Day 4 ~ Debt and repayment

Traduction (même si vous en avez pas forcément besoin) : dette et repaiement. 

Une dette peut être une somme d'argent que l'on doit à quelqu'un, mais pas seulement. Cela peut aussi être une dette morale, un devoir qu'impose une obligation contractée envers une autre personne. Et rapaiement, tout simplement le fait de rembourser cette dette ~

J'ai eu beaucoup de mal à trouver l'inspiration pour ce jour, mais quand il est venu et bien... ça a donné cet OS encore une fois un peu long ^^' (mais le pire est à venir :3)

Sinon, déjà la moitié de la week! Encore une fois merci pour les votes, commentaires et ajouts, et bonne lecture~ (pas de PS cette fois-ci :'))

~:~:~

     Le rouquin se mit soudain à rire, d'un rire démoniaque, inhumain, avant de commencer à cracher du sang, interrompant ce funeste son. Le sang sortant de son nez et de sa bouche se confondait désormais parfaitement avec les tâches rougeâtres qui luisaient partout sur son corps, témoignant du fait qu'il était possédé.

     En face de lui se tenait un brun, bandé de la tête aux pieds. Impuissant pour le moment alors qu'il observait son partenaire souffrir le martyre et, il en était persuadé, mourir à petit feu.

Quelques heures plus tôt~

-Comment ça travailler de nouveau avec lui ?! Il en est hors de question ! Cet enfoiré va encore chercher à me faire une crasse !

     Chuuya fixait sa supérieure, Kouyou, avec un regard à la fois respectueux et totalement dégoûté. Pourquoi fallait-il qu'il collabore à nouveau avec l'autre abruti de suicidaire ? Pourquoi il n'était toujours pas mort, d'ailleurs ? Cela aurait au moins eu le mérite de faire des vacances à tout le monde.

-C'est une mission importante que tu ne peux refuser Chuuya, dit d'un ton ferme la rouquine. C'est la première vraie mission qui t'est assignée depuis que tu as intégré la mafia, il faut que tu prouves à tous que tu es capable et fidèle.

     Le dernier mot fit tiquer le roux. Il savait qu'il devrait prouver sa fidélité à un moment, c'était évident au vu de ses antécédents quelques peu... Houleux avec l'organisation qu'il venait de rejoindre.

     Mais il n'avait pas réellement l'envie de la passer devant le petit protégé de Mori. Et encore moins devant Mori lui-même, qui serait probablement là pour l'occasion. Et qui sait de quoi était capable son esprit tordu et machiavélique pour prouver à tous que désormais le manipulateur de gravité serait un bon toutou fidèle ?

     Il n'avait pas vraiment envie de le savoir. Mais il n'avait pas non plus vraiment le choix.

-Et qu'est ce que je vais devoir faire exactement avec l'autre abruti ?

-Oh, rien de bien méchant. Juste raser l'organisation qui pose actuellement le plus de problème à la mafia. Vu ta force destructrice ça devrait être simple.

     « Juste » ? On se fichait encore bien de lui. Si c'était une organisation qui osait défier la mafia, c'est qu'elle n'était pas si petite que ça.

-Et pourquoi aurai-je besoin de la momie si c'est pour ma force destructrice ? A ce que je sache il n'est même pas capable de blesser un moucheron, alors une organisation.

     Chuuya affichait une moue boudeuse et peu convaincue, tandis que Kouyou lui offrit un petit sourire en coin.

-Oh, tu serais surpris de voir à quelle vitesse il fait parler les otages en salle de torture.

     Le rouquin la regarda, surpris par cette affirmation. Enfin, pas tant que ça en fait. C'était un manipulateur né. Pour lui, faire parler des coupables, voire même des non-coupables, devait être un jeu d'enfant.

-Quand à ce qui est de sa présence... Essaye de deviner par toi-même, ça te fera un bon entraînement à la réflexion.

     Le jeune mafieux s'était tu et se creusait les méninges pendant qu'ils continuaient d'avancer -Kouyou savait trouver les moyens pour le faire taire-

     C'était une organisation dangereuse. Pourtant au vu des plans des bâtiments elle n'avait pas énormément d'influence et semblait même plutôt inoffensive. Dazai avait la capacité d'annuler un pouvoir, mais à part ça...

-Il y aura donc des détenteurs de super-pouvoir là-bas, murmura Chuuya, plus pour lui-même, avant de reprendre son ton énervé habituel. Ce n'est pas ça qui va m'empêcher de les détruire ! Un ou deux petit super-pouvoirs ne m'atteindront pas si facilement, vous pouvez renvoyer l'autre crétin suicidaire !

