Day 5 ~ Big fish
Hey~ comme annoncé dans la description (oui je me doute que vous avez déjà oublié mais bon) ceci est un UA (=Univers Alternatif). Avec un film d'animation qu'absolument tout le monde connaît, évidemment... Attention tenez-vous bien... Avec Big Fish & Bégonia ! (Levez la main ceux qui connaissent :'))
Donc en effet ce thème ne m'a clairement pas inspirée. Parce que de base je ne voulais absolument pas partir sur un UA, mais faute d'autre idée ^^'
J'ai essayé de limiter au maximum le spoil, et j'estime d'ailleurs qu'à part quelques références par-ci par-là que seuls les (nombreux) initiés comprendront, je ne gâcherai pas votre plaisir à voir ce magnifique film~
Merci d'être arrivé jusque-là, encore une fois n'hésitez pas à commenter, et merci de votre soutien!
Sur ce bonne lecture~ (je ne vous dit pas pourquoi je ne voulais pas partir sur un UA. Vous allez comprendre en lisant ^^')
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Chuuya se baladait au bord de l'eau, à l'extrémité du village. Ce dernier avait été construit dans les branches d'un énorme et fier Bégonia après que l'ancien eût été rasé par une inondation. Cet arbre leur servait désormais donc de protecteur et de demeure, étant donné que sans lui probablement toute la population ne serait plus.
Ils avaient beau ne pas être humains, ils n'étaient pas non plus des dieux. Ils vivaient sous l'océan, lui-même frontière entre le monde des Hommes et celui où les âmes revenaient inlassablement. Tout venait de l'océan et tout y retournait.
Ils avaient néanmoins un rôle à jouer : Ils influençaient les évènements météorologiques du monde du dessus, et veillait sur les âmes des défunts, même s'ils ne savaient pas eux-mêmes où ils se rendaient après la mort.
Pour cette raison, autrefois ils se rendaient tous, dans l'année de leur seize ans et durant sept jours, à la surface sous la forme de dauphin rouge. Il fallait qu'ils sachent sur quoi ils avaient le contrôle, et donc qu'ils découvrent eux-mêmes le monde des Hommes.
Malheureusement, cela faisait maintenant plus de cent ans que personne ne s'y était rendu. Pour plusieurs raisons : il fallait un manipulateur d'eau suffisamment puissant pour ouvrir le portail alors qu'il devait être doté d'un masque particulier. De plus, les jeunes devaient boire une sorte de soupe pour pouvoir accomplir leur transformation.
Mais durant la catastrophe qui avait vu leur ancienne demeure inondée, le masque avait été détruit. Puis tous les anciens, ainsi que les manipulateurs d'eau suffisamment puissants, s'étaient éteints petit à petit. Ceux qui connaissaient la recette de la soupe étaient tous d'avis qu'il ne fallait pas retourner à la surface et avaient emporté ce secret dans la tombe.
On ne pouvait pas les en blâmer, après tout ils avaient l'interdiction d'entrer en contact avec les hommes lorsqu'ils montaient à la surface. Mais ce tabou avait été enfreint et avait provoqué le début de la fin.
Seulement, après plusieurs décennies, il s'avérait que sans aucune connaissance du dessus, de plus en plus de jeunes s'amusaient à provoquer catastrophe sur catastrophe, pensant qu'il s'agissait seulement de mythes.
Ce n'était pas le cas de Chuuya, mais il comprenait qu'après tant de temps on puisse remettre en cause tous ces faits. Mais aujourd'hui, ils approchaient enfin du but. Lui et son ami Ranpo, de quatre ans son aîné, avaient réussi à retrouver quels ingrédients utiliser pour le fameux breuvage. Et le masque avait été reconstruit par les parents du rouquin, tous les deux manipulateurs d'eau, une décennie auparavant.
Aujourd'hui avait donc lieu pour la première fois la cérémonie tant attendue, officiée par le père de Chuuya. Mais ce dernier était plus que nerveux. Ce n'était pas le premier essai. L'autre remontait justement à un peu plus d'une décennie auparavant, peu après la naissance du jeune frère du rouquin. Et cela s'était soldé par un cuisant échec, causé par une mauvaise recette du breuvage, et que le jeune homme n'était pas près d'oublier malgré le fait qu'il n'avait que quatre ans à l'époque.
Il craignait surtout pour la vie de son père, qui était affaibli par une grave maladie depuis plusieurs semaines, quoique cela faisait un certain temps qu'il n'était pas très en forme. Il savait qu'il ne risquait rien lui-même, malgré qu'il y ait aussi un peu d'appréhension à l'idée de faire partie des 19 premiers jeunes à être envoyés à la surface depuis plus d'un centenaire.
A vrai dire, il aurait préféré que la cérémonie soit reportée, le temps que lui atteigne l'âge de vingt ans, pour pouvoir prendre la place de son père. Il avait hérité de ses deux parents et était donc beaucoup plus puissant, d'autant qu'il se perfectionnait depuis tout petit dans le but de récupérer cette tâche sacrée. Et lui n'était pas rongé par la maladie.
Mais tous étaient trop impatients pour pouvoir attendre quatre ans, et cela le mettait en rogne. Il donna subitement un coup de pied dans le vide vers l'eau, qui eut tout de même le mérite de soulever une vaguelette.
Vaguelette qui s'écrasa sur un matou qui n'était pas là auparavant. Le rouquin afficha une mine surprise, avant de soupirer.
-Que me voulez-vous, Fukuzawa ?
