18

La salle était de bonne taille, trois fenêtres se détachaient sur la pierre, dont une était légèrement entrouverte. Une table en bois décorée de fleurs fraîches et mise pour huit se trouvait le long du mur. Deux brasero installé sur des trépieds illuminait la pièce d'une douce lueur.

Dalach amena des bières aidé de Maëve qu'ils posèrent sur le buffet discutant avec Téa et Niall. Fand et Seren parlaient avec animation, Linaëlle faisait tourner Owain en bourrique.

Finn et Kian se servirent, puis se mirent à l'écart près d'un brasero.

-Et avec Mara? demanda discrètement Finn en buvant sa bière brune.

-Elle me prends pour un con! lâcha-t-il avec un petit rire qui fit se retourner les amis présent. (Il fit signe de ne pas lui prêter attention et leurs tourna le dos pour revenir à Finn). Elle m'a menti, elle connaît mieux Braen qu'elle ne le prétend, elle doit avoir une raison de vouloir le protéger. Par contre, je n'ai pas la moindre idée jusqu'où peut s'étendre leur complicité, ni s'ils resteront en contact maintenant qu'il est parti. Une chose est sûre, il va falloir garder Mara à l'œil.

-J'avertirai les hommes avant de partir, acquiesça Finn reprenant son rôle d'officier. Autre chose?

Le guerrier blond s'essuya les lèvres avec le dos de la main et hocha la tête avec le sourire en coin que son ami connaissait bien. Finn redoubla d'attention.

-Ce n'est pas le grand roi qui a exigé qu'une prophétesse nous accompagne, dévoila Kian, du moins pas directement. C'est Mara qui s'est imposée par l'intermédiaire de sa supérieure. (Il précisa en baissant encore la voix). La maîtresse de Serbet.

Si chacun était libre de faire ce qu'il voulait, le Grand Roi, Serbet, garant de l'équilibre, n'avait pas cette possibilité. Poséidon avait mis à la tête de chaque territoire un couple pour que l'harmonie ne soit pas rompue
et que rien ne vienne entraver la bonne marche du royaume.

-Pourquoi te l'a-t-elle dit? demanda-t-il lentement.

-Je l'ai surprise, expliqua-t-il, elle n'a pas réfléchi avant de parler. Mais tu peux être certain qu'elle ne lâchera plus rien quand elle se sera rendue compte de sa bourde.

-Jusqu'où sa supérieure peut-elle influencer Serbet à ton avis? questionna-t-il en posant son verre où ne restait plus qu'un fond sur le rebord de la fenêtre.

-Je ne sais pas, admit Kian avant de boire une nouvelle une gorgée. Je ne la connais pas et je ne me suis jamais rendu au temple de Scathach. Tu es déjà allé au palais, tu n'as pas un contact là-bas qui pourrait nous renseigner?

Finn se frotta le visage du plat de la main.

-Je peux toujours essayer, mais je ne peux absolument pas te garantir une réponse. Si la rumeur commence à courir que le grand roi a une maîtresse et qui plus est une prostituée, ça va mal se terminer.

************

-Kian m'a sauvé la vie, raconta Fand à Seren en passant ses doigts sur la cicatrice qu'elle avait sur le cou. Nous avons été surpris autour d'un feu de camp alors que nous voyageions à travers le territoire du Cygne, près de la frontière de celui des corbeaux, il y a sept ans. Les gardes que nous avions postés avaient été égorgés, nos chevaux libérés de leurs liens quand ils ont attaqué.

Fand s'appuya contre la table son verre à la main et contempla les petites bulles dorées qui remontaient s'agglutiner sous la mousse. Elle y but longuement.

-Ils étaient douze, nous étions dix autour du feu moins les trois qu'ils avaient abattus. Ils se sont approché sans bruit, dissimulé par la magie, des faës de la Cour Unseelie. Deux des nôtres sont mort avant qu'on ait compris ce qui se passait. Kian a roulé sur le sol échappant de peu au même sort. Il s'est saisi d'une lance qui se trouvait devant le feu et l'a projetée sur celui qui me tenait. Mes compagnons en ont tué sept avant qu'ils ne prennent la fuite.

