Raven suivit Dylan à l'étage pour aller chercher de quoi noter les recettes. Il s'arrêta dans l'escalier pour observer les photos qui étaient accrochées. Darren et Dylan costumés pour Halloween, les parents bras dessus bras dessous dans une foire, les quatre ensemble autour d'une table, toute une famille réunie dans un jardin, une photo de mariage... Il y avait des tonnes de photos que Raven prit le temps de regarder.

Et puis, il rejoignit Dylan dans sa chambre, la seule pièce dont la porte était ouverte. Dylan fouillait dans les tiroirs de son bureau, donnant une magnifique vue de ses fesses à Raven qui se fit un devoir d'immortaliser ce moment sur son téléphone.

- Arrête de me mater tout de suite.

- Comme si je pouvais faire autrement quand tu prends une telle position !

Dylan ne répondit pas, se redressant avec un regard noir et un papier dans la main.

- Écris ta recette avant que je t'arrache les yeux.

- Il va me falloir plus de papier que ça. Je n'ai pas qu'une recette pour toi.

Dylan soupira et alla piocher d'autres feuilles, donnant à Raven l'occasion de se rincer l'œil une seconde fois.

- J'espère pour toi que ce n'était pas juste pour mater mes fesses, chéri, grinça-t-il en lui donnant les feuilles.

- Je n'oserais jamais. On parle cuisine, là.

- Oh, je vois, la cuisine passe avant tout.

- Ne sois pas jaloux, bébé, tu restes mon numéro un.

Il se retourna et se stoppa net. Une femme qu'il reconnut comme la mère de Dylan se tenait appuyée dans l'encadrement de la porte, une tenue d'agent d'entretien moulant ses larges hanches. Un sourire amusé étirait ses lèvres, déclenchant un chemin de fines rides autour des yeux et de la bouche.

- Maman ! lâcha Dylan, aussi surpris de la voir là que Raven.

- Et si tu me présentais ?

- Voici Raven, Raven, ma mère.

- Oh, tu es le fameux Raven ! J'ai beaucoup entendu parler de toi !

- Maman, râla Dylan.

Raven lui jeta un regard et le découvrit rouge tomate, plus adorable que jamais. Il décocha un sourire charmeur à la mère de Dylan qui restait dans l'entrée.

- Enchanté de vous rencontrer... Dois-je vraiment dire « madame » ? Vous êtes bien trop jeune et belle pour que je vous appelle « madame ».

- Je l'adore, celui-là, Dylan. Garde-le. Et tu peux m'appeler Amanda, Raven.

- D'accord, Amanda, répondit Raven, tous sourires.

- Je suis venue voir si tu t'en sortais avec les courses.

- Faites et rangées, assura Dylan en venant se planter à côté de Raven. Ne t'en fais pas, tout va bien.

Elle lui sourit avec tendresse et passa une main dans ses cheveux. Et puis, elle se tourna vers l'ami de son fils.

- Tu restes déjeuner avec nous, Raven ? J'ai bien envie de savoir si ce que j'ai entendu sur toi est vrai.

- Ça dépend de ce que l'on raconte, répondit le concerné.

Amanda prit le bras de Raven et l'entraîna avec elle, ignorant son fils qui râlait derrière eux. Ils descendirent au rez-de-chaussée et Amanda le fit asseoir à la table de la cuisine. Elle commença à sortir poêles et casseroles et fouiller les placards.

- Laisse, je vais le faire, intervint Dylan, à contrecœur.

- Vraiment ? Parfait ! Toi et moi, on va pouvoir discuter alors, Raven !

- J'en serais ravi, Amanda.

- Tu m'excuses deux minutes ?

Elle repartit à l'étage et Raven alla s'appuyer contre le plan de travail, observant Dylan commencer à cuisiner.

- Tu pourrais arrêter de draguer ma mère ?

- Ne sois pas jaloux, chéri, roucoula-t-il, son sourire menaçant de se transformer en rire.