     Kouyou soupira, désespérée de l'attitude de son protégé et légèrement agacée. Le sentant probablement aussi, le rouquin se calma immédiatement et se tendit légèrement. Pour l'avoir déjà énervée une fois, il n'avait pas franchement l'intention de réitérer l'expérience. Elle était vraiment effrayante par moment. Elle tenta de reprendre sur un ton doux, mais cachant néanmoins les signes d'une colère froide :

-Nous ne savons pas exactement combien ils sont. Premièrement. Et deuxièmement, je te rappelle que tu as failli y rester contre seulement deux détenteurs de pouvoirs, Hirotsu et Dazai, alors imagine s'ils étaient trois ou quatre.

     Cela lui faisait mal de l'admettre, mais elle avait raison. Comme souvent. De plus, s'il voulait continuer à protester, il serait obligé de faire un éloge du pouvoir du brun. Ce qu'il ne s'abaisserait certainement pas à faire.

     Ils arrivèrent quelques minutes plus tard en silence devant le bureau du parrain, et frappèrent à la porte. Ils attendirent patiemment tandis que les bruits d'une dispute entre le boss de la mafia et le jeune suicidaire semblait avoir lieu.

-Vous m'aviez promis de me préparer un poison si je remplissais ma première mission correctement, affirmait d'une voix fatiguée et boudeuse Dazai.

-Je te l'ai certes promis, mais je n'ai pas précisé quand je te la donnerai, et pour le moment j'ai encore besoin de toi, répondait d'un ton moqueur Mori.

-Si j'avais su, soupira le brun, j'aurais directement avalé le mélange que je m'étais préparé. Au moins je n'aurais pas eu à supporter le nain.

     « Le nain » en question vit rouge et se retint de justesse de fracasser la porte pour dire ses quatre vérités à l'infirmerie ambulante. La présence de Kouyou, et le fait que le boss se trouvait dans l'autre pièce, l'aidèrent plutôt à souffler.

-Ces médicaments ne t'auraient jamais tué. A la limite tu aurais eu mal au ventre comme si on t'avait criblé de balles pendant une petite semaine, mais c'est tout.

     Le parrain et ancien médecin douteux avait répondu sur un ton presque surpris, comme s'il s'agissait d'une évidence, et il n'était pas difficile d'imaginer la moue dégoûtée que devait désormais afficher Dazai, qui détestait plus que tout la souffrance.

     Sentant probablement elle aussi que le débat était clos, la capitaine rousse frappa à nouveau à la porte. Puis lorsqu'on les invita à entrer, Kouyou se recula pour laisser passer seul son protégé.

-Tu ne viens pas ? demanda ce dernier, surpris.

-Non, j'ai une autre affaire à régler malheureusement. Mais tu es grand, tu n'as plus besoin d'une nounou.

     Sur ces mots, elle s'éloigna en ouvrant majestueusement son ombrelle, tandis que le rouquin soupirait. Cela voulait dire que cela allait être soit Dazai, soit le parrain qui allait superviser la mission. Que du bonheur.

~

     Ils étaient tous les trois arrivés devant le bâtiment qu'ils devaient détruire. La nuit commençait à tomber, rapprochant les deux jeunes hommes du début de l'opération. Le parrain les accompagnait mais n'interviendrait qu'en cas d'extrême nécessité.

-N'oublie pas Chuuya, je veux que tu te lâches. Je veux voir toute l'étendue de ton pouvoir, tu as intérêt à être à la hauteur du dieu furieux.

     Le roux n'avait pas vraiment confiance. Et pas que parce que le chef de la mafia venait de parler avec un de ces sourires carnassiers dont il avait le secret. Il s'était toujours restreint, pensant ne pas avoir le droit de libérer dans sa totalité son pouvoir.

     Mais il n'avait jamais essayé. Et il avait un mauvais pressentiment. Quand à Dazai, lui fixait la rivière qui coulait un peu en contre-bas, l'envie de s'y jeter ne manquant pas, tout comme celle du rouquin de l'y aider. Mais il fallait qu'ils se contiennent tous les deux en présence du Boss. Toujours est-il que lorsque Mori expliqua le plan, le brun n'écoutait absolument pas, et Chuuya seulement d'une oreille.

     S'en rendant sûrement compte, l'ancien médecin douteux cessa son discours et les invita à commencer l'opération, maintenant que la lune éclairait leurs pas d'une lumière blafarde.