Dalach et Maëve remirent une tournée puis le tavernier barbu annonça que le repas serait bientôt servi.

-Tu lui a pareillement sauvé la vie, devina Seren avec un petit sourire, n'est-ce pas? À la bataille d'Austri?

Fand hocha la tête avec un sourire en coin, les yeux pétillants.

-Qu'est-ce qu'il est têtu, souria-t-elle en secouant la tête. J'ai eu un mal de chien à le sortir de là!

Elles s'esclafférent.

-Nous chevauchions sur le champ de bataille. Le combat battait son plein, brutal et sanglant. (Ses yeux bleus s'illuminèrent comme pris de fièvre). La javeline lui a transpercé l'épaule, j'entends encore le craquement des os. (Elle frissonna). Il a juré comme un charretier, il a jeté son bouclier à la tête de son adversaire qui a du se baisser pour l'éviter. Ça a juste donné le temps à Kian de briser la hampe de la javeline et de changer son épée de main.

-Dans le feu du combat, expliqua-t-elle, on ne ressent pas forcément la douleur tout de suite, la flèche plantée ou la pointe d'une lance est une gêne plus qu'autre chose, (elle hocha la tête), jusqu'à ce que le corps lâche. J'en ai vu plus d'un. Une guerrière qui s'était battue toute l'après-midi avec flèche enfoncée dans l'abdomen, est morte quand nous l'avons retirée pour la soigner.

-Owain m'a rapporté des récits similaires, acquiesça Seren. Exploits, histoires tragiques et pour certaines amusantes. J'aimais m'asseoir avec lui et l'écouter.

-C'est vrai qu'il en a raconter, il en a vu des choses. (Elle siffla le resta de son verre).

Seren tendit sa bière avec un clin d'œil. La guerrière s'esclaffa et la remercia, puis bu goulûment.

-La bière est mon plus grand défaut, avoua Fand avec bonne humeur. Ça, les contes et la bataille.

Elle reprit son histoire.

-Ton homme, (souriante, elle désigna Kian du menton, qui avait l'avant-bras appuyé contre une poutre et discutait à présent avec Téa), s'est battu avec fougue! Il en a tué trois avant de s'évanouir, j'ai pu le maintenir sur sa selle, grâce aux renforts qui étaient arrivés. (Elle hocha la tête incrédule). Je ne sais toujours pas comment ils ont fait pour arriver si vite. J'ai bien faillit le lâcher quand il s'est redressé d'un coup et s'est mis à tempêté et à hurler qu'il allait bien, quand il a vu que nous quittions le champ de bataille. (Elle rit). J'ai du l'assommer pour le conduire à Linaëlle.

Seren éclata de rire. Une fois qu'elles eurent retrouvés leur calme, Fand chercha son regard et ajouta avec douceur.

-J'ai aimé ton oncle, (elle sourit tendrement à ce souvenir). Mais pas Kian, pas de cette manière.

La jeune femme hocha la tête, les yeux brillants. Dalach et Maëve avaient déposés les plats sur la table. Du bœuf braisé, des légumes et du pain frais. Ça sentait délicieusement bon.

Kian la prit par la taille et l'embrassa sur la tempe.

-Tout va bien? demanda Seren à voix basse alors que leurs amis s'installaient bruyamment.

-Ça ira mieux dès que nous serons rentrés et que nous serons au chaud dans notre lit, affirma-t-il en l'attirant doucement contre lui avant de l'embrasser légèrement. Après cette soirée, je vais te devoir quelques explications, (il se passa une main dans ses cheveux coupé en brosse). Mais si tu pouvais attendre demain...

-Je ne te poserai pas de questions ce soir, promit-elle avant de lui rendre son baiser.

-Je t'ai à l'œil Kini! rappella Owain de sa voix rauque en lui jetant un regard noir.

Kian soupira, et avec un léger sourire aux lèvres, sous les rires chaud de leurs amis, il prit la main de Seren et s'installèrent à table.

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