Un homme aux cheveux blancs malgré son relativement jeune âge s'avança, accompagné de trois félins, un blanc aux tâches caramel, un brun aux tâches crème et un dernier totalement noir hormis une petite marque rouge sur son front.
Il s'agissait du nouveau gardien des âmes. Il était entré en fonction il y a à peine quelques années, lorsque l'ancien avait subitement abdiqué à la mort de ses anciens compagnons. Ce dernier, comme son prédécesseur encore avant, avait toujours été renfermé. Il avait souvent un visage triste lorsqu'il était seul, mais cherchait à changer la donne lorsqu'il était en présence de ses semblables. Chuuya pouvait en attester pour l'avoir quelque peu côtoyé.
En revanche, Fukuzawa était plutôt sociable et passait régulièrement dans le village. Après tout, il y avait toujours sa famille. Et c'était toujours l'occasion de se quereller avec l'autre gardien des âmes.
Car oui, il en existait deux : Ceux qui avaient une bonne âme retournait à l'état de poisson et étaient sous la charge de Fukuzawa. Ceux qui, en revanche, avaient une âme souillée, se changeaient en rat et étaient sous la direction d'un homme tout aussi inquiétant que ses créatures.
Les deux gardiens se chamaillaient continuellement, et il n'était donc pas rare de voir de temps à autre un chat portant un rat se débattant entre ses crocs, ou encore une troupe de rats transportant un chat ficelé. Voire même des choses encore plus glauques.
-Juste te souhaiter bon courage là-haut. Et te dire d'arrêter de t'en faire, dit-il avec un léger sourire. Mais la principale raison étant que la cérémonie va bientôt commencer et que ton père s'inquiétait de ne pas encore te voir, reprit-il d'un ton plus sérieux.
-Ouais, ouais, j'arrive, grommela le rouquin.
Pourquoi fallait-il toujours que son père s'inquiète à ce point pour lui ? Il n'avait pas besoin d'être baby-sitté. Il contempla encore quelques instants l'eau tandis que l'homme aux cheveux blancs s'éloignait.
Puis quand il se retourna, il eut la désagréable surprise de tomber nez à nez avec, justement, le gardien des rats, son habituel sourire mesquin et insupportable collé au visage. Il était entré en fonction à peu près au même moment que son homologue, son prédécesseur, un certain Fyodor que le rouquin avait eu le malheur de croiser une fois, ayant mystérieusement disparu.
-J'espère que tu n'as pas oublié notre petit accord Chuuya...
-Bien sûr que non, je n'ai qu'une seule parole. Si vous permettez...
Il s'éloigna immédiatement tandis que l'autre le fixait toujours. Il avait vraiment le don de mettre les autres mal à l'aise, avec ses yeux rouges qui semblaient lire jusque dans votre âme et ses cheveux noir corbeau. Ce n'était pas étonnant qu'il soit devenu gardien des âmes souillées.
Lorsque le rouquin arriva enfin sur les lieux de la cérémonie, à savoir un grand bâtiment circulaire qui servait aussi d'habitation à la plupart des gens vivant ici, et qui avait été reconstruit à l'identique de l'ancien bâtiment pour optimiser la célébration, il remarqua que tout le monde était déjà là. D'ailleurs, son père avait déjà débuté et l'eau commençait à descendre petit à petit.
Probablement était-il le seul à l'avoir remarqué, mais celui qui dansait actuellement au centre du bâtiment, un masque symbolique sur le visage, pour invoquer le portail aquatique vers le monde du dessus n'était clairement pas en forme et se crispait à presque chaque mouvement.
C'était un spectacle insupportable pour le rouquin, mais pour autant il ne pouvait détourner le regard. Il fallait qu'il revienne et vite. Ces sept jours lui paraîtraient sûrement interminables.
Il monta en quatrième vitesse les escaliers, voyant que déjà quasiment chaque jeune avait bu la soupe et commençait à se transformer.
Sur la plateforme qui lui était réservée l'attendaient les deux personnes qu'il chérissait le plus. Son petit frère, évidemment, et un autre jeune garçon, du même âge que son frère, aux cheveux gris et aux yeux jaunes et roses. Ils n'étaient pas liés par le sang mais avaient quasiment grandi ensemble, le gris étant orphelin et s'étant vite lié d'amitié avec les deux autres. Ils se considéraient donc comme frère.
Ils lui souhaitèrent tous deux bonne chance. Chuuya les embrassa et leur promit que ce n'était que sept jours et qu'ils ne verraient même pas le temps passer. Depuis que son père était fragilisé par la maladie, c'était lui qui veillait le plus clair de son temps sur les deux garçons. Puis il accepta enfin le bol qu'on lui tendait.
Il regarda une dernière fois son père tout en bas, une boule de colère et de frustration lui serrant le ventre. Puis il entra d'un coup dans l'eau et se métamorphosa en splendide dauphin rouge. Il était le dernier et se pressa de rejoindre les autres, ne voulant pas forcer son paternel à tenir plus longtemps que nécessaire.
Tous étaient à la fois excités et méfiants. Lorsqu'ils arrivèrent à la surface, ils virent tous un jeune homme aux cheveux brun-roux stupéfait de les voir. Il semblait fixer l'océan avant leur arrivée, et pourtant ne s'attendait pas à les voir débarquer.
En même temps, il avait l'air plutôt jeune et la dernière fois remontait à longtemps. Les humains leur ressemblaient vraiment beaucoup, mais ils n'avaient pas le droit d'entrer en contact avec.
