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Beaucoup de soldats étaient ivres, il avait fallu en séparer deux qui buvaient maintenant ensemble bras-dessus bras-dessous renouvelant leur serment d'amitié à grand renforts de bières l'un avec le nez en sang l'autre avec un œil poché. Un autre pleurait sur l'épaule d'un camarade pris de fou rire qui le consolait en lui tapotant le dos. Pétoche léchait consciencieusement un bout de fromage abandonné sur une assiette gratouillé par Aalana assise à côté qui riait avec un des officiers.

-Cadog a accepté de prendre Brigh avec lui, l'informa Cynfarch en le rejoignant. Il la gardera à l'œil.

Une douce brise s'était levée portant avec elle le parfum des fleurs du jardin.

-Nous avons eu une relation compliquée par le passé, avoua Kian en se passant une main dans les cheveux. Elle est venue me voir ce matin.

-Ah d'où le trou dans les fesses de Camul, en déduisit le commandant d'un ton amusé en buvant une gorgée de vin.

Le guerrier blond acquiesça les yeux baissés.

-Pourquoi l'avoir acceptée à nouveau chez nous? questionna Kian à voix basse en se demandant si Cynfarch allait lui répondre. Vous savez bien que si elle pointe le bout de son nez en dehors de la capitale elle sera mise à mort par le premier soldat qui la reconnaîtra et si quelqu'un apprend qu'on lui a redonné sa place ici, les guerriers des autres territoires se ligueront contre nous.

-Heureusement l'affaire ne s'est pas trop ébruitée, soupira Cynfarch en posant son verre vide sur un tabouret abandonné, mais nous ne pouvons pas nous permettre de la laisser filer il y a trop en jeu.

Kian compris qu'on lui avait mis la pression pour qu'il la réintégre dans la cavalerie.

-Pourquoi n'a-t-elle pas été condamnée? demanda le guerrier blond sachant qu'il frôlait dangereusement la ligne rouge.

Cynfarch le regarda longuement.

-Tout ce que je sais, c'est qu'elle a conclu un accord, lâcha le commandant d'une voix si basse que Kian dut tendre l'oreille. On m'a bien fait comprendre que si je cherchais à en savoir plus, ma peau ne vaudrait pas chère.

Le guerrier blond hocha légèrement la tête.

-Elle m'a remis ça pour toi, dit Cynfarch avec un avertissement dans la voix en lui tendant une languette de bronze gravée de la Wuivre les deux serpents entrelacés.

Kian savait ce que c'était, sans pouvoir deviner ce que cela cachait, mais il savait aussi que le moment n'était pas encore venu. S'il hésitait à la prendre c'était pour ce qu'il représentait. La marque sur sa clavicule le brûla, il entendit le taureau mugir dans son esprit, Camul se rappelait à son souvenir, il n'avait pas le choix. Il prit la languette.

-J'espère que tu sais ce que tu fais, grommela le commandant.

-J'ignore ce que c'est exactement, admit-il. Je ne fais que suivre la volonté de Camul.

-Qu'il te guide au mieux, s'inclina Cynfarch en lui serrant l'épaule.

*******

-Elle me manque, avoua Kian à voix basse en se retournant, tu l'as vue?

Owain poussa un soupir résigné en émergeant de l'ombre pour le rejoindre tandis que Pétoche avait la tête plongée dans le verre de Peadar qui discutait avec Dilwen.

-Elle te retrouvera près de l'embarcadère du temple de Poséidon pour la procession, l'informa-t-il. Pour ce soir, elle a entraîné les filles avec Téa et Linaëlle en ville parce que m'a-t-elle dit qu'il n'y avait pas de raison pour qu'elles ne profitent pas de la fête en nous attendant.

Kian esquissa un sourire. Taureia commençait le soir avant et se terminait une fois les décisions des couples royaux rendus le surlendemain. Owain grimaça. Le guerrier blond haussa un sourcil en buvant une gorgée de bière.

-Elle m'a aussi demandé de te transmettre tout son amour, grommela-t-il.

Le visage de Kian s'éclaira.

-Merci, lui dit-il en lui serrant l'épaule.

Peadar poussa un cri indigné quand il découvrit Pétoche coincé dans son verre. Les éclats de rires fusèrent. L'écureuil affolé moulina des pattes pour se sortir de là. Le verre se fracassa sur la table. Il déguerpit en titubant les poils de sa tête hérissés comme ceux d'un porc-épic. Idriel essaya de récupérer dans ses mains l'animal saoul mais Pétoche qui devait voir double fit un pas de travers et passa entre. Il tourneboula jusqu'aux pieds de Kian.

