Chapitre XIII
Hello hello Loves ❤️❤️❤️❤️ comment ça va aujourd'hui ? Plus d'une semaine ! Vous m'avez tellement manque. J'ai été très occupée, mais voilà je vous laisse un nouveau chapitre assez long.
Bonne lecture!
Les phares du véhicule venaient de s’éteindre. La chaleur du moteur irradiait jusqu’au capot. Evan tardait à descendre, submergé par les doux souvenirs de sa soirée. Le ciel commençait à s’éclaircir et les oiseaux à se faire entendre.
Son regard se porta vers le sac à dos d’Amalia qui était à même le sol du côté passager.
En voulant le prendre, ses côtes lui rappelèrent qu’elles avaient reçu un coup violent il y a peu et qu’il n’avait pourtant pas hésité à faire des galipettes avec Amalia.
Il n’avait pas vraiment sentit la douleur sur le coup.
Grognant de douleur en se mouvant méticuleusement, il attrapa l’objet et au même rythme, prit ses clés et sortit de la voiture.
Après avoir refermé celle-ci, il gravit une à une les marchés qui menaient vers la maison.
Le vent frais lui caressait la peau en passant tel un souffle léger. Après avoir pénétré l’espace de vie éclairé par les faibles lueurs de l’aube, il monta les marchés vers l’étage plus lentement, la main posée sur ses côtes.
Il déposa le sac sur son lit et se traîna dans sa salle de bain pour prendre une douche rapide. Il appliqua délicatement du baume sur la partie endoloris de son corps.
Sa serviette blanche enroulée autour de la taille, il grimaça au contact de sa paume huileuse sur son flanc.
De sa main il massa la zone affectée, qui lui donnait l’impression d’avoir été blessé à l’intérieur.
La douleur n’était pas handicapante, mais très gênante.
Il s’essuya les mains sur sa serviette encore humide et s’assit sur son lit. Il n’hésita pas un instant à fouiller les affaires d’Amalia en sa possession. Il fallait qu’il sache, qu’il trouve quelque chose pour assouvir sa curiosité.
Pour essayer de découvrir qui était le père d’Amalia, que cachaient les peurs et les silences de cette dernière, pourquoi s’était-elle ouvert les veines ?
La question ne se posait même pas. Il déposa un lot de papier sur son lit et commença à les examiner.
Il y avait beaucoup de dessins. Des images de Juan, de lui, de la maison, de ses deux amies, d’une femme qui certainement était sa mère. Aucune image du père, mais une sur laquelle il y avait un visage masqué par l’obscurité, légèrement recouvert d’une cagoule dont on ne voyait que les yeux. Hormis le fait que ce regard sombre dégageait une haine palpable, il semblait familier à Evan.
Il avait beau le fixer et se concentrer, il n’arrivait pas à mettre un visage dessus.
Il prit des photos de chacune des images avec son appareil photo professionnel noir.
Elles étaient toutes très expressives et bien détaillées. Il fallait reconnaître que Amalia avait du talent.
Il se dirigea vers sa garde robe d’où il prit d’un tiroir un boxeur noir à la bande élastique grise, marquée d’écrits en noir.
Il l’enfila lentement pour éviter d’accentuer la douleur. Il prit ensuite le grand carnet sur lequel était marqué « Mi Estrella ».
Il sourit en voyant son écriture. En l’ouvrant, une feuille de papier en glissa. Il déposa le bloc-notes avant de se saisir du manuscrit. Il y avait une liste de villes marquées en bleu. Et comme titre, « liste de ville à visiter quand je serai libre ».
Dans cet océan bleu, un nom était encadré en rouge, c’était le mot « Catalogne ». Il venait après Madrid, Cabo et Isla Mujeres.
La liste était tellement longue. On aurait dit qu’elle voulait visiter la moitié de la planète. Le fait de voir sa ville démarquée des autres le fit sourire.
Au verso, de la feuille, elle avait noté « Les choses à faire ».
Il y avait marqué : Me baigner tout nue dans un cours d’eau naturel ( sauter du haut d’une falaise si possible), faire du karting, du saut à l’élastique, conduire à vive allure sur une route déserte, m’incruster à une fête sans être invitée, échapper à des agents de sécurité ( pour une raison que j’ignore encore),…
La liste était longue et tous les éléments qui la composaient étaient pour la plupart, ce que l’on pourrait qualifier de folies.