Les 19 se séparèrent finalement après une dernière concertation pour explorer le monde. L'eau était pleine de déchets et beaucoup moins remplie de poisson que ce qu'on leur avait dit, mais Chuuya trouva tout de même ce monde magnifique et oublia, l'espace de ces quelques jours, les problèmes qui l'accablaient pour profiter de son voyage.
Il rencontra de nombreux pêcheurs, mais presque tous étaient à bord de grand paquebot et ne le voyaient même pas, ou alors ils attrapaient et faisaient souffrir de nombreux animaux marins.
Cela désolait beaucoup le rouquin. Il savait que c'était un monde cruel, mais pas à ce point. Seulement il avait encore quelque chose à accomplir, aussi repartit-il directement au matin du septième jour vers le portail, pour avoir un peu de temps avant que ce dernier ne s'ouvre.
Il arriva aux alentours de seize heures. Il avait donc encore une heure devant lui et commença à chercher l'objet de sa promesse. Il avait enfin déniché quelque chose qui pourrait correspondre, quand il entendit soudain un grand bruit, comme quelqu'un heurtant violemment la surface de l'eau avant de s'y enfoncer.
Chuuya tenta de voir ce qui avait provoqué ce bruit étrange, et eut la surprise de découvrir un jeune homme brun, qui devait environ avoir son âge, en train de couler à pic et de recracher son air.
Le rouquin pesta, même si c'était plus dans sa tête au vu de sa forme, et se précipita immédiatement vers lui pour tenter de le ramener à la surface. Puis il regarda tout autour de lui et ne vit rien d'autre qu'une immense falaise d'un côté et la mer de l'autre.
Mais qu'est-ce qu'il fichait ici bon sang ?! Le manipulateur d'eau n'avait pas le droit de s'approcher des hommes, et en plus le portail allait bientôt s'ouvrir. De plus la potion était encore assez hasardeuse et le rouquin n'était pas sûr qu'elle fonctionne encore très longtemps, il lui semblait que ses effets commençaient à se dissiper, même si ce n'était qu'une vague impression.
Mais d'un autre côté il ne pouvait pas laisser le jeune homme se noyer sans rien faire, surtout qu'à cet endroit il risquait de se faire absorber par le tourbillon qui devait ramener tous les jeunes dans le monde d'en dessous.
Il observa les alentours, et repéra enfin la plage. Elle était plutôt loin, malheureusement. Chuuya prit rapidement le brun par le col et le tira aussi vite qu'il le put vers le rivage. Sérieusement, qui venait se baigner dans un endroit aussi isolé sans prévenir.
Le rouquin vit ses autres comparses affluer et le portail s'ouvrir alors qu'il arrivait au niveau de la plage. Il prit peur de ne pas arriver à temps et fit de son mieux pour que l'homme arrive sur le sable, ce qui était compliqué avec la marée descendante.
Il avait d'ailleurs été obligé de lâcher le précieux objet qu'il avait déniché quelques minutes plus tôt et devrait retourner le chercher avant de pouvoir emprunter le portail. Enfin, au pire des cas il le laisserait, mais ce n'était pas une bonne idée. Il aperçut un peu plus haut, dévalant les escaliers qui menait de sa maison jusqu'à la plage, le jeune homme brun-roux qu'il avait déjà vu sept jours plus tôt.
Le noyé serait donc tiré d'affaire s'il n'était pas déjà trop tard pour lui. Chuuya se précipita alors vers le portail, ouvert depuis déjà trop longtemps à son goût par rapport à ce que son père était capable de supporter.
Il fonça à toute allure. Mais il n'avait pas compté plus de cinq autres dauphins s'y étant déjà engouffrés à l'heure actuelle, il espérait qu'il n'avait juste pas vu les autres, trop occupé par sa tâche.
Il se rapprochait et commença à piquer vers le tourbillon en diagonale, quand soudain une étrange chose se produisit. Sa main réapparut sous sa forme humanoïde, puis son autre... Il se retransforma complètement. Seulement, sous cette forme, il ne pourrait jamais atteindre le portail à temps, et même s'il y arrivait il n'aurait pas la respiration suffisante pour atteindre l'autre côté.
Puis il commença à paniquer en sentant subitement ses poumons le brûler. Il était encore trop profondément enfoncé dans l'océan, et risquait bien de se noyer immédiatement s'il ne parvenait pas à remonter à la surface. Sa survie passait avant.
Il battit des pieds aussi fort qu'il le put tandis qu'avec ses mains il obligeait l'eau à le propulser toujours plus haut, ainsi qu'à dévier les plus gros poissons de sa trajectoire. Enfin il creva la surface et aspira de grandes goulées d'air.
Probablement quelqu'un sans son affinité avec l'eau n'aurait pas survécu. Puis il vit ensuite au loin le portail se refermer, ne laissant derrière lui que de l'écume blanche. Chuuya pesta. Ils avaient bien dit aux anciens, lui et Ranpo, que les plantes n'étaient plus aussi fortes qu'autrefois, avant l'inondation, et que les effets de la soupe pourraient être diminués. Seulement, on ne les avait pas écoutés. Alors qu'il aurait suffi de raccourcir leur séjour ici d'une seule petite journée.
Ils étaient tous si joyeux à l'idée d'envoyer de nouveau des jeunes à la surface qu'ils en avaient oublié leur sécurité. Désormais le rouquin devrait attendre la prochaine ouverture du portail, dans minimum un an.
S'il y en avait une, ne s'empêchait de murmurer vicieusement une petite voix dans son cerveau.
