L'ADIEU
SAKURA HARUNO
J’avais étrangement mangé avec appétit, malgré le bouleversement que connaissaient mes états d’âme. Je faisais passer la nourriture entre mes lèvres ce qui me permettait de contrôler mon anxiété grandissante. A mes côtés, le Prince Sasuke ne bronchait pas – piochant un grain de riz par-ci, par-là. Il ne m’avait pas adressé la parole, ni la moindre attention. D’ailleurs, j’étais trop terrifiée pour m’inquiéter de sa froideur.
Shizune-senpai. Les larmes affluèrent à mes yeux, mais je dus les ravaler amèrement. Les souvenirs de la brunette, de quelques années mon aînée, me brûlaient la mémoire. Je l’entendais me sermonner alors que je malmenais son petit cochon préféré. Et l’image suivante nous riions aux éclats dans le jardin de la fermette sous un ciel chaud et étoilé. Elle qui m’avait toujours défendue, qui avait tempéré les excès de sévérité de Tsunade-sama à mon égard. C’était une sœur, un exemple, un soutien.
Que pouvais-je faire ? Mon maître ne me le pardonnerait jamais. Et est-ce que moi, j’arriverai à me pardonner un jour ? Merde. Ma main tremblait d’émotion. Je dus me résigner à la cacher sous la table, la plaquant vivement contre ma cuisse.
Exceptée la mise à mort prochain de Shizune, tout me paraissait encore sous contrôle. N’est-ce pas ? Tsunade-sama était encore en vie. Elle sauverait ma senpai. Il suffirait que je prenne le temps d’élaborer un meilleur plan que celui du Tournoi. Il devait y avoir un moyen. Je ris nerveusement, m’attirant une demi-œillade princière.
Et puis, l’Empereur annonça offrir gracieusement mon Maître au roi du Vent et me garder. Le rire jaune se mua en un hurlement qui ne franchit jamais la barrière de ma bouche. Je manquais de flancher, mon corps céda. Le Prince Sasuke plaqua rapidement sa main contre mon dos, efficace et discret – ce qui me permit de rester droite. Je levai mes prunelles vers le tranchant de son profil obscur. Ses doigts se resserrèrent contre les plis de mon Hanfu, pressant ma chair travers. Ses yeux noirs rencontrèrent les miens.
SASUKE UCHIHA.
Devant l’autel dédié à mes ancêtres, je terminais d’attacher mon armure de cérémonie. Le blason de la lignée Uchiha était gravé au cœur du métal sombre. Rouge, comme le sang innocent que je m’apprêtais à verser ce matin. Je n’avais pas l’intention de désobéir. Un shinobi apparut, s’agenouillant à mes pieds pour me présenter mon katana. J’attachai ce dernier de manière solennelle à ma hanche. Mon attention demeurait fixée sur l’encens qui se consumait devant le nom de notre famille. Combien étaient morts ? Exécutés. Cette nuit d’horreur se rejoua. Et toujours la même question qui torturait mon esprit. Pourquoi frère aîné n’avait-il pas empêché cela ?
« -Oji-sama, annonça le ninja, il est l’heure. »
La pluie s’était abattue dès l’Aube sur la cité impériale. Elle avait assombri les cieux et étouffé l’air. Et avec elle, était venu un silence tragique. L’empereur avait décidé que l’exécution ouvrirait la deuxième manche du Tournoi. En ajustant mes gantelets, je traversai mécaniquement l’avenue qui me mènerait à l’Arène, escorté de deux soldats. Quelque part, j’étais soulagé que Naruto soit aux frontières. Il ne me verrait pas accomplir cet acte. Il n’assisterait pas à l’émergence de ce qu’il y a de pire en moi, ni à ma lâcheté. Je n’aurais pas à supporter son regard lourd de reproches, ni ses grands yeux moralisateurs.
A l’entrée de l’arène, je fus accueilli par le stratège Nara. Ce dernier portait peu l’armure mais grand évènement oblige, il avait dû revêtir celle de son clan dont la finition était admirable. Sur le fer grisé, des ombres apparaissaient, souveraines et menaçantes ; elles engloutissaient, au niveau du poitrail, des animaux de légende : chiens, grenouilles, serpents. Ainsi apprêté, il ressemblait enfin à un homme digne de son rang – si ce n’était cet air contrit et médiocre qui collait à ses traits fins.
