42 - Alvasi, déesse gelée
« Les dieux ne doivent pas se mêler des guerres entre les races inférieures. Si je suis présente sur votre territoire, c'est pour rappeler à l'ordre ce « dragon blanc » ayant pris parti dans ce combat. La déesse de l'hiver ne peut agir comme bon lui semble. »
Les murs en pierre de la salle du trône de Voile-d'hiver avaient tremblé. Tous les hommes et les femmes présents et même Vivianne s'étaient sentis défaillir alors même qu'elle était assise.
La prestance de cette créature face à elle l'avait troublée et la faisait maintenant trembler de peur. Elle n'avait pas cru jusqu'au dernier instant que le roi de Stolheim avait pu négocier la venue d'une telle personne à Givreciel.
Un dragon pour en battre un autre.
Vivianne était toujours réticente à l'idée d'appeler de telles créatures « dieux » mais face à Alvasi la « déesse de la guerre des Terres gelées », elle revoyait ses croyances.
Tout en cette bête fantastique ayant pris forme humaine l'intimidait. D'une taille de plus de deux mètres avec de longs cheveux blancs couvrant partiellement ses yeux rouges sang, sa carrure forte en imposait autant que son armure bleue et l'énorme lance dans sa main.
Son aura même refroidissait encore plus la salle et couvrait de givre la pierre sous ses pieds.
Vivianne déglutit et prit un instant pour la considérer avant de se racler la gorge discrètement en tentant de reprendre son rôle de souveraine.
— Nous sommes heureux de vous accueillir à Givreciel, déesse de la guerre.
— Guerre des Terres gelées, précisa Alvasi d'une voix grave. Je n'interviens que dans les conflits liés aux pays du nord. Je n'ai pas le champ d'action d'Aegis et croyez-moi, vous êtes bien chanceux de ne pas avoir le « preneur de vie » sur votre territoire.
— Certes...
« Et en plus il y en a d'autres comme elle ? » pensa la princesse en cachant sa surprise. « Comment est-ce que le continent Est arrive-t-il à gérer la vie entourée de divinité toutes plus menaçante les unes que les autres ? »
— Pourrez-vous arrêter le dragon blanc ? reprit Vivianne avec plus de conviction. Cette créature perturbe l'équilibre même de notre pays et est incontrôlable.
— Elle n'a pas à l'être. Un dieu n'agit que selon sa volonté et ne doit rien aux formes de vie inférieures. Si comme vous l'avez rapporté, elle est à la solde de vos ennemis, alors je dois remettre ma sœur dans le droit chemin.
— Votre sœur ? s'étonna-t-elle.
— Ce dragon « blanc » est la déesse Silja. Nous sommes toutes les deux des divinités du nord, elle étant pacifiste et œuvrant pour la nature, moi pour la guerre afin de ramener un équilibre. Je la combattrais pour lui rendre sa liberté de déesse.
Alvasi accompagna sa parole en frappant le sol de sa lance, givrant un peu plus l'endroit où elle se tenait et faisant sursauter tout le monde. Vivianne approuva d'un mouvement de tête, n'ayant pas le courage d'en dire plus à cette créature capable de lui ôter la vie en quelques secondes.
La déesse décida seule de s'installer le temps de son court séjour là où demeuraient les ruines de l'ancien phare de Voile-d'hiver. La princesse fut rassurée de ne pas l'avoir dans les murs du château lorsqu'elle déchanta en voyant le dragon reprendre sa forme originelle et effrayer tous ceux témoins de ce spectacle.
Un immense dragon bleu s'allongeant dans la neige et détruisant les vestiges du phare, grognant en direction de la mer. Alvasi se recroquevilla sur elle-même avant de plonger dans un sommeil la reposant de son voyage pour arriver au pays de l'hiver éternel.
— Votre Majesté, commença un conseiller s'approchant de Vivianne, nous ne pouvons laisser une telle créature s'installer aussi près de nous. C'est bien trop dangereux pour le peuple ! Et qu'est-ce qui nous certifie qu'elle va vraiment nous aider ? Qu'elle ne pourrait pas se retourner contre nous ? Un seul souffle et le palais entier serait congelé !
— Il va falloir faire confiance au roi Stolh et aux motivations de cette « déesse ». En attendant, envoyez les nouvelles troupes jusqu'à Yolmin. Il est temps de finir le travail commencé à Brise-Lac.
— Le passage sur le lac n'est plus assuré et entrer dans la forêt séparant Yolmin et Brise-Lac serait de la folie. Les loups-de-givres et autres créatures fantastiques sont en colère et ne laissent plus personne y pénétrer.
— D'où tenez-vous cette information ?
— Du chasseur Cassian Nyrh avant le départ des hauts-elfes il y a des jours.
— Et pourquoi la traversée du lac n'est plus possible ?
— ... À cause de Cassian Nyrh ayant brisé la glace et libéré une créature mortelle. La nouvelle m'est arrivée il y a à peine une heure. Nous avons perdu le trois-quarts d'un bataillon par sa faute.