Après plusieurs minutes à tenter de se canaliser, il revint finalement vers le rivage. Il lui serait sûrement impossible d'éviter les hommes durant toute une année, notamment pour se nourrir et même simplement survivre dans ce monde qui n'était pas le sien, il en avait bien conscience.
Alors, autant retourner voir celui qu'il avait sauvé. Peut-être même qu'avec un peu de chance il serait suffisamment reconnaissant pour l'héberger durant cette année.
A vrai dire, Chuuya n'arrivait vraiment pas à s'imaginer, à réaliser la situation désastreuse dans laquelle il était. Il ne fallait pas qu'il s'attache aux hommes, surtout pas. C'est ce qu'il se répéta en boucle avant d'arriver sur la plage, à quelques mètres seulement du noyé et de celui qui habitait plus haut.
Il sortit de l'eau d'une démarche hésitante, ne connaissant pas la texture du sol sous ses pieds. Ayant grandi dans un bégonia, le sable n'était pas vraiment le matériau que l'on trouvait facilement par chez eux.
Le jeune homme que le rouquin avait ramené n'avait toujours pas bougé d'un iota, en revanche l'autre homme le regardait d'un air surpris, comme s'il avait devant lui un fantôme. Chuuya lui lança le regard le plus hostile qu'il put, et l'autre décampa vers sa maison.
Le manipulateur d'eau soupira. Il ne savait pas pourquoi il avait agi comme ça. Probablement parce qu'on lui disait qu'il fallait haïr les hommes depuis qu'il était tout petit. Ce n'était pas comme ça qu'il parviendrait à survivre en tout cas.
Il s'avança vers le brun toujours étendu sur la plage, et pensant qu'il était probablement déjà mort, il lui donna un grand coup de pied dans les côtes. Ce qui eut le mérite de le faire un peu remuer et de grommeler quelque chose.
-T'as pas intérêt à crever, abruti. Sinon, ça signifierait que je n'ai pas pu rentrer chez moi pour rien, et je peux t'assurer que si c'est le cas j'irai moi-même chercher ton âme pour te le faire payer, dit-il avec un regard glaçant et une colère non dissimulée.
-C'est bien ce que je me disais. Tu es le dauphin rouge de tout à l'heure, n'est-ce pas ?
Le rouquin sursauta, surpris par la présence dans son dos. Son premier réflexe fut d'envoyer une vague contre celui qui l'avait surpris, puis il reconnut celui qui avait filé tout à l'heure chez lui. Chuuya rattrapa de justesse l'eau avec qu'elle n'emporte le jeune homme brun-roux.
Puis il le fixa, tentant de déterminer ses intentions. Il comprit lorsqu'il vit qu'il tenait dans ses bras une serviette et un pantalon sec. Le rouquin, tellement chamboulé par sa situation, avait oublié qu'il n'avait rien sur lui, résultat de sa dé-transformation.
Il accepta donc immédiatement les affaires qu'on lui tendait, un peu gêné de la situation. Il marmonna un « merci » à peine audible et enfila le bas sur-le-champ. Puis il reporta son attention sur l'autre personne, qui semblait attendre patiemment.
-Pas besoin de m'expliquer, j'ai compris ce qui était arrivé, annonça l'autre, placide.
-Bien, dans ce cas... Attends, quoi ?! Tu vois subitement un dauphin se transformer en homme et manquer de te noyer, et ça ne t'étonne même pas ?!
L'autre haussa les épaules, comme si cela coulait presque de source.
-Si, un peu. Mon arrière-grand-mère me racontait souvent des histoires sur vous lorsque j'étais petit, mais je n'y avais jamais cru. Mes croyances ont changé, c'est tout.
Chuuya haussa un sourcil, peu convaincu. Depuis quand les humains avaient conscience de leur existence ? Enfin, il n'allait pas relever, il s'en fichait et ça lui simplifiait les choses, dans un certain sens.
-Je me doute que tu ne comptes pas te mêler aux Hommes, aussi j'ai actuellement une chambre de libre là-haut si ça t'intéresse. C'est petit mais près de la mer, ça compense, lui souria-t-il en montrant la maisonnette un peu plus haut.
Le rouquin fut touché par cette proposition et hocha la tête en signe d'assentiment, malgré le fait qu'il ne pouvait s'empêcher de penser à chez lui, et de rester méfiant.
Est-ce que tout le monde était rentré sain et sauf hormis lui ? Il tentait de s'en convaincre. Est-ce que son père tenait encore debout ? Probablement pas, mais il valait mieux imaginer le contraire. Est-ce que le gardien des rats allait passer à l'acte ? Il n'avait sûrement pas intérêt. Chuuya lui avait promis de lui rapporter un objet humain en échange d'autre chose, mais n'ayant pas pu le rapporter, il avait des raisons de s'en faire.
-Je m'appelle Oda, enchanté de faire ta connaissance, ... ?
Coupé dans ses pensées, le rouquin ne répondit pas tout de suite à la main que lui tendait l'autre et à comprendre la question cachée. Puis il finit tout de même par répondre.
-Chuuya.
Oda commença à monter les marches qui menaient à sa maison, puis il se tourna comme pour inviter le nouveau venu à le suivre. Ce dernier regarda le garçon étendu sur la plage.
-Tu ne le ramènes pas ? demanda-t-il en se retournant, étonné.
L'autre poussa un énorme soupir découragé et désespéré à la fois, avant de répondre :
-Non. Il se débrouillera seul.