Evan ricanait au gré de sa lecture. Découvrir ses effets personnels était comme se rapprocher d’elle. Il se rendit compte à chaque ligne, qu’hormis le coup de foudre qui les avait rapprochés,il ne la connaissait pas vraiment.
En apprendre plus sur elle-même c’était de cette manière, créait en lui un sentiment de joie mêlé à de l’amusement. Le plaisir qu’il ressentait en parcourant ces révélations le tenait en éveil, avec l’appétit d’en apprendre plus.
Ce sentiment était doux et immersif, comme quand on lit un bon roman bien au chaud au fond de son canapé, devant une cheminée aux flammes crépitantes.
Après la liste des choses à faire, il reprit le carnet qu’il avait déposé plus tôt. Aux premières lignes, l’expression de son visage se changea. Ses yeux étaient légèrement humides. Ses sourcils relevés créaient quelques rides sur son front.
Le ton montait sur ses joues qui commençaient à s’empourprer. Il avait compris qu’elle parlait de lui. Elle remerciait son étoile qu’elle croyait éteinte, qui avait mis sur sa route une oasis dans son désert. Une personne qu’elle ne pouvait espérer alors qu’elle commençait à sombrer.
Il aurait préféré voir Evan à la place de Brandon. Ce seul détails le laissait envisager une possibilité de lui dire la vérité sur son identité. Il n’avait encore jamais fait face à ce genre de dilemme de toute sa vie de caméléon, car il avait toujours vécu ainsi, comme un caméléon changeant de couleur selon l’endroit où il se trouve. Pour se mettre en sécurité, mais aussi pour tromper la vigilance de sa proie, pour mieux l’engloutir.
Ça ne lui avait jamais posé problème jusque là, mais cette fois, il avait envie d’être lui-même. Il voulait être authentique avec elle, pour elle.
Il se pencha sur les textes d’Amalia jusqu’à environ sept heures du matin, avant de sombrer dans un sommeil paisible. Il avait apprécié chacune de ses phrases, chacun de ses paragraphes. Il en avait appris beaucoup sur elle. Ses confidences l'ont fait l'aimer encore plus et ont aiguisé son désir d'être près d'elle.
Des petits bruits sec provenant de sa fenêtre le réveillèrent en sursaut. D’un geste rapide, il se saisit de l’arme dans le tiroir du haut de sa commode, avant de revenir vers le bruit. Il souleva très lentement un coin du rideau avec le bout de son Glock.
Les muscles raidis par la tension, il focalisa toute son attention sur le bruit. Il travaillait à réguler les battements de son cœur, pour qu’ils se fassent plus lent. Une expression impassible figeait son visage, malgré les quelques gouttes de sueur qui perlaient sur ses tempes.
Il était prêt à l’assaut.
Le bruit redoubla d’intensité, en même temps que le bout de son arme finit par lui donner une visibilité optimale.
Il relâche ses épaules et la pression redescendit d’un cran. Il se trouva stupide de s’être autant alarmé pour deux pigeons qui s’amusaient à picorer la vitre de sa fenêtre.
Il s’adossa contre le mur en soufflant un bon coup.
Le mode de vie qu’ils menaient les rendait quelque peu paranoïaques. Ils se devaient de toujours être sur leurs gardes, car les vengeances et les trahisons n’étaient pas rares dans leur monde.
Il déposa son arme sur la commode et consulta son téléphone. Il y avait deux messages vocaux et un appel manqué d’Amalia.
Le premier message disait : « allô ! Tu es là ? ».
Le deuxième : « Rappelle-moi quand tu auras ce message. »
Ses yeux sur l’horloge de son appareil lui signifiaient qu’il était dix heures trente du matin. Il lança l’appel et elle répondit à la deuxième tonalité.
—Allo ? répondit-elle tout bas.
—Tu vas bien ? s'enquit-il. Pourquoi tu parles tout bas ?
—Je vais bien. C’est juste que mon père est à la maison. Il voulait vérifier que tout allait bien. C’est à croire qu’il a un sixième sens. Et toi ça va ? Tes côtes ?
—Je vais bien ne t’inquiètes pas. Tu me manques, dit-il dans un petit sourire qui se voulait joyeux.
Le simple fait de lui parler réveillait en lui une multitude d’émotions. Ses joues rougies pouvaient en témoigner.