Vivianne jura avant de maudire le cousin de son futur mari. Souhaitant la mort de ce traitre désagréable depuis le premier jour.
— Brûlez-la.
— Pardon ?
— Brûlez toute la forêt. Ça tuera ces créatures et dans le pire des cas, ça les fera fuir vers nos ennemis en causant leur perte.
— Votre Majesté... Si nous la brûlons, nous attiserons la colère de la déesse Fenrir qu-
— Nous avons une autre déesse pour contrer n'importe qui, une divinité de la guerre en personne ! Brûlez la forêt et avancez jusqu'à Brise-Lac ! Si nous prenons la ville, faire tomber Emyth en sera bien plus facile.
— Les nains artisans de Yolmin n'approuveront pas cette décision et pourrait rejoindre le camp des rebelles. Ce sont des givrecieliens, après tout.
— Des nains qui ont juré fidélité à Stolheim. Tuez les rebelles et rappelez-leur qui est la future reine de ce pays.
Malgré les réticences, les ordres de la princesse régente n'étaient pas discutables. La jeune femme aux allures de douce naïve ne cessait de rappeler depuis le début du conflit qu'elle avait été élevée à Stolheim pour reprendre Givreciel et devenir reine.
Elle était prête à tuer les rebelles de son peuple pour ça et même, s'il le fallait, la déesse même.
❄❄❄
— Ça va ton épaule ? Ces stolheimiens visent aussi bien que les archers elfiques, j'en suis encore surpris... Mais tu leur as bien fait comprendre qu'on ne rigole pas à Givreciel !
— Et eux nous ont prouvé leur détermination.
Cassian serra les dents en touchant son bandage alors que la blessure de la flèche cicatrisait déjà grâce à son sang mêlé. Il regarda les soldats autour de lui, déplorant les pertes et les forçant à se replier à Brise-Lac.
Le peu d'habitants de la ville avait fui pour se réfugier dans la cité souterraine d'Onhild, craignant une nouvelle attaque dévastatrice comme celle d'il y a des années glaçant la moitié des bâtiments, leurs résidents avec.
Certains étaient tout de même restés et aidaient les rebelles en leur apportant du ravitaillement et en les soignant. Jurant leur soutien à la cause et à leur leader Cornélia.
« Endoctrinement de masse par le sang dans la nourriture et les boissons... La petite fille de givre est aveuglée par sa détermination et son amour pour son peuple. » pensa Cassian en fixant sa dague.
Repensant à son engagement envers la royauté leonidienne, à cette mission donnée par son oncle qu'il ne pourrait accomplir et à tous les bouleversements que ce voyage dans le nord allait entrainer.
À Jeremiah qui était prêt à tuer son propre père pour accéder au pouvoir et assurer leur avenir.
À son père Laurenz qu'il n'avait pas pu voir depuis des années. Ce dernier boudant son fils refusant à chaque rencontre d'intégrer les rangs de l'armée royale. Il savait que son père voulait le préparer à être chef de l'armée de Leonidia mais ce destin-là, il n'en voulait pas.
Avec Jeremiah comme roi, est-ce qu'il pourrait changer d'avis ?
« Loué soit la déesse Silja. »
Cassian fut tiré de ses pensées par les paroles de Volkan à ses côtés levant la tête vers le ciel.
De timides flocons de neige tombaient des nuages et semblaient rassurer tous les givrecieliens présents, priant une déesse qu'ils ne savaient pas prisonnière.
— Ce n'est que de la neige, murmura Cassian.
— Non, c'est bien plus. C'est de l'espoir. Ça veut dire que le dragon blanc va sortir de son sommeil et nous accorder son aide. Que Cornélia va bientôt chanter et nous guider vers la victoire !
— Chanter ?
— L'invocation du dragon. La complainte de Givreciel.
« Alors c'était ça. Voilà pourquoi elle ne voulait pas me la chanter, pourquoi elle m'a menti. Ce chant lui permet d'invoquer l'esprit divin de sa mère. »
Une complainte pour une déesse prisonnière de la tristesse.
Un court chapitre qui prépare à la suite des événements... Que pensez-vous de l'arrivée d'Alvasi et de sa motivation ? De l'ordre de Vivianne pour brûler la forêt et de ces conséquences ? Un grand danger arrivera bientôt vers Cassian... sera-t-il capable de l'affronter ?
❄ N'hésitez pas à voter et donner votre avis en commentaire ! On se retrouve mardi prochain pour la suite ! ❄
⚠ Demain matin, le 5 août, je sortirais une nouvelle de 10 chapitres dans son intégralité pour mon anniversaire (parce que j'aime vous gâter), avec une patte un peu à la Food Porn Lover et où vous pourrez retrouver un de ces personnages. Je n'en dis pas plus donc pour être au courant, abonnez-vous à mon compte ou aller sur mon rantbook🤫⚠
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