     Le rouquin se concentra de tout son être sur le pouvoir qui bouillonnait en lui. Il savait où le trouver, même si Rimbaud l'avait en quelque sorte scellé huit ans plus tôt. Puis lorsqu'il l'eut atteint, il le libéra, d'un coup. Cela semblait si simple, finalement. Des mots s'échappèrent de ses lèvres, mais si rapidement qu'il fut bien incapable de savoir lesquels. Puis des marques rouges apparurent sur ses bras, déchirant les manches de son nouveau manteau noir.

     C'était donc ça, toute l'étendue de son pouvoir ? Non. Ce n'était pas fini. Il regardait, désormais impuissant, les marques rouges se former sur ses épaules, les sentant ensuite arriver jusque sur son visage. Puis il se sentit chavirer, alors même qu'il était au summum de sa puissance. C'était une sensation très étrange, et qui pourtant lui semblait déjà familière. Et il aurait été bien incapable de l'endiguer.

     Il sentait qu'il pouvait désormais manipuler la gravité d'une autre manière. Il était suffisamment puissant pour la condenser et créer une boule d'énergie dévastatrice.

     Il commença à former cette sphère de gravitons dans ses deux mains, lorsqu'il se sentit perdre pied. Il tenta difficilement de rester conscient, mais rien à faire. Il paniqua. Non. Il ne voulait pas revivre ça. Pas maintenant qu'on l'avait enfin libéré de son état de prisonnier. Il ne voulait pas sombrer à nouveau, encore, sans savoir quand est-ce qu'il pourrait ressortir, s'il ressortait.

     Mais c'était trop tard. Il disparut totalement dans le néant, comme happé par la force qu'il venait de libérer, tandis qu'il entendait vaguement un rire dément s'échapper de ses propres cordes vocales, et une voix au loin l'interpeller, inquiète.

     Puis il fut de nouveau dans cet espace clos et noir, dont il n'était jamais parvenu à s'échapper seul. Dont il était resté prisonnier pendant sept putains d'années. Et dont il allait probablement encore rester prisonnier un certain temps. S'il retrouvait quelqu'un capable de l'en sortir.

     Il maudit Mori pour ses plans foireux, et il se maudit, lui, pour avoir écouté sans broncher cet être vicieux et machiavélique, malgré tout le respect qu'il ressentait à son égard. C'était une force qu'il aurait mieux valu laisser enfouie. Mais le Boss devait savoir qu'elle existait, et aussi souhait-il la mettre à profit.

     Dazai observait celui qu'il était censé aider détruire à lui-seul, dans un immense bain de sang, le bâtiment principal de l'organisation. Puis il vit tous les sous-fifres débarquer, puis être balayés un à un. Enfin il vit trois détenteurs de super-pouvoirs lutter contre cette force surnaturelle. En vain, évidemment. L'avantage, c'est que lui n'aurait rien à faire. Il s'était donc déplacé pour rien.

     Pour autant, il avait un mauvais pressentiment depuis qu'il avait vu les marques rouges apparaître sur le corps de son compagnon. Elles n'étaient pas bon signe, et lorsqu'il avait traité le rouquin de « petite limace naine » il n'y avait eu aucune réaction de sa part. Lui qui réagissait toujours au quart de tour. Il y avait vraiment quelque chose qui clochait.

     Mais le parrain lui avait bien stipulé, avant même que Kouyou n'apprenne la mission à Chuuya, que lui, Dazai, ne devait absolument pas intervenir durant l'opération sans son ordre express, sous peine de croupir quelques jours dans la salle de torture.

     Ce qui n'était pas vraiment au goût du brun, aussi avait-il décidé qu'il s'abstiendrait. Pourtant, il ne pouvait détacher son regard du rouquin. Il allait y passer si ça s'éternisait, c'était certain. Du sang commençait déjà à couler de son nez. Et si le Boss l'avait mis en garde, c'est qu'il se doutait qu'il serait capable d'intervenir.

     Dans une dernière et immense boule de gravitons, la nouvelle recrue de la mafia balaya le dernier bâtiment de l'organisation ennemie. Cela avait été relativement rapide, ils pourraient avoir une nuit presque complète, pour peu que Mori ne leur assigne pas de suite une nouvelle mission.

     Le brun allait tourner les talons, après tout le combat était terminé et ne revêtait plus aucune sorte d'intérêt, quand il entendit encore une détonation. Il stoppa son geste et observa sa source : Chuuya.

     Pourquoi ne s'arrêtait-il donc pas, cet imbécile ?

-Ohé, Chibi ! C'est fini, remballe ton pouvoir maintenant !