-A t'entendre tu as l'habitude de ce genre de cas. Il est si maladroit que ça ? Pourquoi est-ce qu'il vit au bord de mer alors ?
-Oui, malheureusement on peut dire que j'ai l'habitude. Et non, ce n'est pas ce que tu crois.
Il détourna les yeux, semblant gêné. Le rouquin allait commencer à s'impatienter quand il reprit finalement :
-Je te demanderai d'accepter des excuses pour ce qui s'est passé pour deux, annonça-t-il en se passant une main dans la nuque.
Chuuya fut surpris par cette affirmation. Ce n'était pas à cet Oda de s'excuser, mais à l'autre crétin encore allongé plus bas pour avoir réussi l'exploit de finir en haute mer et sur son chemin. Mais il n'insista pas, de toutes façons tant qu'il arrivait à survivre une année sans trop s'attacher aux Hommes, le reste lui importait peu. Mais il était tout de même curieux de voir quel genre de gugusse il avait sauvé.
-Viens manger quelque chose, il ne se réveillera pas avant encore au moins deux bonnes heures, cet idiot.
Le rouquin le suivi docilement, après tout cela faisait une semaine complète qu'il n'avait strictement rien avalé. Il découvrit de la nourriture qu'il ne connaissait pas, mais qui n'était pas mauvaise non plus. Son hôte lui avait bien précisé qu'à la base le repas était seulement prévu pour le brun et lui, mais qu'il pouvait manger toute la part de celui qu'il avait sauvé en compensation. Ce qu'il ne se priva pas de faire.
Puis ils retournèrent ensuite sur la plage, où Oda lui expliqua plus avant sa situation familiale et celle du brun. Il s'appelait Osamu Dazai et habitait à l'heure actuelle lui aussi dans la maisonnette sur la côte.
Ils étaient les seuls occupants car les parents et grands-parents du propriétaire étaient déjà partis depuis bien longtemps vivre ailleurs, seul lui était revenu lorsque son arrière-grand-père était décédé, pour tenir compagnie à son arrière-grand-mère. Puis elle était décédée environ trois ou quatre ans plus tôt, aussi avait-il vécu seul.
Puis Dazai, qu'il connaissait depuis tout petit car ils habitaient dans le même village avant qu'Oda ne parte, avait décidé de fuir sa mère, trop exigeante à son goût. Il avait trouvé refuge ici -enfin, il avait plutôt fortement insisté auprès de son ami, qui s'y était dans un premier lieu opposé, pour la simple et bonne raison que si jamais les dauphins revenaient, ce serait trop compliqué à expliquer. Même s'il n'y croyait pas encore à ce moment.
Oda avait gardé la maison plutôt que de rentrer chez lui pour deux raisons. La première était qu'il aimait beaucoup l'endroit et la vue. La deuxième était qu'il savait pertinemment que, chaque année à la même date, l'ancienne propriétaire scrutait avec attention les flots, avec une tristesse et une culpabilité plus que simples à percevoir. Alors même si ces récits étaient faux, il y avait tout de même obligatoirement anguille sous roche.
Il n'avait compris qu'aujourd'hui ce qu'elle espérait tant voir. Car pour lui, ce n'étaient que des mythes encore quelques heures plus tôt.
Ils s'étaient installés sur un petit muret pour discuter, Chuuya s'amusant à lancer de temps à autre un caillou qu'il avait ramassé, le projetant plus haut qu'une personne normale en l'entourant d'eau, tandis qu'il avait une jambe repliée sous lui et l'autre qui pendait dangereusement vers la mer. Le brun-roux, quand à lui, le regardait faire tout en parlant et en surveillant celui qui ne s'était toujours pas réveillé.
Lorsqu'il eut fini son récit, le rouquin l'observa longuement. Il se méfiait, on lui avait toujours dit que les humains étaient mauvais. Mais finalement, il lui était tout de même reconnaissant, alors il consentit à un petit effort.
Il prit la parole et lui expliqua à son tour sa situation et l'urgence qu'il avait de rentrer pour s'assurer de la santé de son père, en omettant tout de même certains détails comme le gardien des âmes ou la description poussée de son univers. Il ne savait d'où l'autre avait tiré ses informations, aussi ne comptait-il pas lui en apporter de plus amples.
Une fois qu'ils eurent tout deux terminé de parler, ils contemplèrent le ciel, où le soleil n'était déjà plus visible qu'à moitié, le teintant de couleurs rose-orangées. Puis soudain, Oda reprit la parole tandis que Dazai commençait à remuer dans le sable.
-Surtout, méfie-toi du gardien des rats.
Chuuya eut un mouvement de recul. Il en savait donc autant que ça sur son monde ? Il était peut-être réellement dangereux, en fin de compte. Il ne lui avait toujours pas dit d'où il tenait ça. Enfin, le jeune homme n'avait pas l'intention de développer, sinon il l'aurait dit plus tôt. Le brun n'était probablement pas au courant pour le monde d'en dessous, aussi il ne fallait pas l'évoquer s'il était conscient.
Ce dernier ouvrit subitement les yeux, qui roulèrent dans leurs orbites avant de se poser sur son meilleur ami.
-Tiens, Odasaku ! Si tu es là, c'est que je ne suis pas encore mort, hein ? soupira-t-il finalement.
-Qui sait, répondit pince-sans-rire l'interpellé.
Le rouquin observa leur échange, ayant peur de comprendre pourquoi il ne fallait pas qu'il attende de remerciement.
