xi. Corruption
Cela fait désormais un moment que je suis assise sur les remparts de la pyramide, à regarder au loin d'un œil terne. J'ai préféré m'isoler, sachant très bien que je ne ferais que pleurer si je restais avec Caspian. Les visages de tous nos soldats me hantent, leurs cris terrifiés résonnent dans mes oreilles. Je ne parviens pas à les sortir de ma tête. Je me sens si faible, si... minuscule, face à la menace qui pèse sur nous. J'ai l'impression d'être inutile. Nous avons remporté une bataille contre la Sorcière Blanche, et je pensais que rien ne pourrait être pire que son pouvoir. Je me rends maintenant compte que je me trompais. Non seulement Miraz est puissant, mais nous commençons également à nous déchirer de l'intérieur. Nos bases sont en train de s'effondrer. Si cela continue, nous aurons perdu avant même d'avoir commencé à nous battre.
Soudain, j'entends quelqu'un s'asseoir à côté de moi. Inutile de me retourner pour deviner que c'est Edmund.
— Ça va ? me demande-t-il doucement.
J'hausse les épaules.
— Ça pourrait aller mieux.
Edmund hoche la tête.
— Je sais ce que tu ressens. Mais il faut que tu passes outre toutes ces mauvaises pensées. On traverse un moment difficile, c'est vrai, mais... ça pourrait être pire.
— Qu'est-ce qu'il pourrait y avoir de pire, sérieusement ?
— J'en sais rien, tu... Tu pourrais ne pas être là.
Je me tourne vers lui.
— Comment ça ?
— Bah, t'es un peu le ciment du groupe... Si t'étais pas là, on serait complément foutu.
J'esquisse un sourire amusé.
— Ciment, tu parles... Je ne parviens même pas à rester diplomate.
— Si tu veux parler de Peter, je pense qu'il s'en remettra. Tes mots lui ont fait l'effet d'un bon coup de fouet, il avait au moins besoin de ça pour se rendre compte qu'il fait tout de travers depuis le début.
— Ça veut dire que tu me soutiens ?
— Eh, doucement, on va pas commencer à créer des partis... Non, disons simplement que je l'ai trouvé culotté de s'en prendre à Caspian, alors qu'il était celui qui était en tort. Mais tu l'as bien défendu, alors...
— Il mérite au moins ça. Il m'a souvent sauvé la vie, et sa présence me fait du bien. Et je me sens moins seule... Évidemment, je me sentais déjà moins seule en vous rencontrant, j'ajoute avec un sourire.
— Ça me fait plaisir d'entendre ça, répond simplement Edmund.
Je souris légèrement, avant de lever les yeux vers lui.
— Merci, Ed. Ça me fait du bien de parler, dis-je, la gorge serrée.
— Tu sais très bien que tu peux me parler à n'importe quel moment... Je serais toujours là.
Ses mots me touchent, et les premières larmes d'une énième série de sanglots roulent sur mes joues.
— Désolée, je souffle en les essuyant.
— Oh, non, c'est moi qui suis désolé... J'aurais pas dû insister, maintenant tu pleures par ma faute... dit-il en passant un bras autour de mes épaules et en me serrant contre lui.
— C'est pas de ta faute, je réponds d'une voix étranglée.
J'aimerais lui en dire plus, mais les mots restent bloquée dans ma gorge. Alors je reste blottie dans ses bras, à essayer de calmer mes sanglots.
Soudain, Peter débarque sur le rempart.
— Vous n'avez pas vu Caspian ?? questionne-t-il.
— Pourquoi, tu as encore envie de te défouler ? Ça ne t'a pas suffi, tout à l'heure ?
— C'est pas pour ça, Aby, je suis vraiment inquiet.
Je me retourne. L'air affolé de Peter me surprend.
— Il est introuvable, dit-il.
Je m'empresse de me relever, aidée par Edmund.
— Tu as vraiment cherché partout ?
— Je n'ai pas cherché dans tous les couloirs, j'ai préféré vous trouver avant.
Nous rentrons à l'intérieur. Affolée, je jette des regards tout autour de moi. Il n'est pas parti, tout de même ?! Il n'oserait pas nous abandonner ??
