. Mais même sans le voir, il me transperçait.

-Cette fille, Hazel, entonna-t-elle alors, et j'y vis l'effort de penser à autre chose qu'à la destruction de la Cour. Tu la connais bien ?

-Assez mal, en fait. Je n'ai pas parlé à beaucoup de Romain quand ils ont stationné chez nous. Et toi ? Je veux dire ... C'est une fille de Pluton, non ?

Dylan dressa un sourcil.

-Et ?

-Et ... Je ne sais pas, je me suis dit que ... Peut-être tu lui répondais ...

-Je suis une fille de Perséphone, mauvaise herbe. Pas de Proserpine.

-Ah.

Je me sentais un petit peu idiot de ne pas avoir vu la nuance. La personne à laquelle elle répondait devant être grecque. Pourtant, Hadès/Pluton ne devait pas avoir des masses d'enfants, parce qu'un pacte – qui n'avait de pacte que le nom car personne ne l'avait respecté – avait longtemps interdit aux trois grands d'avoir des enfants. Et malheureusement, je ne connaissais qu'un grec qui avait survécu à cela.

-Et sans indiscrétion ... Tu sais à qui tu réponds ? Je veux dire, quel enfant Hadès a eu pour ... euh ... « justifier » ta naissance ?

Je crus qu'elle n'allait pas me répondre et m'envoyer sur les roses. Mais contre toute attente, elle ne fit que grimacer.

-Je ne suis pas censée savoir ça, en fait. Ma mère ne me l'a pas dit la seule fois que je l'ai vue. Et je ne suis jamais allée aux Enfers. Mais un jour, un gamin est venu me voir. Il m'a dit que j'étais sa « réponse » et j'ai compris. Peut-être que tu le connais, il est à la Colonie.

-Nico Di Angelo.

-Ouais, c'est ça.

J'accusais le coup, assommé. Il avait bien sûr été la première personne à laquelle j'avais pensé, mais j'avais éloigné cette possibilité de mon esprit. Je n'avais jamais réellement su ce que je ressentais vis-à-vis de ce demi-dieu sombre et mélancolique au regard acéré. En réalité, je pensais qu'il me faisait flipper. Oui, c'était cela, j'avais peur de Nico et cette aura ombreuse qui s'accrochait à ses pas. Je n'aimais la mort, et Nico Di Angelo l'incarnait parfaitement. L'idée que Dylan puisse avoir un rapport, même infime avec lui me rendait mal à l'aise.

-Tu ne l'aimes pas, devina Dylan, remarquant visiblement mon malaise.

-Ce n'est pas ça. A vrai dire, je ne lui ai quasiment jamais parlé. Il est juste ... bizarre. Donc tu l'as rencontré ?

-A Denver, oui. Il est venu me voir. Mais je ne lui ai rien dit sur la Cour, si c'est ce que tu penses. On a juste pris un café, et je me suis faite passée pour une gamine des rues.

-Cour ou pas, c'est ce que tu es, Dylan.

-La ferme. En tout cas je l'ai trouvé gentil. Son père l'avait informé de l'entente et il voulait voir à quoi ressemblait sa réponse. Mais il ne m'a pas beaucoup parlé de lui.

-Voilà qui est surprenant.

Il n'y avait pas plus secret que Nico Di Angelo. Pourtant, de longues années à le croiser m'avaient appris quelques trucs – son étrange passion pour les cartes mythomagic, la perte de sa grande sœur et sa toute nouvelle homosexualité. Cette dernière chose fit rire Dylan de bon cœur. Imperceptiblement, je me sentis me détendre, et mes doigts se décrisper du volant. Cela faisait du bien d'entendre Dylan rire.

-Je t'avoue que je n'aurais jamais parié là-dessus, quand je l'ai vu, avoua-t-elle. Il est si sombre, si renfermé ...

-Qui ça ?

Camille venait d'ouvrir un œil, gardant toujours dans ses bras sa meurtrière Mary Poppins. Ses deux tresses noires étaient complétement défaites.

-Un copain de Dylan, répondis-je, récoltant le regard noir de celle-ci. Bien dormi la marmotte ?

-Ça va. On est où, là ?

-Tu nous as dit d'aller vers l'ouest, on va vers l'ouest. On vient de passer la frontière avec l'Utah.

-Parfait.

-Camille ? (Dylan se redressa pour avancer sa tête entre nos deux sièges). Maintenant, tu vas m'expliquer pourquoi tu étais si sûre d'avoir besoin de moi ?

