Chapitre 48 : Dylan
Le lundi matin, un étrange stress lui noua le ventre. Il allait devoir faire face au lycée pour la première fois depuis qu'il s'était mis en couple avec Raven. Ce qui voulait dire qu'il allait agir comme si ce n'était pas le cas et supporter de le voir entouré de ses fans. Il ne savait pas s'il saurait s'empêcher d'être jaloux en voyant Skye et Brianna lui tourner autour comme deux vautours.
La voiture de Steven se gara devant la maison et un coup de klaxon résonna. Darren goba les dernières cuillerées de céréales et récupéra son sac sur le canapé. Les deux frères sortirent de la maison rapidement. Le cœur de Dylan fit un salto dans sa poitrine en voyant Raven appuyé contre la voiture, les mains dans les poches, son insupportable sourire séducteur sur les lèvres.
- Salut, mon chéri.
Dylan cilla, se demandant depuis quand Raven avait une voix si riche et suave qu'il en avait des frissons. Ce n'était pas le seul détail qu'il avait négligé à propos de son petit ami. Il n'avait jamais remarqué combien sa chemise soulignait la ligne de ses épaules musclées et la forme de bras, combien son jean accentuait l'étroitesse de ses hanches et la courbure de ses reins, combien son parfum si simple de cannelle et de chocolat était attirant...
Il frémit lorsque la main de Raven glissa sur sa hanche pour venir l'entourer. Il ne résista pas, se laissant enlacer, se laissant embrasser.
Ce fut un coup de klaxon qui les força à se séparer et à monter en voiture. Il ne réagit pas quand Raven assena un coup sur la tête de Darren. Steven démarra sans rien dire, ne demandant pas la moindre explication. Pas que Dylan ait attendu autre chose de son ami. Steven ne s'intéressait pas à la vie privée des autres.
Durant le trajet, Darren râla sur tous les sujets qu'il put trouver. Notamment sur les devoirs que Dylan l'avait forcé à faire la veille au soir après le départ de Raven.
Steven se gara devant le lycée et Darren jaillit hors de la voiture, manquant d'arracher le rétroviseur avec son sac dans sa précipitation. Dylan roula des yeux. Son frère pouvait bien râler après Raven et lui quand il agissait ainsi dans l'unique but d'aller rejoindre Delilah.
Raven le retint par le bras dans la voiture. Il se tourna vers lui, surpris. Il ne résista pas lorsqu'il glissa une main sur sa nuque pour le rapprocher de lui et l'embrasser.
- Si je dois passer la journée sans pouvoir le faire, mieux vaut que je t'embrasse maintenant.
Dylan se sentit sourire et rosir. Raven sortit de la voiture après avoir récupéré les clés que Steven avait laissé sur le contact.
La journée passa comme toutes les autres qui suivirent. Dylan eut du mal à contenir sa jalousie par moments malgré que Raven se comporte de façon exemplaire. Ils agissaient comme ils l'avaient toujours fait mais le texan n'était plus si enclin à flirter avec tout le monde pour son amusement personnel. Il passait encore trop de temps avec Skye et Brianna à son goût, cependant. Pas qu'il puisse lutter contre.
En dépit de ce secret parfois difficile à supporter pour Dylan, ils étaient heureux. Raven avait l'art et la manière de le surprendre au détour d'un couloir pour un baiser volé ou une étreinte rapide et subite. C'était devenu un jeu entre eux, un petit plaisir secret qui pimentait leurs journées de cours. Et personne ne se doutait de rien.
Même Harmon qui passait son temps avec Raven ne voyait pas les regards, les effleurements, les sous-entendus. Il continuait de ne rien remarquer, d'insinuer qu'ils finiraient ensemble et qu'il gagnerait son pari avant la fin de l'année. Dylan se sentait un peu coupable envers leur ami. Il connaissait Harmon depuis le collège et, dans le dos de tout le monde, dans le dos d'Esther, il avait été là pour lui. Il avait risqué de finir harcelé à son tour par pure amitié. Et maintenant que Dylan sortait enfin avec quelqu'un, il ne le lui disait pas. Il le lui cachait. Globalement, il ne faisait pas confiance à son plus proche ami. Il se sentait horrible à chaque fois qu'il faisait face à Harmon.
