18 - Ver de neige
— Diantre, quelle est cette horreur ?!
— Argh putain ! Fais chier !
Les crochets du ver de neige se plantant doucement dans sa peau, tachant ses habits de rouge, le chasseur agita son épée qui arriva à blesser le corps de la bête sous lui. Le ver émit un nouveau bruit strident en replongeant sous terre, lâchant Cassian au passage.
L'impact au sol ne fut pas atténué par la neige et il dut serrer les dents pour se retenir de hurler. Mais ce n'était que la surprise qui l'avait perturbé car il se releva immédiatement, analysant la situation comme il en avait l'habitude dans son métier.
Il prit une grande inspiration et ferma les yeux, se concentrant sur les moindres vibrations du sol, se déplaçant lentement jusqu'à le sentir trembler et qu'il plante son épée dans la terre.
Le ver de neige en sortit comme précédemment mais cette fois-ci avec l'arme du chasseur dans ce qui lui servait de tête. Ils purent détailler la créature ressemblant bel et bien à un ver de terre géant mais immaculé et avec des crochets lui servant de dent pour sucer le sang de ses victimes.
D'autres petites dents sortaient du trou lui servant de bouche, longeant les parois internes de son corps et attendant d'être satisfaites par de la chair. Vyrr déglutit et fit une grimace en observant la créature avant de sortir délicatement sa dague elfique.
— Est-ce que tu sais au moins t'en servir ? demanda Cassian en bandant son arc.
— C'est plus un objet de collection, avoua l'elfe sans honte.
— Est-ce que tu maîtrises la magie ? J'ai vu qu'ils y avaient des runes sur l'une de tes bagues.
— C'est...
— Plus un objet de collection ? Bordel.
Le chasseur jura à nouveau en comptant le nombre de flèches dans son carquois, visiblement insuffisante alors que la bête attaquait de nouveau.
« J'attire autant les emmerdes qu'un pot de miel attire les guêpes » se dit-il avait de tirer une flèche sur la créature, esquivant une de ses attaques en roulant dans la neige. Il en décocha immédiatement une autre avant que la bête ne retourne sous terre, brisant son épée au passage.
— Vyrr ! Je vais faire une diversion pour que tu le dépasses avec les chevaux et que tu continues sur la route.
— Ce n'est pas une idée très brillante... On devrait retourner vers le croisement.
— Pas la peine, je vais tuer cette créature. J'ai affronté plus coriace qu-
Cassian s'interrompit en esquivant un nouvel assaut du ver qu'il tenta de transpercer avec sa dague, en vain. Sa peau était devenue subitement trop molle et la lame rebondissait presque dessus. Le chasseur était à court d'idées et la fuite s'imposait dans son esprit lorsqu'il fut à nouveau attrapé par les crochets de la créature.
Vyrr le regardant les bras croisés, se frottant le menton comme s'il regardait une belle tapisserie.
— Ça casserait ton cul elfique de m'aider un minimum ?! s'écria Cassian en donnant des coups de pied à la bête voulant le faire tomber dans sa bouche.
— Je ne sais pas si c'est digne de ma race... Je veux dire, vu comment tu m'as traité quand on s'est rencontré... Ça mériterait bien une petite vengeance qu-
— VYRR !
— Oh ça va, on a plus le droit d'être sadique sous prétexte que l'on est un elfe. Sagesse, pureté et générosité... Mes bourses sur ton front.
Le ver de neige, visiblement ennuyé par la nonchalance de son autre proie, se rapprocha de l'elfe pour l'encercler avec son corps. Cassian et Vyrr étaient prisonniers d'une étreinte dangereuse avec la créature, le chasseur redoublant d'efforts pour la blesser et l'elfe attendant en croisant les bras.
— Elle va bien la race supérieure ?!
— Ferme ta bouche.
Cassian était à deux doigts de jouer sa carte maîtresse, utilisable qu'en cas d'urgence, lorsque son voisin à l'air indifférent au danger décroisa enfin les bras. Il sentit l'espace d'une seconde un changement dans l'air se gorgeant de magie avant de soudainement disparaître...
« ATCHOUM ! »
L'éternuement de Vyrr eut un effet de bombe, créant avec son souffle une épaisse fumée violette faisant hurler de douleur le ver de neige abandonnant son étreinte. Ils s'écartèrent de la créature, Cassian choqué par ce qui était en train de se passer : le corps de la bête était en train de noircir, comme si la fumée avait eu un effet corrosif.
— Allez, on s'en va ! s'écria Vyrr en remontant sur son cheval prêt à retourner à l'entrée de la forêt.
— Attends ! On peut traverser et-
— On ne sait pas ce qui nous attend d'encore plus fantastique dans ces bois. Reprends tes esprits et mets ton égo de côté. La bête n'est pas encore morte.
