Chapitre 26 : Dylan
Dylan se frotta les yeux, figé au milieu du couloir. À côté de lui, son frère était dans le même état.
- J'ai deshallucinations ou Raven et Steven... discutent ensemble ?
- Je vois exactementla même chose, répondit Dylan.
Ils étaient le lundi durant la pause matinale et Steven se tenait à côté de Raven qui fouillait son casier. C'était une vue jusqu'alors inédite puisque les deux n'avaient jamais véritablement échangé plus qu'une poignée de mots où Steven ignorait Raven.
Dylan sortit de sa transe et les rejoignit. Ils parlaient mécanique.
- Salut, chéri, luilança Raven sans même tourner la tête vers lui.
Comment pouvait-il savoir que c'était lui ? Dylan secoua la tête, préférant laisser tomber. Il ne comprenait jamais le texan.
- Depuis quand vousdiscutez, tous les deux ? préféra-t-il demander.
- Depuis que l'ons'est découvert deux intérêts communs : la mécanique et lamusique. Il me parlait du transmetteur de sa voiture, si tu veuxsavoir.
Dylan se tourna vers Steven, surpris.
- J'ignorais que tut'intéressais à la mécanique.
- Je n'ai pas jugéutile de le faire savoir puisque ni toi, ni Darren, ni Harmon necomprenaient la moindre chose aux voitures.
- Je croyais que tonpère t'avait simplement acheté une voiture canon, avoua Darren.
- C'est loin d'êtrejuste une voiture canon, Darren, crois-moi, dit Raven en claquant laporte de son casier. Sa voiture, c'est un petit bijou d'hybride.Elle date un peu maintenant mais elle reste une innovation.
- Si vous le dites,répondit simplement le plus jeune.
Il les planta là pour aller rejoindre la petite brune avec qui il avait passé la soirée lors de la fête de Martin.
- On dirait qu'ellel'a accroché, sourit Raven. À quand ton tour ?
Dylan lui jeta un regard froid sans répondre. Le texan vint passer un bras autour de ses épaules.
- Je suis ouvert àtoutes les propositions, chéri.
- Brûle en enfer,répliqua-t-il en lui flanquant un coup de coude dans le ventre.
Il partit sans attendre, le rire de Raven résonnant dans le couloir derrière lui.
Les cours reprirent avec la même monotonie. Le pire était qu'il n'était pas prêt de rentrer puisqu'il avait trois élèves à punir pour s'être battus dans la cafétéria. Il ne savait pas encore exactement combien de temps il allait les faire souffrir ni comment mais il avait encore le temps de trouver.
Après les cours, il gagna le stade et posa son sac sur le banc, attendant ses trois victimes. Ils ne tardèrent pas à arriver, l'un après l'autre, tous portant des bleus et des griffures sur le visage. Ils s'étaient bien amoché les uns et les autres.
- Et si nous passionsdirectement aux choses sérieuses ? dit-il. Puisque vous savezsi bien vous servir de vos muscles, vous allez me faire cinq centstractions là-bas. Dès que vous avez fini, vous pourrez partir.Mais je veux cinq cents tractions. Menton au-dessus de la barre.
- Cinq cents ?
- Oui.
Deux d'entre eux ne dirent rien et partirent faire leurs tractions. Le troisième jeta un regard noir à Dylan avant de leur emboîter le pas au niveau des barres.
- Je veux vousentendre compter ! cria Dylan.
Ils commencèrent à crier les chiffres, trouvant rapidement un rythme régulier. Tous les trois s'allièrent dans l'effort. Dylan s'assit sur le banc et sortit son livre de son sac. Il avait un bon moment à attendre avant que les trois ennemis terminent leurs cinq cents tractions.
- Ils doivent enfaire combien ?
Dylan tressaillit lorsque Raven se laissa tomber à côté de lui sur le banc. Il étendit ses jambes devant lui et soupira.