- Tu veux en parler à Harmon ? lui demanda Raven.
Surpris, Dylan se tourna vers lui, titubant légèrement sur le trottoir. La main de Raven vint dans son dos pour le stabiliser à côté de lui, épaule contre épaule.
- J'ai vu que tu étais mal à l'aise avec lui, reprit-il. Surtout quand il se montre lourdingue avec ses allusions et son pari. C'est ton ami donc je me doute que ça doit être difficile de ne rien lui dire.
- Depuis quand suis-je un livre ouvert pour toi ?
- Je ne parviens pas toujours à te comprendre mais parfois, j'y arrive parce que je commence à te connaître et tu es quelqu'un de trop honnête pour mentir à l'un de tes meilleurs amis.
- Tu as raison, soupira-t-il. Je me sens mal de le lui cacher. Je devrais lui faire plus confiance que ça après plus de quatre ans d'amitié et tout ce qu'il a fait pour moi.
- Alors fais-le. Parle-lui. Harmon est plus sérieux qu'il n'y paraît.
- Pourquoi ne suis-je pas étonné que tu me dises cela ?
- Parce que je suis fin psychologue et que je passe beaucoup de temps avec lui. Il ne parle pas ouvertement et ne le montre pas mais il réfléchit bien trop pour son propre bien. Et je pense que, s'il insiste autant, c'est parce qu'il s'en doute. On sort ensemble depuis plus d'un mois alors forcément qu'on a laissé échapper des choses devant lui. Et puis, bon, la discrétion et moi, ça fait deux, faut dire aussi.
Dylan rit malgré lui. Il n'y avait que Raven pour exposer les choses aussi ouvertement. Il n'avait réellement aucune honte. Il connaissait ses défauts et les acceptait. Parfois, il acceptait même un peu trop ce qui n'allait pas dans sa vie ou chez lui. Il avait cessé de lutter et vivait sa vie sans se retourner.
- Penses-tu vraiment qu'il s'en doute ?
- Je ne serais pas surpris que ça soit le cas. Je ne peux pas en jurer, par contre. Peut-être. Tout ce que je sais, c'est que tu veux lui parler et que c'est ce qui est véritablement important. Et puis, si jamais il ne sait pas tenir sa langue, est-ce si grave que ça ?
Dylan sentit que la question ne tenait pas vraiment à l'attitude de Harmon, de savoir si c'était impardonnable qu'il parle plutôt que de savoir si Dylan pourrait accepter que leurs camarades apprennent leur relation. Peut-être Darren avait-il eu raison de le prévenir sur la possible réaction de Raven face à sa demande de secret.
- Non, ça ne serait pas grave mais je préférerais que ça soit juste toi et moi, simple et sans rumeurs volant dans tous les coins. Je sais qu'il y aura quelqu'un pour se mêler de ce qui ne les regarde pas.
En vérité, s'il devait être entièrement honnête, ce n'était pas ce quelqu'un qui parlerait qui l'inquiétait. C'était le souvenir de ces hommes qui les avaient agressés à la sortie de la pizzeria qui le hantait malgré lui. Il ne s'était rien passé de très grave mais il savait que ça pouvait empirer, surtout avec des lycéens. Il suffisait d'une seule personne pour déclencher un raz-de-marée. Il le savait parfaitement. Esther en avait été la preuve.
Et il refusait de laisser quoi que ce soit détruire sa relation avec Raven.
- Je ne laisserai jamais personne te faire du mal, Dylan. S'il y a une seule personne qui essaie d'ouvrir sa grande bouche, il devra apprendre la langue des signes quand j'en aurais fini.
- Ne dis pas ça. Je ne veux pas que tu te battes, Raven. C'est pour ça que je veux que ça reste entre nous. Pour qu'on soit tranquilles et qu'on reste comme on l'est.