Camille eut un vague mouvement d'agacement, comme si elle chassait une mouche. Ses yeux noirs étaient gorgés de sommeil et ce fut d'une voix atone qu'elle répondit :

-J'ai rêvé d'Alice ces derniers temps. Je ... Je pensais que c'était des simples rêves, venus de mon imagination mais ... (Elle me jeta un regard). C'est plus que ça, non ?

Je hochai la tête, jubilant intérieurement. Camille avait rêvé d'Alice, elle l'avait admis dans la salle télé. J'ignorais si c'était mon père qui lui avait envoyé ces rêves ou si c'était leur lien de jumelles qui se manifestait, mais c'était notre seule chance de savoir ce qui lui était arrivée.

-Une des règles primordiales chez les demi-dieux. Un rêve n'en ai jamais un.

-Et qu'est-ce que tu as vu ?

Camille garda un instant le silence. C'était peut-être l'effet de mon imagination, mais son regard semblait légèrement embué.

-Je crois qu'elle me cherchait.

La voix de Camille était rauque et Dylan mit doucement sa main sur son épaule.

-Je pensais que c'était mon subconscient qui m'envoyait ses rêves. J'ai ... j'ai toujours attendu qu'Alice ou ma mère vienne me chercher. Une façon de me narguer, quoi.

-Non, Camille, lui souffla doucement Dylan pour lui prendre la main. Ta sœur te cherchait vraiment, pas vrai Travis ?

Je me trémoussai, mal à l'aise. En réalité, Alice n'avait jamais cherché Camille. Et cela n'avait aucun sens qu'elle la cherche.

Parce que Camille était censée être morte.

Je compris en un éclair ce qui s'était passé dans la tête d'Alice. Mes doigts se crispèrent à nouveau sur le volant.

-Elle est partie vers les Enfers.

-Pire que ça. Elle y est déjà descendue, Travis. Et c'est pour ça qu'on a besoin de toi, Dylan. On a besoin d'un enfant des Enfers pour aller dans les Enfers.

Dylan cligna des yeux, abasourdie, et Camille dégagea la main de la sienne. A présent, ses yeux étaient aussi sec que le désert dans lequel nous étions plongés.

-Comment le sais-tu ? souffla Dylan, perplexe. Comment sais-tu qu'elle y est ?

-Je le sens, c'est tout. La dernière image que j'ai eu d'elle, c'était à Los Angeles. On habitait là-bas. Mais ... Je ne sais, on aurait dit qu'elle partait en expédition. Elle avait un sac à dos et des chaussures de marche. Et une photo de nous deux dans les mains. Mais maintenant, elle n'est plus à Los Angeles. Elle est aux Enfers.

Dylan garda un moment le silence, dévisageant Camille avec une sorte de gêne. Je devinai qu'elle n'aimait pas particulièrement cette nature là, celle de fille des ombres, et qu'elle répugnait à l'utiliser. Pourtant, elle finit par pousser un soupir de résignation.

-OK. OK, je veux bien l'entendre. Alice te croit morte, elle va te chercher aux Enfers. Jusque là c'est logique. Tu as besoin d'une enfant des Enfers ? Pas forcément nécessaire, mais assez logique aussi. Et tu as une chance incroyable que cela arrive en automne.

-Peut-être que mon père a parfaitement calculé ce timing.

Dylan me jeta un regard acéré pour me faire taire.

-Mais, je suis peut-être une enfant des Enfers – du moins en ce moment – il n'empêche que je n'ai aucune idée de comment on y accède.

Camille se mordit nerveusement la lèvre et baissa les yeux d'un air déçu. En revanche, un léger sourire s'étira sur mes lèvres.

-Pourquoi tu souris comme ça ? s'étonna Dylan avant de se rembrunir. Je déteste quand tu souris comme ça.

-Ah la la, Dylan. Ta formation de demi-déesse à la Cour a été plus que lacunaire. (Elle rougit furieusement en me fusillant du regard). Crois-moi, à force de côtoyer Percy Jackson, on apprend quelques trucs utiles. Camille (j'extrais mon portable de ma poche pour lui tendre). Entre « Los Angeles » dans le GPS.

-Mais Alice n'y est plus ...

-En fait, si. Ou plutôt en dessous. Je vous expliquerais. En tout cas, les filles, j'espère que vous avez fait le plein de drachmes. Parce que comme nous sommes vivants, je pense que Charon nous demandera plus d'une pièce pour passer. 

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