     Mais il continua sa danse mortelle, comme si de rien n'était. Il se mit soudain à cracher du sang, puis à nouveau il rit, d'un rire qui n'avait cette fois absolument plus rien d'humain.

     Dazai regarda le Boss. Il avait un sourire en coin et regardait sa nouvelle prise comme s'il s'agissait d'un film. Il ne manquait que le pot de popcorn. Le brun commença à sentir son ventre se serrer, sans qu'il n'en sache réellement l'origine. Le rouquin pouvait bien mourir, il se disait que ça lui était égal, mais cela ferait perdre à la mafia un atout puissant et un membre que lui-même avait eu beaucoup de mal à recruter. C'est ce dont il essayait de se convaincre intérieurement, en tout cas.

-Boss, il faudrait peut-être...

     L'interpellé lui fit un signe de la main comme quoi ça attendrait. Le brun haussa les épaules, après tout ce n'était pas de son ressort. Pourtant son ventre continuait de désagréablement se tordre. Mais qu'est-ce qui lui prenait ?

-Il va mourir s'il continue comme ça, murmura tout de même le suicidaire à l'intention de son supérieur.

-Dans ce cas, c'est qu'il n'était pas apte à nous rejoindre. S'il est lui-même incontrôlable, on ne peut rien attendre de lui sur un champ de bataille, alors autant qu'il y reste.

     Ces paroles étaient dures et n'auraient probablement pas plu au concerné. Mais en même temps quelque chose dans l'attitude de Mori montrait bien qu'il s'attendait à cette situation. Et ces paroles firent l'effet d'une gifle au brun. Ils n'étaient tous que des pions remplaçables au final. Même lui. Surtout lui.

     Soudain Dazai comprit. Ce n'était pas que Chuuya qui était testé, mais lui aussi. On testait sa fidélité en même temps que le degré de puissance du réceptacle divin.

     Encore une fois, le parrain s'était bien joué de lui. Il reporta son regard sur le rouquin. Il devait encore lui rester une ou deux minutes, maximum, après il s'écroulerait.

     Et pour une raison qui lui était encore inconnue, le brun ne le supportait pas. Aussi il s'avança, ignorant son supérieur lui ordonnant de rester.

-Tu ne m'as pas encore servi en tant que chien, limace. Tu n'as pas le droit de mourir maintenant.

     Dazai eut du mal à parcourir les derniers mètres tant son compagnon émettait une vague d'énergie surpuissante, qui l'aurait d'ailleurs probablement envoyé valser s'il n'avait pas eu son propre pouvoir.

     Il parvint enfin au niveau du roux, et lui saisit le poignet fermement et sans aucune délicatesse. Immédiatement les yeux du plus petit retrouvèrent leur teinte bleutée et les marques disparurent.

     Il s'écroula complètement dans les bras de son sauveur, cracha une dernière fois du sang qui lui était encore resté coincé dans la gorge -sur la veste du brun évidemment- et s'évanouit aussitôt.

     Le suicidaire soupira. Il était obligé de faire sa propre lessive, et le sang était une des choses les plus dures à enlever. Il hissa le rouquin inconscient sur son épaule et se tourna vers Mori avec une lueur de défi dans le regard.

-Je vois que tu as fait ton choix. Enfin, je suppose que ce n'est pas si dramatique, j'ai vu ce que j'attendais de son pouvoir. Néanmoins...

     L'homme aux yeux rouges affichait un sourire presque carnassier tandis que son protégé, malgré qu'il le fixât toujours d'un air de révolte, frissonna brièvement. Il savait très bien ce que cela signifiait.

~

     Chuuya s'éveilla le lendemain sans d'abord se rappeler ce qu'il s'était passé. Puis quand les images lui revinrent, il crut d'abord à un cauchemar. Avant de sentir le sang séché qui lui maculait encore le visage, les cheveux et les vêtements.

     Puis il se demanda ensuite comment il avait pu s'en sortir, et surtout au bout de combien de temps au vu de son état. Il tenta de se relever avant d'être pris de vertige. Ce qui, en considérant que ce sang était le sien, n'était pas si étonnant.

     Il allait retenter le coup lorsqu'il entendit des voix s'élever de l'autre côté de sa porte. Il s'agissait probablement du Boss et de Kouyou, au vu du timbre de voix. Mais il n'aurait pu en attester, car si c'était bien la rouquine elle était vraiment très, très énervée.

     Il ne comprit que quelques mots sur le tas, comme son prénom, « mort », « inconscient ». Il crut même entendre Dazai à un moment. Qu'est ce qu'il venait encore faire là lui ? Le connaissant, il avait probablement attendu sagement dans un coin que lui-même fasse tout le travail, c'était certain, même s'il n'avait pas de souvenirs pouvant l'attester.

