Seren l'attendait appuyée contre la petite barrière fleurie à côté de l'embarcadère. Il avait pris du retard en passant dans sa chambre à la caserne pour se changer puis en tentant de se frayer un passage dans la foule pour la rejoindre. La musique des tambours et des flûtes qui précédaient la procession royale se rapprochait.

Il l'embrassa avec fougue ses mains caressant ses fesses nues à travers le fin tissu bleu, robe qu'il lui avait enlevée la première fois qu'ils avaient fait l'amour. Elle répondit à son baiser avec une passion égale à la sienne les bras autour de sa nuque en sentant le corps chaud et le désir brûlant de son amant. Il se détacha de ses lèvres puis lui murmura à l'oreille de sa voix profonde:

-Nous pourrions rentrer à...(il écarquilla les yeux).

La chèvre pie lui souriait largement découvrant ses dents jaunes une touffe d'herbe lui pendant au coin de la bouche, une barbichette de long poil bruns flottant au vent. De petites cornes se dressaient fièrement entre ses jolies oreilles marrons et blanches qui s'agitaient gaiement. Il jeta prudemment un coup d'œil derrière l'épaule de la jeune femme. Une queue blanche à la pointe brune frétillait à toute allure. Il recula toute envie de faire l'amour l'ayant déserté.

-Qu'est-ce qui se passe? demanda Seren en le regardant avec surprise.

Il se plaqua une main sur le visage qu'il laissa glisser lentement son teint se colorant peu à peu.

-Je vais tuer Baelag! jura Kian furieux.

-Quoi? s'étonna Seren.

-Ce connard m'a donné des champignons hallucinogènes et de l'absinthe! brailla le guerrier blond sa voix couverte par le son des tambours, des flûtes et des chants, un sourire se dessinant lentement sur le visage de la jeune femme.

-Toute la nuit j'ai eu des hallucinations plus bizarroïdes les unes que les autres! expliqua-t-il furieux tandis que Seren reniflait ses yeux saphirs tourneboulant.

-Ton oncle, lança-t-il indigné, m'a clairement traité de cruche quand je me suis étalé en sortant du bain parce que je voulais voir les papillons qui jouaient à la balle!

Elle éclata de rire en se blotissant contre lui.

-Et Pétoche? demanda-t-elle les yeux brillants relevé vers lui.

-Finn est reparti ce matin le panier à pain sous le bras avec un Pétoche qui cuvait sa bière, raconta-t-il avec un large sourire un bras autour de sa taille.

Ils s'esclafférent en se dirigeant vers le temple. Devant la foule de gens richement habillé pour l'occasion, un cordon de soldat vêtu de bleu ciel armé de lance se tenait au bord du chemin pavé qui finissait en un grand arc de cercle à l'entrée du temple de Poséidon. Kian l'entraîna derrière lui à la recherche d'une place.

-Kini! appela un soldat en lui faisant signe de venir.

Kian répondit d'un signe de la main. Les gens qui s'étaient retourné en entendant l'appel leurs ouvrir gracieusement un passage jusqu'au premier rang. Il serra l'avant-bras du soldat brun au nez cassé puis le présenta à Seren.

-Voici Einri un des capitaines des gardes de la ville, Einri voici Seren ma compagne.

-Enchantée, dit-elle avec un petit sourire.

-Ah c'est donc toi! s'exclama-t-il en lui prenant la main une lueur admirative dans le regard tandis que Kian riait en hochant la tête. Je voulais depuis longtemps te remercier du service que tu nous a rendu en nous débarrassant de Braen.

-Tout le plaisir est pour moi, répondit-elle malicieusement son amant rougissant légèrement.

Einri s'esclaffa.

-Elle est belle et pleine d'humour, tu n'aurais pas pu mieux tomber. J'aurais fait pareil.

Kian ses yeux bleu foncé brillants de fierté enlaça tendrement Seren. Ce fut au tour de la jeune femme de rougir.

-Je vois que tu n'es pas de service? constata le guerrier brun en voyant la chemise gris-bleutée de Kian.