Il réalisa qu'ils étaient arrivés devant chez Raven. Il ne s'était même pas rendu compte qu'il l'avait suivi au lieu de changer de rue au carrefour pour partir chez lui. Il ne résista pas lorsque Raven l'entraîna à l'intérieur. Il jeta son sac à côté du sien sur le canapé et lui emboîta le pas jusque dans la cuisine. Comme toujours, Raven leur prépara de quoi grignoter avec la boisson chaude qu'il affectionnaità ce moment-là.
- Peu importe ce qu'il se passe, Dylan, je leur ferai avaler leurs langues s'ils s'en mêlent.
- Tu n'en feras rien. Si ça arrive, tu les ignoreras.
- Après leur avoir mis mon poing dans le nez, dans ce cas.
Dylan soupira, devinant que ça ne servirait à rien de lutter. Quoi qu'il se passe, Raven ne saurait pas l'ignorer et passer au-dessus. Il ferait connaître son point de vue et ne laisserait personne tenter de dicter sa loi. Il lui arrivait d'admirer la force et la pugnacité du texan mais, cette fois, pour leur relation, il aurait préféré qu'il réagisse plus calmement.
- Toujours est-il que je ne pense pas que ça arrivera, reprit Raven, appuyé sur l'îlot, sa tasse entre les mains. S'il y avait des homophobes au lycée, tu ne penses pas qu'ils se seraient déjà fait connaître ? Je n'ai jamais été discret en flirtant avec toi. Sans compter les trois couples gays qu'il y a au lycée et qui n'ont aucun soucis. C'est sûr, il y a des gens qui n'aiment pas trop ça alors ils restent discrets mais ils ne cherchent pas à se cacher parce qu'ils savent qu'il ne leur arrivera rien.
Dylan ignorait l'existence de ces couples. Il n'avait jamais prêté attention à ce genre de détails, auparavant. Il se moquait de qui sortait avec qui, de qui couchait avec qui à part s'il s'agissait de ses amis et de son frère. Ses autres camarades n'avaient aucun intérêt pour lui. À part lorsqu'ils ne respectaient pas les règles et que Dylan devait intervenir ou qu'il se retrouvait obligé de travailler en groupe avec l'un de ses camarades, ils n'étaient que des visages qu'il croisait tous les jours. Des visages qui n'avaient pas de noms, parfois, d'autres qui lui disaient vaguement quelque chose mais aucun avec une histoire, un passé.
Nonobstant, il se sentit plus à l'aise avec l'idée que le lycée finisse par savoir pour eux. Tant qu'il pourrait l'éviter, il préférait tout de même que personne ne sache à part leurs plus proches amis.
Il prit sa tasse et partit s'asseoir dans le canapé, allumant la télé au passage. Raven ne tarda pas à le rejoindre, venant s'installer contre lui. Au bout d'un moment, le texan s'allongea et posa sa tête sur ses genoux, regardant distraitement les programmes qui s'enchaînaient sur l'écran pendant qu'il zappait pour en trouver un convenable.
Il ne se rendit pas compte qu'il s'était mis à caresser les cheveux de Raven avant qu'il ne remarque que celui-ci s'était endormi. Dylan avait remarqué que son petit ami avait l'air fatigué, ces derniers temps. Il avait aussitôt pensé à ses parents mais puisqu'il ne portait aucun hématome, il sentait que c'était autre chose. Il ne posait pas de questions, sachant que Raven lui en parlerait lorsqu'il en ressentirait le besoin.
Il se pencha pour poser sa tasse par terre, ne pouvant atteindre la table basse. Il continua à faire glisser ses doigts dans les cheveux de Raven, le laissant parfois dériver sur son visage, le long de sa mâchoire. Il laissa le temps filer sans y prêter attention. Ce ne fut que lorsque Raven roula sur le dos en se frottant les yeux qu'il réalisa que le soleil s'était couché et qu'il mourrait de faim. Et qu'il devrait sûrement rentrer chez lui.
Convaincre Raven qu'il pouvait rentrer seul chez lui demanda plus d'efforts qu'il ne l'aurait cru. Il savait que son petit ami avait un peu profité de la situation pour le garder chez lui un peu plus longtemps. Il détestait laisser Raven seul dans cette horrible maison.