- Cinq cents,répondit Dylan.
- Quand même !T'y vas pas de main morte !
- Ils se sont battus,ils assument. Ils auront si peu de force dans les bras dans lesjours à venir qu'ils ne pourront plus se battre.
- Ils ne pourrontmême plus lever leur stylo ! Ça va être drôle de les voirgalérer pour noter leurs cours !
- S'ils sontintelligents, ils ne les feront pas tous à la seule force de leursbras.
- Oh ! Je vois !Tu veux qu'ils s'entraident, en fait !
- Exactement. Lesobliger à travailler ensemble les forcera à se réconcilier. Ets'ils se réconcilient, ils ne se battront plus.
- Je comprends mieuxpourquoi tu es le président des élèves. T'es un vrai démon.
Dylan sourit en ramenant son attention sur son livre.
- J'ai repensé àl'association, dit Raven. À ce qu'on pourrait faire pour aiderFarah et Bella.
Il glissa son marque-page dans son livre et se tourna vers le texan, soudain curieux. Il n'aurait pas cru que Raven prendrait cette histoire à cœur à ce point. Il ne commenta pas, demandant simplement à quoi il pensait.
- Les enfantspourraient créer des choses, des bracelets ou des colliers qu'onvendraient. Ce genre de choses qu'on fait à l'école pour lesparents.
- Pourquoi est-ce quetu ne les aiderais pas à faire des gâteaux, plutôt ? Ça sevendrait beaucoup plus et beaucoup plus facilement que des bijoux.
- Ça coûteraitbeaucoup plus cher. Et ils sont tous très jeunes, ça seraitcompliqué. Et en plus, sans une cuisine qui fonctionne, ça seraitencore pire.
- C'est vrai. Lavaisselle, le lavage des mains... En plus, il n'y aura jamais assezde place dans la cuisine. Elle est beaucoup trop petite.
- Les bijoux restentle plus simple.
- Mais ça ne sevendra pas. À part les familles ou les gardiens, ça sera dur d'envendre. Il faut quelque chose de plus commun. Quelque chose qu'onpourrait vendre à tout le monde.
Raven demeura silencieux un moment. Dylan retourna à son livre après avoir jeté un œil aux trois garçons qui discutaient tout en luttant pour faire leurs tractions. Ils étaient arrivés à quatre-vingt deux. Ils étaient encore très loin du compte. Dylan n'était pas rentré...
- Je sais ce qu'onpeut faire. La chose la plus aisée au monde.
- Quoi ?
- Pizza !chantonna Raven. C'est vraiment tout con ! Il suffit depréparer la pâte à l'avance et les enfants n'auront plus qu'àles garnir. La sauce tomate, le fromage et les pepperonis ne coûtentpas cher. C'est tout à fait réalisable puisque le four fonctionne.
Dylan ne répondit pas immédiatement, analysant son idée sous tous les angles. Si Raven préparait la pâte chez lui, il suffirait ensuite de l'emmener et de former les pizzas directement dans la cuisine. Il faudrait du personnel pour vendre les pizzas, pour s'occuper des enfants, aider le processus pour obtenir une machine bien huilée qui roulerait sans difficulté.
- C'est faisable,c'est vrai. Mais il nous faudra du renfort. À cinq, on ne sera pasassez pour tout ce qu'il y a à faire. Il faut qu'on trouve del'aide. Et il faut réparer la cuisine parce que l'évier nefonctionne pas, l'électricité ne cesse de disjoncter dans tout lebâtiment lorsqu'on allume la lumière dans la cuisine et la hottene fonctionne pas.
- Ça se répare !
- Parce que tu vas medire que tu t'y connais en plomberie ?
- En fait... Oui. Jepeux réparer à peu près n'importe quoi.
- Je ne te crois pasun seul instant.
- Tu verras. J'iraijeter un œil à la cuisine samedi matin et, suivant ce que ça dit,je pourrais peut-être même réparer quelques trucs dans lajournée.