« - Prince Uchiwa.
- Stratège Nara.
- Il y a foule. J’aurais souhaité que l’empereur décide de mener cette exécution à huis clos.
- La concubine Sakura est-elle déjà présente ? demandai-je simplement. »
Pour seule réponse, il tourna les talons, m’invitant à le suivre. Après avoir passé la grande arcade de l’entrée, nous émergeâmes sur le terrain. L’averse tombait toujours avec indifférence sur le monde des vivants et les gradins étaient noirs de monde. Malgré le nombre écrasant de spectateurs, un silence glacial régnait. Pour simple gibet, une estrade montée à la va-vite, faite de vieux bois et de clous rouillés. Je m’en approchai lentement, mesurant chaque mètre qui me séparait de mon destin de bourreau. Et je sentis peser sur moi un regard verdâtre – embué de larmes, et brillant d’incompréhension. Haruno Sakura. Elle siégeait à la tribune impériale, aux côtés de mon aîné. Avait-elle compris quel serait mon rôle ? Je n’avais jamais remarqué à quel point ses yeux paraissaient si grands. Une part de moi-même voulut la rassurer, lui promettre que je ne ferai pas souffrir cette femme : qu’elle aurait le droit de mourir dignement. Merde. Si je n’avais pas été Sasuke Uchiwa, je lui aurais hurlé cette intention.
Un éclair stria les cieux et toute la foule m’apparut durant une fraction de seconde. Au deuxième éclat de foudre, le visage impassible de mon aîné se distingua. Puis seulement, le tonnerre fit trembler l’air. Le gibet vibra dangereusement, mais ne flancha pas. Nata dût hausser la voix pour me présenter ses adieux. La suite de cette tragédie m’appartenait désormais. Quelque part dans un mur de l’Arène, des grilles grincèrent et la silhouette de la captive s’invita. Chétive, malgré son œil furieux, elle scrutait les alentours avec désespoir – les mains enchaînées dans le dos et escortée par deux gardes impériaux. Elle était trempée et le sable de l’arène, qui se muait en boue sous l’alchimie de l’averse, rendait sa progression difficile.
Elle monta les marches instables de sa potence avec dignité, toutefois – le front aussi haut que sa volonté ce qui provoqua en moi, un peu de respect. Je la suivis de suite, faisant grincer la structure éphémère sous le poids de mon armure. Nos regards se croisèrent.
« - Je ne suis pas étonnée que ce soit toi, me dit-elle sérieusement. Je ne fus même pas surpris par le tutoiement employé.
- Tu es souvent mandaté pour te salir les mains à la place de l’empereur, poursuivit-elle en dressant son attention vers la tribune impériale.
- J’honore mon devoir, répliquai-je par automatisme en déposant une main autoritaire sur son épaule frêle.
- Fais ce que tu as à faire, trancha-t-elle alors qu’elle s’agenouillait sous la pression de ma poigne. »
NARUTO UZUMAKI.
Les frontières n’étaient pas la porte à côté. C’était le cas de le dire, bordel. Après avoir péniblement traversé l’empire du Feu, nous avions dû bifurquer par les contrées étranges des Sources Chaudes. D’après le général Kakashi, cette déviation permettrait de brouiller les pistes sur notre plan de route. Une idée farfelue de Nara, encore. J’aurais pensé que nous nous déplacerions comme un seul homme formé de bataillons entiers. Pensai-je…Nous étions quelques pauvres shinobis dont les manteaux bouseux occultaient la splendeur de leur armure. Nous faisions partie de l’avant-garde qui se relayait aux Frontières pour surveiller les intentions et actions du pays de l’Eau. Un passant m’avait même fait l’aumône sous le regard perplexe du général…
C’en était trop ! J’avais envie de retirer cet habit et de crier au monde entier que j’étais le prince Uzumaki, héritier du trône de l’Empire du Feu…l’un des plus grands empires sur cette terre ! Ils feraient moins les malins.
« -Prince Naruto, que faîtes-vous ? » me demanda Hatake.
Dans mon élan, je m’étais retrouvé sur la table de la petite auberge de campagne qui accueillait notre halte. Les rares clients de l’endroit portaient sur moi un regard de pitié et d’effarement.