Je me précipite dans le premier couloir que je vois, celui qui est parsemé de peintures de nos anciens exploits. J'aperçois contre le mur tout l'attirail de Caspian, il a dû s'en débarasser ici. Je récupère son épée et continue mon chemin en courant. Je vois de la lumière se refléter contre le mur du couloir, m'indiquant que les torches de la salle au bout sont allumées. J'accélère ma course jusqu'à ce que j'arrive à l'intérieur. Ce que je vois me laisse coite. Caspian, entouré de Nikabrik, d'une harpie et d'un loup-garou, tendant la main vers un mur de glace. À l'intérieur, j'y aperçois le reflet de la Sorcière Blanche. Mon cœur tambourine dans ma poitrine. Je suis trop choquée par ce que je vois pour esquisser le moindre mouvement. Je ne m'aperçois qu'au dernier moment que le loup est en train de fondre sur moi, tel un monstre assoiffé de sang. Je me sens tirée en arrière et Edmund apparaît devant moi, menaçant la bête de son épée. Je reprends mes esprits et lève l'arme d'emprunt que je tiens entre les mains. Peter arrive à son tour, accompagné par Trompillon. Ils se précipitent sur les créatures de la Sorcière. Sans faire attention à ce qui se passe autour de moi, je traverse la salle en courant et, contournant la Table de Pierre, je me jette sur Caspian pour l'éloigner de Jadis, que je menace ensuite de mon propre chef. Elle esquisse un sourire narquois derrière la glace.
— Tiens, Abigail... Aurais-tu pris de l'assurance, depuis la dernière fois ?
— Taisez-vous. Je refuse d'écouter vos paroles, elles ne sont que poison.
La Sorcière éclate de rire. Je tente tant bien que mal de cacher ma peur face à cet ennemi que je croyais vaincu pour toujours.
— Tu es comme ta mère, crache-t-elle. Faible, et stupide. Tu ne mérites pas d'être Reine de Narnia.
Quelques larmes commencent à perler aux coins de mes yeux. J'abaisse doucement mon épée, mes mains tremblantes de colère.
— Vous mentez, je marmonne entre mes dents.
— Tu as peur, Abigail. Tu n'es pas à la hauteur... Si tu m'aides à sortir, je ferais en sorte que tu deviennes la Reine la plus respectée de Narnia.
Le brouillard qui embrumait mon esprit disparaît soudainement. Je reprends conscience et relève mon épée. La Sorcière a un mouvement de recul.
— Vous mentez ! je hurle. Le peuple de Narnia m'aime, et me respecte parce que je fais de même avec lui. Jamais je ne chercherais le pouvoir, ou la crainte de ceux qui m'entourent ! Jamais je ne serais comme vous !
La Sorcière, un air profondément surpris sur son visage blanc, n'a pas le temps de répliquer. Le mur de glace se met à craquer et, sous mes yeux ébahis, s'effondre, la faisant disparaître pour de bon. Je me sens tirée en arrière pour éviter les blocs de glace. Les mains de Peter restent sur mes épaules le temps que je reprenne ma respiration. À la place du mur de glace se trouve Edmund, son épée à la main. Je devine aisément qu'il est celui qui nous a tous sauvés. Sans hésiter une seconde, je me précipite vers lui et le prend dans mes bras, l'enlaçant de toutes mes forces. Il répond à mon étreinte de bon cœur.
— Merci infiniment, Ed, je lui souffle à l'oreille.
— Je t'en prie, répond-t-il simplement.
Quittant les bras d'Edmund, je jette un regard circulaire autour de moi. Le loup et la harpie sont allongés sur le sol, inanimés. Nikabrik aussi est mort. J'aperçois même Lucy, que je n'avais pas vu arriver.
Soudain, je croise les yeux sombres de Caspian. Il semble profondément choqué par ce qui vient de se passer. Je vois des traces de larmes sèches sur ses joues. Nous échangeons un regard qui veut tout dire. Notre frayeur, notre soulagement, notre culpabilité. La Sorcière pourrait-elle revenir ? Que va-t-il advenir, désormais ? Qu'allons-nous faire pour tenir toutes nos promesses ?...