—Tu me manques aussi. Je crois qu’on ne pourra pas se voir aujourd’hui. Il semble ne pas avoir l’intention de s’en aller.
Une douce voix masculine appelant Amalia se fit entendre. Ce n’était pas celle de Juan il en était certain, mais au ton autoritaire qu’il percevait, il déduit que c’était celle de son père.
—Je dois y aller, je t’appelle dès que j’ai un petit moment. Allez ! Je t’embrasse.
Evan n’eut pas le temps de répondre que la voix qui appelait sa bien-aimée semblait s’être rapprochée. Et cette dernière raccrocha aussitôt.
Après sa douche, il enfila un jean bleu ciel délavé avec un t-shirt orange sur lequel il était mentionné « California » dans un orange plus foncé. Sa montre grise à son poignet, une paire de lunettes noir enfoncée à l’encolure de son haut, des tennis blanches, et il était prêt pour sortir.
Son sac à dos gris trouva son épaule.
En sifflotant, il sortit de sa chambre après s’être parfumé. Descendant les marchés rapidement, sa course s’arrêta net quand il vit un chapeau de type western dépasser de l’un des fauteuils.
Il prit une arme sous un des sièges du bar et s’avança à pas de velours scrutant les environs. Il colla le canon de son pistolet sur le couvre-chef qui tomba à son contact.
Les yeux écarquillés, il reconnut la chevelure crépu poivre et sel de son père.
Il contourna le canapé pour lui faire face et le découvrit le regard perdu dans le vide. Evan était posté devant lui, mais il avait l’impression qu’il ne le voyait pas.
—Papa ? Tu vas bien ? s'enquit-il le cœur palpitant.
Aucune réponse l’homme était toujours absorbé par ses pensées. Inquiet, Evan lui tapota le bras de sa main devenue moite. Voir son père dans cet état le rendait anxieux. Il ne l’avait encore jamais vu comme ça.
Son geste eut le mérite de le ramener à lui. Il posa ses yeux sur son fils, comme s' il était surpris de le voir là.
—Ça va papa ? Qu’est-ce qu’il t’arrive ?
—Rien, fils. Rien. Ça va. Tu es là depuis longtemps ?
—Depuis un bon moment. J’ai pointé une arme sur toi, tu as perdu ton chapeau, je t’ai appelé et rien. Tu n’as pas réagi et tu me dis qu’il n’y a rien ? Et depuis quand tu portes ce genre de chapeau d’ailleurs ?
—Je vais bien. Je suis juste un peu préoccupé, dit-il en se levant pour rejoindre sa chambre.
Evan laissa tomber son sac sur la moquette et se mit à sa suite.
—Papa, tu m'inquiètes là ! Attends tu me fais quoi là ?
Il se retourna vers son fils un brin de tristesse sur le visage. Il semblait confus et fatigué.
—J’ai besoin de me reposer. On se parle plus tard, dit-il en reprenant sa marche.
Il s’enferma dans sa chambre, laissant en plan Evan devant la porte d’acacia.
Les sourcils relevés, puis froncés, il tentait de comprendre ce qui se passait.
—Tu es arrivé quand ? questionna-t-il après avoir frappé contre le bois.
—Hier soir, tu dois vraiment être plus attentif à ce qui se passe autour de toi.
—Tu es là depuis hier soir et tu n’as pas jugé utile de me le faire savoir ? T’as fait quoi tout ce temps ?
—Rien, maintenant j’aimerais me reposer.
—Toute la nuit ne t’as pas suffit ? En fait non. On le sait quand on voit tes yeux fatigués et rougis. Qu’est-ce qui t’arrive ?
—Laisse-moi me reposer gamin. Qu’est-ce que tu ne comprends pas dans : « j’ai besoin de repos ».
—Ils t’ont fait quoi là-bas ?
—Je ne vais pas me répéter Brandon.
Il savait qu’Evan n’aimait pas qu’on l’appelle ainsi et il l’avait fait sciemment.
—Tu sais que je vais finir par le savoir n’est-ce pas ?
—Pour une fois, mêle-toi de tes affaires.
—C’est ce que je vais faire le vieux. C’est ce que je vais faire.
Il partit de là remonté. Il détestait les prises de tête avec son père. Même si celle-ci n’était pas très grave, elle avait un goût amer cerné de mystères. Il désapprouvait qu’on lui cache volontairement les choses.