« -Ah, pardon, pardon… soufflai-je embêté avant de revenir m’agenouiller près du chef militaire.
-Eh bien, eh bien…je pense que l’empereur n’a pas tout à faire tort…cette mission vous remettra un peu de plomb dans la tête, remarqua-t-il en replongeant son attention dans une lecture évocatrice que je tentai de scruter tant bien que mal.
-Quelle importance ? Je ferai mon devoir coûte que coûte, et plus vite que ce crétin de Sasuke. »
Et j’espère qu’il ne profitait pas de mon absence pour courtiser Hinata-san. Je bouillonnai rien qu’à cette idée. Que pouvait-il bien se tramer en monde absence ? Le palais avait-il brûlé ? Le reste de la garnison nous attendait déjà au prochain avant-poste. Soudainement, je me remémorais la promesse faite à Sakura-chan. Le vieux pervers ! Avant le général Hatake, il était mon précepteur d’armes. Hélas, à la suite d’une discorde avec l’empereur, il dut s’exiler et on ne le revit jamais. Sacré vieillard. Son absence avait laissé un grand vide dans ma vie.
« - C’est quartier libre ce soir, général Kakashi ? interrogeai-je mon supérieur, en faisant la moue.
- Oui, à l’aube nous reprendrons la route. Mais restez vigilant. Et surtout, profitez de ce dernier répit. Une fois aux frontières, la vie sera rude. »
J’approuvai en silence et me redressai pour traverser l’auberge. En atteignant les alentours boisés, je m’adossais à un chêne. J’offris ma figure au ciel afin d’en admirer les teintes sanguines. Quelque part, j’espérais qu’Hinata-san et les autres pouvaient profiter du même spectacle. Oui, j’espérais de toutes me forces que ces êtres chers regardaient dans la même direction que moi. Mon sourire s’effaça lorsque j’entendis des bruits dans les fourrées proches. Machinalement, ma main se dirigea vers l’un des kunaï cachés dans mon manteau.
INO YAMANAKA.
Quelle tristesse. Quelle noirceur. Quelque soit les pensées qui me parvenaient des alentours, elles reflétaient toute l’abîme sans fond des ténèbres et du désarroi. Mais l’esprit qui hurlait le plus était, sans surprise, celui de Sakura Haruno. Mon cœur venait d’éclater en milliers de morceaux face à ce mental dévasté. Mon attention se dirigea vers la sinistre estrade où le Prince Uchiwa dominait sa proie. A mes côtés, l’empereur ne bronchait pas. Dignement assis sur son trône, il assistait avec attention à l’exécution de sa volonté. J’admirai alors son profil sombre et sévère. Si sa beauté me percuta à nouveau, la déception prit le dessus. Entre deux éclairs, ses prunelles luisaient dans la pénombre de l’orage.
« - Itachi-sama… le sollicitai-je doucement.
Une œillade me prouva qu’il me prêterait l’oreille.
- Puis-je vous demander d’épargner cette femme ?
- Tu ne dois pas contester mes décisions, répondit-il avec toute la simplicité du monde. Au nom de quoi souhaiterais-tu que je l’épargne ?
- Je sais…soupirai-je, le cœur affolé par mon audace. Mais regardez Haruno Sakura. »
Etrangement, il obéit et se mit à détailler la concubine, qui était un peu plus loin sur sa gauche. Elle agrippait désespérément la balustrade. Ses phalanges blanchies témoignaient de la force avec laquelle elle pressait la pierre. Nous pouvions tous aisément entendre les battements de son cœur. Dans son ombre Shisui était prêt à intervenir au cas où elle déciderait de poser un acte irraisonné. Elle serait capable de se jeter dans le vide. Elle en était à ce niveau-là d’horreur.
« - Je vous en prie, répétai-je. Il y a forcément une autre solution. »
Du coin de l’œil, je captai l’agitation sur le gibet. Sasuke Uchiwa avait dégainé son katana dont la lame ruisselante d’eau menaçait désormais la gorge de la pauvre condamnée qui fixait le sol avec acharnement. Il n’attendait qu’un ordre. Un seul.
Sakura Haruno voulait mourir. La vue de cette mort imminente l’avait terrorisé. Je fermai les yeux. Mon époux allait parler. D’un instant à l’autre. A ma droite Karin était sur le point de vomir. Derrière moi, plus haut, mon père, le clan Hyûga et le stratège Nara n’avaient pas l’intention d’interférer.