Cassian serra les dents avant de retrouver sa monture et de partir au galop, les cris stridents du ver de neige tentant de les poursuivre malgré sa douleur.
Lorsqu'ils arrivèrent à l'entrée de la forêt, le chasseur tomba soudainement de son cheval, les mains sur ses blessures encore sanglantes. Cette fois-ci, Vyrr se pressa pour le rejoindre et ouvrir son manteau jusqu'à le mettre torse nu dans la neige.
Les sourcils froncés et l'air songeur en détaillant le corps blessé de Cassian.
— Ça me brûle à l'intérieur... réussit-il à articuler.
— Hum... Pas de doute, c'est le poison.
— Comment peux-tu savoir que cette créature était venimeuse ?
— Je ne le sais pas, c'est mon sort qui était venimeux. C'est pour cela que je t'ai dit de fermer ta bouche.
— Putain... Tu abuses...
C'est sur ces derniers mots, le front en sueur, que Cassian s'évanouit. Vivant ses derniers instants dans la neige et mort à cause de celui dont il avait eu pitié.
« Note à moi-même pour ma prochaine vie : la solitude, il n'y a que ça de vraie » pensa-t-il avant de sombrer.
❄❄❄
Sauvez l'elfe aux yeux violets même s'il vous semble hautain, il vous le rendra bien.
« Argh ! »
Cassian se réveilla subitement, le cœur battant tellement fort qu'il lui faisait mal à la poitrine. La respiration erratique, il sentit une main froide se poser sur son front avant de le pousser à se rallonger.
— Qu'est-ce que vous avez vécu pour en arriver à cet état ?
— Il s'est battu contre un ver blanc géant.
— Ah... Le ver de neige. Le piège, c'était de suivre le chemin dans la forêt. Généralement il faut passer par Brise-Lac sans couper par les bois.
— C'est à lui qu'il faut dire ça. Moi, je voulais juste aller au quartier général des rebelles et rencontrer Cornélia.
La suite de la conversation se perdit pour Cassian qui s'évanouit à nouveau.
Ce n'est que quelques heures plus tard qu'il rouvrit les yeux, son corps engourdi mais ne ressentant plus la moindre douleur. Il passa le dos de sa main sur son front avant de toucher une serviette humide posée dessus. Se relevant péniblement, il se massa les tempes et remarqua qu'il était torse nu sous le fin drap le couvrant.
Des bandages couvrant les blessures infligées par le ver de neige.
Il ne perdit pas de temps à observer la pièce qui n'était qu'une simple chambre de taverne comme il en avait déjà vu dans le pays, avant de se rhabiller. Partant à la recherche de son équipement mais surtout de cet elfe ayant failli causer sa perte.
Ses jambes le lâchèrent presque lorsqu'il arriva en bas des escaliers et il fut rattrapé de justesse par les mêmes mains froides s'étant occupées de lui lors de son alitement.
Il croisa le regard vide de son nouvel ami jusqu'à ce que ce dernier se mette à caresser son torse nu avec lenteur, provoquant une gêne chez le chasseur.
— Euh, Viktor ? Qu'est-ce que tu fais ?
— Je vérifie l'état de tes fonctions vitales. Tu es resté allongé pendant deux jours entiers.
Cassian se mordit la lèvre, contrarié d'avoir perdu du temps sur sa mission et tout ça à cause d'une créature qu'il avait à peine blessé. En tant que chasseur, il se sentait faible d'avoir subi l'attaque du ver de neige et surtout d'avoir été « sauvé » par un elfe.
— Où est Vyrr ? demanda-t-il soudainement. Si je n'avais pas accompagné cet elfe...
— Sans lui, tu serais mort. Son sortilège a désinfecté les blessures du ver de neige et tu as même gagné en résistance au poison. Dans ton malheur, tu es devenu plus fort.
— Tsss... Alors où est-il ? Et où sommes-nous ?
— Nous sommes au village de Brise-Lac. Vyrr est partie ce matin avec un de nos groupes rebelles rentrant à notre base. Il voulait rencontrer Cornélia et vice-versa. Maintenant retourne te coucher, tu as encore besoin d'une nuit avant de bouger.
— Alors arrête de me caresser.
Viktor éloigna sa main, les joues rouges et s'excusant de cette proximité avant que le chasseur le remercie d'une tape sur l'épaule.
Ce n'était pas de la faute de l'elfe s'il était dans cet état. C'était sa responsabilité et il le savait très bien mais avait encore besoin d'une nuit pour le digérer.
❄ Prochain chapitre déjà disponible ! ❄
Qu'avez-vous pensé de l'altercation avec le ver de neige ? De la relation Cassian / Vyrr a ce moment-là et enfin de l'attaque de l'elfe et de ses conséquences ? Vos théories sur la suite ?
❄ Si ce chapitre vous a plu, n'hésitez pas à voter et laisser un petit commentaire ! ❄
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