- J'ai hâte de voirça.
- Je vais encoret'impressionner, chéri. Tu verras. Je suis plutôt doué de mesmains.
Dylan roula des yeux au ton suggestif de Raven. Il était clair que le texan ne parlait pas seulement de plomberie ou de mécanique.
Il releva la tête lorsque Raven sauta sur ses pieds et se secoua, déliant ses membres, étendit ses bras au-dessus de sa tête en bâillant, faisant remonter son t-shirt et dévoiler le bas de son ventre et une ombre d'abdominaux.
- Allez, je vais yaller. Steven m'a dit qu'il passerait après dîner. Tu veux que jete ramène quelque chose à manger ?
- Vu qu'ils en sont àcent trente-huit et qu'ils n'ont toujours pas compris qu'ilspouvaient s'aider les uns les autres pour terminer, je ne suis pascontre.
- Je reviens.
Raven ne lui demanda même pas ce qu'il voulait et Dylan ne tenta pas de le lui faire savoir. Bizarrement, il savait que le texan allait lui ramener quelque chose qu'il aimerait. Raven connaissait ses goûts et semblait toujours savoir ce que Dylan choisirait.
Comme pour le prouver, Raven revint avec un gobelet de Starbucks en plus d'un sachet de McDonalds. Il déposa le tout à côté de Dylan qui le remercia avec un léger sourire que lui rendit Raven.
- Bon courage avectes idiots, chéri. On se voit demain !
Il lui fit un signe de la main et trottina hors du stade avant de disparaître. Dylan le regarda partir avec un soupir. Il sortit son McWrap du sachet et sourit en voyant que Raven lui avait choisi le poulet et bacon. Il connaissait vraiment bien ses goûts.
Il ne put s'empêcher de se demander pourquoi Steven allait chez Raven. Ça ne lui ressemblait pas de sortir après avoir dîné avec son père. Surtout pour aller chez Raven. Les deux s'étaient soudain rapprochés et c'était vraiment perturbant. Steven ne se liait pas d'amitié facilement et il ne cautionnait pas l'attitude du texan. Pourtant, d'un coup, il se rendait chez lui, discutait avec lui... Raven le laissait même supporter les punitions seul, ce qu'il n'avait pa sfait depuis un moment. Il avait pris l'habitude de lui tenir compagnie et là, il le laissait tomber avec aisance pour aller rejoindre Steven.
Se pouvait-il qu'il y ait plus qu'un partage d'intérêt entre les deux ? Ils pouvaient parfaitement parler musique et mécanique au lycée. Alors pourquoi Steven allait-il chez Raven si tard le soir ?
Il se massa les tempes et mangea son repas en regardant les garçons comprenant enfin qu'ils pouvaient s'aider les uns les autres. Deux restèrent au sol et aidèrent le troisième à faire ses tractions en tenant chacun une jambe.
Ils terminèrent une heure plus tard et Dylan put enfin récupérer ses affaires et rentrer chez lui. Les trois garçons restèrent là, épuisés, le visage tourné vers la bruine nocturne.
S'il y avait une chose que Dylan détestait, c'était ce trajet qui le séparait de chez lui. Quand c'était l'été et que le soleil était encore levé lorsqu'il le faisait, ça allait. Ou si Darren était avec lui, ça allait aussi. S'il marchait seul à la lumière des lampadaires, la paranoïa commençait à l'étreindre et à lui écraser la poitrine.
Il accéléra le pas et soupira lorsqu'il vit sa rue apparaître. Parfois, il avait envie d'envoyer valser ses responsabilités de président des élèves. Mais pouvait-il seulement le faire ? S'il cessait de punir les élèves, North East High School retournerait à l'étage sauvage. Les retenues n'avaient aucun effet à long terme et les exclusions encore moins. La plupart voyaient ça comme des vacances imprévues. Ils se fichaient pas mal de l'état de leur dossier.