J'hésite longuement à aller le serrer dans mes bras. J'y renonce finalement en décidant de lui laisser un peu d'air. Sans un mot, je quitte la salle en compagnie de Lucy. Je décide d'aller me passer un peu d'eau sur le visage. Les catastrophes s'enchaînent, et tout mes espoirs semblent s'être envolés. Je déteste cette sensation d'impuissance. Pour l'instant, aucune solution ne s'offre à nous. Et bien que je parcoure chaque recoin de ma tête, je ne parviens pas à en trouver une. Je me dois de le faire, pour Caspian. Je lui ai promis la lune, alors que je n'avais même pas une poussière d'étoile entre les mains. Et maintenant, je le regrette.
Après m'être rafraîchie à la source, je décide de retourner à mon isolement sur les remparts extérieurs. Je m'aperçois cependant en arrivant qu'il y a déjà quelqu'un. Je m'approche calmement et vais m'asseoir à côté de lui.
— Tu m'as piqué ma place, dis-je doucement.
Caspian lève ses yeux noirs vers moi.
— Tu t'es enfin décidée à revenir me parler ? me demande-t-il, l'air véritablement vexé.
— Je... Caspian, je suis désolée. J'avais besoin d'être seule, après ce qui s'est passé, et... j'ai supposé que toi aussi... J'imagine que j'avais tort.
— Pas entièrement, répond-t-il en haussant les épaules. J'avais juste besoin de ton soutien, étant donné que c'est le seul dont je dispose...
— Je suis sincèrement désolée... Je ne pensais pas à mal. Pardon si je t'ai blessé.
— N'en parlons plus. D'ailleurs... merci de m'avoir sauvé, tout à l'heure.
— Ne me remercie pas, j'assure en posant une main sur son épaule.
Caspian saisit ma main et serre mes doigts entre les siens.
— Dis-moi... Quand tu lui faisais face, la Sorcière a parlé de ta mère. Comment se fait-il qu'elle la connaisse ?
Je baisse la tête, prise au dépourvu.
— Quand j'ai rencontré Aslan pour la première fois, il m'a confié que ma mère était déjà venue ici quand elle avait mon âge.
— Et tu as suivi sa trace... Comment a-t-elle réagi, lorsqu'elle a appris que tu étais venue également ?
— Malheureusement, elle est morte il y a des années de ça. Je ne devais pas avoir plus de huit ans, mais je me rappelle encore très bien de son visage. C'était la plus belle femme que le monde ait connu. Elle avait de magnifiques cheveux noirs, toujours libres, et des yeux bleus à couper le souffle. Son sourire seul illuminait une pièce entière. Elle était belle parce qu'elle était heureuse. Et malgré sa maladie, elle parvenait toujours à penser aux autres avant de penser à elle.
((vous l'avez sûrement reconnue, c'est Evangeline Lilly hehe 💛 je l'ai choisi pour interpréter Grace tout simplement parce que j'adore cette actrice et qu'elle correspondait bien au rôle))
Penser à la mort de ma mère me rappelle également la perte récente de mon père. Je lève des heux larmoyants vers mon ami.
— Ils me manquent, tu sais, dis-je d'une voix brisée par l'émotion. Mes parents. Ils me manquent tous les jours.
Caspian, silencieux, m'entoure de ses bras et me serre contre lui en guise de réconfort.
— Je sais, murmure-t-il simplement.
En entendant ça, je ne peux m'empêcher de me trouver égoïste. En effet, lui aussi a perdu ses parents, et depuis plus longtemps que moi. Sans rien dire, je me blottis contre lui et sanglote doucement. Je me redresse après quelques longues minutes, essuyant mes larmes. Mes yeux rencontrent la forêt, où j'aperçois quelques silhouettes floues. Je fronce les sourcils.
— Aby, je... J'aimerais te dire quelque chose... commence Caspian d'une voix hésitante.
— Attends, je le coupe. Regarde.
Je désigne la forêt. Caspian suit la direction qu'indique ma main et se redresse d'un bond.
— Les Telmarins. Ils nous ont trouvés.
— C'est pas vrai ?!...
Caspian hoche la tête.
— Il faut prévenir les autres, dépêchons-nous !
j'espère que ce chapitre vous a plu ! n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé 💗 perso je l'aime bieeen hehe
je vous embrasse fort jusqu'à samedi prochain 😘
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