11 - La princesse Vivi
« Nos forgerons travaillent de concert avec les ingénieurs nains venus d'Ironfrost à la demande du roi de Stolheim pour concevoir les armes que vous avez demandés, Votre Altesse. »
Vivianne Vaeryl parcourait d'un œil attentif le livret de commande du royaume, accompagné de ses conseillers suivant les finances du pays. Elle leva les yeux vers son général de guerre planté droit comme un i devant son trône, attendant une remarque lorsqu'elle soupira.
— Dans combien de temps les armes arriveront ? Il nous faut des arbalètes massives pour répondre à la menace rebelle.
— Quelques semaines, disons moins de deux mois comptant la traversée de l'est à l'ouest.
— Et les vivres ? Le roi Stolh est bien au courant que nous accueillons de nombreux visiteurs dans notre capital depuis l'ouverture de la mer gelée. Pour l'instant nous n'avons pas de soucis et l'économie de Voile-d'hiver s'en porte plus que bien mais de nouveaux bateaux arrivent de l'est et du sud dans quelques semaines... Nous avons besoin de beaucoup plus.
— La situation est délicate Votre Altesse, intervint un des conseillers, Stolheim a refusé de rejoindre les pays fédérés par le roi de Greenland, ce qui a valu une diminution des échanges commerciaux avec le centre du continent Est qu-
— Je n'ai que faire des soucis de l'Est. Ici, nous sommes à Givreciel et l'hiver est éternel. Nous nous sommes toujours débrouillés avec le climat et les rebelles et ça aurait pu continuer si la mer gelée n'avait pas été brisée. Croyez-moi, je suis ravie de libérer le pays de sa solitude, cela booste notre économie, mais ce n'était pas le moment. Le roi Stolh aurait dû attendre que nous éradiquions les rebelles car maintenant, les yeux des puissants sont braqués sur nous.
Vivianne soupira en massant ses tempes et affirma sa demande de vivres supplémentaires en concluant la réunion.
Elle massa son cou avant de se lever de son trône et de s'étirer les bras en marchant vers la fenêtre. Observant la cour et ses invités puis au loin la capitale de Voile-d'hiver et enfin les plaines enneigées la protégeant de la sauvagerie de l'ouest.
Ces mêmes plaines qu'elle avait aimé parcourir avec ses frères et sœurs jusqu'à ce qu'un jour, sa famille se brise à cause de son père et sa naïveté. Jaden Vaeryl était un roi ne laissant rien paraitre, le cœur glacé et n'accordant pas une once d'amour à ses enfants et sa femme.
Pas un seul geste tendre, faisant croire à la princesse encore enfant que son père était incapable d'aimer... Jusqu'à ce qu'elle les rencontre.
Viktor et Cornélia.
Se souvenir d'eux lui fit serrer les dents de rage lorsqu'elle sursauta en entendant toquer à la porte de la salle du trône, un garde annonçant l'arrivée de la seule personne la divertissant en ces temps troublés.
« Bonjour majesté. Votre robe d'aujourd'hui est encore plus sublime que la précédente. J'ai peur d'être subjugué chaque jour avec vous ! »
Vivianne sourit aux mots de Jeremiah Leonidi avant de venir le saluer. Ce dernier attrapa sa main pour la baiser et le seul contact de ses lèvres la fit rougir comme une pivoine.
— Je vous ai déjà dit de m'appeler Vivianne, dit-elle en cachant ses joues de sa main.
— Et moi je souhaiterais que nous nous tutoyions lorsque nous sommes en privé, « Vivi ».
Subitement, la princesse retira sa main comme si elle venait de se brûler, passant de la gêne à l'irritation en entendant ce surnom qui lui déplaisait tant.
Jeremiah ne put l'ignorer et s'excusa d'une révérence alors qu'elle se tournait à nouveau vers la fenêtre.
— Pardonnez... Pardonne-moi, Vivianne. Je pensais que comme nous allions devenir très proches, je pouvais déjà me permettre d'être familier. Je m'en excuse, vraiment.
