iii. Partie de cache-cache

    Les Pevensie sont arrivés depuis maintenant une semaine et je ne me suis pas ennuyée une seule seconde — la petite Lucy avait raison. Le courant est bien passé avec tous. Mon sentiment de solitude me quitte peu à peu, je le sens. Je me lève tous les jours avec le sourire, pressée de les retrouver.

   Ce matin, ils me retrouvent dans la bibliothèque. Je suis penchée sur Les Hauts de Hurlevent, d'Emily Brontë — mon roman favori. Je m'y suis réfugiée car il pleut. D'ordinaire, je lis dans le parc. Sans un mot, Susan et Edmund s'asseoient sur le sofa à côté de moi. Peter et Lucy préfèrent parcourir la pièce.

   — Qu'est-ce que l'on peut faire ? demande Lucy.

   — Il pleut, fait Peter. On ne peut pas jouer à l'extérieur.

   — Merci, on n'avait pas remarqué, lance Edmund, arrachant une grimace à Peter.

    Edmund lui tira la langue.

   — J'ai une idée, dit alors Susan. Je vais prendre ce dictionnaire, là, et chacun à votre tour vous essaierez de trouver la définition du mot que je vais vous dire.

   Edmund soupire bruyamment. J'avoue que l'idée ne m'emballe pas non plus, mais il n'y a rien d'autre à faire.

   Susan se lève donc pour aller chercher l'épais dictionnaire qui repose sur une des étagères et se rassieds à sa place.

   — Aby, tu commences ?

   — Si vous voulez...

   Elle ouvre le dictionnaire à la lettre A et cherche un mot des yeux.

   — Accastillage, lit-elle au bout de quelques secondes. Tu sais ce que c'est ?

   Je réfléchis quelques instants. Il me semblait l'avoir déjà vu dans un livre...

   — Ce n'est pas en rapport avec un bateau ? je demande.

   — Si, confirme Susan.

   — Il me semble que c'est l'ensemble des choses qui aident à manœuvrer le bateau, je ne me trompe pas ?

   — Non, répond-t-elle. C'est l'ensemble des superstructures d'un navire qui servent au réglage du gréement et à la manœuvre des voiles. Bravo !

   Je souris. Elle continue ensuite avec la lettre B, pour Lucy, puis C pour Peter, puis D pour Edmund et ainsi de suite... Lorsqu'elle a fini, elle recommence. Au bout d'un moment, nous sommes tous lassés. Edmund et Lucy ont arrêté de jouer et s'occupent autrement. Peter semble sur le point de s'endormir. Quant à moi, je reste passive et essaie de continuer.

   — Gastro... vasculaire, lit Susan.

   Peter prend un temps pour réfléchir.

   — Alors, Peter ? Gastro-vasculaire ?

   — Ça vient du latin ? demande Peter finalement.

   — Oui, acquiesce Susan.

   — En latin, ça ne voudrait pas dire "le jeu le plus bête du monde" ? intervient Edmund qui s'ennuie à mourir.

Susan lève les yeux au ciel.

   — Vous ne voulez pas qu'on joue à cache-cache ? propose Lucy.

   Je me redresse, soudainement intéressée. Il faut que je bouge, où alors je risque d'exploser.

   — Pourquoi on ne continuerait pas le jeu de Susan, on s'amuse tellement bien, ironise Peter.

   — S'il te plaît, Peter ! geint Lucy. S'il te plaît, s'il te plaît, s'il te plaît...

   Peter nous jette un regard circulaire. Je le supplie du regard d'accepter.

   — Et un... Deux... Trois...

   Lucy et moi bondissons instantanément. Susan pose son dictionnaire avec un léger soupir mais se lève aussi.

   — Tu es sérieux ? grogne Edmund en se mettant debout à son tour.

   Nous quittons tous les quatre la pièce et je pars sur la droite, cherchant une cachette adéquate. Je ne sais pas si c'est à cause de cette heure déprimante que je viens de passer, mais je me sens très enjouée à l'idée de jouer à cache-cache.

   Je parcours les pièces rapidement, ne m'attardant pour ne pas perdre de temps. Au final, je descends aux cuisines où travaille Margaret. C'est la meilleure cuisinière que je n'ai jamais vue.

   — Bonjour, Margaret ! je lance en entrant dans la pièce.

   — Bonjour, ma petite Aby. Tout se passe bien, avec tes nouveaux petits camarades ?

   — Très bien. Nous avons commencé une partie de cache-cache.

   — Faites attention de ne pas casser quelque chose, Madame Macready s'arracherait les cheveux...

   — Non, ne t'inquiète pas, nous faisons attention. Tu n'aurais pas une idée d'endroit où je pourrais me cacher, ici ?

   — Tu n'as qu'à te cacher dans le cellier. Si ils descendent ici, je dirais que je ne t'ai pas vu.

   — Merci, Margaret !

   J'entre dans le cellier. Il y fait très froid. Je prends alors mon mal en patience et attends. Au bout d'un certain moment, je commence à trembler de froid. Je ressors du cellier. Margaret est toujours là, s'affairant à la préparation du déjeuner.

   — Ils sont passés ici ? je lui demande.

   — Non, mais ça ne fait que cinq minutes que tu es là, tu sais.

   — Il fait extrêmement froid, là-dedans...

   Je m'approche de l'entrée de la cuisine et tends l'oreille. Peter a arrêté de compter.

   — Je vais essayer de trouver une autre cachette sans me faire repérer. Merci, Margaret.

   — D'accord. N'oubliez pas d'être à l'heure pour déjeuner.