J’avais quitté mon siège sans même me rendre compte.
« - Prince Sasuke ! m’exclamai-je d’un ton que j’espérais autoritaire. L’exécution est annulée ! »
Ma voix venait de résonner dans toute l’Arène. Des dizaines de paires d’yeux me transpercèrent d’un coup. J’adorais être le centre d’attention mais là….j’avais carrément merdé. Il fallait le reconnaître. Je commençai à trembler. Qu’est-ce qui m’avait pris ?
« - Sai, appela fermement l’empereur. Ramenez l’Impératrice à son pavillon et qu’elle y reste. Elle doit être souffrante. »
Je sentis l’ombre de mon garde personnel m’envelopper et sous la pression, je le suivis sans un mot quittant l’abri de la tribune impériale pour fondre sous l’averse. L’orage s’était tu. Seule ma voix faisait encore écho.
« - Procédez à l’exécution, Prince Sasuke. » entendis-je ordonner mon époux.
SAKURA HARUNO.
Son ruban était demeuré blanc. Immaculé, comme son âme- bien que son sang eût souillé l’air, le bois de l’estrade, le sol de l’arène. Son ruban s’état envolé sous la pluie, aussi vierge qu’elle. Il était passé devant mon regard stupéfait aussi lumineux que léger et avait disparu vers les nuages qui se dissipaient lentement. Et son corps tomba lourdement, sans vie. Shi..zu..ne….n’était plus. Mon visage consterné se dirigea vers la silhouette de la main coupable. Quelques gouttes vermeilles tâchaient les traits de Sasuke Uchiwa. Il l’avait assassiné, aussi froid qu’un serpent qui exécutait sa proie. Sur un simple ordre. Et il osait me regarder de ses immenses yeux aux profondeurs infinies.
Je quittai l’estrade précipitamment, Shisui sur mes talons. Bousculant les macabres spectateurs, je me frayais un chemin vers les dédales de l’Arène, soulevant les pans encombrants de mon hanfu. Alors que je touchais au but, Shisui me rattrapa fermement. Il emprisonna sans vergogne mon bras entre ses doigts puissants, stoppant net ma course au milieu d’un couloir obscur. Au bout, la lumière que je ne verrai jamais. Le corps de Shizune était là, seul. Je devais faire quelque chose.
« -Sakura.
-Lâchez-moi, ordonnai-je entre mes dents. Je dois m’occuper de son corps ! Vous allez me refusez CA aussi ?! »
Il resserra ma poigne et je sentis la surprise éclairée un bref instant sa figue pâle. Il ne se doutait pas qu’il serait si difficile de me retenir d’une main ? Ignorait-il la rage qui me consumait et la tristesse qui m’anéantissait ?
« -Je…suis désolé pour cette perte, mais…
- Menteur !
- A quel moment ai-je menti ? reprit-il en fronçant les sourcils. A quel moment ne t’ai-je pas prévenue des conséquences auxquelles tu dois faire face aujourd’hui ? »
Il me relâcha pour mieux me maîtriser, pressant mes joues entre ses paumes glaciales. Je n’avais d’autre choix que de planter mes prunelles au cœur des siennes et d’affronter leur couleur ténébreuse.
« - Qu’est-ce qui a été le plus dévastateur, Sakura Haruno ? Obéir ou voir un être cher périr ? »
Face à mon silence, ses doigts glissèrent le long de ma mâchoire et s’éloignèrent. Voir Shizune mourir. Sans hésiter, c’était la voir mourir. La réponse s’avérait comme une évidence, mais comment ne pas céder à la haine ? A ce sentiment d’injustice ?
« - J’aimerais…pouvoir l’enterrer et faire mon deuil, cédai-je en baissant mes yeux brouillés de larmes.
- Mérite-le, déclara-t-il en me montrant le chemin de retour vers la tribune impériale. »
ITACHI UCHIWA.
Ce fut devant mon indifférence la plus totale qu’on m’annonça pénétrer les quartiers d’Ino Yamanaka. Celle qui était mon Impératrice venait de faillir à ses devoirs les plus élémentaires. Je ne la pensais pas capable d’un tel caractère. Il fallait dire que son paternel l’avait vendu comme un charme d’obéissance et de gentillesse. J’avais besoin d’une épouse noble, riche et loyale. Il lui manquait cruellement une de ces trois qualités. D’un geste impérieux, j’exigeais le départ des domestiques et de Sai.