     Il se rallongea sur son oreiller pour se rendormir aussitôt. Ce combat l'avait vraiment épuisé. Mais quelle en avait été la finalité ?

     Quelques heures plus tard, lorsqu'il se réveilla de nouveau, Kouyou était assise à son chevet et regardait par la fenêtre. Quand elle remarqua que son protégé commençait à remuer, elle reporta son attention sur lui.

-Qu'est ce qui m'est arrivé ?! demanda-t-il d'une voix encore à moitié ensommeillée.

     C'était la question qu'il se posait depuis qu'il s'était réveillé le matin, et qui tournait donc dans sa tête depuis quelques heures. Il avait besoin d'une réponse. La rouquine éluda d'abord la demande, semblant réfléchir. Peut-être pesait-elle le poids des mots, car elle finit par répondre après quelques minutes.

-Le dieu furieux a pris possession de toi. Tu as ravagé absolument tout, il ne reste peut-être même plus aucune trace de l'organisation que vous avez détruite. Ce n'était qu'il y a deux jours, mais vous êtes déjà connus un peu partout chez nos autres ennemis désormais. En tant que duo. On vous a baptisé « double noir ».

     Chuuya l'avait laissé parler mais sans vraiment trop comprendre. Deux jours, cela voulait déjà dire qu'il avait dormi plus d'une journée et demie. Cela ne lui était encore jamais arrivé auparavant, d'autant qu'il avait toujours eu un sommeil plutôt agité.

-Quel rôle a joué la momie si ce n'est qu'observer ? bougonna-t-il tout bas.

-Eh bien, sache qu'il t'a tout simplement sauvé !

     L'aura de la jeune femme semblait avoir quelque peu changée, ce qui effraya plutôt le rouquin. Sauvé ? C'était donc lui qui l'avait sorti de son état de transe. Son pouvoir avait donc lui aussi la capacité de le récupérer. C'était plutôt rassurant, en soi. Mais cela voulait dire qu'il allait devoir le remercier ? Non, probablement avait-il agit sur ordre du Boss, aussi n'avait-il pas eu le choix et ne serait pas en mesure de demander ce genre de chose.

-Où est-il d'ailleurs ? S'il m'a sauvé, il devrait déjà être là en train de fanfaronner, non ?

-Il est au cachot.

-Quoi ? Mais pourquoi ?

-Pour avoir désobéi à un ordre direct du parrain.

     Elle avait parlé d'un ton amer. C'était relativement explicite maintenant. Un ordre que Kouyou n'acceptait pas était probablement en rapport avec sa propre protection, et cela signifiait donc que cet imbécile de suicidaire se retrouvait au cachot pour l'avoir sauvé. Mais quel crétin, il ne lui avait rien demandé !

     La rouquine se leva soudain, en prétextant ne pas avoir fini sa propre tâche. Avant de partir elle laissa tomber un papier indiquant un numéro d'une des prisons souterraines. Cela aussi, c'était explicite. « Va le remercier ».

     Il soupira. Il n'en avait pas vraiment envie, mais en même temps il n'avait pas le choix. Et au fond de lui, tout au fond, il était reconnaissant. Qui sait s'il serait encore là si le brun n'était pas intervenu ?

~

     Lorsqu'il descendit avec un seau dans les mains -il avait entendu parler du traitement plutôt horrible réservé à ceux qui se retrouvaient enfermés aussi bas- il croisa le parrain en personne remonter. Celui-ci lui adressa un sourire carnassier tout en lui faisant un signe de la main.

-J'en ai fini avec lui. Ta nouvelle moitié est toute à toi, murmura-t-il en passant à la hauteur de son nouveau subordonné, si bas que ce dernier n'était pas sûr d'avoir bien entendu.

     Sa moitié ? Mais qu'est ce que c'était encore que ces conneries ?!

     Toujours est-il qu'il pénétra avec une appréhension certaine dans la pièce froide et humide, avec pour seuls mobiliers quelques chaînes par-ci et autres instruments de torture par-là. D'ailleurs certains semblaient être recouverts de sang frais, aussi Chuuya préféra-t-il détourner son regard, pour le poser sur l'élément central de la pièce, à savoir un certain suicidaire.

     Celui-ci faisait vraiment peine à voir. Ses deux bras étaient retenus par des chaînes qui semblaient le présenter à tout nouvel arrivant, quasiment entièrement dénudé. Mais ce n'était pas ça qui faisait le plus pitié : c'était toutes les cicatrices qui striaient son corps, certaines déjà à peine visibles et donc anciennes, d'autres encore suintantes de liquide rouge écarlate.

