xi. L'île du dragon

   Le lendemain, nous accostons aux abords d'une nouvelle île. Nous chargeons deux barques et nous partons avec quelques hommes.

   — Je doute que les Seigneurs aient débarqués ici, Altesse ! fait remarquer Ripitchip, dans la barque voisine à la notre. Il n'y a pas le moindre signe de vie.

   — C'est vrai, répond Caspian, en train de ramer face à moi. Une fois qu'on sera descendu à terre, prends des hommes et cherche des vivres et de l'eau ! Nous quatre allons explorer l'île.

   — Attendez, vous voulez dire nous cinq ? fait immédiatement Eustache, l'air paniqué.

   Nous nous retournons tous vers lui.

   — Je vous en prie, ne me laissez pas avec ce rat... gémit-il.

   — J'ai tout entendu, répond Rip.

   Eustache lui lance un regard noir avant de baisser son regard vers ses pieds.

   — De quoi je me mêle... marmonne-t-il tout bas.

   — J'ai tout entendu, répète Ripitchip.

   J'échange un regard amusé avec Lucy, avant d'éclater de rire.

   Nous arrivons bientôt à terre. Nous déchargeons les barques avant de partir explorer l'île.

   — Ça a l'air d'être volcanique ici, dis-je après quelques minutes de marche. Je ne suis pas sûre que l'on trouve grand chose à manger ou à boire...

   Soudain, j'aperçois une corde attachée autour d'un pic rocheux. Je m'approche. Celle-ci descend dans une sorte de puit creusé dans la pierre.

   — Venez-voir ! Quelqu'un est passé par là avant nous !

   — Les Seigneurs ? demande Edmund.

   — C'est possible, répond Caspian avant de jeter un caillou dans le puit. Que pensez-vous qu'il y a, en bas ?

   — Allons-voir, fait Edmund.

   Il s'engage le premier dans la descente, suivi par Caspian, Lucy et moi. Lorsque je les rejoins, Edmund est en train de contempler une drôle de silhouette au fond d'un bassin.

   — Qu'est-ce que c'est ? je demande, curieuse.

   — J'en sais rien, répond Edmund. On dirait une statue en or.

   Il se détourne alors du bassin et revient quelques secondes après avec une branche, qu'il plonge dans l'eau. Je reste stupéfaite en voyant la branche se recouvrir d'une pellicule dorée. Edmund la jette dans l'eau, paniqué.

   — C'était quoi, ça ?? je demande, effarée.

   Edmund me regarde, l'air perdu.

   — C'est l'eau... Elle transforme en or tout ce qui la touche. Alors cette statue...

   J'étouffe une exclamation d'horreur.

   — C'est une vraie personne ? Oh mon Dieu...

   — Il a dû tomber dedans... dit tristement Caspian en s'approchant du bord de l'eau.

   — Caspian, reviens vers nous, dis-je alors, tendue. Je n'aimerais pas que tu finisses comme lui...

   Il lève la tête vers moi et s'écarte d'un pas.

   — Le pauvre homme... fait Lucy, tandis que je viens prendre la main de Caspian.

   — C'est un Seigneur, fait remarquer Edmund en désignant le bouclier de l'homme, à côté de lui.

   — C'est le blason du Seigneur Restimar, déclare Caspian.

   — Son épée est au fond ! s'exclame Edmund.

   Il se penche et dirige sa propre épée vers celle du défunt Seigneur. Il réussit à la récupérer et recule de quelques pas.

   — Ton épée n'a pas été changée en or... s'étonne Lucy.

   — Les épées sont magiques, explique Caspian, alors que Edmund lui tend celle qu'il vient de récupérer.

   — Il n'a pas dû réaliser ce qui lui arrivait... dit Lucy.

   — Peut-être que non... ou peut-être qu'il avait une idée en tête, répond Edmund.

   — Mais quelle idée, comment ça ? questionne Caspian qui l'observe, les yeux plissés.

   Je fronce les sourcils. Avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, Edmund est déjà penché au-dessus du bassin, trempant l'extrémité d'un grand coquillage dans l'eau. Il se recule ensuite et pose le coquillage qui se change doucement en or par terre. Il le prend dans sa main et l'observe avec un air inquiétant sur le visage.

   — Pourquoi as-tu ce regard ? le questionne Lucy.