La toute blonde était assise sur son grand lit, toujours parée de sa coiffe complexe représentant son statut impérial. Et ses iris claires pointaient sur moi comme deux lances de fer parées pour la guerre. Malgré la pâleur de son teint, elle semblait en pleine forme. Mais qu’en était-il de son mental ? Je poussai un discret soupir et pris place sur un divan proche.
« - Les exécutions sont un mal nécessaire, affirmai-je.
- Qui en pâtit le plus ? demanda-t-elle d’une voix faible, encore brouillée par des larmes qui avaient dues couler quelques minutes plus tôt. -Les femmes, répondit-elle ensuite, les dents serrées.
- Tu fais fausse route. Et en tant que femme, tu devrais savoir où est ta place.
- A attendre, comme un petit chien en laisse que son maître daigne bien lui accorder une caresse ?
- Tu outrepasses les limites, avertis-je calmement.
- Non, écoutez-moi, Itachi-sama. Je ne suis pas une poupée. Sakura Haruno n’en est pas une non plus, pas plus que cette…Karin.
- Que crois-tu qu’il y ai au-delà des murs du palais que tu n’as jamais quitté ? Il y a un empire, peuplé de millions de sujets. Des hommes, des enfants…des femmes. Ils sont sous ma responsabilité. Ils s’en remettent à leur empereur pour vivre en paix. Ton rôle est de me supporter dans cette tâche primordiale. Si tu t’élèves contre moi en public, tu risques d’ouvrir des failles dont les conséquences mèneraient à des morts autrement plus horribles que celle de ce matin. Et ne pense pas que ton statut d’Impératrice te protège de ma colère.
- Vous ne m’aimez pas, conclut-elle, le ton amer.
- L’amour est un luxe superflu dont ne peuvent s’encombrer nos personnes, insistai-je. »
Je tentai d’être le plus calme et le plus diplomate possible afin d’éviter de nourrir sa volonté de révolte. Je me redressai lentement, prenant la direction de la sortie.
« -Ino, repris-je alors que les portes coulissèrent. Ce sera mon unique et dernier avertissement. J’enverrai Shimura-san t’instruire sur tes devoirs d’Impératrice. Et une dernière chose. (Je pris une grande inspiration.) Le caveau des Uchiwa est interdit d’accès et scellé. Cela vaut pour les affaires du clan. Y compris les kimonos de ma défunte mère. Ne t’avise plus de prendre des décisions insensées dans mon dos. »
Et lorsque je refermai la porte derrière moi, j’entendis un bruit sourd. Je devinai aisément qu’elle venait de s’en prendre au mobilier. Je ne pensais pas que composer avec une épouse serait si compliqué. Je ne la détestais pas et j’aurais aimé qu’elle coopère pour le bien de notre pays. Cas contraire, je n’aurais aucune pitié à m’en séparer ou à la sanctionner. Un bref instant, la figure paisible d’Izumi m’apparut entre deux réflexions. Et son souvenir me conforta dans ma décision. Il était hors de question d’épargner qui que ce soit.
SASUKE UCHIWA.
Je n’arrivais pas à détourner les yeux de la concubine. Au travers du rideau de pluie, j’étais le témoin impuissant de sa détresse alors que gisait le corps encore tiède de la condamnée. L’ordre de frère aîné m’avait fait agir mécaniquement. Sans réflexion. Et dans le regard brisé de Sakura Haruno, j’avais lu toute la meurtrissure qu’engendrait la trahison. Cela me remémora la nuit où ma famille fut décimée. L’incompréhension, le sang, les cadavres que l’on ne reverrait plus jamais se relever. Je rengainai mon katana souillé d’hémoglobine. La toute rose avait quitté la tribune. Seul demeurait l’empereur, entouré du Roi du Vent et des dignitaires de la cour. Il avait eu ce qu’il voulait ardemment. L’Ordre.
« Tu souhaites retourner aux Frontières ? »
Le ton du souverain n’était franchement pas surpris. Agenouillé devant lui, au cœur du Pavillon Amaterasu, je serrais les dents.
« -Oui, frère aîné.