     Il en avait presque partout sur le torse, et les quelques endroits où il n'y en avait pas étaient masqués par le sang ou alors la peau y était bleue violacée. Il en avait également qui lui couraient sur les bras et les jambes, plus longues mais moins nombreuses.

     Ces blessures semblaient avoir été infligées tantôt par un couteau, tantôt par un fouet, voire même par... Non, le rouquin ne souhaitait pas vraiment songer à ce qui avait pu infliger cette horrible cicatrice parcourant tout son bras gauche. Pourtant, aussi horribles soient toutes ces blessures, on pouvait également y déceler l'habilité du tortionnaire. Jamais trop profonde pour sectionner une veine trop importante ou un organe vital, mais suffisamment tout de même pour laisser une marque et faire saigner à la limite de l'évanouissement. C'en était à vomir.

     C'était également la première fois que Chuuya voyait le brun sans ses habituels bandages -enfin, pour une raison obscure, il avait toujours son œil caché, à croire qu'il était réellement borgne cet imbécile- et cela lui serra le cœur, même s'il n'en montrait rien. Il avait perdu de sa superbe. Les blessures les plus anciennes venaient-elles de ce même genre de traitement, ou bien se les était-il infligées lui-même ?

     Toujours est-il que lorsque Dazai entendit les pas, il pensa sûrement tout d'abord qu'il s'agissait de son tortionnaire qui revenait, car il murmura un « je pensais que vous en aviez finis avec moi, monsieur Mori. Vous savez pourtant que je ne supporte pas la douleur. » faiblement, le regard baissé vers le sol mais un petit sourire en coin, comme à son habitude. Il avait beau être affaibli, il restait fidèle à lui-même, c'en était presque admirable.

     Le rouquin s'approcha de lui sans rien dire, déposa son seau et commença à essuyer -sans douceur aucune évidemment- le sang qui maculait le corps de celui qui l'avait sauvé.

     Le jeune mafieux suicidaire releva immédiatement les yeux en sentant la différence de traitement, et fixa d'abord d'un regard d'incompréhension celui qui avait commencé à le « soigner ». Puis il lui offrit son plus beau sourire.

-Tiens, le nain. Je ne t'avais pas vu arriver, il faudrait penser à grandir un jour ~

-Ferme-la, je ne suis pas là par plaisir.

-Parce que tu crois que moi si ?

     Ne sachant quoi répondre, Chuuya se tut. Le brun allait sûrement demander une contrepartie, c'était obligé. Le roux avait fini de débarrasser le bras gauche de son compagnon du sang, montrant que la cicatrice aperçue tout à l'heure était encore plus horrible vue de près. Elle était à la fois profonde et épaisse, c'en était presque si on pouvait voir l'os entre les chairs à vif, et ses bords étaient parsemés de morceaux de peau encore accrochés, comme si cela n'avait pas été coupé mais arraché petit à petit, comme un morceau de viande. Ne pouvant la regarder plus longtemps, le plus petit commença à enlever le sang du torse du brun.

-Tu pourrais y aller plus doucement quand même ! finit par grimacer celui qui s'était fait torturer, visiblement souffrant plus du traitement que lui apportait son compagnon que de ses blessures elles-mêmes.

     Le rouquin le fixa d'abord sans rien dire, interrompant sa tâche. De toutes façons il en avait fini avec le sang, ne restait que celui qui suintait encore un peu de certaines des plus profondes blessures. Puis il sortit un désinfectant, qu'il prit bien soin de montrer au plus grand, comme pour le punir de se plaindre, avant de commencer à l'appliquer, sous ses gémissements exagérément souffrants.

-En réalité, c'est le parrain qui t'a demandé de venir pour achever de me torturer, hein ?

-Je ne t'ai absolument rien demandé, crétin. Je n'avais pas besoin d'être sauvé, je m'en serais très bien sorti tout seul.

     Dazai esquissa une moue peu convaincue, mais il commençait à savoir comment fonctionnait le rouquin. Premièrement, il avait honte d'avoir été incapable de se débrouiller seul et de devoir lui être redevable. Deuxièmement, bien enfoui sous ses paroles faussement énervées se cachaient un « merci » qu'il ne dirait jamais franchement. Le brun soupira avant de répondre :

-Surtout ne me remercie pas. Mais c'est également au maître de protéger son fidèle toutou~

     Son interlocuteur réagit exactement comme le prévoyait le suicidaire : il appuya plus fortement et mis encore plus de désinfectant sur son tissu, qui suintait lui aussi désormais.