Quelques minutes plus tard, il était au volant de sa voiture, en route pour l’université.
Il avait réussi à convaincre Cody, un camarade en faculté de médecine, de l’aider à se procurer des téléphones jetables. Ce dernier les avait achetés et devait les lui remettre après les cours.
Après les avoir reçus, Evan ne tarda pas à repartir. Dans la cabine de son véhicule, il passa un coup de fil à Juan pour lui savoir s’ils pouvaient se voir. Ce dernier accepta et au bout d’une demie heure, ils se rencontrèrent dans un restaurant aux spécialités mexicaines.
Evan releva les yeux de son téléphone en voyant arriver Juan. Il portait une chemise blanche à manches courtes qui camouflait son ventre. Un pantalon jean bleu nuit avec une paire de chaussures en cuir noir. Il était l’homme typique mexicain. Teint hâlé, yeux et cheveux noirs.
Quand il arriva à la hauteur d’Evan, ses fossettes se creusèrent dans un sourire. Il tendit la main à celui qui l’avait invite.
Après cette brève salutation, il s’installa sur le siège libre à la gauche d’ Evan. Ce dernier héla le serveur en lui faisant un signe de la main, s’étant légèrement retourné pour attirer son attention. Le garçon lui fit un signe de la tête, ses mains portaient un plateau rempli de verres.
—Tu vas bien ? questionna Evan.
—Ouais et toi ça va ?
—Super.
Le serveur vint vers eux, tenant dans ses mains un carnet et un stylo.
—Eh Juan ! dit ce dernier avec un grand sourire.
—Danilo, mi amigo ! dit-il avec un sourire.
Ils joignirent leurs points dans une salutation.
—Vous vous connaissez ?
—Et comment ? C’est mon resto préféré. Je passe pratiquement ma vie ici.
—Qu’est-ce que tu prends aujourd’hui, dit-il en positionnant son bic sur le papier.
—Comme d’habitude et pour mon pote aussi. Tu devrais goûter ça Brandon. C’est exquis. Je pourrais vendre ma mère rien que pour une bouchée.
Evan écarquilla les yeux devant ce commentaire.
—Je rigole, renchérit Juan.
Danilo, amusé, porta son regard sur Evan pour connaître son choix.
—La même chose que lui, dit-il amusé.
Le garçon se retira pour se rendre aux cuisines.
—Comment va Amalia ? Elle m’a dit que son père était là.
—Ouais, soupira-t-il. Il est là, mais elle va bien. Il semble vouloir s’éterniser, il a emmené une valise.
—Oh !
—Ouais c’est chaud.
—Avant que je n’oublie, dit-il en ouvrant son sac à dos. Tiens remet lui ça.
—Un téléphone jetable ?
—Oui, on a décidé de faire plus attention.
—D’accord, dit-il en prenant l’objet.
Danilo revint plusieurs minutes avec leurs plats.
—Et voilà pour les messieurs.
—On va manger tout ça, s’étonna Evan.
Il n’avait pas fini sa phrase qu’un autre serveur vint déposer un autre plateau sur la table.
—Tu te fou de moi là?
—Pas du tout mon pote. J’appelle ça la sé.le.ction. Il y a un peu de tout. Tu vois, c’est plusieurs plats de chez-moi au Mexique. Tiens ! Goûte-moi ça, fit-il en lui présentant le plat qui contenait des Chilaquiles.
Je te promets que tu vas halluciner. Ces gens ont vraiment des mains en or.
Les serveurs de retirèrent, pendant que les deux jeunes hommes discutaient. Ils parlaient de tout et de rien. Juan racontait certaines anecdotes de son enfance. Il présentait à Evan des plats et leurs descriptions.
—Goûte-moi ça, dit-il en désignant un cocktail du doigt.
—Qu’est-ce que c’est ?
—Un Caldera señor, dit-il en ouvrant les bras de manière théâtrale, l’air joyeux.
La table était riche en couleurs et en arômes. Les saveurs épicées titillaient leurs papilles et les faisaient littéralement saliver. Les odeurs des plats se mêlaient et créaient avec la musique, une ambiance typiquement Mexicaine.