-Parce que si j'étais réellement là-haut, et aussi attirant soit le mioche là-bas, je ne souhaite pas rester au paradis, ou même en enfer, entouré de gnomes.
Chuuya mit un certain temps à assimiler les paroles du brun et l'insulte ouverte malgré qu'ils ne se connaissaient même pas, temps durant lequel Oda tenta de calmer le jeu.
-Dazai, fais attention à ce que tu dis, c'est lui qui...
Trop tard, la pierre avait fusé directement sur la tempe de celui qui venait de se réveiller, le faisant basculer et retrouver sa place initiale dans le sable, sonné.
-Répète un peu pour voir ? dit le rouquin, passablement énervé. Il était très susceptible, surtout lorsqu'il s'agissait de sa taille. Je n'ai pas encore fini ma croissance, je te signale !
Mais le brun l'ignora royalement, et après avoir repris ses esprits s'adressa de nouveau à son ami.
-Comment ai-je pu revenir ici, alors que j'étais sur la falaise tout au bout et que c'était la marée descendante ?! Ça n'a aucune logique !
Il l'avait dit sur un ton boudeur, ce qui permit enfin à Chuuya de comprendre. S'il s'était retrouvé là, c'est qu'il avait tenté d'attenter lui-même à sa vie. Le rouquin avait donc sauvé un suicidaire, et se retrouvait désormais coincé ici, pour rien, car il retenterait probablement le coup.
De fureur, il se leva, en même temps qu'une énorme vague qui le dépassa de trois fois sa taille, avant de partir d'un pas rageur vers la maisonnette située en haut. Il resterait pour la nuit mais tenterait de trouver un autre logement demain.
-J'ai rêvé où la vague s'est soulevée sous son impulsion ? demanda un Dazai tout intrigué.
-Tu as rêvé. Imbécile, soupira Oda.
Puis il partit à son tour, laissant le suicidaire pantois sur le sable. Il n'aurait peut-être pas dû, car cela permit à ce dernier de prendre toute la mesure des choses. Personne n'aurait pu décemment venir le chercher et le ramener à temps sur la terre ferme, de là où il s'était jeté. Car c'était forcément lui qui l'avait sauvé. Oda n'avait pas connaissance de ce lieu et lui venait d'arriver de nulle part à l'improviste. De plus il lui avait semblé avoir aperçu un dauphin d'une couleur peu habituelle avant de sombrer, même s'il n'en mettrait pas sa main à couper.
Et il était persuadé que la marée n'était pas suffisamment forte à cette période pour provoquer une telle vague. De plus, le caillou qu'il avait reçu juste avant était bien trop rapide et puissant, au vu de comment il avait été lancé, et il avait laissé un peu d'humidité sur sa peau.
Cela promettait d'être intéressant, peut-être qu'au final sa mort attendrait un peu. Il sourit et grimpa à la suite de son ami et de leur nouveau comparse les marches, tout guilleret.
~
Chuuya fut installé, pour son plus grand malheur, dans la chambre avoisinante à celle du suicidaire. Ce dernier avait protesté toute la soirée contre son emménagement, traînant dans les pattes des deux autres comme un vrai gamin. Le rouquin, lui, affirmait que ce n'était que temporaire, tandis qu'Oda, lui, affirmait qu'il resterait toute l'année avant de repartir. Ce qui intriguait d'autant plus le brun.
D'ailleurs le propriétaire des lieux avait plusieurs fois fait comprendre à son hôte pas des œillades appuyées qu'il n'avait pas le choix. Enfin, après avoir trouvé deux tenues à la taille du plus petit, ils allèrent tous trois se coucher.
Chuuya n'arrêtait pas de ressasser encore et toujours ses pensées moroses, n'arrivant pas à les effacer. Puis quand il avait enfin réussi à presque trouver le sommeil, il avait subitement entendu un son exubérant provenant de la chambre d'à côté.
-Mais c'est pas possible...
Il serra fort les dents pour se comprimer un peu, tandis que de l'autre côté de la cloison Dazai chantait à tue-tête comme s'il était seul. C'était donc pour cette raison qu'Oda dormait totalement à l'opposé ?
Le rouquin respira calmement, se disant qu'il ne chanterait pas toute la nuit, et tenta à nouveau de dormir. Au bout de dix minutes et l'oreiller enfoncé sur les oreilles, rien n'y faisait. Alors il se leva et tapa trois grands coups contre le mur, persuadé d'avoir fait trembler la maison au passage.
La chanson s'arrêta. Chuuya soupira, avant de repartir s'emmitoufler dans sa couette. Mais à peine posait-il sa tête sur l'oreiller que c'était reparti.
Il se leva à nouveau, muni du traversin, bien décidé à continuer le travail qu'avait exercé la mer sur les poumons du brun, et sortit de sa chambre. Il ne frappa même pas et ouvrit la porte si violemment qu'elle alla se cogner contre le mur dans un grand bruit.
Il fixa le suicidaire, qui lui rendit son regard tout en chantant. Puis, voyant la lueur meurtrière qui flottait dans les yeux azur de son nouveau colocataire, il cessa enfin sa chanson et se releva, tout sourire.
-Tiens, le nain ! Tu n'arrives donc pas à...
Sa phrase fut étouffée dans l'oreiller du « nain » en question, dont cette appellation avait été la goutte de trop. Durant plus de cinq minutes ils se bagarrèrent et roulèrent sur le sol, comme deux gamins se disputant. L'un tentant d'étouffer l'autre avec l'oreiller, et ce dernier tentant de l'en empêcher avec force cris et coups. D'ailleurs, ils auraient probablement encore continué longtemps, si Oda ne s'était pas levé pour les séparer.