   — Celui qui a accès à ce bassin... peut devenir la personne la plus puissante du monde, dit Edmund d'une voix d'outre-tombe.

   J'échange un regard préoccupé avec Caspian.

   — Lucy... Nous pourrions être riche, reprend Edmund. Personne ne pourrait plus nous donner d'ordres, ni nous imposer quoi que ce soit.

   — Ce qui est à Narnia doit rester à Narnia, Edmund, dit Caspian.

   — Qui l'a décrété ??

   — Moi.

   Edmund lui jette un regard sombre, avant de reporter son attention sur le coquillage. Il se lève alors, ramassant son épée.

   — Je ne suis pas votre sujet, lance-t-il d'un air menacant.

   — Ça fait longtemps que vous attendiez ça... répond Caspian. Vous me défiez, vous doutez de ma légitimité !

   — Vous en doutez vous-même !

   — Vous n'êtes qu'un enfant !

   — Et vous, un poltron sans envergure !

   — Edmund, dis-je d'une voix ferme. Là, tu vas trop loin. Pose ce coquillage.

   — Non ! Je suis fatigué de jouer les sous-fifres ! D'abord avec Peter, ensuite avec vous ! J'ai plus que courage que vous deux réunis ! Pourquoi est-ce vous qui portez l'épée de Peter ? Je mérite d'avoir mon propre royaume ! Et je mérite de commander !!

   — Edmund, stop !

   — Puisque vous pensez être si brave... prouvez-le ! s'écrie Caspian en le poussant en arrière.

   — Caspian, arrête !!

   Malheureusement, je ne suis écoutée par personne. Ils commencent à échanger des coups d'épée. Lucy tente de s'interposer, mais je la tire en arrière. Je leur en voudrais toute ma vie si elle était blessée. Je me plante alors sur mes deux pieds et ferme les yeux.

   — ARRÊTEZ-VOUS !! je hurle, laissant exploser ma colère.

   Mon cri résonne en écho dans la grotte, mais ce n'est pas ma voix que j'entends. C'est un puissant rugissement qui fait presque trembler les murs. J'ouvre a nouveau les yeux, à bout de souffle. Trois paires d'yeux sont braquées sur moi.

   — Maintenant que vous êtes calmés, on remonte, je lance d'une voix dure. Immédiatement. Vous n'êtes pas vous-mêmes, ici.

   — Aby a raison, ce lieu vous ensorcelle, répond Lucy. C'est ça, la mise à l'épreuve dont Coriakin avait parlé.

   — Alors ce rugissement, c'était aussi de la sorcellerie ? demande Caspian, l'air inquiet.

   Je reste silencieuse, ne sachant quoi dire. Même moi, je ne sais pas ce qui s'est passé.

   — Non, répond Lucy à ma place. Ça, c'était la magie d'Aslan.

   Je la vois fixer mon médaillon, et je devine qu'elle a compris.

   — Quittons cet endroit, dis-je alors en revenant vers la corde.

   Lucy me suit. Avant de remonter, je tente de calmer les battements de mon cœur. Je sens une main se poser sur mon épaule.

   — Ça va ? me demande Lucy.

   — Je crois... Ne t'en fais pas. Allons-y.

   Elle hoche la tête. Nous remontons tous à la surface. Je n'adresse pas un mot à Caspian et Edmund. Ils gardent la tête baissée, l'air penaud.

   Nous revenons auprès des autres, qui sont déjà revenus vers les barques.

   — Qu'avez-vous trouvé ? demande Caspian.

   Rhince lui montre la maigre récolte au fond des paniers.

   — C'est volcanique ici, Majesté, dit-il. Y'a pas grand chose qui pousse.

   Caspian pousse un léger soupir.

   — Repartons dès maintenant, dis-je alors. On réussira à trouver quelque chose avant demain. J'en suis certaine.

   — Espérons que tu aies raison...

   Je m'approche de Caspian et pose une main réconfortante dans son dos. Il baisse ses yeux vers moi.

   — Aby... Je suis vraiment désolé pour...

   — Laisse tomber. Ça n'a plus d'importance, je le rassure avec un sourire.

   Il hoche la tête, les lèvres pincées.

   — Où est Eustache ? demande alors Lucy.

