La littérature coréenne

La littérature coréenne, commune aujourd'hui à la Corée du Nord et à la Corée du Sud, a été longtemps écrite exclusivement en caractères chinois, jusqu'à la création d'un alphabet propre à la langue coréenne en 1443-1446, le hangeul (한글), sur l'initiative du roi Sejong (세종대왕).


       I. Les premières littératures coréennes :

· Hyangga (700-900 siècle) : Les Hyangga (향가, Hanja : 鄕歌, littéralement, chant de village) sont des poèmes composés en Corée pendant la période des Trois Royaumes, lors du royaume de Silla (실라) unifié et au début de celui de Goryeo (고려). Écrits dans un système d'écriture indigène, le Hyangchal (향찰), seuls quelques-uns ont survécu. Le nombre total de Hyangga existants encore se situe entre 25 et 27, selon que certains d'entre eux soient considérés comme authentiques ou non.

· Hyecho : Hyecho (혜초,Hanja : 慧超), né en 704, mort en 787, était un moine bouddhiste originaire du royaume de Silla, en Corée. Il était un des nombreux moines qui ont fait le pèlerinage en Inde. Il est né dans le royaume de Silla. Dès l'âge de 16 ans, il partit en Chine à Canton en tant que novice pour connaître l'enseignement bouddhiste. C'est là qu'il rencontra les moines indiens Shubhakarasimha puis Vajrabodhi qui l'initia au bouddhisme tantrique. Cette rencontre réveilla sa curiosité et sa soif de savoir pour le vrai enseignement de Bouddha. En 723, à l'âge de 19 ans, Hyecho partit de Canton en bateau pour rejoindre l'Inde à un moment où le bouddhisme y a déjà entamé son déclin. On suppose que son bateau suivit la côte de l'Asie du sud-est et qu'il arriva en Inde du côté de Calcutta dans le pays de Magadha. Il visita Kusinagar, Lumbini, Varanasi et le Cachemire. Après les quatre années (723-727/8) de son voyage de découverte, il rentra en Chine en suivant la route de la soie et en traversant Karachahr et les monts du Pamir pour rejoindre la capitale, Changan (찬간). Au total, il a parcouru 9 000 km en mer et 11 000 km sur terre. Son passage au nord-ouest de l'Inde et en Asie centrale a lieu au moment où l'islam commence à s'installer.

À son retour, Hyecho a mis son récit par écrit, c'est le Wang ocheonchukguk jeon (오천축국 전), puis il s'est occupé essentiellement de traduire les écritures bouddhistes du sanscrit en chinois. En 774, lors d'une grande sécheresse, Daizong, l'empereur des Tang lui demande à présider à un rituel pour faire venir la pluie. En 780, il entra au monastère du mont Wutai pour continuer son travail de traduction. Il est mort dans ce monastère en 787. On ne sait pas s'il est retourné en Corée après son voyage.

· Jewang Ungi (1287) : Le Jewang Ungi (제왕운기) est un poème épique coréen composé en 1287 par Yi Seung-hyu (이승휴). Il traite de l'histoire de la Corée depuis le règne du roi Tangun (탄군) jusqu'à celui du roi Chungnyeol (충녈).

II. La littérature des débuts de l'ère Choson (초손) (392-1592) :

Afin de populariser le nouvel alphabet hangeul, le roi Sejong encourage la rédaction des premiers ouvrages exclusivement en coréen :

- "Les chants des dragons s'envolant vers le ciel" constituent un ensemble de 125 chants en vers qui célèbrent l'avènement de la dynastie Choson ;

- les "Épisodes de la vie de Sakyamuni", composés en 1447, sont une biographie de Bouddha ;

- reflétant au contraire l'encouragement du confucianisme par la nouvelle dynastie (au détriment du bouddhisme), "l'Anthologie des lettres de l'Est" est une compilation de plus de quatre mille textes réalisée jusqu'à la fin du XVème siècle, laquelle a permis de fixer des textes antérieurs de la littérature coréenne en la distinguant de la littérature chinoise.

Les ouvrages de Yi I (이이) mettent l'accent sur la nécessité des réformes sociales et militaires.

Le principal auteur coréen des débuts de la dynastie Choson est Jeong Chol (정철), auteur notamment du "Chant de Kwangdong", poème en dix-huit parties qui célèbre les beautés de la nature coréenne.

Il y a aussi :

Kim Si-Seup (김시습) (1435-1493), auteur du premier roman coréen,

Annales de la dynastie Joseon (조선왕조실록) (1413-1865).

III. De la première invasion japonaise (1592) à la prise de Pékin (1860), symbole de l'ouverture forcée sur l'Occident :

Les invasions japonaises (1592-1598), repoussées, ont inspiré la poésie patriotique de Pak Il-lo (박일로), tandis qu'apparaît une littérature réaliste, illustrée notamment par les poèmes kosa de Yun Seon-do (윤선도) qui suivent la vie d'un pêcheur, d'un agriculteur ou d'un lettré en harmonie avec la nature.