-Ta place est ici, pourtant, à mes côtés.
-Ma place n’est pas celle d’un bourreau, rétorquai-je en dressant vivement mes yeux pour le fixer avec colère.
-Je te rassure, Sasuke. Prendre la décision d’ôter une vie est plus difficile que celle d’être la main qui l’exécute. Ta conscience ne doit pas souffrir de cette mort. Tu as accompli ton devoir, expliqua-t-il après avoir délaissé son trône pour entamer sa descente vers moi.
-Alors, laissez-moi accomplir mon devoir en protégeant l’empire du Feu. Je veux retourner aux Frontières. »
Au moins, je retrouverais Naruto et une existence autrement moins compliquée. Au moins, je ne reverrais plus jamais les prunelles de Sakura. Et au moins, je laverais ce sang innocent sur mes mains par d’autres vies autrement plus coupables. Je n’avais plus le souhait de rester à la cour impériale pour assister au jeu d’échecs que jouaient mon aîné et Shisui. J’avais besoin de trouver la vérité sur le massacre de notre clan, de devenir plus fort dans ce seul objectif. Le reste m’importait peu.
Itachi s’était arrêté à mes côtés. Je pouvais admirer la qualité de ses chaussure sombres tandis que je restais ployé vers le sol dans cette éternelle posture de soumission.
« - Je vais y réfléchir, répondit-il finalement. »
Et il quitta la salle du trône pour rejoindre l’Arène et le Tournoi qui s’y déroulait désormais. Les phases finales débuteraient bientôt et un vainqueur émergerait. Ce rappel engendra en moi davantage de frustration. Ma promesse d’aider à la liberté de Sakura. Le lamentable échec de notre tentative. Je détournai la tête pour apercevoir le dos de l’empereur. Il avait toujours une longueur d’avance.
SAKURA HARUNO.
Comment le ciel avait-il pu passer d’une pluie orageuse à un bleu ensoleillé et éclatant ? Comment la foule de l’Arène avait-elle pu passer d’un silence morbide à des acclamations de joie ? En si peu de temps. Etions-nous encore la même journée ? Shizune-senpai venait tout juste d’être emportée que l’on commençait déjà à préparer les combattants pour qu’ils s’affrontent sur le sable ensanglanté de sa mort. Afin de ne pas la voir jeter dans une fosse commune et lui offrir un enterrement décent, j’avais obéi à Shisui Uchiwa et en regagnant la Tribune, avais constaté l’absence de l’Empereur.
« - Etait-ce une de vos proches ? »
Mon regard verdâtre avait frôlé le visage du Roi Gaara alors qu’il attendait une réponse de ma part. Il était venu près de moi, le plus naturellement possible.
« -Oui, soufflai-je.
- J’en suis désolé.
- Vous n’avez pas à l’être. »
Je sentais les prunelles claires de la princesse Temari me fixer avec hostilité tandis que je conversais avec son frère. Je me demandais pourquoi, à l’instar de sa fratrie, le souverain du Vent semblait bienveillant et altruiste. Depuis mon arrivée au Palais, je commençais à me méfier des apparences. Que cachait-il ?
« - A Suna, nous avons aboli la peine de mort, expliqua-t-il simplement.
Ah. Voilà donc où sa petite compassion nous menait. A me faire la promotion de son pays. Espérait-il vraiment que je le supplie de m’y mener ?
-Vous pouvez être certaine que votre maître, la légendaire Tsunade ne subira pas le même sort. Ni vous, si vous décidiez de fuir en mon royaume.
- Vous accueilleriez une fugitive et risqueriez la mauvaise entente, ou la guerre, avec L’Empire du Feu ? dis-je en levant les yeux au ciel.
-Il y a une femme importante qui se meurt d’un mal inconnu dans mon palais. »
Je fronçai les sourcils. Ainsi donc avait-il besoin d’un médecin pour soigner cette femme ? Je commençai seulement à comprendre. Itachi Uchiwa avait mis la main sur mon maître avant le Roi Gaara. C’était intelligent de sa part. S’il avait envoyé ses hommes chercher Tsunade-sama, il aurait risqué l’incident diplomatique. Ici au palais, il avait tout loisir de négocier sa présence, ou la mienne. Je me mordillai la lèvre et ramenai mon attention sur l’Arène où l’on annonçait les premiers combats.
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