— Non ce n'est pas... Ce n'est pas toi, Jeremiah. Tu ne pouvais être au courant mais j'insupporte autant que j'aime ce surnom depuis des années. Ma mère, mes frères et sœurs m'appelaient comme ça mais il n'était malheureusement pas les seuls.
— Votre père ?
— Lui ? répondit-elle en retenant un rire. C'est à peine s'il ne m'appelait pas « fille numéro quatre » ! Non, c'est sa chouchoute qui m'appelaient Vivi... Saleté de Connie...
Jeremiah fut surpris de la colère que tentait tant bien que mal de contenir la princesse lorsqu'il glissa ses doigts sur sa main pour mieux la faire rougir et oublier sa jalousie passée.
Mais il voulait comprendre. Il avait entendu des rumeurs sur Jaden Vaeryl depuis son arrivée à Voile-d'hiver et ce genre d'information lui serait utile mais également pour Cassian s'il revenait dans la région.
Comprendre le territoire sur lequel on s'aventure était bien plus aisé en ayant son histoire.
Alors Jeremiah usa de ses charmes habituels pour faire craquer les femmes : il se mit dans le dos de la princesse et vint l'enlacer de ses bras avant de poser sa tête sur la sienne. Caressant de ses mains les bras de Vivianne rougissant comme pas possible et peureuse à l'idée d'être surprise dans cette position gênante.
— Vos secrets deviendront les miens ma princesse, murmura-t-il à son oreille d'une voix suave. Pourquoi êtes-vous soudainement en colère ?
— Mon père était un bon roi, en apparence, mais c'était un très mauvais époux. Il aimait énormément son pays et son environnement. J'étais trop jeune pour le voir mais on m'a raconté qu'il partait souvent pendant presque des semaines dans les forêts et les montagnes, laissant ma mère diriger à sa place.
— Un passionné de la flore et de la faune ?
— Surtout de la faune... J'ai déjà évoqué le fait que Silja, la soi-disant déesse de l'hiver était une amante de mon père, mais s'il n'y avait eu qu'elle. Il ne s'est pas gêné pour forniquer avec une autre déesse, Fenrir.
— Attends, « Fenrir » n'est pas un loup géant ?
— Chez nous, Fenrir est une louve géante. Déesse de la faune hivernale qui régit notre environnement. Mais ce n'est que fabulation encore une fois... Je les ai vus ces femmes, en chair et en os, et il n'y a rien d'un dragon ou d'une louve chez elle. Ce n'était que des catins.
— Si ces femmes n'étaient que des distractions, pourquoi tant de haine ?
— Catins, pas distractions. J'ai un jour demandé à mon père pourquoi il avait couché avec la louve et ce dernier m'avait répondu que c'était « pour assurer notre survie ». Qu'il avait conclu un marché avec elle et que grâce à cela, nous ne manquions pas de gibiers.
— Et pour Silja ?
Vivianne resserra ses mains sur celle de Jeremiah, s'attardant sur la neige tombant doucement du ciel à travers la fenêtre avant d'inspirer et d'avouer ce qu'elle avait toujours refusé à croire :
— Mon père était amoureux de Silja. Le roi de Givreciel charmé par la déesse de l'hiver, c'était une histoire d'amour qui aurait été belle à conter au peuple... Il était amoureux d'elle avant même de monter sur le trône mais s'est vu contraint par le mariage politique avec ma mère, une princesse de Stolheim. Les efforts de la reine et ses enfants n'ont pas eu raison de son amour qui, l'année de ma naissance, lui a donné une fille.
— Votre demi-sœur ? Est-elle encore vivante ?
— Oh malheureusement oui ! Elle et mon demi-frère, le fils de la louve, sont la cause de mes problèmes ! Cornélia et Viktor Vaeryl, les chefs des rebelles de Givreciel.
Jeremiah ne put cacher sa surprise en apprenant la nouvelle complexifiant de plus en plus la situation du pays qu'il s'était fait. L'insurrection n'était pas qu'à cause de la domination d'un pays étranger sur les terres de givres, elle n'était que le résultat d'un conflit familial créé par le précédent roi.