   — Quelque part en train de ne pas nous aider à charger les provisions, répond Ripitchip.

   — Eustache ? appelle Lucy. Eustache ??... J'ai un mauvais pressentiment, grimace-t-elle.

   — Je vais le chercher, soupire Edmund.

   — Je viens avec vous, dit Caspian.

   Il me tend l'épée du Seigneur Restimar et rejoint Edmund.

   Lucy et moi restons quelques instants, mais nous sommes obligés de remonter dans une barque. Une fois revenues sur le bateau, nous restons aux aguets, surveillant l'île. Nous patientons de longues minutes avant d'apercevoir du mouvement. Ce dernier se résume en un rugissement suivi d'une gerbe de flammes apparaissant derrière les rochers.

   — C'était quoi ?? questionne Lucy.

   — C'était le volcan ? demande la petite Gael, à côté de moi.

   Drinian garde les yeux rivés sur l'île.

   — Oh, non... Ce n'était pas le volcan.

   Je déglutis.

   — Vous pensez que c'était... un dragon ?

   — L'île semble bien porter son nom, me dit-il avant de revenir vers ses hommes. Tout le monde sur le pont ! Archers, en position !

   Je me retourne de nouveau vers l'île, et c'est là que je le vois. Un vrai dragon en chair et en os, et il se dirige droit vers nous. Sur le pont, c'est rapidement la panique.

   — Tous à vos postes ! Ne tirez qu'à mon commandement !

   J'observe le dragon faire des cercles autour du bateau. Étrangement, il ne me paraît pas agressif. Il semble... perdu, et effrayé. Il se pose sur la vergue du mât et pousse un nouveau hurlement.

   — C'est moi, c'est Eustache ! j'entends d'une voix lointaine.

   Je reste bouche-bée.

   — Aidez-moi ! Je suis Eustache !

   — Mais qu'est-ce que ça veut dire... je souffle, sous le choc.

   — Archers, en position !

   — Non ! je m'écrie. Arrêtez, ne tirez pas !

   — Majesté, il va finir par détruire le bateau, il faut le faire fuir !

   — Non, non ! Je crois que... ce dragon, c'est Eustache !

   Drinian fronce les sourcils.

    — Qu'est-ce que vous voulez dire ?

   — Je... Je l'ai entendu, il... il a parlé !

   Le capitaine me jette un regard étrange.

   — Ne me regardez pas comme ça, moi aussi je trouve ça complètement fou... Mais faites-moi confiance !

   Drinian semble rester sceptique, mais finit par hocher la tête et ordonne à ses archers de baisser leurs arbalètes. Je me penche par-dessus la balustrade.

   — EUSTACHE !

   Je vois le dragon tourner brusquement la tête et s'envoler pour venir faire des ronds devant moi.

   — Aby ? Tu me comprends ?? me demande-t-il d'une voix tremblante.

   — Il semblerait... Eustache, Caspian et Edmund sont en train de te chercher sur l'île. Emmène moi là-bas, et tu m'expliqueras ce qui s'est passé, d'accord ? je lui dis d'une voix que je veux rassurante.

   Il hoche la tête. Je décide alors de grimper sur le dessus de la balustrade. Drinian accourt vers moi pour me permettre de garder l'équilibre. Je le remercie et me dresse sur la poutre. Je plante mes yeux dans ceux d'Eustache.

   — Tu me rattrapes ? je lui demande, peu assurée.

   Il hoche la tête. Je souffle un grand coup et saute dans le vide. Je ferme les yeux. Avant que je ne touche l'eau, je me sens rattrapée au vol. Eustache a été réactif. Je peux respirer normalement.

   — Allons-y, mon grand...

   Eustache ressert légèrement son emprise autour de moi, et se dirige a grands coups d'aile vers l'île.

coucou, alors oui j'ai posté 2 chapitres d'affilée, déjà parce que (comme annoncé sur mon profil) je pars demain en vacances, donc pas de publications avant longtemps, et aussi parce qu'il ne me reste que le dernier chapitre et l'épilogue a écrire

eh oui, cette histoire est bientôt finie :( enfin vous il vous reste encore quelques chapitres à lire avant de lui dire au-revoir

donc voilà, j'espère que ce chapitre vous a plu 💙 n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé !! je vous embrasse 😘

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