- Et arrête avec tes « chéri » ! Darren lui a déjà bien assez farci la tête de bêtises pour que tu n'en rajoutes pas ! Elle en a entendu bien assez tout à l'heure.

- Ta mère a l'air fun, je ne vois pas pourquoi tu t'inquiètes autant. Je vois de qui Darren tient son caractère.

- Justement, Darren et ma mère sont pareils ! Et tu ne vis pas avec eux, moi si. Ce n'est pas toi qui va devoir la supporter après. Je suis sûr qu'elle se fait déjà des films.

- Elle a bien remarqué que j'étais un mec ?

Dylan roula des yeux avec un soupir. Il allait répondre lorsque Amanda revint, aussi excitée que si elle avait bu beaucoup trop de café.

- Oh, mais ça ne me dérange pas du tout ! Du moment que quelqu'un est capable de supporter cet être taciturne sorti de mon ventre, je prends ! Fille, garçon, peu importe ! Je lui ai dit cent fois qu'il pouvait me le dire s'il était gay mais il est têtu et il ne m'a jamais ramené personne avant toi !

Raven se mit à rire alors que Dylan massacrait ses oignons, agacé.

- Je comprends pourquoi il t'a gardé caché si longtemps quand je te vois.

- Maman ! explosa Dylan en lâchant son couteau.

- Fais attention, mon poussin, tu vas te blesser si tu continues.

Il ramassa le couteau et alla le passer sous l'eau avant de reprendre sa cuisine. Amanda prit Raven par le bras pour aller dans le canapé. Il trouva une étrange similitude entre cet instant et celui qu'il avait partagé avec Dylan peu de temps auparavant. La mère et le fils adoptaient la même position dans le canapé.

- Dis-moi, Raven, il n'est pas trop difficile à vivre ? Dylan peut vraiment être un rabat-joie, parfois.

Il ne put s'empêcher de rire.

- Il n'est pas si mal. Un peu trop sérieux mais j'y travaille.

- Tu vas à son lycée ?

- Oui, depuis début novembre.

- Tu as déménagé ?

Il hocha la tête.

- Je viens du Texas.

- Vraiment ? Et pourquoi tu es venu ici ?

Le cerveau de Raven travailla à toute vitesse pour monter un mensonge plausible à donner à Amanda.

- Le... travail de mes parents. Ils ont dû venir dans l'Oregon alors on a déménagé.

- Pas de frère ou de sœur ?

- Ni l'un ni l'autre.

- Je croyais que tu voulais discuter avec lui pas lui faire passer l'Inquisition ! cria Dylan dans leur dos.

Amanda tendit le cou pour regarder son fils qui s'attelait aux fourneaux.

- Je dois bien connaître la base ! Tu n'es pas bavard et Darren se contente de me raconter ce que vous faites. Vous êtes avares sur les détails, tous les deux.

- Qu'ai-je fait pour mériter une mère pareille ?

- Toi, je ne sais pas mais moi, je sais ce que j'ai fait pour t'avoir...

- MAMAN !

Raven éclata de rire alors qu'Amanda souriait, ravie de son effet.

- J'adore le faire râler, avoua-t-elle à Raven sur le ton de la confidence.

- J'avoue adorer ça aussi.

- Flirter avec lui aussi, non ?

Pour la première fois, Raven se sentit un peu mal à l'aise. Comment répondre à ça ? Sa mère pensait-elle que quelque chose couvait réellement entre lui et Dylan ? Que penserait-elle de lui si elle comprenait que ce n'était qu'un jeu entre eux ?

- Ne t'en fais pas, Raven, tu peux faire ce que tu veux avec mon fils à une seule et unique condition.

- Laquelle ?

- Si tu lui fais du mal, je te ferai regretter d'être né.

Il déglutit face à la lueur froide et sérieuse dans le regard d'Amanda. L'instant suivant, elle avait recouvré son sourire et lui tapotait les mains.

- Et je serais toi, je réfléchirais un peu plus à tout ce flirt. Je crois que tu refuses de voir certaines choses.