Dylan ne se rappelait pas exactement comment il s'était retrouvé dans sa position. Il était arrivé au lycée et, après trois mois, il s'était réfugié dans ses études lorsque son père avait commencé à s'affaiblir et qu'étudier était la seule chose qui lui permettait d'échapper à la réalité. Il s'était retrouvé parmi les rares élèves du lycée à avoir de bons résultats.
Son sarcasme était ce qui l'avait condamné. Sa capacité à répondre et à se faire respecter malgré qu'il soit un bon élève au milieu de cancres et de tire-au-flancs. Le principal lui avait donné la responsabilité de la présidence sans qu'il l'ait demandée et il n'avait pas eu d'autre choix que de l'accepter. Il s'en était servi pour remplir un peu plus ses journées et fuir cette ambiance difficile qui régnait à la maison.
Sans compter que déverser la plus insultante des diatribes à la face d'animaux trop incultes pour comprendre la moitié des mots qui sortaient de sa bouche lui permettait de se défouler. Il savait se battre et aurait pu se servir de ses poings pour se faire respecter mais il savait que les mots avaient un pouvoir bien plus grand que des coups n'en auraient jamais.
Au final, il ne regrettait pas d'avoir pris cette position parce que ça offrait à Darren un bon environnement où étudier et grandir. Sans ça, son frère serait assurément devenu de la mauvaise graine. Il se laissait facilement entraîner, adorait jouer les durs pour séduire. Il était toujours prêt à relever n'importe quel défi, peu importe les problèmes que ça lui causait. En fait, plus il avait de problèmes, mieux il le vivait et ce n'était pas ce que Dylan voulait pour lui.
Sa position dans la famille avait changé à la mort de leur père. Il avait pris la tête de la maison, devant soutenir sa mère et l'aider, recadrer son petit frère et le pousser vers le meilleur avenir possible. Ça n'aurait jamais dû être son rôle. La mort de son père ne lui avait pas donné d'autre choix que de l'endosser, qu'il le veuille ou non.
Darren était rentré lorsque Dylan poussa la porte. Le bruit de la télé résonnait légèrement dans le couloir. Il jeta ses affaires dans sa chambre et redescendit dans la cuisine. Son frère avait préparé un plat de pâtes à la sauce tomate qui avait l'air bien trop sec. Cependant, Dylan ne s'en formalisa pas. Darren ne cuisinait jamais. Pour la première fois, il avait préparé un dîner à peu près digne de ce nom et il avait pensé à préparer une portion pour leur mère. Il l'avait laissée dans la casserole, couverte d'un torchon propre, prête à être réchauffée.
L'émotion le prit à la gorge et il se laissa tomber sur une chaise, tentant de la maîtriser, de la ravaler. Il était épuisé. Il fallait qu'il aille coucher mais il avait encore tellement de devoirs à faire qu'il devait en faire au moins une partie avant de pouvoir aller dormir.
Il retourna dans sa chambre et se mit au travail. Une fois lancé, il termina tout ce qu'il avait à faire et dut s'endormir à un moment puisqu'il se réveilla avec la nuque raide et le dos en compote, la joue collée sur son livre de sciences.
Il se leva pour aller éteindre son réveil qui hurlait, abandonné à côté du lit. Il alla secouer son frère et le força à se traîner vers la salle de bains. Il trouva sa mère dans la cuisine en train de retourner des pancakes. Il alla passer ses bras autour de sa taille, la faisant sourire. Elle déposa un baiser sur son front en guise de bonjour.
- Tu n'es pas autravail ?
- Je ne vais pastarder à y aller, répondit-elle simplement.
Il n'insista pas, la regardant s'occuper de ses pancakes. Il aida à installer la table et Darren arriva juste au moment de manger.
