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Les guerriers du territoire du serpent avaient pris l'habitude de patrouiller à deux dans les collines environnantes pour empêcher quiconque de s'introduire dans la forêt, car depuis un mois, les emmerdes se succédaient.
Un cheval piafa, refusant d'avancer, le cavalier jura et dans un cliquetis de rênes, reprit le contrôle. Le second guerrier avait mis pieds à terre puis attaché sa monture à un pommier solitaire et foudroyé. À l'orée du bois, une masse claire était étendue sur le sol, une nuée de corbeaux se chamaillant en croassant au-dessus.
-Putain de merde qu'est-ce qui s'est passé? grommela le soldat en rejoignant son collègue qui avait fait fuir les oiseaux qui attendaient plus loin, mécontents.
-La chasse sauvage, dévoila une voix douce, féminine. Cela fait longtemps que je n'en avais plus entendu parler.
La guerrière retira sa main de la robe auparavant alezane du cadavre de l'animal, lardé de coups de becs. Du sang recouvrait sa paume qu'elle montra au soldat, il était noir dans l'obscurité.
-Il n'y a qu'eux qui font suer du sang, indiqua-t-elle en s'essuyant la main sur son pantalon. Regarde les blessures, aucune bête vivante n'est capable d'infliger ça.
Elle désigna les profondes griffures sur la croupe un os luisait à la pâle lueur de la lune. Bougeant la lourde tête du cheval aux yeux crevés, elle montra les muscles arraché au poitrail.
-Le cadavre ne pue pas, fit remarquer le guerrier en s'acroupissant et regardant la tête de l'animal. Les mouches ne l'ont pas encore découvert, c'est récent. (Il jeta une motte de terre sur un corbeau attiré par la charogne qui s'envola en croassant frustré de ne pas pouvoir faire bombance). Tu crois que c'est eux qui sont responsables de ce qui s'est passé ces derniers temps?
-Non, affirma-t-elle tranquillement en se relevant. La chasse sauvage s'attaque aux voyageurs qui passent par la forêt. Le roi et sa cour ne peuvent pas en sortir.
Elle détacha un bâton de coudrier de sa hanche. D'un large geste de la main le bâton tendu, elle balaya l'espace devant elle. Un souffle de vent. La forêt sembla se brouiller, puis elle s'éclaircit aux couleurs du crépuscule. Ils regardèrent attentivement. Il n'y avait rien, pas une trace de sang, ni d'indices d'un quelconque affrontement. Seul un lièvre détala d'un buisson entre les abres. La guerrière soupira, elle rangea son bâton, le bois redevint sombre et impénétrable.
-Pourquoi ont-ils attaqué maintenant? demanda lentement le guerrier.
-D'après ce que j'ai entendu, ils ne se mettent en chasse que pour annoncer un désastre, ou quelqu'un leur à ouvert.
-Comme si nous n'avions déjà pas assez de problèmes sur les bras, soupira-t-il.
Il donna un coup de pied dans le vide en direction des oiseaux qui reculèrent en sautillant en émettant des cris aux sonorités métallique affreuses. Il passa une main lasse dans ses cheveux blonds noué en catogan.
-Reste à savoir ce que ce soldat faisait là, dit-il songeur en désignant le taureau gravé sur la bride. Il vient du territoire de Camul, il ne faisait probablement que traverser.
-Si Owain est toujours sur le territoire du taureau, alors le guerrier ne se trouvait pas ici par hasard. Manque de chance, au retour, il est tombé sur d'autres redoutables ennemis.
-Ce qui veut dire qu'il attend sa rentrée et qu'il risque de venir fouiner chez nous, en conclut le soldat.
La rousse acquiesça en s'essuyant le front avec sa manche.
-J'irai le voir en temps voulu, annonça la guerrière, nous ne pouvons plus cacher ce qui se passe.
-Le grand roi va nous cracher à la figure, avertit le blond.
-Alors nous passerons outre, trancha-t-elle. Tu iras voir Alawn pour lui expliquer la situation pendant que je chercherais des réponses.
-Ah! Tu me laisses la tâche la plus plaisante, parler à notre roi!
-Soit discret, recommanda-t-elle avec un sourire malicieux. Je ne veux pas impliquer plus de gens que nécessaire. (Elle ajouta). Alawn s'est toujours fié à toi, il t'écoutera.
Il acquiesça, et l'aidant, ils fabriquèrent rapidement un brancard avec de la toile accroché avec de la corde nouée entre deux petits arbres. Jurants et suants, privant les corbeaux de festin, ils y glissèrent le cadavre qu'ils firent tirer par leurs chevaux discrètement jusqu'à la caserne.
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