   — Midi et demi pétantes, nous serons là.

   Je sors alors de la cuisine et remonte l'escalier discrètement. Je n'entends aucun bruit, à l'étage. Rien qui montre que quelqu'un a été trouvé, ou que Peter cherche toujours. Alors que j'avance dans les couloirs, j'entends quelques éclats de voix venant d'une pièce où je n'étais jamais entrée. Peter, Susan, Edmund et Lucy sont tous là, fouillant dans une grande armoire en bois verni, presque semblable à celle de ma chambre. Je me plante dans l'encadrement de la porte.

   — Que faites-vous là ? je demande, curieuse.

   Ils se retournent tous les quatre vers moi. Les trois aînés jette un regard vers Lucy.

   — La partie est finie, lâche Peter.

   — Qu'est-ce qu'il se passe ?

   — En me cachant dans l'armoire, j'ai découvert une forêt enneigée et il y avait un lampadaire et là, j'ai rencontré un faune qui s'appelait Monsieur Tumnus, il m'a emmené...

   — Oh, doucement Lucy... dis-je. Tu me dis qu'il y a une forêt dans l'armoire ?

   — Oui ! Il suffit d'entrer dedans et de traverser les manteaux qui s'y trouvent !

   — Tu m'expliques pourquoi nous n'avons rien trouvé, alors ? demande Peter.

   — Lucy, le seul bois ici c'est c'est celui du fond de l'armoire... renchérit Susan.

   — Un seul jeu à la fois, s'il te plaît, continue Peter. Tout le monde n'a pas autant d'imagination que toi.

   Les trois aînés Pevensie s'apprêtent à quitter la pièce.

   — Mais je n'invente rien ! tente Lucy.

   — Maintenant, ça suffit, sévit Susan.

   — Pourquoi est-ce que je mentirais ? demande la fillette d'une voix brisée par la tristesse.

   — Oh, intervient Edmund, moi je te crois !

   — C'est vrai ? demande Lucy.

   — Mais oui ! Je ne vous ai jamais parlé du terrain de football dans le placard de la salle-de-bain ?

   Je pince les lèvres.

   — Quand est-ce que tu arrêteras tes bêtises ?? questionne Peter, visiblement agacé. Tu te sens toujours obligé d'envenimer les choses, c'est ça ?

   — C'était pour rire ! se défendit  Edmund.

   — Il est temps de grandir, tu ne crois pas ? lui dit alors Peter.

   — La ferme ! crache Edmund, hors de ses gonds. Pour qui tu te prends ? Tu n'es pas mon père !

   Il sortit de la pièce en courant. Susan jette un regard courroucé à l'aîné de la fratrie.

   — Bravo, Peter, tu as tout gagné.

   Et elle part à son tour, pour tenter de consoler Edmund.

   — Je vous assure que je l'ai vu... reprend alors Lucy. C'était là, c'était réel...

   Peter se tourne vers elle, désolé de la tournure des événements.

   — C'est Susan qui a raison, Lucy, dit-il. Maintenant, ça suffit.

   Je le regarde partir tristement. Jamais je n'aurais cru que la situation se dégraderait si vite. Je rejoins Lucy qui ferme les grandes portes de la l'armoire.

   — Tu permets que je vérifie aussi ?

   Elle hausse les épaules. J'entre dans l'armoire et avance jusqu'au fond. Je ne rencontre qu'un panneau de bois. Je pose mes mains à plat et appuie dessus. Rien ne se passe. Je ressors de l'armoire. Lucy me regarde, pleine d'espoir.

   — Tu es sûre que ce n'est pas ton imagination qui t'a joué un tour ? Moi aussi, parfois, j'ai l'impression de voir des choses qui, en fait, n'existent pas...

   — Non, c'était bien réel !...

   Elle commence à me raconter ce qui s'est passé. Je l'écoute attentivement. Son histoire est remplie de détails qu'on aurait pas pris le temps d'ajouter si c'était un mensonge. C'est pourquoi j'ai un énorme doute sur sa crédibilité.

   — Le plus étrange, c'est lorsque je suis ressortie de l'armoire. J'ai passé au moins trois heures chez Monsieur Tumnus, et quand je suis revenue... c'était comme si tout était exactement comme au moment où je suis rentrée dans cette armoire. Comme si le temps s'était figé.

   — Je vois...

   — Alors... Tu me crois ?

   — Tu sais, j'ai toujours été une grande lectrice. Alors j'ai une très grande imagination. Mais, même une histoire comme ça, je n'aurais très certainement pas pu l'imaginer moi-même. Je te crois quand tu dis que tu ne mens pas, Lucy... Mais j'ai besoin d'une preuve. Tant que je n'aurais rien vu de moi-même, j'aurais toujours quelques hésitations, tu comprends ?

   Lucy hoche la tête.

   — Allez, ne pense plus à ce qu'ont dit tes frères et sœurs. Allons manger, c'est l'heure.

   Je la prends par la main et nous sortons de la pièce.

   — Comment tu as dit que ça s'appelait, là où tu es allée ? je lui demande sur le chemin.

   — Narnia. Cela s'appelle Narnia.

J'espère que ce chapitre vous a plu ! N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez 😊 vos avis importent vraiment pour le futur de cette histoire parce que je suis sûre de rien haha 😅

P-S : pour ceux que ça intéresse, j'ai commencé à poster une fanfiction sur Peter Parker, alias Spider-Man, et elle est vraiment importante pour moi alors n'hésitez pas à aller voir haha 💖

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