La mélodie dominée par les sons respectifs de bajo quinto, de bajo sexto et de marimba, faisait l’unanimité à la table voisine, éloignée de la leur de quelques mètres. Les jeunes gens hurlaient presque les paroles en cœur, sous l’effet de la Tequila.
Circulaires et grandes, les tables sur la terrasse pouvaient compter jusqu’à quinze places assises. Le béton qui les soutenait était incrusté à certains endroits de sable et de verdure.
—Alors ? Comment tu la trouves ? questionna Juan.
—Acidulée, répondit Evan en posant son verre.
—Quoi c’est tout ? dit-il en riant. Tu devrais en reprendre.
Un vent doux allait et venait. Il adoucissait le moment. Le soleil qui n'était plus à son Zénith, avait opté pour un orange séduisant, parsemant ses rayons aux mêmes teintes de part et d'autre des nuages.
Evan se sentait bien. Ça faisait longtemps qu’il n’avait pas passé des instants aussi décontracté avec un pote ou presque.
—Tout compte fait, il y a un léger goût de racine…
—Hum hum.
—Il y a aussi comme un goût de tomate.
—Tu es sur la bonne voie amigo. Continue comme ça.
Evan émit un rire joyeux devant l’expertise de Juan. Il était plus détendu et parvint à oublier un moment l’état dans lequel était son père et sa vie de caméléon. Sur le moment, il était juste un jeune homme qui passait un bon quart d’heure avec un pote et il aimait cette sensation. Il voulait inconsciemment que cela devienne sa réalité.
Il avaient entamé leurs repas depuis près d'une vingtaine de minutes déjà et Juan avait de l’avance sur lui.
Le visage de ce dernier luisait. Sa peau grasse expulsant l’excès de sébum. Il mangeait joyeusement sa nourriture.
—Si je t’ai demandé de venir, c’est pour te parler de quelque chose qui me tracasse.
—Je t’écoute!
—Tu as laissé entendre que ton oncle était violent. Est-ce qu’il la bat ?
Juan déglutit difficilement, avant de s’essuyer la bouche avec sa serviette en papier.
—Je ne peut pas en parler… elle va m’en vouloir…
—Je ne sais pas ce qui se passe, mais ça me semble grave. Elle a des traces sur ses poignets, dit-il le regard inquiet en se penchant vers son interlocuteur. Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Elle s’est ouvert les veines ? Réponds-moi Juan, insista-t-il face au silence de celui-ci.
Le jeune Mexicain soupira et se laissa tomber sur le dossier de sa chaise.
Rares étaient les sujets ou les évènements qui pouvaient lui couper l’appétit. Son regard s’assombrit quelque peu. Il expira bruyamment avant d’articuler :
—Brandon…il vaudrait mieux ne pas en parler.
—Pourquoi ? S’enquit ce dernier, les traits déformés d’appréhension. Pourquoi ? Je veux pouvoir l’aider. Mais je ne peux rien faire si je ne sais rien.
—Tu ne pourras rien de toute façon.
—Tout seul peut-être pas, mais si on travaille ensemble on pourra.
—Tu ne sais pas qui est cet homme.
—Justement dis-le moi pour que je sache. Ça ne te fais rien de la voir souffrir comme ça ?
—Comment veux-tu que ça ne me fasse rien ! Amalia c’est ma sœur, c’est mon sang. Tu crois que je n’ai pas essayé ? Il a toujours une longueur d’avance et sait se faire craindre, dit-il indigné.
Je me demande comment on peut faire ça à sa propre chair, dit-il le visage emprunt de colère.
—Comment on peut faire quoi Juan ?
Il voyait bien que son interlocuteur hésitait, mais il n’avait pas l’intention de lâcher l’affaire.
—Je veux vous aider, il suffit que je sache comment. J’aime ta sœur Juan et crois-moi avec ou sans ton aide, je vais la sortir de là.
Juan soupira, toujours adossé à son siège.
—Quand son père a rencontré la sœur de ma mère, ils étaient tous jeunes. Ils ne se quittaient pas. Il l’aimait… il l’aime toujours. Mais à un certain moment, il a commencé à la voir en cachette. Tous le monde pensait qu’il n’étaient plus ensemble. Il est devenu un peu paranoïaque. Il se cachait de je ne sais qui ou de je ne sais quoi. Ça s’est empiré quand il a appris qu’elle était enceinte. Il l’a carrément caché tout le temps de sa grossesse.