Enfin, c'est ce qu'il avait tenté de faire dans un premier temps. Le jeune homme avait beau avoir un charisme assez impressionnant, ce n'était pas suffisant pour mater les deux énergumènes qu'il logeait désormais, qui ne l'avaient même pas remarqué, tout occupé à se chicaner.
Aussi, commençant à perdre de sa patience légendaire, il soupira et éteignit la lumière. Les deux se séparèrent soudain, surpris, puis ensuite penauds, et quand il ralluma, ils s'excusèrent tous les deux. En plein dans leur dispute, ils avaient à peine fait attention à lui.
Maintenant, ils voyaient tous deux la lueur menaçante dans son regard fatigué. Dazai, qui le connaissait plutôt bien, savait qu'arrivé à ce stade, il fallait juste se taire. Quand à Chuuya, il n'en savait rien, mais au vu de la maturité et du calme dont l'autre avait fait preuve jusqu'à présent, il le devinait.
Le rouquin retourna dans sa chambre, et le brun tenta de se justifier en disant que c'était lui qui l'avait agressé le premier. Ce qu'il cessa immédiatement sous le regard courroucé de son ami. Il avoua finalement l'avoir peut-être un peu cherché, et promit de ne plus le déranger de la nuit.
Chuuya trouva enfin le sommeil, mais il ne fit que cauchemarder. Il n'avait déjà pas confiance par rapport au gardien, mais le brun-roux n'avait fait qu'accentuer ce sentiment, mêlé à de l'incompréhension. Ensuite, il regrettait d'avoir sauvé cet imbécile de suicidaire au lieu de rentrer chez lui. S'il l'avait laissé là, tout le monde aurait été content.
Sauf peut-être Oda, se dit le rouquin. Lui aurait sûrement été triste. Puis il se rappela subitement que c'était des humains, et qu'il n'aurait pas dû s'en approcher. Son sentiment de culpabilité ne fit que s'accentuer, et il se fit la promesse cette nuit-là de rester distant avec eux deux.
C'était beaucoup d'émotions à son âge, surtout que désormais il avançait dans un monde qui lui était totalement inconnu.
Oda, lui, se demanda bien comment il allait pouvoir gérer les deux cas sociaux qu'il hébergeait désormais. Il ne s'attendait sûrement pas à tomber sur quelqu'un d'aussi impulsif que le rouquin, tout comme il ne s'attendait pas à ce que son ami réagisse de cette manière.
En réalité, s'il était parti de chez lui, c'était parce que son père était décédé d'une maladie incurable, et que sa mère était devenue insupportable. Et depuis qu'il vivait ici, il avait toujours été morose, au point de tenter plusieurs fois de se tuer. Enfin, réellement, car il le faisait déjà depuis un certain temps, mais moins. Là, il avait souri et s'était disputé. Tant d'émotions qu'Oda ne lui avait pas connues depuis au moins deux ans.
Quand à Dazai, lui, cherchait une solution pour faire cracher le morceau aux deux autres hommes. Car son meilleur ami était forcément au courant, vu comme il lui avait répondu. Aussi il s'endormit tandis que son brillant cerveau imaginait toutes sortes de plans tous plus fous les uns que les autres.
~
Le lendemain matin, seul Oda semblait frais et dispo, malgré le fait qu'il avait d'énormes cernes sous les yeux. Car ce n'était rien comparé à ses deux acolytes. Chuuya, qui s'était levé le premier beaucoup trop tôt, somnolait de temps en temps sur le canapé. Le brun-roux ne savait trop depuis combien de temps, étant donné qu'il était déjà comme cela lorsqu'il était arrivé dans la pièce.
Il n'avait visiblement pas réussi à dormir correctement, hanté par ses cauchemars. Oda n'y pouvait malheureusement rien, et de toutes façons il avait déjà tenté de s'approcher et s'était immédiatement fait jeté. Il savait que ce n'était pas une situation des plus simples, surtout après les évènements du siècle passé, aussi il lui laisserait le temps qu'il faudrait.
Mais cela était moins sûr pour le deuxième homme logeant chez lui. Il s'était levé le dernier, une tête plus morte que vivante. Oda s'en étonna d'abord, il n'avait aucune raison de mal dormir. Mais pour l'avoir déjà vu dans cet état, il ne valait mieux rien dire.
Dazai s'affala sur une chaise devant la table du petit déjeuner, et commença à soupirer.
-Odasakuuu... Je refuse de dormir une nuit de plus dans la pièce à côté du nabot ! Il ne fait que geindre et il est impossible de trouver le sommeil ! se plaignit-il suffisamment fort pour que le concerné entende.
-Je vais le tuer si je le vois encore au réveil demain, cet abruti de suicidaire, marmonna Chuuya, trop fatigué pour crier.
Puis il se retourna finalement, attiré par l'odeur du petit déjeuner que venait de préparer leur hôte et dont il n'avait jamais entendu parler. Puis il remarqua que le brun portait des bandages.
-C'est quoi ce délire ? Tu te momifies pour crever plus vite, crétin ? se moqua-t-il.
Le rouquin trouvait cela tout bonnement ridicule. Il avait poussé jusqu'à se recouvrir un œil en plus du cou et des bras. Qu'est ce qu'il cherchait à prouver ?
L'autre le regarda simplement avec un regard éteint et fatigué, ne daignant même pas répondre. Néanmoins, il sembla au rouquin qu'il lui avait tiré la langue l'espace d'une demi-seconde. Mais quel gamin !