"L'histoire de Hong Kiltong", écrite vers 1608-1613 et généralement attribuée à Heo Gyun (허균), raconte l'histoire d'un enfant illégitime d'un ministre du roi Sejong. Elle est considérée comme le premier roman coréen, écrit en hangeul.

À la fin du XVIIème siècle, le mouvement baptisé ultérieurement Sirhak (실학, mouvement du Savoir, ou de la Pensée, ou de l'École, Pratique) et lancé par Yi Su-gwang (이수관) prend forme en tant que critique de l'immobilisme néo-confucéen, qui n'a pas su faire face efficacement aux invasions étrangères (japonaises puis mandchoues).

Les auteurs du Sirhak appellent à des réformes inspirées du modèle chinois, tout en critiquant la corruption des aristocrates. Pak Chi-won (박지원, 1737-1805) raconte la vie de héros ordinaires, sur un ton non dénué d'humour.

Au début du XVIIIème siècle se fixe la forme du pansori (판소리), récit coréen chanté traditionnel, dont seulement six pièces nous sont parvenues grâce au travail de Sin Chae-hyo (신채효, 1812-1884).

IV. Le tournant moderne (1860-1905) :

Forcée de s'ouvrir sur l'Occident à la fin du XIVème siècle, la Corée se modernise techniquement et s'ouvre aux idées occidentales (via le Japon). La littérature des Lumières s'inscrit dans la pensée Kaehwa (캐화, pensée des Lumières) qui désigne une ouverture aux idées et aux cultures nouvelles, étrangères : les "Observations lors d'un voyage à l'Ouest", écrites en prison en 1885 par Yun Chi-ho (윤치호), constituent un plaidoyer de sciences politiques pour un État moderne.

Une des principales œuvres des Lumières, "Indifférence" de Yi Kwang-su (이광수), futur collaborateur pro-japonais, est publiée sous forme de feuilleton dans le "Maeil Sinbo" en 1917.

Dans ce contexte où la prédominance de la culture chinoise recule au profit d'autres influences, notamment pro-japonaises, le premier journal en hangeul paraît en 1896 : "L'Indépendant" de So Chae-pil ( 서재필).

A la fin de ce siècle, Maurice Courant publie un catalogue en quatre volumes décrivant 3821 livres parus en Corée avant 1899: la Bibliographie coréenne.

V. L'occupation japonaise (1905-1945) :

Sous l'occupation japonaise (1905-1945), les écrivains pro-japonais développement notamment une approche social-darwinienne, selon lesquelles les sociétés humaines seraient sélectionnés par une lutte à mort. La poésie du collaborateur avec les Japonais (après avoir été un des rédacteurs de la déclaration d'indépendance du 1er mars 1919, avec Yi Kwang-su (이광수) et Han Yong-un (한용운)) Choe Nam-seon (최남선), qui lance en 1908 la revue "Sonyon (손욘)", est marquée par un renouvellement formel et thématique, privilégiant la jeunesse et la puissance.

Dans la résistance à l'occupation japonaise, Sin Chae-ho (신채호, mort en prison en 1936) théorise le concept de "juche", autonomie et indépendance de soi qui implique le rejet des influences étrangères.

Les modernistes investissent également les champs du théâtre, marqué par la représentation en 1906 de "Larmes de sang" de Yi In-jik (이인직), et du cinéma naissant, pour renouveler les formes d'expression traditionnelles.

Le nombre de revues, ouvertes aux différentes influences étrangères (notamment le surréalisme et le dadaïsme), cultivant le réalisme, augmente régulièrement, jusqu'à leur interdiction par les autorités japonaises. De nombreux écrivains s'engagent sur le terrain politique, opposés aux Japonais, comme Kim An-so (김안소, nom de plume : Kim Ok), Kim So-wol (김소월) et Han Yong-un (한용운) et les membres de la Fédération coréenne des artistes prolétariens (acronyme en espéranto : KAPF, Korea Artista Proleta Federacio), fondée en 1925 et engagée à gauche, représentée notamment par Im Hwa (임화), Han So-rya (한소랴), Choe So-hae (최소해) et Kim Tong-hwan (김통화).

Les tensions politiques entre les différents groupes sont fortes et se poursuivent après 1945 puis dans le contexte de la division de la Corée, malgré une tentative d'unification dans la résistance au sein du mouvement Singanhoe (신간회, Société du nouveau rameau).

À la fin de l'occupation japonaise, si l'usage obligatoire du japonais et l'adoption de noms japonais limitent les possibilités d'expression culturelles proprement coréennes, plusieurs auteurs coréens commencent à se distinguer, dont Kim Ki-rim (김기림) et Chae Man-sik (채만식).