Trois mois après l'accouchement, il l’a laissé appeler ma mère. Elle était très émue. Je me souviens qu’elle pleurait. J’avais cinq ans à l’époque. Je me rappelle qu’on a fait nos valises rapidement et l’après midi on était dans un avion pour les rejoindre. Les retrouvailles étaient très émouvantes.
Ma tante Alandra m’a présenté ma cousine. Elle tenait sa petite main dans la sienne, dit-il avec un sourire nostalgique. J’étais heureux.
J’étais un grand frère, j’avais l’impression d’être un super héros. Je ne voulais plus la quitter. Quelques temps après on est rentré à Mexico. Nous les avons laissé à Montréal, mais on allait souvent leur rendre visite.
Une fois, alors qu’on était chez ma tante, ma mère m’a demandé de regarder les fleurs et de chanter Estrellita donde estas en me bouchant les oreilles.
Elle a fait une scène à mon oncle comme elle sait bien le faire, un vrai ouragan. Il a fini par lui expliquer pourquoi il agissait ainsi.
Le calme qui a suivi m’a fait me retourner. Je serrais señor bigote contre moi par le bras droit. C’était mon doudou, dit-il avec un sourire triste.
Il marqua une petite pause durant laquelle les yeux d’Evan ne le quittèrent pas.
—Mon cœur avait bondit dans ma poitrine, reprit-il. Ma mère était dévastée. Des larmes silencieuses lui coulaient. Son visage était marqué d’effroi, confia-t-il avec les poils qui se hérissaient, comme s’il revivait la scène.
Il avait froid dans le dos et les battements de son cœur avaient légèrement accélérés. Cette scène l’avait marqué et faisait partie des choses qu’il aimerait oublier, mais il poursuivit.
—J’ai couru vers elle en pleurant. Elle a demandé à ma tante de venir avec nous, mais cette dernière a refusé. Elle lui a crié dessus, l’a supplié, l’a même traîner de force, mais rien n'y a fait. Elle voulait rester avec lui et nous a demandé de rentrer à Mexico.
On est parti le cœur gros. Le jour même. Ma mère ne m’a jamais rien expliqué. Jusqu’à aujourd’hui. Elle n’en parle pas, elle m’a juste dit de faire attention à mon oncle, que c’était quelqu’un de dangereux.
—Qu’est-ce qu’il s’est passé ensuite ? questionna Evan.
—On a plus eu des nouvelles d’elles pendant un long moment. C’était une vraie torture pour ma mère. Elle priait tous les jours pour elles. Et quand je lui demandais pourquoi elle ne priait pas pour mon oncle, elle disait que c’était inutile de prier pour quelqu’un qui avait vendu son âme au diable.
—Qu’est-ce qu’elle voulait dire par là ?
—Je ne pas exactement. Mais je l’ai toujours soupçonner de tremper dans des histoires louches.
Quand Amalia a eu cinq ans, ma tante et elle sont venus s’installer à Mexico. Dans une forteresse, une vraie prison dorée. Elles venaient nous rendre visite et on allait rarement les voir.
Amalia a toujours eu du génie pour fuguer. Elle a commencé à sept ans. Elle allait observer les élèves de l’école publique. Elle rêvait d’y aller et elle s’est même fait un ami là-bas. Il n’étudiait pas là, c’était un vendeur de Tacos ambulant . Il s'appelait… elle me chantait des louanges de ce…Tulio. Il s’appelait Tulio. Elle voulait se marier avec lui et ouvrir un restaurant de Tacos.
Evan émit un petit rire et fut rejoint par Juan.
Quand mon oncle a appris qu’elle sortait de sa forteresse, il l’a battu pour qu’elle comprenne qu’il ne fallait pas qu’elle retente cette folie. Elle en est ressorti avec une côtés cassée. Il a fait venir une équipe de médecin pour la soigner, parce qu'il ne voulait pas l'emmener à l'hôpital. Elle avait des bleus partout. Sa mère a détesté son père pour ça et ne lui a pas adressé la parole pendant des mois. Mais plus tard, ils ont fait la paix et il s’est excusé auprès d’elles.
Son obsession pour la sécurité le rendait de plus en plus violent. Il arrivait difficilement à se contrôler. Amalia se sentait mal aimée, elle avait l’impression d’être une enfant non désirée. Il l'enferma plusieurs jours pour qu’elle comprenne qu’il ne fallait pas désobéir.