Mêlant en plus de cela un aspect divin auquel Vivianne ne croyait pas, contrairement à Jeremiah qui, en bon prince savant, avait de bonnes connaissances sur le sujet.
La faute à son souvenir d'un dragon blanc dans cette même salle où il se trouvait, des années après le drame ayant failli coûter sa vie.
— Cette Silja... Une manipulatrice... Jamais je n'avais vu mon père autant sourire à ses côtés et autant ma mère pleurer de rage. J'ai pourtant essayé d'être sympathique avec sa fille, Cornélia, mais la retrouver après tant d'années à vouloir me faire tomber du trône de mon père...
— N'ait crainte, j'empêcherais cela.
— Comment est-ce qu'un étranger à la culture de Givreciel pourrait arranger les choses ?
— Je suis partisan de la paix et je suis loin d'être seul. Je veux que Leonidia et Givreciel entretiennent les meilleurs rapports politiques et commerciaux et c'est pour cela que je vais t'aider à totalement apaiser les tensions.
— Oh Jeremiah...
Vivianne soupira avant de se retourner vers lui et de s'emmitoufler dans ses bras, la tête collée à son torse et écoutant les battements de son cœur. Le prince lui, fit preuve de douceur en lui caressant les cheveux avant de revenir à ses instincts primaires et d'en vouloir plus.
Il leva de ses doigts le menton de la princesse avant de caresser ses lèvres, son regard empli de désir et rapprochant sa bouche très lentement. Tous les deux fermant les yeux pour enfin avoir leur premier moment d'intimité lorsque quelqu'un toqua à la porte.
Vivianne sursauta, les joues rouges et visiblement très déçue d'être interrompue alors que Jeremiah s'écartait d'elle à l'arrivée d'un garde.
— Qu'y a-t-il ? demanda-t-elle avec un brin d'irritation dans la voix.
— Pardonnez-moi votre Altesse mais un navire inconnu est en train d'arriver au port.
— Inconnu ? Nous allons voir cela.
La princesse courra presque jusqu'au rempart, accompagné du garde et de Jeremiah curieux d'un possible rebondissement. S'attendant même à voir le navire de son père arriver bien trop tôt pour leurs épousailles.
L'un des gardes présents tendit sa longue vue pour Vivianne qui fronça les sourcils à la vue du bateau dont les couleurs et la forme l'intriguaient. Une grand-voile rouge et dorée accompagnée d'un drapeau bleu et violet, le tout sublimant l'élégance du bâtiment.
Jeremiah n'ayant pas la vision de lynx de son cousin, sortit sa longue vue pour déterminer d'où pourrait provenir le bateau lorsqu'il émit un hoquet de surprise.
— Mais non ! s'étonna-t-il en vérifiant à nouveau. Pourquoi est-ce que ce pays viendrait ici ?
— Alors mon prince ? s'impatienta Vivianne. Qui sont-ils ? Amis ou ennemis ?
— Pour leur intention, je n'en ai clairement pas la moindre idée. Pour ce qui est de leur identité, je peux l'affirmer par les voiles mais surtout par le drapeau.
Il vérifia à nouveau avant de ranger sa longue et d'annoncer tout fier de ses connaissances géopolitiques :
« Ma princesse, voici un bâtiment de la marine elfique du pays de Rhapsodia au sud de l'autre continent et, à en juger par son drapeau, c'est un navire de la famille royale. Vous allez avoir votre première rencontre avec un haut-elfe ! »
Qu'avez-vous pensé de ce chapitre à Voile-d'hiver ? De la façon de régner de Vivianne ? De la façon d'agir qu'à Jeremiah avec elle et enfin des nombreux aveux qu'elle lui fait sur sa famille ?
Un bâteau en provenance de Rhapsodia arrive... On se demande bien quelle nouvelle rencontre ils vont pouvoir faire...? Rendez-vous mercredi prochain pour en savoir plus😉
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https://youtu.be/wazjoAts9q4
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