Voir aussi :

Shim Hun (신훈), Kim Saryang (김사량)

Yi Sang (이상, 1910-1937), poète ; représente la modernité en littérature. En 1934, il intègre le Groupe des Neuf qui prône la littérature pure. Aujourd'hui, le prix Yi Sang, très recherché, récompense la nouvelle de l'année.

Kim Yu-jong (김유종, 1908-1937), nouvelliste ; d'une vie et d'une œuvre, coupées net par la tuberculose, il a consacré sa courte carrière littéraire à décrire la vie humble des paysans coréens et les relations entre hommes et femmes.

VI. La littérature sud-coréenne depuis 1945 :

Les désillusions après la division du pays, les destructions liées à la guerre de Corée, et l'établissement de régimes autoritaires (au pouvoir en Corée du Sud de 1948 à 1987, à l'exception de la brève parenthèse démocratique de 1960-1961) se traduisent par un nouvel essor du réalisme, dont une des expressions est le roman historique, notamment ceux de Hwang Sun-won (황순원) et Pak Chong-hwa (박총화). L'association des écrivains coréens regroupe les auteurs proches du régime militaire (1961-1987).

Kim Su-yong (김수용, 1921-1968) a été un des précurseurs d'un nouveau courant moderniste qui s'attache à décrire les bouleversements économiques et sociaux de la Corée du Sud au rythme d'une industrialisation et d'une urbanisation rapides après 1960. Hwang Sok-yong (황속용, né en 1943) développe ensuite une littérature réaliste et militante qui décrit notamment la vie des plus pauvres ; une démarche historique et politique a inspiré un autre partisan de la réunification de la Corée, Ko Un (코운).

Une description réaliste des conséquences de l'industrialisation a aussi été conduite par les écrivains du mouvement Munji (문지), parmi lesquels Cho Sehui (초세희, né en 1942) et Yi Munyeol (이문, né en 1948). Choe Sung-ho (최숭호, né en 1954) a décrit la déshumanisation de Séoul.

La littérature contemporaine ré-explore également la culture populaire traditionnelle, à l'instar de Shin Kyung-rim (신큥림, né en 1935) dont la poésie s'inspire des chants paysans. La musique — en particulier la musique classique — exerce une forte influence sur le poète Cho Jung-kwon (조중권).

Yi Cheong-jun (이청준, né en 1939) a développé en particulier une littérature conceptuelle, où le récit cède le pas devant la description des évolutions de la conscience.

Dans les années 1980, la répression du soulèvement de Gwangju (광주) a encouragé de nouvelles formes d'écriture politique insistant sur le devoir de mémoire, notamment dans les œuvres de Choe Yun (최윤), née en 1953, et d'Im Choru (임초루), né en 1954.

Au cours des années 1990, le post-modernisme de Song Kon-ho (송콘호) et Kang Mang-il (캉망일) est marqué par une inscription dans l'histoire nationale, notamment dans son opposition aux États-Unis.

Les prix littéraires les plus prestigieux sont le Prix Daesan (대산, depuis 1993), le Prix Dong-in (동인, depuis 1955) et le Prix Yi Sang (이상, depuis 1977). À ceux-ci viennent s'ajouter le Prix Gongcho (공초), le Prix Hwang Sun-won (황순원), le Prix de littérature contemporaine (Hyundae Munhak현대문학), le Prix Midang (미당) et le Prix Woltan (1966-2001).

Il existe aussi plusieurs récompenses renommées pour la poésie : le Prix de l'Association des poètes coréens, le Prix Jeong Ji-yong (정지용), le Prix Kim Soo-young (김수융), le Prix Poésie contemporaine et le Prix de poésie Sowol (소월).

VII. La littérature nord-coréenne depuis 1945 :

Après 1945, la littérature nord-coréenne a d'abord été représentée par des écrivains de gauche qui avaient lutté contre l'occupation japonaise, notamment au sein de la KAPF.

O Chang-hwan (오창환), Jeong Ji-yong (정지용), Kim Ki-rim (김기림), Kim Tong-hwan (김통환) et Hong Myong-hi (홍묭히) font partie des écrivains de la génération de l'entre-deux-guerres qui ont rejoint la Corée du Nord. Parmi eux, Han So-rya (한소랴) a présidé la Fédération des arts et de la littérature de Corée du Nord.

Hong Myong-hi, grand-père de Hong Sok-jung (홍속중), est devenu vice-premier ministre de la République populaire démocratique de Corée, après avoir embrassé la carrière d'écrivain pour protester contre l'interdiction de la langue coréenne par les Japonais pendant l'occupation de la Corée.

Choi Myung-ik (초이뮹익), représentant du courant moderniste des années 1930, a également été publié en Corée du Sud.

Voir aussi : Ri Tong-chun (리통춘), Rim Kun-tan (림쿤탄), Keul Madang (글마당), Yi Cheong-jun (이청준).


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