-Pétoche? appela le guerrier blond inquiet en se penchant pour le ramasser.

-Il est vivant? demanda Idriel.

L'écureuil se redressa, sa tête se balançant de droite à gauche ses chaleureux yeux brun essayant de faire le point.

-Ça à l'air, répondit Kian en soutenant l'écureuil qui grimpait maladroitement sur son épaule.

-Il a sifflé la moitié de ma bière! s'écria le vieux guerrier.

-Il avait soif, se moqua Owain de sa voix rauque. Si tu passais moins de temps à faire du charme à ces jeunes femmes tu l'aurais déjà finie.

-Il n'a pas tort, approuva Mabon en lui donnant un nouveau verre un large sourire aux lèvres. La dernière fois que tu as discuté avec une femme, pas aussi jolie bien sûr, (il adressa un clin d'œil à Dilwen qui leva les yeux au ciel en secouant la tête tout en rougissant légèrement), tu y as laissé ton souper.

Peadar répliqua. Ils ne tardèrent pas à se chamailler sous les rires des guerriers qui en rajoutaient des couches.

-C'est la première fois que je vois un écureuil ivre, avoua Kian en riant tout en gratouillant la tête collante de Pétoche qui ronflait dans son oreille sa queue autour de son cou.

-Il fallait bien qu'il fête sa venue chez nous, souria Owain, au moins il boit comme un soldat pas comme une chiffe molle!

Le guerrier blond hocha la tête secoué d'un petit rire. Il déposa délicatement l'écureuil dans un petit panier de pain vide. Owain glissa un doigt sous le médaillon pour l'observer de plus près. Le continent de l'Atlantide était gravé sur le métal avec le contour des dix royaumes tels qu'ils étaient à l'origine. le Territoire Perdu n'y était pas présent car les terres avaient été prises au territoire de Macha, celui de Belisama et une petite partie à celle du dieu Herne. Le taureau était posté en son centre tenant le soleil entre ses cornes des vaguelettes sous ses sabots antérieures dans la partie du territoire des chiens.

-Tu as pu parler avec Finn et Cynfarch? demanda Kian appuyé contre la table en buvant sa bière brune.

-Pas encore, répondit-il en se redressant. Nous sommes arrivés hier soir tard. Avec les morts, les blessés, les rapports revenus d'Ilyn nous avons pris du retard.

Il eut un geste tranquille de la main pour l'empêcher de le couper quand il le vit ouvrir la bouche. Kian toucha son front de deux doigts en inclinant légèrement la tête. Owain restait son supérieur hiérarchique.

-C'est bon Kini dorénavant nous allons nous en passer. (Ses yeux saphir pétillèrent en voyant l'air surpris du guerrier). Quant au reste, ajouta-t-il de sa voix rauque, nous avons tenu notre serment de soldat en répondant à la demande d'une personne qui n'avait pas les compétences nécessaires pour agir et appliqué la loi de Poséidon: "s'apporter une aide mutuelle entre les dix royaumes".

-Bien sûr, répondit le nouveau capitaine la gorge sèche.

Un doux chant résonnait dans le jardin.

-Au moment où nous sortions du domaine, raconta Owain, nous avons croisé Cuill qui revenait du Territoire du Corbeau. (Il déglutit). Les nouvelles ne sont pas bonnes.

-C'est à dire? questionna Kian en sentant sa nuque le picoter.

-Une partie du territoire à la pointe nord est devenue totalement inaccessible pour des raisons qui restes obscures. Abyssa la capitale est bouclée, le roi Brychan s'est fait excuser, il ne sera pas présent à Atlantis ce dont Serbet se fout apparemment.

-Et Liadan, sa reine? demanda lentement Kian.

Il avait eut l'occasion de la croiser une fois et en gardait un bon souvenir.

-Aucune idée, répondit le vieux guerrier dans un souffle.

-Qu'a-t-il découvert d'autre? insista Kian inquiet.

-Nous n'avons rien pu en tirer de plus Kini, il est mort quelques heures plus tard en se noyant dans son sang terrifié, expliqua-t-il sa voix se cassant. C'est un miracle qu'il ai pu rentrer dans son état et pour nous d'avoir compris ce qu'il nous disait entre deux convulsions et ses jets de sang.

Owain se passa une main tremblante sur le visage. Kian sentit un frisson glacial lui remonter le long de sa colonne vertébrale.

-Par quoi s'est-il fait attaqué? murmura le guerrier blond.

-Je n'en ai aucune idée, avoua-t-il d'une voix mal assurée, je n'ai jamais vu de telles blessures.

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