- C'est la voiture deSteven dehors ? Va lui dire de venir au chaud pendant queton frère prend sa douche.
Darren râla mais obtempéra sans attendre. Dylan alla se préparer et récupérer son sac avant de descendre. Il cilla, réalisant qu'il y avait soudain trop de monde dans la cuisine.
- Salut, chéri,chantonna Raven avec son habituel sourire séducteur, ne sepréoccupant absolument pas de la présence de sa mère dans lapièce.
- Brûle en enfer,répondit-il simplement.
- Il est trop tôt lematin pour que tu flirtes avec lui sous mon nez, pesta Darren.
- Il n'est jamaistrop tôt pour flirter, répliqua Amanda en déposant une bouteillede sirop d'érable sur la table.
Raven et Darren se jetèrent dessus en même temps et s'affrontèrent du regard pour récupérer la bouteille en premier. Dylan s'installa, consterné, et leur arracha la bouteille sans effort, les laissant le regarder avec un véritable choc sur le visage. Il versa une généreuse rasade de sirop sur ses pancakes et les deux idiots se jetèrent derechef sur la bouteille et Darren remporta la victoire, faisant bouder Raven.
Dylan réalisa alors deux choses.
La première : Raven était venu avec Steven. Forcément.
La seconde : un écouteur reliait les deux voisins.
Il les observa discrètement en mangeant ses pancakes sans parvenir à comprendre ce qu'il se passait entre eux. Raven passa tout son temps à se chamailler avec Darren sans vraiment prêter attention à Steven.
Il se sentit rougir lorsque le regard bleu de Steven croisa le sien. Son visage était aussi dépourvu d'expression que d'habitude mais il exsudait l'amusement. Il tenta de soutenir son regard mais finit par se détourner en premier, ne supportant pas la façon de son ami de le passer aux rayons X sans même paraître le faire.
Sa mère les salua et disparut rapidement pour aller attraper son bus. Darren se redressa, un filet de sirop sur le menton.
- Son anniversaireest le mois prochain, dit-il. Tu vas lui prendre quoi ?
- Je pensais faireréparer sa voiture.
- Même à nous deux,on aura jamais assez d'argent pour ça.
Dylan serra les dents. Son frère n'était pas gêné d'évoquer leurs finances devant leurs amis mais lui l'était. Il n'aimait pas avoir à admettre qu'ils avaient du mal à joindre les deux bouts parfois.
- Je peux peut-êtrevous filer un coup de main, intervint Raven. J'ai réussi àremettre une épave sur la route alors je pense que je peux sûrementréparer sa voiture.
- Il faut denouvelles pièces, tu nous épargnerais juste la main d'œuvre.
- Tu ne me connaisdonc pas depuis le temps ? Je peux faire bien plus que ça.
- Ah oui ? Etcomment ?
Steven se tourna vers Raven, semblant déjà connaître la réponse.
- La casse, réponditle texan. Il doit bien y en avoir une dans les environs. Souvent,ils gardent les pièces encore utiles qu'ils peuvent revendre. Danscertaines, il faut aller les chercher soi-même et c'est plutôtfun. On peut facilement trouver de bonnes pièces pour pas cher.
- Ah, tu m'énerves !explosa Darren. Y'a quelque chose que tu sais pas faire ?
- Non, je suisparfait, répliqua l'autre avec son insupportable sourire angélique.
- Il faut qu'on yaille, dit Steven en se levant.
L'écouteur tomba de l'oreille de Raven qui ne parut pas y faire attention. Ils allèrent s'entasser dans la voiture de Steven et gagnèrent le lycée. Darren bondit hors de la voiture, encore furieux de ne pas avoir eu son siège passager habituel puisque Raven y avait pris place, parlant avec Steven des casses des environs.
Dylan les observa, ne sachant toujours pas s'il aimait ce développement subit ou non.
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NdlA : Oh, Dylan, Dylan, Dylan... Quel idiot tu fais !
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