Elle s’est calmée et a repris des forces. Elle n’avait plus fugué jusqu’à ses douze ans. Elle est allée à un concert et s’est fait surprendre par un des gardes du corps. Son père l’a appris et la roué de coups jusqu’à ce qu’elle en perde connaissance. Il s’était enfermé dans une pièce avec elle et pour la secourir, ils ont dû casser la porte.
Le visage d’Evan exprimait de la colère. Son sang bouillait dans ses veines. Il avait de la haine. Il se contenait pour ne pas laisser exploser sa colère.
—En revenant à elle, elle ne parvenait pas à bouger tellement elle avait mal. Elle était en pleurs. Elle ne pouvait pas manger, alors on lui a mis une sonde pour l'alimenter.
Quand ma mère l’a appris, on est allé la voir, mais les gardes ne nous ont pas laissé entrer.
Deux semaines après, sa mère appelait la mienne en larmes. Dans un moment d’inattention, Amalia avait brisé un miroir et s’était ouvert les veines. Elle voulait juste partir et moi ça m’a brisé.
Heureusement on a pu la sauver à temps. J’ai demandé à ma mère de me laisser rester avec elle et c’est à partir de là qu'on ne s’est plus quittés. Elle avait une très faible estime d’elle et avait toujours tendance à se faire du mal.
Ils lui ont pris un psychologue et des chirurgiens esthétiques pour réparer ce que son père avait détruit.
Ensemble on a développé plusieurs techniques pour sortir et comme j’avais la permission d’inviter des potes, on avait un semblant de vie sociale.
Ma tante est restée à Mexico et on dû venir ici pour des raisons de « sécurité.»
Parfois j’ai l’impression que l’existence d’Amalia rend son père nerveux. C’est comme s’il fallait qu’il prenne plus de précautions avec elle.
Il n’a jamais fait preuve de violence envers ma tante.
—Comment il s’appelle ?
—Il se fait appeler Michael Douglas, mais apparemment ce n’est qu’un pseudo.
Pour signer des documents importants, il utilise les initiales D.S.
—Tu ne sais rien d’autre sur lui ? Où il travaille, s’il fait des affaires ? Quels endroits il fréquente ? Qui sont ses amis ou ses partenaires ?
—Je ne sais pas grand-chose sur lui, mais il y a peut-être des informations sur lui dans ses affaires.
—Il a des affaires chez vous ?
—Oui, il a une chambre et un bureau.
—Il va falloir qu’on les fouilles. Il y a des caméras de surveillance ?
—Pas que je sache.
—Quand il sera parti, je viendrai et on fera ce qu’il faut.
—Il faut qu’on soit prudent. Surtout toi. S’il le découvre… je crois que c’est quelqu’un qui n'hésiterait pas à tuer une personne qui le gêne.
—Je vais faire gaffe, dit Evan en prenant son verre.
Il but une gorgée et commençait déjà à cogiter. L’air semblait s’être allégé. Ils reprirent timidement leur repas, mais au bout d’une trentaine de minutes, Juan fit tout emballer pour emporter chez lui. Il ne laissa rien à Evan qui se moquait de sa gourmandise. Evan fit envoyer de la glace à Amalia avant de prendre la route pour rentrer chez lui.
Il fit une marche arrière, puis braqua le volant vers la droite pour imposer sa direction au véhicule.
Le récit de Juan l’avait secoué, il se sentait mal pour elle. Il avait l’impression d’avoir été poignardé en plein cœur.
Imaginer ce qu’elle a pu vivre et ressentir l’horrifiait, mais pas plus que le fait qu’un père puisse infliger de telles atrocités à son enfant. Ça lui donnait envie de vomir, de crier, mais aussi de faire subir à cet homme la plus horrible des morts qu’il soit.
Deux situations l’inquiétait, celle d’Amalia, mais aussi celle de son père qui était revenu étrange de son voyage. Il fallait qu’il trouve des réponses à ses questions et il savait déjà par où commencer.
Voilà voilà. J'espère que ça vous a plus.
Votre avis est très important pour moi n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé.
Je vous dit à très vite Loves. Prenez soins de vous. Merci encore de m'avoir lu. Je vous envoie pleins de bisous 😘😘😘😘😘
Xoxo Loves ❤️❤️❤️❤️
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