-Nous sommes rentrés de mission il y a quelques jours, expliqua le nouveau capitaine en grimaçant.

Ils discutèrent à voix basse tandis que les musiciens vêtu de jaune prenaient place sur deux rangs à l'entrée du temple. Les danseuses du temple de Scathach habillées d'une robe vaporeuse blanche faisaient leur entrée. Elles étaient très belles, finement maquillées, leurs cheveux noué en chignon flou un fleur rouge plantée dedans. Elles étaient pieds nus, les ongles écarlates, un fin bracelet d'or à la cheville et aux poignets. Leurs corps souples évoluaient avec grâce et sensualité faisant l'admiration du public. Kian indifférent chuchotait en caressant le dos de sa compagne. Les vingt danseuses se placèrent devant les musiciens. Le battement d'un tambour résonna annonçant l'entrée des couples royaux.

Six soldats transpirant vêtu d'or et de rouge portaient une lance dorée précédaient les couples royaux. Einri ricana ouvertement, personne de ses collègues ne réagit, eux non plus ne les appréciaient pas. C'était une partie des "chiens de gardes" personnel de Serbet. Le guerrier brun s'était plus d'une fois confronté à eux et avait supporté leur mépris tandis qu'il se battait pour sa petite garnison et ses hommes.

Serbet allait devant sur son char tiré par deux étalons blancs. Il était somptueusement vêtu d'or et de rouge une cape d'hermine recouvrant ses épaules maigres. Il était filiforme ses rares cheveux bruns étaient soigneusement coiffé en arrière une lourde couronne posée sur son front mais ses petits yeux noirs et chafouins observait attentivement la foule qui avait mis le genou à terre. Caelan l'accompagnait superbe couleur du blé regardant devant elle.

Eamon et Moïra du Territoire du Cheval venaient derrière suivit d'Amaethon et d'Eilwen. Thurel et son épouse Olwen du Territoire du Chien, le Territoire du Cygne était représenté par Meallán et Thiten, celui du Serpent par Maav et Alawn, Gawain et Riwanon pour le Territoire du Taureau, enfin venait Riagal et Dron pour le Territoire de l'Ours. Ils se déployèrent en arc de cercle devant l'entrée du temple puis déscendirent de leur char doré décoré de spirales.

Les habitants qui avaient suivit la procession entouraient à présent les rois protégé par les soldats. Des palefreniers vinrent prendre les chevaux et les menèrent en file en direction du palais. Un ritualiste d'Ogma habillé de blanc s'avança et s'inclina profondément devant les couples royaux puis entama un discour devant la population réunie en rappelant l'importance de cette journée où les rois des territoires se réunissaient pour prendres les décisions concernant la bonne marche du continent.

Kian qui écoutait le discours ricana en lui-même, il savait que les ennuis ne faisaient que commencer. Il sentit la main de Seren se resserrer sur la sienne. Il l'embrassa sur la tempe. Le soleil s'était changé en plomb au fur et à mesure que la lecture avançait, les habitants ruisselaient de sueur. Un vent chaud s'était levé amenant avec lui du sable fin qui piquait les yeux et salissait les vêtements.

Quand le soleil atteignit son zénith, un chant envoûtant s'éleva venant des servantes de Scathach accompagné par les musiciens. Les portes s'ouvrirent . Huit fillettes blonde vêtue d'or une couronne de fleurs d'oranger sur la tête s'avançait d'un pas aérien précédent le taureau tenu par un licol d'or par deux autres ritualistes. Le taureau était noir, majestueux, autour de son cou un collier de fleurs multicolores. Sur son large dos une couverture blanche à la bordure dorée ses longues cornes et ses sabots avait été teinté d'or.

Le taureau fut amené face aux couples royaux qui s'inclinèrent devant lui.