Elle se leva, le planta là, sautillant jusqu'à son fils aîné pour l'embêter. Raven resta assis sur le canapé, tentant de comprendre ce qu'elle avait voulu dire. Elle semblait penser que, quelque part au fond de lui, il avait des sentiments pour Dylan. C'était risible ! Comme si ça pouvait arriver ! Il flirtait avec lui parce qu'il savait que ça l'agaçait et qu'il adorait le défi que représentait cette attitude désintéressée et sarcastique qu'arborait Dylan comme une armure.

Il n'était pas question de sentiments. Ils étaient amis, rien de plus. Ils se chamaillaient à leur façon. Il n'y avait aucun autre sentiment que l'amitié et la confiance. Qu'est-ce qui pouvait lui faire croire que ce n'était pas le cas ?

Il secoua la tête et gagna la cuisine à son tour, observant les interactions entre la mère et le fils, se demandant si c'était ainsi dans toutes les familles. Le déjeuner se passa dans la joie et les rires, Amanda adorant taquiner son fils dès qu'elle en avait l'occasion. Raven adora le voir rougir et râler. Ce n'était pas tous les jours qu'il avait droit à ce genre de vision.

- Ne vas-tu pas être en retard ?

Amanda leva les yeux vers l'horloge et se leva vivement.

- Bien vu ! répondit-elle à Dylan. Je dois filer. Soyez sages, les garçons ! Ne faites rien que je ne ferais pas !

- Y a-t-il seulement quelque chose que tu ne ferais pas ?

- C'est vrai mais vous m'avez comprise ! Soyez sages ! Pas trop quand même.

Dylan se leva et poussa sa mère vers la porte.

- Tu vas être en retard, si tu continues. Le bus ne t'attendra pas.

- Au revoir, Amanda ! lança Raven en agitant la main.

Amanda échappa à son fils et revint vers Raven pour le prendre dans ses bras et déposer un baiser dans ses cheveux.

- Tu es toujours le bienvenu ici, Raven. J'espère te revoir très vite. En espérant que mon idiot de fils aîné ne parvienne pas à te faire fuir grâce à son sale caractère !

Elle lui caressa les cheveux avant de se presser hors de la maison pour aller attraper son bus. Dylan ferma la porte et appuya son front dessus.

- Cette femme m'épuise.

- Elle n'est pas si terrible.

Dylan se redressa et revint dans la cuisine, s'asseyant face à Raven.

- Pour toi ! Ce n'est pas toi qu'elle s'est amusée à humilier pendant tout le repas.

- Tu as de la chance de l'avoir.

- J'en ai conscience, répondit Dylan avec un léger sourire.

Raven demeura silencieux, encore secoué par cette étreinte et ce baiser qu'ils n'avaient pas vus venir. Il ne se souvenait pas de la dernière fois que quelqu'un l'avait serré dans ses bras, l'avait fait se sentir aussi accueilli et apprécié. La dernière personne à l'avoir fait devait être Nina. Sa baby-sitter l'avait toujours traité comme s'il avait été son petit frère jusqu'à ce qu'elle soit virée. Elle l'avait préféré à Stanford et ça avait été son erreur.

- Que t'a dit ma mère avant de passer à table ? le questionna Dylan. Tu avais l'air bizarre.

- Oh, rien de grave. J'ai juste eu un peu de mal à voir où elle voulait en venir.

Dylan haussa un sourcil, ne semblant pas le croire, mais il n'insista pas et Raven en fut soulagé. Il n'avait pas particulièrement envie de lui avouer que sa mère pensait qu'il avait des sentiments pour lui et que ça le travaillait. Il ne savait même pas pourquoi ça le faisait tant réfléchir. Il était évident que ce n'était pas le cas.

N'est-ce pas ?

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NdlA : Oooooh ! Amanda aurait-elle découvert quelque chose que même les garçons ignorent ? A-t-elle raison ? A-t-elle tort ? Vos pronostics ?