-Atatata... Chuuya, ça fait mal !

-Pour ta propre santé et celle de mes oreilles, ferme-la, répliqua sèchement le rouquin.

     Il y alla néanmoins un peu plus doucement, et le brun commença même un peu à se détendre tandis que son compagnon le soignait. Ses soins faisaient toujours mal, mais c'était toujours moins que ceux de son supérieur. C'était même plutôt agréable, au final.

-On a qu'à dire que tu as une dette envers moi, Chibi, sourit le brun en voyant que le roux affichait un visage où commençait à se lire de la culpabilité quelques minutes plus tard. Il était trop facile à comprendre. Tu devras me rendre la pareille, c'est tout ~

     L'interpellé releva immédiatement la tête à cette dernière phrase et fixa son regard bleu azur dans ceux du brun. Il était parfaitement sérieux. Chuuya pesta en terminant de désinfecter les blessures du brun.

-Et comment je suis censé rendre cette dette à un crétin de suicidaire, qui tente donc lui-même de se supprimer ?!

-A toi de trouver une solution ~

     Ainsi le rouquin s'était retrouvé endetté. Mais sauver la vie d'un suicidaire pour lui rendre service, c'est plutôt compliqué.

-Heureusement que je ne compte pas réutiliser mon pouvoir à ce point, au moins je ne te devrais rien de plus, soupira le nouveau mafieux alors qu'il prenait la direction de la sortie, plus pour lui-même.

-C'est vraiment ce que tu penses ?

-Qu'est ce que tu veux dire ? demanda-t-il, surpris, en se retournant.

-Et bien, réfléchis un peu la limace, tu penses qu'après le petit spectacle que tu as offert au boss, il te laissera t'en tirer comme ça ?

-Aah ?

-Evidemment, tu es trop lent d'esprit pour comprendre, j'oubliais. A moins que la taille de ton cerveau ne soit proportionnelle à celle de ta taille ~

     Chuuya se retint difficilement de frapper son interlocuteur. Il était déjà suffisamment blessé comme ça après tout. Et par sa faute. Puis il réfléchit. C'est vrai qu'il avait pris à lui seul trois détenteurs de pouvoirs. Mais s'il recommençait il risquait de mourir. A moins que... Il écarquilla les yeux en comprenant, ce qui n'échappa pas au suicidaire. C'était donc ce que signifiait les paroles du parrain, un peu plus tôt.

-Eh oui, malheureusement il semblerait que ce ne soit que le début du « double noir », soupira l'auburn, ce qui visiblement le fit souffrir car il étouffa ensuite un gémissement.

     Chuuya s'en alla, jurant dans plusieurs langues différentes. Ce n'est que quelques temps plus tard qu'il comprit les sentiments complexes qui l'avaient étreint ce jour-là. De la reconnaissance, sincère. Qui laissa place à une confiance indéfectible et inexplicable par la suite.

     Seulement, après trois ans de collaboration « forcée », Dazai quitta la mafia, laissant cette dette accabler le petit roux et brisant au fil des ans sans contact ce lien si fort. Ils se revirent ensuite, devant à nouveau travailler ensemble pour protéger leur chère ville de la guilde. Etrangement, le lien fragilisé semblait s'être encore plus renforcé durant ces quatre années d'absence que durant les trois où ils s'étaient côtoyés. Puis ils cessèrent à nouveau d'avoir tout contact, jusqu'à ce que la brume provoquant les suicides de détenteurs de super-pouvoir se lève, engendrant une nouvelle menace pour tous.

     Durant ces évènements, Chuuya sauva la vie du brun, et la ville par la même occasion. Même si on le lui avait demandé et qu'il prétendait que s'il avait pu, il ne l'aurait pas sauvé. Qu'il avait juste besoin de son pouvoir. Mais il avait accepté de souffrir pour lui sauver la vie, dans les faits. Aussi la semaine suivante, Dazai lui envoya un message. Court et concis pour qu'il ne soit pas ignoré :

« Là où tu sais, demain à 20h, pour ta dette~ »

     Un parc avait été construit sur les ruines de l'organisation qu'ils avaient détruites en une nuit sept ans auparavant. Quelle ironie, pensa le rouquin en arrivant sur les lieux. Ils s'y étaient retrouvés quelques fois après le travail, profitant du paysage, évacuant leurs émotions dû à leur collaboration ou autre.