Il avait beau réfléchir, il ne trouvait pas de solutions pour le problème de Raven. Il ne pouvait pas l'arracher à ses parents, il ne pouvait pas lui dire de s'installer chez eux ou chez un ami, il ne pouvait pas intervenir auprès de la police... Il ne pouvait rien faire sinon être là pour lui, pour le soutenir et l'aimer.
Il se décida à parler à Harmon dès le lendemain. Il ne pouvait pas continuer à être un aussi mauvais ami envers lui. Il lui envoya un message avant la pause de la matinée pour qu'ils se retrouvent dans une salle de classe au lieu d'aller profiter du soleil comme le reste de leurs camarades.
Harmon était déjà là lorsqu'il entra dans la salle. Il s'était assis sur une table, balançant les jambes dans le vide, jouant sur son téléphone. Il releva la tête et sourit lorsque Dylan ferma la porte derrière lui.
- C'est quoi, tout ce mystère ? De quoi tu voulais me parler ? Ça te ressemble pas d'en faire des caisses, comme ça.
Dylan alla s'asseoir à côté de lui sur la table, posant ses pieds sur la chaise en face de lui. Il baissa la tête, crispant ses mains l'une contre l'autre.
- Il y a quelque chose dont je dois te parler mais tu dois me promettre de n'en parler à personne.
- Tu m'inquiètes, Dylan. Mais je te le jure. Peu importe ce que tu me diras, ça restera entre nous. C'est à propos de quoi ?
- C'est à propos de Raven.
- Je m'en doutais un peu, à vrai dire. Mais qu'est-ce qu'il y a à dire ?
- On... On sort ensemble.
Les jambes de Harmon se figèrent et il tourna la tête vers lui.
- Ça fait un peu plus d'un mois, maintenant, poursuivit Dylan.
- Et pourquoi personne n'en sait rien ? Sérieux, pourquoi Raven parade pas dans les couloirs en se vantant de t'avoir comme petit ami ?
- Je le lui ai demandé. Je tiens à garder ça dans notre cercle le plus restreint.
- Mais pourquoi ? C'est pas comme si personne se doutait que ça finirait par arriver. Vous vous tournez autour comme des requins depuis le premier jour !
- Justement, tout le monde se mêle trop de ce qu'il se passe entre lui et moi. Alors je lui ai dit que je préférais que seuls nos amis sachent.
- Et je l'apprends un mois plus tard alors que je suis certain que les autres le savent depuis bien plus longtemps. Tu ne me fais plus confiance, Dylan ?
- Si, bien sûr que si. C'est juste que... Je sais que, parfois, tu ne sais pas tenir ta langue et je ne tiens pas à ce que ça se sache. Je veux garder ma relation avec lui simple et sans personne pour s'en mêler.
Harmon s'orienta vers lui, l'air le plus sérieux que Dylan lui ai jamais vu sur le visage.
- Et il comprend ça ?
- Oui, il sait que ce n'est pas parce que j'ai honte ou autre que je veux qu'on reste comme ça.
- Et ça se passe bien ? Entre vous ?
Dylan sourit en hochant la tête. Il vit que son ami n'était pas en colère après lui et qu'il ne lui en voulait pas. Il voulait juste rassasier sa curiosité.
- Très bien. Vraiment.
- Vu ton sourire, j'ai bien envie de te croire. Il a l'air de te rendre heureux. C'est tout ce qui compte.
- C'est le cas, admit-il. C'est pour ça que je veux que ça continue, qu'on reste comme on est.
Harmon acquiesça d'un mouvement de tête, souriant largement, visiblement heureux pour lui. Il lui donna un coup d'épaule, taquin.
- Mais, n'empêche... Pourquoi Raven ?
Dylan éclata de rire et Harmon suivit. Ils restèrent dans la salle de classe jusqu'à ce que la sonnerie résonne et les force à retourner en cours. Dans le couloir, ils croisèrent Raven et Harmon se fit un devoir de lui donner une grande tape dans le dos. Dylan roula des yeux, ignorant le regard que lui jeta son petit ami, et partit en cours.
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