Mais l'animal était nerveux. Ses yeux étaient bordé de rouge il balançait la tête en meuglant, les ritualiste avaient du mal à le tenir malgré la drogue qu'ils lui avaient donnée pour qu'il reste calme. Une coulée infect jaillit de ses entrailles éclaboussant sa couverture. Il tapait du sabot et bousculait les hommes qui furent rejoint par deux aides pour le retenir. Les gens commençaient à murmurer entre eux. Serbet lança un regard noir au premier ritualiste son visage acétique figé dans une grimace de dégoût. Il lui fit signe d'un geste sec de poursuivre la cérémonie sans traîner. Le ritualiste tremblant acquiesça. Le taureau meugla à nouveau du sang s'écoulant du coin de ses yeux comme des larmes.

-Qu'est-ce qui se passe? grommela Einri à voix basse en voyant le sable tourbilloner autour de l'animal apeuré qui beuglait de plus belle.

Ida le ritualiste se frotta les yeux la peur au ventre, rien ne se déroulait comme prévu. Depuis hier ils n'avaient eu que des problèmes pour préparer la cérémonie, dont le plus grave avait été la mort d'un de ses collègues qui s'était fait encorné par l'animal furieux. Transpirant, il éleva la voix pour inviter la population à rendre hommage à Poséidon en lui sacrifiant le taureau mais en voyant les gens qui se tournait à demi pour échapper au sable et qui visiblement ne l'entendait pas, il laissa tomber. Il savait qu'il n'échapperait pas au courroux du Grand Roi, mais le pire, c'était ce que laissait présager ses incidents. Au fond de lui, il craignait que Poséidon ne se soit détourné de son peuple. Sa peur redoubla quand il vit les couples royaux garder un visage de marbre eux aussi conscient de l'avenir sombre qui les attendaient.

-Aucune idée, avoua Kian en plissant les yeux, c'est la première fois que je vois ça.

Le premier ritualiste força le taureau hurlant à se coucher en lui frappant les pattes avant avec une baguette de bois. Beaucoup se bouchèrent les oreilles. Pour mettre fin à cette torture sonore, Ida trancha la gorge du taureau qui émettait des atroces couinements de goret qui résonnaient dans tout l'espace son corps massif pris de convulsions. Un aide tomba le genou brisé par un coup de sabot dans un horrible craquement ses cris de douleurs se mêlant à ceux de l'animal agonisant. Seren vit Kian blême se passer nerveusement la langue sur ses lèvres, tandis que les ritualistes se précipitèrent pour entraîner le jeune homme à l'écart de la foule horrifiée.
Puis il s'immobilisa. Le sang de l'animal coulait lentement noir et grumeleux dégageant une odeur de poisson avarié en même temps qu'il se relâchait dans une puanteur abominable.

La foule recula. La terre se mit à trembler produisant un inquiétant grondement souterrain. Des pleurs, des cris. Caelan croisa le regard de Seren une lueur amusée dans les yeux en secouant la tête ses épaules tressautants. Seren se rendit compte qu'elle riait. Elle recula sa main refermée sur le petit taureau d'ambre parcourue d'un frisson de terreur tandis que la plupart des gens fuyaient de tout côté. Le grondement s'accentua la terre trembla plus fort. Le paysage se brouilla devant elle.

Camul drapé dans sa cape jaune se tenait à leurs côtés sa lance à la main. Il lui fit un petit signe de tête de côté. Elle entendait Kian l'appeler de loin.

Une vision l'envahit.

Kian nu se trouvait avec un taureau brun qu'il caressait d'une main couverte de sang entouré de ses guerriers. L'animal aux yeux doux était couché sur le sol, libre de toutes entraves et frottait affectueusement sa tête contre l'épaule du guerrier. Le sang giclait écarlate, son amant pleurait la mort du taureau la tête de l'animal sur ses cuisses.

Elle vit l'expression inquiète de Kian qui la regardait en l'appelant. Elle reprit ses esprits. La terre ne tremblait plus et l'air frais embaumait les fleurs de pommiers. Amaethon et Eilwen rentraient derrière leurs homologues dans le temple qui se referma sur eux. Le taureau avait été évacué, la place était déserte en dehors d'eux et des soldats armés de seau d'eau pour dilué le sang figé sur les pavés.

-Allons-nous en, dit Kian en la prenant par la main.