     Aussi c'était obligatoirement cet endroit auquel le brun faisait référence dans son message. Mais comme à son habitude, il était en retard. Il était déjà 20h20 passée, et toujours aucun signe du suicidaire. Chuuya s'était donc assis sur un banc et regardait le ciel en attendant, scrutant le vol des oiseaux et la course des nuages, même si cela n'avait pas grand-chose d'intéressant.

     Puis soudain un visage envahit son espace visuel, jovial et satisfait. Le roux se releva immédiatement et se retourna pour fixer le nouvel arrivant.

-Tu es en retard, lâcha-t-il tandis que le suicidaire s'installait à ses côtés, peu dérangé par cette affirmation. Je suppose que si tu es là, ce n'est pas pour me dire que ma dette est effacée, n'est-ce pas ? soupira-t-il finalement.

-En effet. Pourquoi le serait-elle ?

     Il semblait étonné par cette affirmation et souriait comme un enfant. Qu'est ce qu'il pouvait être agaçant. Le roux commença à s'énerver et parla sur un ton un peu plus fort :

-Peut-être parce que je t'ai sauvé !

-Sous la demande du département des Super-pouvoirs, à qui tu en devais déjà une également. Tu pensais vraiment pouvoir faire d'une pierre deux coups, alors que je t'ai sauvé la mise par la suite ?

     Chuuya détourna le regard en murmurant un « abruti de suicidaire », ce qui le fit sourire encore plus. Il était mignon quand il s'agaçait comme ça. Autrefois, le brun aurait nié avoir tout simplement pensé cela. Mais depuis qu'ils s'étaient retrouvés, il avait enfin lui-même comprit exactement pourquoi, ce jour-là, il avait accepté ces souffrances. Et il ne les regrettait absolument pas.

     Il laissa quelques secondes s'écouler, pour laisser le temps au capitaine impulsif de redevenir un semblant plus calme.

-Et donc, quelle est la raison pour laquelle tu m'as fait venir, infirmerie ambulante ? finit par demander le rouquin en se retournant vers son ancien acolyte.

-Je voulais te proposer une alternative de remboursement~

-Hein ? Si tu acceptes de sauter d'un pont et de me laisser aller te chercher ensuite, alors oui peut-être, mais je ne vois pas d'autre alternative.

-Tu n'as qu'à me donner ta vie, vu que tu es incapable de sauver la mienne autrement, souria-t-il, énigmatique.

-Que... Tu comptes vraiment que je meurs pour toi ?! s'énerva le roux sans comprendre. Tu peux toujours aller te faire...

     Il se tut, interrompu par les lèvres de Dazai frôlant les siennes. Soudain il comprit, et il devint presque aussi écarlate que ses cheveux.

-Evidemment que je ne te demanderai jamais ça. Enfin, à moins que tu ne veuilles sauter de ce fameux pont avec moi, mais je suis d'avis qu'il peut encore attendre un peu, murmura le suicidaire à quelques centimètres de son visage.

     Chuuya était perplexe et partagé. Il ne comprenait pas les agissements de son compagnon, alors qu'il se plaisait plutôt à dire le contraire à qui voulait l'entendre d'habitude. De plus il avait ressenti une sorte de « déclic » qu'il ne s'expliquait pas. Il y a encore quelques jours il aurait immédiatement repoussé cet abruti sans demander son reste et l'aurait frappé pour un tel affront. Là, il hésitait entre ça ou alors l'embrasser, aussi n'avait-il pas encore bougé d'un iota.

-Que... Qu'est ce qui me prouve que tu ne partiras pas à nouveau ?

-Absolument rien.

     Cette réponse sincère fit s'écarquiller les yeux du rouquin. Il était vraiment sérieux ? À son expression, oui. Totalement.

-En revanche, tu peux juste te contenter de m'accorder ta confiance. Je sais que je l'ai déjà brisée il y a quelques années, mais... Cette fois-ci, nos rôles ont changés. C'est à toi de décider si tu me l'accordes une nouvelle fois ou non.

     C'était probablement la première -et la dernière- fois que Chuuya entendait Dazai parler sans aucune once de moquerie. De plus, même si leurs rôles avaient réellement changé, le rouquin avait plus que jamais envie de faire confiance à son ancien partenaire. Car c'était la seule chose qui leur était resté, après toutes ces années. Cela, et cette dette.

-Très bien. Si ça me permet d'effacer mon ardoise, alors j'accepte.

     Le suicidaire lui souria, avant de l'embrasser tendrement et passionnément, sur les ruines de ce lieu où ils étaient pour la première fois devenu un duo à part entière. L'histoire se répétait donc, mais cette fois ils ne seraient pas simplement partenaire de travail. Ils seraient bien plus.

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