Puis Chuuya se rappela la discussion qu'il avait eu avec Oda avant que l'autre abruti ne se lève. Pour retourner chez lui, même dans un an, il fallait qu'il puisse de nouveau se retransformer, sa seule capacité à maîtriser l'eau ne suffisant malheureusement pas.
Il fallait donc qu'il recrée un breuvage similaire à celui permettant de se transformer dans son monde, mais avec les plantes humaines. Heureusement, il avait d'énormes connaissances en botanique, c'était d'ailleurs pour cela qu'il avait contribué à en retrouver la recette.
Il avait énoncé ses connaissances devant Ranpo, pour qui la botanique ne représentait aucun intérêt, et ils avaient testés. Cela avait presque fonctionné du premier coup. Non pas que la botanique intéressait le rouquin, loin de là, mais après la première tentative dix ans auparavant... Disons qu'il se doutait en avoir besoin et qu'il avait fait un effort.
Aussi, il savait quoi chercher. Pour peu qu'il soit chez lui. Mais ici, il allait devoir découvrir les effets des plantes locales avant de pouvoir trouver une recette similaire, d'autant que la même aura n'habitait pas les deux endroits.
Oda lui avait alors certifié qu'il savait où chercher ces connaissances. Il s'avérait justement que la mère de Dazai était pharmacienne, et était donc plus que compétente et qualifiée. Seul petit bémol, le brun la fuyait comme la peste depuis deux ans. Et cela signifiait également que Chuuya avait besoin de lui, ce qu'il ne supportait pas.
Une fois que tout le monde eut fini son petit-déjeuner, Oda expliqua la situation au suicidaire, tentant de faire preuve de tact. Il cacha bien évidemment les véritables raisons, et dit à la place que le nouvel arrivant était atteint d'une maladie très grave et mortelle, à laquelle il ne survivrait pas si on ne trouvait pas un antidote.
-Attends... Tu me demandes de retourner voir cette mégère ? Pour cette limace ? Et puis quoi encore ?
-Tu viens de m'appeler comment là ?! s'énerva encore une fois le rouquin, coupant la parole à Oda qui avait pourtant ouvert la bouche dans une tentative de réponse.
-Limace. Petite, baveuse et orange. Comme toi.
Chuuya tenait un verre d'eau à la main, et était parfaitement en mesure de la condenser puis de l'envoyer comme une lame de rasoir. Mais il se retiendrait tant qu'il aurait encore besoin du brun. Enfin, il essaierait.
-D'ailleurs, pourquoi je le ferais alors qu'il ne m'a toujours pas dit d'où il venait ? Vos cachotteries commencent à bien faire ! se plaignit encore une fois le brun. Evidemment, il n'avait fait que harceler de question la veille le plus petit, sans aucune réponse, ce qui l'avait frustré.
-Et puis, reprit-il en voyant qu'on ne lui répondrait pas, il n'a qu'à mourir, je n'en ai rien à faire, et je préfère toujours ça que de voir ma mère.
Voyant que Chuuya allait se lever dans le but d'étriper l'autre, le trouvant tout de même bien ingrat et peu coupable au vu de la situation, Oda intervint immédiatement. Il avait compris la veille que cela pouvait dégénérer à tout moment.
-S'il n'est pas soigné à temps, il mourra dans d'atroces souffrances, et très lentement.
Cela n'émut pas le suicidaire, qui ne broncha même pas, comme s'il s'en fichait vraiment.
-Et s'il venait à mourir comme ça, il resterait alité durant toute son agonie et ferait bien plus de bruit que la nuit dernière, termina le plus mature des trois, sans appel.
Cette fois-ci, Dazai écarquilla les yeux. Si c'était vrai, alors il ne trouverait pas le sommeil avant longtemps. Il grommela quelque chose comme « dans ce cas... » puis ajouta un « Chibi » avant de se retourner.
C'en était trop pour le rouquin, et Oda n'ayant plus rien pour calmer le jeu, le brun fut subitement soulevé par une force étrangement élevée pour une si petite taille. Avant d'être balancé à travers la pièce et d'atterrir violemment contre une lampe, qui se cassa sous le choc.
Chuuya partit dans sa chambre et claqua sa porte, tandis que Dazai était sonné et qu'Oda se demandait si son intérieur avait une chance de survivre supérieure à zéro. Mais il était encore trop tôt pour partir en ville, surtout par égard pour le suicidaire et ses rapports familiaux plus que houleux. Ils allaient donc attendre au moins jusqu'à demain.
Oda leva les yeux vers son plafond comme s'il pouvait apercevoir le ciel à travers, et murmura :
-Pardonne moi, je ne t'ai jamais crue de ton vivant, et désormais je ne sais absolument pas dans quoi je m'embarque.
Enfin, au fond, il se disait que ce n'était pas non plus une mauvaise chose pour son meilleur ami. Peut-être que s'il trouvait quelqu'un à embêter, il arrêterait enfin de vouloir mourir. Il était évident qu'un lien commençait à naître entre eux-deux, même s'ils ne l'accepteraient probablement pas. Et même si cela était mauvais pour Chuuya.
Oda allait donc pouvoir arrêter de surveiller les faits et gestes du suicidaire pendant un certain temps. Mais dans une année, quand le rouquin partira pour ne jamais revenir, que se passera-t-il ? Il valait mieux parfois ne pas avoir de réponse à ses questions.
A suivre ~
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